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EAN : 9782021030587
272 pages
Seuil (19/08/2010)
3.78/5   37 notes
Résumé :

New York, août 2003.Une chaleur suffocante. Ground Zero, le site des attentats du 11 Septembre, vidé de ses décombres, n'est qu'un trou large comme un quartier. Ce n'est plus le World Trade Center depuis deux ans, et ce n'est pas encore la tour de la Liberté, qui n'est qu'un projet d'architectes. Un non-lieu étrange, une absence dans le paysage. " Le plus petit désert du monde." Un vendredi à l'aube, on découvre le ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (9) Voir plus Ajouter une critique
New York, deux ans après les attentats du World Trade Center. La canicule écrase Manhattan. le corps d'un ouvrier arabe est découvert sur le chantier de Ground Zero, dans un puits de forage, un soir d'août. Accident ou meurtre ? L'inspecteur O'Malley, du FBI, responsable du site, mène l'enquête.
Grâce à de courts chapitres bien rythmés et des descriptions détaillées, "L'envers du monde", de Thomas B. Reverdy, tente de reconstruire des destinées touchées, de près ou de loin, par cette catastrophe. Entre avancées et retours en arrière, les différents protagonistes se croisent, se rencontrent, s'évitent, s'aiment, se haïssent. Ils ont tous un lien avec New York et le 11 Septembre. Une date synonyme de perte ou de renaissance, de souvenir ou d'obsession, de haine ou de désespoir, d'impuissance et de tristesse...
Il y a Pete, l'ancien flic qui a assisté à la chute des "Twin Towers", reconverti en guide à Ground Zero. Toujours traumatisé par ce drame, il est pris dans une spirale de racisme et de violence. Il y a Candice, une serveuse qui a perdu son mari dans l'attentat. La jeune femme a du mal à retrouver goût à la vie. Il y a Simon, un écrivain français venu enseigner à l'université de New York, qui a vu les tours tomber à la télé à Paris et qui accumule, depuis, tout ce qu'il peut trouver sur l'attentat. Il se sent comme un "étranger" qui disserte volontiers avec ses étudiants sur l'attentat, sans jamais s'être rendu sur le site...
Des personnages en quête de hauteur, qui veulent aller de l'avant malgré le chaos ambiant, qui cherchent un sens à la vie malgré cet événement qui a ébranlé le siècle et le monde. Avec cet ouvrage délicat, sensible et touchant, Thomas B. Reverdy tente de comprendre l'impensable...

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Je découvre avec bonheur l'auteur Thomas B. Reverdy avec ce titre.
D'emblée, on dirait un roman policier parce dès le début du récit, on retrouve le cadavre d'un arabe, ouvrier, dans le grand (vide? ) chantier de Ground Zero.
Un inspecteur du FBI, oui oui du FBI et non de la criminelle mènera l'enquête. le FBI parce qu'il s'agit de Ground Zero, des tours jumelles, de terrorisme, de l'islam et de l'Amérique.
Mais ce n'est pas qu'une enquête sur un meurtre. C'est un roman sur le deuil, sur le manque, sur le vide, sur l'absence.
C'est à travers le désarroi de Pete, ancien flic à la retraite, faisant le guide à Ground Zero pour les touristes; c'est à travers la tristesse de Candice, barmaid le soir, qui a perdu son mari lors de l'explosion des tours; c'est à travers la solitude de Simon, prof français en résidence à NY et obsédé par le 11 septembre, que nous entr'ouvrirons le rideau de l'envers du décor, de l'envers du monde.
C'est à travers ce chassé croisé de sentiments divers, de solitude, d'incompréhension et de désillusion que j'ai découvert Thomas B. Reverdy mais surtout, ce qui marque, c'est la clairvoyance de son propos dans la délicatesse de son écriture. Chaudement recommandée.
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Sur le 9/11 je n'avais lu jusqu'ici qu'une seule fiction littéraire : L'Homme qui tombe de Don DeLillo, magnifique.
Dans son roman, Thomas B. Reverdy met en scène son double, Simon, jeune écrivain français venu s' installer à Manhattan en 2003 pour recueillir des témoignages qui lui permettront, espère-t-il, d'écrire à propos d'événements qui relèvent de l'ineffable : le deuil, la disparition.

" Il y a le motif de la cendre, par exemple, ou de la poussière. Les scènes centrales des écrivains [américains] qui s'y attaquent tournent autour de ça, même chez Don DeLillo qui croit prendre une autre image avec son Falling Man, en fait sa scène primitive, si je puis dire, ce n'est pas l'homme qui tombe, c'est le mari qui rentre chez lui couvert de cendres. C'est très frappant. C'est évidemment lié à un imaginaire religieux, le discours sur la mort est en fait, discours sur la vanité de l'existence. le problème, c'est que c'est un discours à double tranchant. Les tours étaient vaines, d'une certaine manière, dans l'exhibition de leur désir de puissance et de richesse. C'est une sorte d'impasse. On l'a dit souvent, "Dieu ne peut pas se déclarer la guerre". Alors, comment le raconter ? "

Thomas B. Reverdy choisit de nous raconter une histoire de mort, de remord et de rédemption apparemment déconnectée de l'attentat du 11 septembre, mais qui prend toute sa dimension inquiétante et tragique parce qu'elle se déroule en bordure de l'excavation de Ground Zéro.
L'immense chantier, déblayé des ruines des tours jumelles, mais encore vierge de toute construction mémoriale, est au centre du roman.
Ce vide de béton symbolise l'absence, la disparition. C'est un "lieu-qui-n'est-le-lieu-de-rien" : "Le monde et sa vie s'y étaient retournés comme un gant."

L'envers du monde est écrit en très courts chapitres groupés en trois parties, une pour chacun des prénoms des trois caractères principaux : Pete, Candice et Simon.
"Tout le monde a ses fantômes."
Pete, est celui des trois qui a vécu au plus près le drame de septembre 2001, en participant aux secours. L'ancien policier n'a pas digéré le traumatisme. Persuadé de n'avoir pas mérité sa médaille de héros, il ne supporte pas son statut de survivant.
Candice, est une veuve du 11 septembre. Pendant de longues heures, elle a attendu ce jour-là le retour de son son compagnon qui travaillait dans une tour du WTC. Contrairement à Pete, elle n'a jamais accepté de partager son traumatisme avec les autres, dans un groupe de parole. le jogging est sa thérapie personnelle.
Simon le français, témoin télévisuel beaucoup plus lointain de la chute des tours, est celui que personne n'attend nulle part, que personne ne retient de partir. Sa douleur à lui, sa perte, remonte à l'enfance, tellement indicible qu'il lui faut venir jusqu'à Ground Zero pour la reconnaître et l'écrire enfin : "L'hopital, ses tempes nues, ses lèvres de pierre. L'étonnante absence de tout parfum."
Deux autres personnages importants de l'histoire n'ont pas de prénoms dans le roman. Il y a le commandant O'Malley, chargé au FBI de l'enquête sur la mort de Mohammad Sala, l'ouvrier dont le corps a été retrouvé dans la boue du chantier et que personne ne viendra jamais réclamer. Il y a aussi un garçon sans identité, voyou aux déambulations suspectes, sorte d'ange de la mort.

Décor et personnages bien en place, Thomas B. Reverdy nous fait vivre au quotidien la vie de Pete, de Simon et de Candice pendant une semaine de canicule du mois d'août 2003, à Manhattan, à Brooklyn, et à Cosney Island. le meurtre de l'ouvrier musulman sur le chantier de Ground Zero, et l'enquête qui suivra, vont venir bouleverser les trois trajectoires de vie et précipiter les rencontres, deux à deux : Pete-Candice, Simon-Pete, Candice-Simon.

Je me suis (enfin) intéressée à l'histoire et aux personnages inventés par l'auteur, j'ai aimé la contruction efficace du roman, et enfin le style calme et posé mais puissamment évocateur. Très beau roman, très bien écrit, personnel malgré le thème et l'environnement décrit, et malgré le prétexte policier.
Lien : http://tillybayardrichard.ty..
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Il n'y a plus rien. Pas de ruines: aux Etats-Unis, on n'aime pas ça. Pas encore de construction: trop tôt. Il faudra des années avant que la Freedom Tower ne soit construite. Donc, c'est un gigantesque chantier qu'on fait visiter, aux Américains et aux touristes étrangers. Et Pete, “ ancien héros ” (qu'est-ce que cela peut bien signifier? On perd sa qualité de héros quand le temps passe?) ancien policier aussi, accompagne les visiteurs et repère vite ceux qui ont “ perdu ” quelqu'un dans l'événement. Perdu, c'est le mot: on nous dit que des milliers de gens n'ont jamais été retrouvés et que, quand on en retrouve un, il n'y a pas plus de quelques petits os pour l'identifier.

Combien de temps faut-il à un corps pour tomber de dix-huit étages? Trente? Combien de temps pour nettoyer un chantier après un tel attentat? Combien de temps pour la serveuse Candice avant d'accepter la disparition de Gregg, son mari, atomisé le 11 septembre 2001? pour accepter de vivre un autre amour?

Et pour Pete, un autre problème se pose: un Arabe qui se déclare “ victime ”, c'est possible? Outre le fait qu'il mélange Perse et Arabe, il fait lui aussi un drôle de calcul: immigré + musulman = coupable. Ce qui va justifier le passage à tabac de l'Arabe en question, Mohamed, travailleur au noir sur Ground zero. Et c'est un autre corps atomisé en de multiples os fracassés qu'on va retrouver au fond du puits. Meurtre? Oui. Raciste? Probable.

L'enquêteur O'Malley devra trouver le meurtrier. O'Malley, l'inspecteur en costume-cravate qui ne transpire pas par plus de 40° à l'ombre...

Pete fait partie d'un groupe de parole où chacun est salué d'un “ bonjour, untel ”, comme chez les alcooliques anonymes.Ici aussi on essaie de faire accoucher la parole de ceux qui ne peuvent pas raconter l'irracontable. Ainsi Pete raconte ce qu'il a vu, pour la première fois: deux ans après le 9- 11, un Arabe a déplié son gilet fluo de chantier et l'a étalé sur le sol, puis il s'est prosterné. C'était l'heure de la prière. Sur Ground Zero! Pete a vu rouge...

L'histoire s'articule autour de trois moments de vie: Pete, Candice, Simon, le Français qui a reçu le WTC en pleine figure, comme s'il avait été là, au travers des récits des témoins. Inoubliable moment que le récit de l'indicible, un vertige, une plongée silencieuse et assourdissante en enfer. Comme dans “ Extrêmement fort et incroyablement près ” de Jonathan S. Foer. Près de quinze ans plus tard, on a encore les yeux qui s'embuent et le coeur qui se serre, par la magie d'une écriture très soignée, fluide en apparence, travaillée en réalité.


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Un petit tour à New York deux ans après les attentats du 11 septembre.

Été 2003. Sous une chaleur suffocante, Ground Zero n'est qu'un vaste chantier. La Freedom Tower n'existe que sur plan, et la fragilité des habitants de Manhattan est palpable. La plaie est loin d'être refermée et tout peut basculer en une fraction de seconde. C'est d'ailleurs ce qu'il se passe lorsque le corps d'un ouvrier clandestin et arabe est retrouvé sur le site.

Le commandant O'Malley est chargé de l'enquête. L'occasion pour le lecteur de faire la connaissance de plusieurs personnages ayant vécu et ressenti différemment le 11 septembre. Il y a Candice, serveuse de bar, dont le petit ami travaillait au World Trade Center et n'est jamais revenu. Pete, ancien flic, de service ce jour-là, et Simon, le frenchie fraichement débarqué qui observe tout cela d'un oeil extérieur.

« La victime ? Écoutez, commandant, ce type était un musulman, et sûrement un clandestin, pas une victime. Victime, c'est un mot qu'on réserve ici à tous ceux qui sont morts dans les tours. »

« L'envers du monde » est un roman à part. Sur fond d'enquête policière, il nous parle de deuil, de perte, de traumatisme. A travers les personnages proposés par Thomas, le lecteur fait, lui aussi, son deuil. Pete n'est plus flic, aujourd'hui, il est guide touristique sur Ground Zero. Chaque jour, il se retrouve devant ce trou béant, chaque jour il revit ce jour terrifiant, où il était là, couvert de poussière lorsque la tour une s'est effondrée, ne sachant quoi faire ni où aller pour aider. Aider qui ? Aider quoi ? Pete est devenu raciste, que fait donc cet ouvrier musulman en train de prier sur Ground Zero ? Il ne peut qu'être un terroriste.

Candice s'accroche à la vie tant bien que mal. Son coeur s'est arrêté de battre le 11 septembre. le chapitre où elle nous raconte ce jour terrible restera gravé dans ma mémoire. L'homme de sa vie ne reviendra jamais des Twin. L'émotion se dégageant de ce chapitre est violente, intime.

Simon, quant à lui, a assisté au drame depuis Paris. Passionné par le sujet, il est venu donner des cours à New York, afin d'être au plus près de Ground Zero. Pourtant, il n'est encore jamais venu sur les lieux. Pourquoi ?

Tous sont des survivants. de quel droit ont-ils survécus, eux, et pas les autres ? Pourquoi la vie continue-t-elle pour eux, et pas pour les autres ? Comment se reconstruire ? Comment continuer sa vie ? Ce sont les questions auxquelles Thomas tente de répondre. Tout en nous promenant entre Manhattan, Brooklyn et Coney Island. Histoire de nous apporter un peu d'air, de nous éloigner de la touffeur de Ground Zero.

Car « L'envers du monde » joue beaucoup sur l'ambiance. A Ground Zero, l'atmosphère est déjà lourde de sens, mais Thomas y rajoute la chaleur écrasante du mois d'août. Tout dégouline. de sueur, de regrets, de peur. A Ground Zero, le soleil est accablant. Il n'y a plus l'ombre protectrice et bienfaisante des Twin Towers. Tout se liquéfie et se délite. Les gens, le temps, la pensée, la mémoire.

La plume de Thomas est délicate, posée, efficace. Les chapitres sont courts, le roman est découpé en trois parties donnant la parole à chaque personnage. Comme lors d'une rencontre. Un peu comme dans un groupe de parole, chacun nous raconte son parcours, son rapport avec le 11 septembre, pourquoi il est là, ce qu'il envisage.

Ce roman est à découvrir absolument si le sujet du 11 septembre vous intéresse. J'ai beaucoup aimé me plonger dans cette atmosphère particulière de Ground Zero. J'ai vu, comme tout le monde, moult reportages télévisés sur la catastrophe. Ici, j'avais l'impression d'être aux côtés des personnages, de vivre tout cela avec eux, il y avait un côté intimiste qui m'a prise aux tripes.

Un roman poignant, un hommage fort aux victimes, mais aussi à ceux qui sont restés en vie.

« A bien des égards, Ground Zero n'existe pas. C'est une fiction. (…). C'est un envers. L'envers de l'attentat, l'envers du monde, de nos vies. C'est la douleur et le mal, la mort, l'absence, l'endroit où les choses que nous connaissons disparaissent en laissant une place vide qui est de la place pour les mots, pour du sens. Une fiction. »

#Lenversdumonde #ThomasBReverdy #LePoint
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Citations et extraits (22) Voir plus Ajouter une citation
Le chantier était un capharnaüm de grues, de poutres métalliques, de gravats, de dalles de béton,, de canalisations et de tunnels abouchés au cratère comme béant en enfer, dans la chaleur étouffante d'août, au milieu des débris, des décombres ou ce qui apparaissait encore comme tel, simple enchevêtrement de matières et de machines, des hommes minuscules vêtus de gilets orange évoluant au milieu de tout ça selon des parcours compliqués, tortueux, gesticulant et criant des ordres, guidant les bulldozers et les pelleteuses, commandant aux bétonnières, aux foreuses, courant, grouillant, en ordre dispersé, mais en ordre, hermétique au profane, telle une fourmilière qui se recompose après qu'on a marché dessus, et c'est exactement ce qui s'était passé, deux ans plus tôt, un énorme pied invisible avait foulé le sol de l'Amérique, il avait laissé une empreinte large comme un quartier entier. Un trou, si profond qu'on aurait dit que les tours s'étaient comme retournées dans le sol, un simple creux, mais qui était comme l'envers du monde. ( p.11)
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P 75: Est-ce qu’on peut mourir, dans des endroits qui n’existent pas?

P100; ...ce qui est frappant ici, dans le cas de Ground Zero, c’est la nature même du site. Transitoire. Ground Zero n’est pas un site. C’est ce qui reste des Tours jumelles et qui n’est pas encore la Tour de la Liberté. A bien des égards, Ground Zero n’existe pas. C’est une fiction. Entre le fantôme du World Trade et le rêve de la Freedom T5ower, c’est le lieu de la disparition, il faudrait un mot pour ça, “ le-lieu-de-la-disparition ”, peut-être, “ le -lieu-qui-n’est- le - lieu-de_rien ”

P108: Elle ne pouvait pas croire vrailment ce qu ‘elle disait, elle n’aurait pas pu le dire d’un autre Pete, seulement de lui, parce que c’était son petit frère. Les gensne changent jamais, dans une famille. C’estcomme ça. Personne n’a jamais réellement décid é de qui il était on ne s’est jamais réuni pour distribuer les rôles et cependant ils sont fixés pour toujours.
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La peur et la violence éclatent au fond de son ventre comme une grosse bulle, et elle ne peut s’en détacher. Trois, quatre, peut-être cinq hommes ont suivi, ils sont là, dehors, elle les voit par intermittence lorsque leurs silhouettes passent dans l’encadrement de la porte restée grande ouverte, ils ont l’air de courir sur place, mais c’est parce qu’ils donnent de formidables coups de pied dans la forme à terre, recroquevillée, sombre, qui ne bouge plus, mais tressaute et se déforme comme un sac de grains, sauf que c’est un sac de viande et d’os qui se brisent, avec le bruit d’un poulet qu’on désosse, un sac de chairs qui explosent et viennent teindre de sang la surface de la peau, les vêtements, comme des étoiles de feu d’artifice, oh, mon Dieu, ils vont le tuer pense-t-elle, et elle se souvient du téléphone, on entend des chocs sourds et des craquements, des insultes encore et encore, et les quatre hommes, peut-être cinq, s’arrêtent à présent parfois, les poings sur les hanches, penchés vers le sol, reprenant leur souffle, épuisant leur haine, chassant la sueur de leurs yeux, devant la forme à terre qui se traîne, sac encore tremblant de vie gémissante, les deux bras autour de la tête, rampant comme un ver dans sa douleur nue, ils vont le tuer pense-t-elle, mais elle n’arrive toujours pas à faire le numéro, figée par la bulle de peur et de violence qui a éclaté dans son ventre, fascinée par sa propre lâcheté, jusqu’à ce qu’elle voie Toni qui se campe dans l’encadrement de la porte et qui crie « Police ! » en brandissant le téléphone du bar, sans que l’on sache bien si c’est pour que cela finisse enfin, ou pour leur laisser le temps de disparaître.
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Vu d'un toit il y a très peu d'obstacles aux désirs. P. 215
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Toutes ces personnes charmantes dont il ne connaîtrait jamais l’intimité, cette sociabilité bizarre où l’on se donne des rendez-vous dans les bars, où l’on va au cinéma ensemble, mais où ça ne viendrait pas à l’idée de partager un plat de spaghettis à la maison, tous ces gens qui n’ont finalement d’autre intimité que la leur, quand ils sont tout seuls, leur façon de dormir, de regarder la télé, leur façon de manger dans leur coin à n’importe quelle heure, que ce soit chez eux ou même sur un bout de trottoir, sur une borne de pompiers ou un capot de voiture, c’était ça qui l’isolait le plus, finalement, la langue il s’y habituait, la salade il pouvait s’en passer, c’était les gens qui lui manquaient, toute cette humanité qui se bornait à partager une politesse, trop respectueuse de l’individu, de sa liberté, pour empiéter dessus,comme si l’intimité, c’était une sorte de pelouse bien tondue sur laquelle les voisins n’ont rien à faire.
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Vidéo de Thomas B. Reverdy
Thomas B. Reverdy, professeur de lettres et écrivain présente son dernier ouvrage, le grand secours paru chez Flammarion. Il a reçu le prix Landerneau des lecteurs 2023 pour ce titre.
Pau, le Parvis, 17 janvier 2024.
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