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EAN : 9782253037828
221 pages
Le Livre de Poche (30/11/-1)
3.71/5   152 notes
Résumé :
Ils n'étaient pas plus méchants que d'autres, les Coverdale. Ce couple aisé, cultivé, amoureux, menait une existence paisible dans un élégant manoir de la campagne anglaise. Ils avaient même trouvé, avec Eunice, la domestique idéale : polie, effacée, ne rechignant jamais devant le travail. Pourquoi, comment Eunice va-t-elle être amenée à décrocher un fusil et à perpétrer un véritable massacre ? C'est ce que la romancière de L'Eté de Trapellune et Jeux de mains nous ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (22) Voir plus Ajouter une critique
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Eunice, ha ! Eunice, c'est un cas. Elle ne sait ni lire, ni écrire et pourtant elle est allée à l'école jusqu'à l'âge de 14 ans, mais il y a eu la guerre pour interrompre ce qui de toute façon ne l'intéressait pas. Puis il y a eu sa mère malade, la maison à s'occuper et puis et puis... finalement elle est devenue bonne à tout faire chez les Coverdable. Une famille de bourgeois cultivés habitant un joli manoir à la campagne.

Malgré une raideur d'esprit, de celle qui empêche toute possibilité d'adaptation, les premiers temps au service des Coverdable furent pour Eunice un succès. À cette époque pas un instant ses employeurs ne se doutèrent de la profonde névrose liée à l'analphabétisme de leur employée. Ce n'est qu'au fil du temps que des bizarreries presque imperceptibles ont commencé à alerter le maître de maison.

Et de fait, de plus en plus oppressée par cette famille de grands lecteurs qui vivent parmi les livres, les objets de son malheur, Eunice va multiplier les comportements inappropriés, poussée par " ses impulsions ". Une montée en puissance vers le drame, stimulée par sa rencontre avec une femme aussi déséquilibrée qu'elle. Deux femmes qui en dépit des apparences n'ont " aucune ressemblance avec les soeurs Papin, qui cuisinière et femme de chambre chez une mère et sa fille au Mans, les assassinèrent toutes deux en 1933. "

Analphabétisme, différence de classes et d'éducation, perversité, folie, on assiste fasciné à ce qui a conduit au drame annoncé, la mort de quatre innocents qui ont fait une erreur de jugement. Du grand art dans la psychologie non dénuée d'ironie, comme dans l'excellent film de Claude Chabrol, La Cérémonie, tiré de ce roman, avec les inoubliables interprétations d'Isabelle Huppert et Sandrine Bonnaire dans le rôle des criminelles.
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Une famille aisée, les Coverdale, insouciante et cultivée ; un confortable manoir ; Eunice, une domestique presque parfaite ; Ruth Rendell nous a planté le décor idéal d'un drame absurde, ignoble, nourri par le ressentiment, la frustration, la jalousie, la folie… Quand une femme fragile tombe dans l'intégrisme religieux et croise le chemin d'une employée de maison analphabète, le cocktail devient vite explosif…

L'auteur nous peint avec beaucoup de talent le caractère d'une femme fruste sur laquelle la culture intellectuelle a glissé, l'absence d'accès au langage écrit ayant atrophié sa sensibilité, appauvri ses relations au monde et aux autres, la laissant seule, enfermée dans une unique obsession : que personne ne découvre son incapacité.

Comment un discours religieux fanatique peut avoir une résonance criminelle chez des êtres fragiles, comment l'illettrisme peut conduire à la violence, ce sont des thèmes qui nous interpellent forcément et résonnent avec notre actualité. le tout dans une ambiance manoir anglais, suspense psychologique et tasse de thé, avis aux amateurs…
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Dès les premières lignes, on sait qu'Eunice a tué 4 membres de la famille pour laquelle elle travaille comme femme d'ouvrage à demeure. Commence alors le récit incroyable d'un drame qui prend sa source dans son analphabétisme.

Je découvre Ruth Rendell avec ce roman que Chabrol a adapté au cinéma et dont je n'ai pas vraiment de souvenirs.
La technique de l'autrice est de casser le whodunit classique et de le transformer en whydunit. Ce qui l'oblige à construire pas à pas chacun des acteurs de la tragédie et à tirer les différents fils qui, ensemble, mèneront au drame connu dès l'entrée. La forme du récit hésite constamment entre une espèce de compte-rendu journalistique et un témoignage. C'est assez bluffant comme Ruth Rendell est parvenue à maintenir une tension tout au long du roman alors qu'on sait comment tout cela se termine.

J'ai beaucoup aimé cette approche qui s'attarde parfois sur des détails qui semblent insignifiants sur le moment et ne dévoileront leur portée que plus tard. J'ai particulièrement apprécié la construction du personnage d'Eunice, passant de vieille fille un peu aigrie, pour qui on a presque de l'empathie au vu de la vie qu'elle mène et de son passé peu glorieux, tout en ayant très vite un petit caillou dans la chaussure.
L'autrice ne s'est pas contentée de fouiller ses personnages, avec concision, mais elle a aussi du étaler les relations entre eux. C'est plus particulièrement vrai pour la relation entre Eunice et Joan, l'épicière du village, impliquée dans une secte religieuse et au passé sulfureux.
Comme on sait où on va, on détecte ces moments qui annoncent la tragédie mais on hésite toujours à conclure qu'Eunice est coupable ou victime d'une mauvaise influence.

Derrière le polar, le lecteur est aussi confronté aux conséquences modernes (années 70) de l'analphabétisme, surtout quand il est dissimulé par honte, gêne ou fierté mal placée. On n'imagine pas toujours les difficultés auxquelles sont confrontés les analphabètes, surtout quand ils évoluent dans un entourage d'érudits et de grands lecteurs. Ruth Rendell a vraiment bien balayé tout cet aspect de la problématique et ses éventuelles conséquences sur le caractère de la personne concernée, sur ses décisions et donc, sur ses actions; sans pour autant trouver d'excuse à son personnage.
Et on ne peut que se poser la question sur l'enfer que vivent les analphabètes du 21e siècle, époque où il n'est plus possible de faire la moindre démarche sans devoir consulter internet.
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La nature du suspense qui vous tiendra en haleine lors de la lecture de "L'analphabète" de Ruth Rendell, n'est pas liée au nom de l'assassin. En effet, l'auteure nous livre d'emblée l'identité du -ou plutôt de la- coupable, nommée Eunice Parchman. Tout comme elle précise immédiatement son mobile... et c'est paradoxalement cette indication qui dote le début de l'intrigue d'une dimension énigmatique. Nous apprenons en effet que si Eunice Parchman a tué ses patrons, les Coverdale, qui l'employaient comme domestique depuis neuf mois, c'est parce qu'elle était analphabète.

Commence alors un compte à rebours, l'intrigue reconstituant les différentes étapes qui ont mené à la tragédie qui coûtera la vie à quatre membres de la famille Coverdale. Mais "L'analphabète", c'est surtout l'histoire d'un drame social, d'une exclusion que, par honte, sa victime s'impose. Car le récit tourne essentiellement autour du personnage de Eunice Parchman, et plus précisément autour des conséquences de son analphabétisme sur son caractère, sur sa psychologie.

Ce handicap a fait d'elle quelqu'un de profondément différent, qui agit davantage par instinct que par réflexion. Son analphabétisme, couplé à l'indifférence parentale dont fut auréolée son enfance, semble par ailleurs être la cause d'un intellect limité, et surtout d'une frigidité émotionnelle et d'un manque de curiosité pour le monde qui l'entoure absolument atterrants.

Eunice Parchman est pour résumer un personnage singulièrement inquiétant. Mais ce qui est tout aussi glaçant, c'est l'incommunicabilité et l'incompréhension mutuelle qui président aux rapports qu'elle entretient avec autrui en général, et avec les Coverdale en particulier, ce dont elle n'est pas l'unique responsable...
Car autant Eunice oppose à ses employeurs un mutisme rebutant, autant ces derniers, engoncés dans la certitude -certes inconsciente mais néanmoins bien réelle- de leur supériorité sociale et intellectuelle, lui renvoient une attitude naturellement condescendante qui entretient la distance entre la domestique et ses patrons, nourrit progressivement le ressentiment de l'une et le malaise des autres...

Ruth Rendell déroule son intrigue en s'attachant à ne dépeindre que des faits : à l'image du personnage de Eunice, son récit occulte toute émotion, mais donne néanmoins l'impression de décortiquer les mécanismes qui la conduisent à l'acte fatal. Car elle possède un sens aigu du détail significatif, et sait mettre en scène ses protagonistes de manière à permettre au lecteur d'appréhender les subtilités de leur évolution psychologique.

Lien : http://bookin-inganmic.blogs..
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Titre original : A Judgment in Stone.

George et Jacqueline Coverdale sont des bourgeois aisés qui vivent au domaine de Lowfield Hall, vaste manoir où ils ont besoin d'engager une bonne. Les enfants Melinda et Giles sont demi-frère et demi-soeur car ils sont issus d'un précédent mariage de chaque côté, vivent aussi à Lowfield Hall.
Dès la première phrase du roman, Ruth Rendell installe le climat d'un destin implacable qui ne tient par la suite qu'à de petites choses : on sait que toute la famille va mourir assassinée par la bonne, Eunice et la narration va remonter le temps pour retrouver le fil des évènements qui s'enchaînent avec une rigueur mathématique. Il faut savoir qu'Eunice ne rechigne pas à l'ouvrage et apparaît les premiers temps comme une perle. Mrs Coverdale est ravie et George, bien que ressentant un malaise dès le départ ne veut pas gâcher le bonheur de sa femme. Prenant le lecteur à témoin, la narratrice explique comment les Coverdale furent les artisans de leur propre perte et que le lourd secret d'Eunice, son incapacité à lire et à écrire, dès qu'il se fait jour, la rend plus meurtrière que jamais. le personnage lui-même est un bloc compact d'insensibilité :
"une pierre qui respirait, voilà ce qu'était Eunice. Ce qu'elle avait toujours été."
mais rendue paranoïaque à l'idée qu'on puisse découvrir son "infirmité"; elle fuit livres et magazines comme la peste, la moindre note écrite lui paraît une source infinie d''ennuis, bien plus que le ménage de la grande maison . Ce bloc de pierre trouve son écho dans la scène du meurtre où les victimes sont rassemblés pour écoutant le Don Juan de Mozart à la télévision, qui a pour sous-titre « le festin de pierre", allusion à la statue du Commandeur qui emporte Don Juan dans les enfers, les protagonistes s'identifient chacun à un personnage. Ruth Rendell parsème des allusions littéraires, notamment le Shakespeare du « Conte d'Hiver» ou du « Marchand de Venise ». le rôle de la folle postière et épicière, obsédée par un rachat improbable dans une secte, Les Adorateurs de l'Epiphanie, transforme sa rédemption en meurtre et se pose en soldat du Christ qui tue les impies, inventant à l'occasion ses propres citations bibliques comme elle invente ses médisances. le fils Giles, jeune adolescent byronien, amoureux platonique de sa demi-soeur, elle-même un peu caricaturale en étudiante gauchiste, cherche sa voie chez les sages hindouistes puis vers la religion chrétienne et parsème le tableau de feutre de sa chambre de citations sibyllines qui semblent autant de provocations pour Eunice .
Le film de Chabrol, « la cérémonie », s'inspire du roman à la sauce française. Eunice devient Sophie et l'incarnation de Sandrine Bonnaire- au visage admirablement fermé - lui donne vingt ans de moins. La fin est aussi plus brutale tandis qu'après la mort des Coverdale, le roman continue et l'enquête policière se résume ainsi à une vingtaine de pages avec les fausses pistes et là encore, des coïncidences, des petits faits comme par exemple le mot "enregistrement" (au magnétophone) confondu avec le mot "disque 33t", chose impossible en français mais que l'anglais désigne du seul mot de "record". En ce sens la traduction pèche un peu et l'on y trouve quelques anglicismes "présents" pour "cadeaux" ou encore plus étrange "pour dire le moins" au lieu de « le moins qu'on puisse dire"... Reste un roman très prenant qu'on ne veut pas lâcher de si tôt tant l'auteure a réussi un petit chef d'oeuvre de cohérence dont bien des auteurs de « littérature » pourraient s'inspirer.
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Citations et extraits (8) Voir plus Ajouter une citation
Elle ne savait pas, n'aurait jamais imaginé qu'en fait, Eunice était bien plus effrayée par sa patronne qu'elle-même intimidée par sa domestique. Que l'incident de l'historique des Coverdale l'avait fait rentrer complètement dans sa coquille, persuadée que si elle leur parlait ou se laissait adresser la parole, son ennemi mortel, le mot imprimé, se lèverait et viendrait l'assaillir. Quand Jacqueline, après avoir tiré un fauteuil à côté du radiateur, lisait dans son coin afin de ne pas gêner Eunice et lui laisser le champ libre, elle était loin de se douter qu'elle ne pouvait justement rien faire de mieux pour la gêner encore plus et attiser sa haine.
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Les Coverdale s'étaient posé bien des questions sur les capacités de travail d'Eunice Parchman, et sur son attitude respectueuse ou non, envers eux. Ils lui avaient attribué une salle de bains personnelle, un poste de télévision, des sièges confortables et un lit bien rembourré, un peu comme on donne une bonne litière et une bonne mangeoire à un cheval de labour.
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... l'égoïsme n'est pas de vivre comme on a envie mais d'y contraindre les autres.
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Ils avaient peur de se montrer égoïstes, car ils n'avaient jamais compris ce que Giles savait instinctivement, que l'égoïsme n'est pas de vivre comme on a envie mais d'y contraindre les autres.
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A propos d'Eunice Parchman :

"Elle avait le redoutable pragmatisme du singe de nos origines déguisé en femme du XXe siècle." (p.5)
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