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François Chapon (Préfacier, etc.)
EAN : 9782070412600
557 pages
Gallimard (01/03/2000)
4.33/5   49 notes
Résumé :
Lumière rousse


On accroche le ciel d’automne aux quatre coins
Un tambour résonne
Des pas dans le vent
Le regard qu’on donne
À chaque passant
Les flammes effilées à travers les barrières
Les maisons retournées
Tous les dos en prières
Et les jours perdus dans les a... >Voir plus
Que lire après Main d'oeuvre : Poèmes 1913-1949Voir plus
Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
Main d'oeuvre regroupe plusieurs des recueils de Pierre Reverdy publiés entre 1925 et 1949 et de nombreux poèmes inédits écrits à partir de 1913.
Lié à l'essor du surréalisme sans qu'il ne fasse partie du mouvement, l'image de Pierre Reverdy restera longtemps celle d'un libre penseur mais aussi d'un théoricien de la poésie.

" Y-a-t-il au monde un mot plus chargé de sens et de prestige que celui de poésie ? En est-il un autre qui soit plus que celui-ci aisément tourné en dérision et méconnu, si souvent employé et si mal défini ? " demandait Pierre Reverdy dans sa célèbre conférence radiodiffusée en 1948 intitulée " La fonction poétique ".

Comme un préalable à la création poétique, Pierre Reverdy entend définir les contours, les conditions de l'acte d'écrire. Revendication personnelle qui transparaît beaucoup dans les nombreux poèmes qui composent Main d'oeuvre.
La lecture des poèmes de Reverdy est en elle assez exigeante. Non que les textes soient dépourvus de sens, de pouvoir d'évocation ou de lyrisme, ils restent pour la plupart chargés d'une vérité qui est à chercher dans un rapport direct au langage.
Pierre Reverdy veut faire déborder la conscience hors d'une servitude fonctionnelle, faire se rapprocher ce qui ne saurait l'être à priori.

" Il y a le merveilleux refrain
D'un timbre dur au dessin clair
Des mains qui volent sans raison
Blanches au revers des pommettes
Le duvet de la poudre
Et la paille du sort
Quand l'or coud fil à fil
Le désastre ou la fête
La trame des regrets dure sous la chanson
Les oreilles flétries sous le vent qui bourdonne
Un pas de plus vers la maison
La raison que le coeur me donne
[…] "*

La poésie de Reverdy naît de la perception des choses, des êtres, de l'instant, mais elle ne saurait s'arrêter à leur seule description. Chaque vers porte en lui une dynamique, un pouvoir d'évocation que le poète met en évidence, une charge de sens très particulière qu'il adjoint et met en contradiction avec les autres. de là, naît une nouvelle parole, un nouveau langage.

Si parfois la lecture de Main d'oeuvre m'a semblé un peu éprouvante, un peu trop saturée de sens, la poésie de Pierre Reverdy me paraît plus qu'essentielle. Elle porte en elle toute l'énigme, toute la potentialité du langage qui se renouvelle en lui-même, et pousse plus loin notre rapport au monde et au temps.


(*) extrait de " le Silence infernal " in " le chant des morts ", 1944-1948.
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Il y a une certaine sécheresse dans les poèmes de Reverdy, ses constructions énumératives sont déstabilisantes. Si des images parviennent parfois à surgir de rapprochements inattendus, l'ensemble du recueil semble drapé d'une grosse couche de neige, bloc statique et pesant qui n'invite pas à l'enthousiasme. Mais cette ombre permanente a aussi quelque chose d'émouvant. La forme souvent biaisée des poèmes s'accorde souvent avec la sensation de laisser-aller, de glissade, de chute, offerte par leur lecture. Mais toute monotonie de la linéarité est contrecarrée par la description d'un monde plissé, où le parcours du lecteur se heurte à des sillons, à des interstices et à des failles, nouveaux mondes que la poésie seule est capable de donner à percevoir.
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Pierre Reverdy: encore un poète dont je connaissais le nom mais que je n'avais jamais lu. Né en 1889 et mort en 1960, il a côtoyé de près des poètes et artistes célèbres et a beaucoup contribué au renouveau de la poésie française au XXème siècle. Admirateur de S. Mallarmé et peu éloigné du surréalisme (à ses débuts), il a voulu créer « des rapports inouïs » entre les choses, par la force et la forme de sa poésie. Cet épais volume présente la production de P. Reverdy pendant une longue période: entre 1913 et 1949. On y trouve quelques beaux textes, plutôt faciles à lire.
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Si le plaisir est statique et ne cherche rien d'autre que lui-même comme le bonheur. La souffrance est une moissonneuse-batteuse qui laboure notre âme mais pour une récolte fertile.
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Citations et extraits (51) Voir plus Ajouter une citation
FERRAILLE/1937

REFLUX


Quand le sourire éclatant des façades déchire le
décor fragile du matin ; quand l'horizon est encore
plein du sommeil qui s'attarde, les rêves murmurant
dans les ruisseaux des haies ; quand la nuit rassemble
ses haillons pendus aux basses branches, je sors,
je me prépare, je suis plus pâle et plus tremblant
que cette page où aucun mot du sort n'était encore
inscrit. Toute la distance de vous à moi — de la vie
qui tressaille à la surface de ma main au sourire
mortel de l'amour sur sa fin — chancelle, déchirée.
La distance parcourue d'une seule traite sans arrêt,
dans les jours sans clarté et les nuits sans sommeil.
Et, ce soir, je voudrais, d'un effort surhumain,
secouer toute cette épaisseur de rouille — cette
rouille affamée qui déforme mon cœur et me ronge
les mains. Pourquoi rester si longtemps enseveli
sous les décombres des jours et de la nuit, la pous-
sière des ombres. Et pourquoi tant d'amour et
pourquoi tant de haine. Un sang léger bouillonne à
grandes vagues dans des vases de prix. Il court dans
les fleuves du corps, donnant à la santé toutes les
illusions de la victoire. Mais le voyageur exténué,
ébloui, hypnotisé par les lueurs fascinantes des
phares, dort debout, il ne résiste plus aux passes
magnétiques de la mort….

p.342-343
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COMME ON CHANGE

Qu'on nous raconte cette histoire
Qu'on nous dise ce qu'il est devenu
Que personne autre que lui ne parle plus
Il rit
La rue est noire
La nuit vient doucement
Et l'esprit s'abandonne
A d'autres mouvements
Dans le fond à genoux sur le tas de pierres
Et les mains liées
Tous ceux qui pardonnent
Au cœur bourrelé
Ils sont encore tous là derrière
Les regards étoilés
Tous les noms confondus
Les rires étouffés
Les numéros perdus
Enfin le vent brutal les a tous dispersés
Et seul il s'en allait dans l'ombre sans écho
Il regardait le ciel le mur la terre et l'eau
L'histoire le remords
Tout était oublié
Ce n'était plus du tout le même
Au coin quand il s'est retourné
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LES REGARDS QUI CHANGENT

Vers quatre heures je serai là
Il passera certainement quelqu'un
Alors j'ouvrirai la porte

La porte s'ouvre comme un œil
Et je regarde à l'intérieur
J'ai trop peur pour entrer
Et je ne sais que dire

Les marches à monter
Jusqu'au palier obscur
Et là peut-être la chambre
Peut-être rien
Peut-être un mur

C'est qu'arrive le crépuscule
Je serai là et je t'attends
J'attends que passe une voiture
Qui emportera mon tourment

Et puis vers la prochaine gare
Je te suis nous irons plus loin
Enfin de la maison d'en face
On me regarde en souriant
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BRUITS DU SOIR

Les griffes des buissons
La cheminée qui hurle
La gueule ouverte au loin où le ciel vient bâiller
Le rayon plat du soir sur les dents
Les rochers
Quand le vent déforme le paysage
L’air est gris
Dans la direction des bras nus qui se tendent
Le temps sera bientôt repris
Les formes dures du couvent
Le mur jeté plus bas
La distance des arbres
Au creux du pont levé
Dans le chemin plus droit
Les ans marqués au mur
Les cris qu’on éparpille
Tout ce qui s’est passé là-bas
À cet âge moins mûr
Et c’est moi
Contre le parapet
Et le fer de la grille
Sous la poudre du temps
Le blanc de la poussière
Ou l’interlocuteur pressé dans la lumière
L’heure qui tinte au loin
Celui que l’on appelle
Quand l’écho seul répond
C’est une vois nouvelle
Une autre forme de mon nom
Une silhouette moins sûre
Les rides qui datent mon front
Et les traits d’une autre figure
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CE SOUVENIR

Je t'ai vu
Je t'ai vu au fond devant le mur
J'ai vu le trou de ton ombre sur le mur
Il y avait encore du sable
Et tes pieds nus
La trace de tes pieds qui ne s'arrêtait plus
Comment t'aurais-je reconnu
Le ciel tenait tout le fond tout l'espace
Un peu de terre en bas qui brillait au soleil
Encore un peu de place
Et la mer
L'astre est sorti de l'eau
Un navire passait volant bas
Un oiseau
La ligne à l'horizon d'où venait le courant
Les vagues mouraient en riant
Tout continue
On ne sait pas où finira le temps
Ni la nuit
Tout est effacé par le vent
On chante autrement
On parle avec un autre accent
Je reconnais des yeux qui sont restés vivants
Et la pendule qui sonnait dans la chambre
Une heure en retard
Le matin vert qui vient quand on n'a pas dormi
Il y a un gai ruisseau d'eau claire et d'autres cris Devant la porte une silhouette qui disparaît
Un visage dans la lumière
Et au milieu de tout ce qui vit et se réveille
La même et seule voix qui persiste
dans mon oreille


(extrait de "Grande nature", 1925) - pp. 30-31
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Videos de Pierre Reverdy (27) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Pierre Reverdy
Robert Bober Il y a quand même dans la rue des gens qui passent - éditions P.O.L où Robert Bober tente de dire comment et de quoi est composé son nouveau livre "Il y a quand même dans la rue des gens qui passent", et où il est notamment question de son précédent livre "Par instants la vie n'est pas sûre" et la poursuite de sa conversation avec Pierre Dumayet, d'identité indéterminée et d'identités, d'innocence et de bonté, d' enfance et de rencontres, du yiddish et de Georges Perec, de Seth et de Julien Malland, de Martin Buber et de Gaston Bachelard, de Cholem Aleikhem et du film "Tevye le laitier" de Maurice Schwartz, de Zozo et de la rafle du Vel d'hiv, d'images et livres, de Robert Doisneau et de la photographie, de Pierre Reverdy et de la librairie du Désordre à la Butte aux Cailles, à l'occasion de la parution de "Il y a quand même dans la rue des gens qui passent" en octobre 2023 aux éditions P.O.L, à Paris, le 10 janvier 2024

"– Alors, toujours aussi gros ? – Et toi, toujours aussi con ? C'est comme ça que j'ai compris qu'ils étaient copains. le gros, derrière son comptoir, c'était le patron du bistrot-guinguette « Chez Victor » situé derrière la place des Fêtes au fond de l'impasse Compans. le con était accoudé au zinc en attendant d'être servi. Plus tard, bien plus tard, je suis retourné voir le bistrot « Chez Victor », je ne l'ai pas retrouvé. Tout le quartier avait été détruit."
+ Lire la suite
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