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Dolores Reyes (Autre)
EAN : 9791032908662
206 pages
Éditions de l'Observatoire (19/08/2020)
3.27/5   79 notes
Résumé :
Un peu sorcière, un peu voyante, celle qu’on surnomme Mangeterre possède un don hors du commun qui implique une responsabilité immense : en avalant la terre qu’elles ont foulée, Mangeterre entrevoit, lors de douloureuses transes, le terrible sort des femmes brutalisées d’Argentine. Dès lors elle est face à un dilemme : doit-elle répondre à l’appel de la terre et tenter de sauver toutes ces femmes en détresse ? Car, très vite, des parents désespérés arrivent des quat... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (31) Voir plus Ajouter une critique
3,27

sur 79 notes
Mangeterre, on la surnomme comme cela depuis le jour où elle s'est mise à manger de la terre aux obsèques de sa mère, celle-ci tombée sous les coups de son père alcoolique et mauvais, devant la tombe non encore refermée, histoire d'agacer son entourage. Alors, le sol s'est mis à vaciller, ou peut-être étaient-ce ses jambes ? C'est ainsi qu'elle a découvert qu'elle avait un don hors du commun : en avalant la terre que des personnes disparues ont foulées auparavant, elle entre en transe et dès lors est capable de voir des choses, de voir le visage des personnes disparues, de voir les lieux où leur sort s'est malheureusement scellé...
Mangeterre, on ne connaît pas son prénom, mais j'ai fermé les yeux et j'ai imaginé les traits de son visage.
Qui est Mangeterre ? Au quotidien c'est une adolescente un peu rebelle, un peu vulgaire, mais qui cache dans ses tripes une douleur presque désespérée. Elle ne s'est pas remise de la mort de sa mère. Son corps a pris alors une déflagration... Elle vit seule avec son frère Walter, garagiste.
Elle réfute qu'on dise d'elle qu'elle est une voyante.
Le bouche à oreille la rend vite célèbre. Des parents désespérés n'hésitent pas à braver les kilomètres pour la rencontrer, solliciter son don, à sortir des liasses de billets et les poser sur la table de la cuisine, dans l'humble maison où vit Mangeterre.
Elle supporte mal la souffrance de ceux qui la consultent. On appelle cela l'empathie, se mettre à la place de ceux qui ont mal. « Je commençais à me rendre compte que les gens à la recherche d'une personne ont un trait distinctif, une marque près des yeux, de la bouche, un mélange de douleur, de colère, de force et d'attente qui prend corps. Quelque chose de brisé où vit ¬celui qui ne revient pas. »
Elle a un langage de charretier. Elle avale de la terre et recrache des gros mots, c'est son style, sa manière d'être... Cela fait contraste avec la poésie qui porte le texte. J'adore !
Et puis un jour elle fait la rencontre d'un policier, Ezequiel, parti à la recherche de sa cousine disparue, Maria... C'est une rencontre, une relation atypique qui se noue alors entre les deux personnages. Ezequiel, secret, mystérieux, enchante alors l'adolescente. Et l'inverse sans doute aussi... C'est une enquête qui commence, car cette fois Mangeterre a vu, a bien vu que Maria est vivante, bien vivante... Il faut faire vite.
Alors, cette enquête, c'est un peu un prétexte pour construire le personnage de Mangeterre, construire son chemin, tracer sa route...
Il y a quelque chose de magique et d'ensorcelant dans ce roman que je découvre un peu par hasard.
Derrière ce conte aux allures fantastiques, se cache un récit à la fois intime et universel qui m'a totalement bouleversé.
C'est un texte violent, brutal, onirique, parfois je ne savais pas bien m'y situer, mais ce n'est pas grave, j'étais déstabilisé autant par les personnages, leurs mots, leurs douleurs aussi. Était-ce justement un conte fantastique, la parodie d'une réalité immonde, une manière de poser des mots emplis de lumière, de faire entrer cette lumière comme un espoir qui peut transcender cette douleur ?
Par l'entremise de ce texte qui est son premier roman, je découvre Dolores Reyes, une auteure féministe dans le bon sens du terme, engagée sur des combats légitimes, la question des violences subies par les femmes.
Un roman actuel, malheureusement, qui dit la violence du monde qui nous entoure, la violence de prédateurs, mais un texte aussi qui dessine un magnifique portrait de femme.
Il faut le lire pour tout cela...
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« Mangeterre » est un roman sur les violences faîtes aux femmes. de part le monde, les femmes crient pour que cela cesse.
En Argentine, une femme meurt toutes les 36 heures sous les coups de son compagnon ou d'un proche. Avec le confinement, le nombre de féminicide a augmenté d'un tiers et le nombre d'appels d'urgence pour dénoncer des violences domestiques a explosé. Un chiffre : 18 femmes ont été assassinées par leur conjoint ou ex-conjoint pendant les vingt premiers jours du confinement de l'année dernière.
Sans aller aussi loin, on recense chaque année en France environ 225 000 femmes victimes de violences conjugales. En 2019, triste nombre, révoltant, 146 femmes ont été tuées par leur conjoint.
*
« Mangeterre » un nom qui interpelle. C'est le surnom de la narratrice, une adolescente à part, d'humeur taciturne et indocile.
Elle se découvre un don le jour de l'enterrement de sa mère, victime des brutalités conjugales répétées. Par désespoir, colère, rébellion, elle mange de la terre, ce qui lui provoque des visions. Elles lui révèlent où sont les personnes disparues ou décédées et les circonstances de leur mort.

Ce pouvoir est un secours inestimable pour toutes ces familles à la recherche de parents disparus, des femmes la plupart du temps. Les familles affluent, apportant dans des petites bouteilles, de la terre foulée par leur proche disparu. Mais l'état de transe dans lequel plonge la jeune fille est aussi une terrible épreuve. Voir leur supplice, ressentir leur souffrance et leur peur l'obsède, l'habite dans ses rêves.

Trop jeune, elle se sent désorientée, partagée entre son envie d'aider les autres et le besoin de se protéger.
« J'ai caressé la terre qui me donnait des yeux neufs, me permettait d'avoir des visions auxquelles j'étais la seule à accéder. Je savais combien les messages des corps volés sont douloureux. »
*
Terriblement immersif. J'ai respiré le parfum de la terre humide, j'ai ressenti du dégoût à en manger.
En seulement 200 pages d'une beauté crue et âpre, l'auteure nous immerge dans les pensées de cette jeune fille et nous ressentons ses peurs, ses fragilités, son mal-être, la nécessité de se préserver de toutes ses souffrances, mais aussi son désir d'apaiser les incertitudes et le désarroi de toutes ces femmes qui viennent la solliciter.
*
Ce roman est aussi celui d'une adolescente qui se cherche. L'auteure donne ainsi vie à une héroïne complexe, forte autant que fragile, un peu sorcière, un peu voyante. Sous des apparences de dureté et de grossièreté, se cache une âme sensible, blessée et un coeur généreux. Nous ne connaîtrons ni son prénom, ni son âge.
« Je garde mes larmes pour moi, pour ne laisser sortir qu'une colère qui me donne l'impression d'être pétrifiée. »
*
Mais ce qui est le plus intéressant, c'est cette image de la terre, qui boit le sang des victimes, et avec lui, leur douleur, leur peur, leur rage. Cette terre est la mémoire des violences commises, en particulier sur les femmes et les enfants. Cette terre qui lui permet de voyager jusqu'au disparu, d'entrer en contact avec lui lors de transes et de voir ce qui est arrivé.
*
L'écriture évolue en fonction des besoins de la narration. Mangeterre s'exprime dans un langage argotique et cru. Mais le langage de la rue se substitue à une écriture plus poétique, plus profonde, plus riche. Ce mélange est assez déconcertant, mais rend le récit encore plus douloureux et poignant.
La violence est très présente, mais l'auteure ne décrit pas toute la barbarie et l'abjection des meurtres, le lecteur lit entre les lignes. J'ai aimé cette approche sans voyeurisme.
*
La première partie du roman m'a emportée dans un univers fantastique, mystérieux et onirique, même si l'intrigue ne s'installe pas vraiment.
La deuxième partie de l'histoire m'a moins transportée, plus cru, moins onirique. Je me suis demandée où l'auteure voulait me conduire. Il n'y a pas vraiment d'intrigue, c'est plutôt un itinéraire de vie, une expérience individuelle, une fiction qui rend compte de la violence faite aux femmes et de l'impuissance des autorités à résoudre ces affaires criminelles.
La fin ouverte laisse le lecteur dans l'incertitude. Je comprends bien les intentions de l'auteure qui nous laisse comprendre que le combat pour le respect des femmes continue, mais je n'aime pas trop ce genre de fin.
*
Roman lu après la magnifique critique de Berni_29 que je vous engage à lire, je ne regrette pas, même si je suis un tout petit peu moins enthousiaste que Berni. C'est un roman atypique, intrigant, agréable à lire, où se mêlent dureté et lyrisme. J'ai été prise dans un tourbillon de sentiments contradictoires, entre colère, tristesse, empathie, impuissance, révolte, beauté aussi.
Je vous engage à le lire pour vous faire votre propre avis.
*
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Je remercie chaleureusement les Éditions de l'Observatoire ainsi que Babelio pour cette lecture et leur confiance !

« Mangeterre » de Dolores Reyes est un roman singulier, étonnant de par son histoire et son style d'écriture ; fort et puissant pour son message adressé à toutes les femmes subissant des violences qu'elles soient physiques, psychiques, sexuelles. Mangeterre est une toute jeune fille perdue dans un climat de violence quotidienne, physique et verbale, de son père alcoolique et mauvais. Sa mère succombe sous les coups. Un énième féminicide sur cette terre d'Argentine. Cette jeune fille déscolarisée et vivant dans le dénuement le plus total avec son frère Walter dans la maison familiale, dispose d'un don. Lorsqu'elle est prise par l'envie irrépressible de manger, d'avaler de la terre, son corps et son psychisme perçoivent des choses, qui sont autant de visions sur ce qui est arrivé à une personne disparue, assassinée.

La terre dévorée est symbole de ce qui nourrit les plantes, les insectes, mais c'est aussi la terre où l'on est inhumé, le goût dans la bouche de celui qui mord la poussière. Mangeterre avale cette terre pour exprimer son dégoût de ceux qui font subir ces sévices aux filles et aux femmes d'Argentine. Ce livre adresse un message universel de lutte contre le fléau des féminicides. Un sujet plus que d'actualité. A l'école déjà, Mangeterre avait permis de retrouver le corps d'Ana son institutrice. Assassinée elle aussi. Il y a un mélange très intéressant au coeur de ce roman entre un réalisme cru, une violence pleinement présente, et une façon très onirique qui est presque de l'ordre du fantastique de nous présenter les choses. L'histoire est vu par les yeux de cette jeune fille qui s'exprime comme toutes celles de son âge. L'heure des transformations, des bouleversements, des premiers amours. La police représentée par le ténébreux Ezequiel lui demande son aide pour retrouver une jeune fille disparue. Elle s'appelait Maria.

Elle avale cette terre qui lui donne si mal au ventre puis des ombres dansent autour d'elle et elle perçoit les choses, la vie ou la mort, les détails pouvant conduire à la retrouver. Mangeterre se voudrait plus dure qu'elle ne l'est. Au fond d'elle, derrière ce masque de colère liée à une vie qui ne l'a pas épargnée, il y a une jeune fille qui souhaite faire le bien avec son don de vision. Mangeterre possède une profonde sensibilité mais elle se cherche. Un roman profondément original qui résonnera j'en suis sûr dans le coeur de ceux pour qui le combat, pour lutter contre les violences exercées par les hommes sur les femmes, est essentiel. Dolores Reyes a écrit ce roman comme un cri, celui de la colère mais aussi celui de la tendresse car tous les hommes ne sont pas bourreaux fort heureusement. Un roman qui dénonce, qui secoue, riche de ces quelques imperfections car l'idée profondément originale aurait pu être davantage creusée. Mais ce que je retiens de cette lecture c'est vraiment son message universel sur la question des violences subies par les femmes. A découvrir.
Lien : https://thedude524.com/2020/..
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La couverture colorée avec une jeune fille coincée dans une bouteille sur un tas de terre m'a tout de suite interpellée, tout comme le résumé mentionnant un don inhabituel. Un don qui oscille entre cauchemar et merveilleux, et qui va se révéler à notre protagoniste, jeune fille capable de voir le sort réservé aux disparus en ingérant un peu de la terre qu'ils ont foulée. Je dis disparus mais disparues serait plus juste, la plupart des évaporés étant des femmes.

Des femmes ayant subi la violence des hommes dans cette Argentine dont le portrait n'est pas flatteur, peut-être parce que nous suivons une jeune fille issue des quartiers populaires, déscolarisée et sans grande perspective d'avenir. J'ai regretté un manque de contextualisation et d'éléments culturels auxquels me raccrocher ne connaissant que peu l'Argentine. J'ai ainsi eu le sentiment que le roman aurait pu se passer dans un autre pays d'Amérique du Sud, voire du monde…

Mais c'est aussi la force de Mangeterre, cette portée universelle qui pend aux tripes et permet de saisir toute l'horreur qui se cache derrière chaque disparition. Bien que l'autrice ne cherche pas à susciter le pathos, se contentant d'énoncer les choses les plus dures comme les plus triviales avec un naturel mêlant poésie et brutalité, on se surprend très vite à ressentir une vive compassion pour Mangeterre. Un surnom donné à notre narratrice dont la personnalité se noie inexorablement dans sa déroutante capacité, qui la lie autant à la terre nourricière qu'elle la coupe du commun des mortels.

De fil en aiguille, sa vie se retrouve rythmée par les soirées avec son frère et ses amis, les bières avalées pour étancher une soif plus psychologique que physiologique, et les demandes des familles pour retrouver une fille, une mère, une cousine… La jeune fille a parfois du mal à faire face à cet afflux de désespoir, chaque bouteille emplie de terre déposée devant sa porte étant synonyme d'une potentielle vision dévastatrice. On la rétribue pour ses services d'un genre particulier, mais chacune de ses visions lui coûte bien plus que ce que l'argent lui permet d'acheter.

Malgré les difficultés et un apparent immobilisme, lui faisant prendre la vie comme elle vient sans autre considération que le lendemain, Mangeterre avance, petit à petit, pour trouver sa voie dans une obscurité heureusement éclaircie par des touches d'espoir. Une fille retrouvée avant qu'il ne soit trop tard, une relation soeur/frère qui permet d'avancer dans l'adversité, une histoire d'amour, l'apprentissage de bonheurs simples que l'on savoure d'autant plus dans une société où la violence peut vite vous rattraper… Je ne me suis pas attachée à cette héroïne dont les sentiments les plus profonds ne sont pas réellement étayés ni dévoilés, mais j'ai été captivée par cette existence en suspens où mort et vie se rejoignent dans la terre.

Tout au long de ma lecture, j'ai également été frappée par la manière brute et symbolique à la fois dont l'autrice dénonce les féminicides, forçant chaque lecteur à faire face à l'indicible sans détourner le regard. Ainsi, quand Mangeterre voit, nous voyons avec elle ! Et nous ressentons tout, de la violence, à l'injustice, en passant par la peine et la vie qui s'écoule et rejoint une terre qui parle et qui a tellement à dire. Notre narratrice se fait son porte-parole et lui permet de souffler la vérité avant qu'elle ne finisse définitivement enterrée, emportant avec elle ses vils secrets, les coups donnés en toute impunité, les viols commis sous les rires, les blessures infligées sans aucun remord… En levant le voile sur les disparitions, bien qu'elle opte parfois pour un mensonge moins lourd à porter, Mangeterre offre aux familles la possibilité d'un deuil futur et aux victimes, une forme de justice.

Reste la question de vraie justice qui semble ici presque occultée, soit parce que le roman est trop court pour que la question soit abordée, soit parce que, comme en France, elle est loin d'être à la hauteur. Et puis, faudrait-il déjà que les forces de l'ordre prennent au sérieux les disparitions, ce qui ne semble pas vraiment être le cas ici. On comprend alors pourquoi autant de familles se tournent vers notre narratrice, dernier espoir avant leur désespoir… Mais n'est-ce pas là une responsabilité trop lourde à porter pour une jeune fille qui a elle-même perdu sa mère sous les coups d'un père violent et alcoolique, et une ancienne enseignante qui vient encore hanter ses rêves ?

Alors que ce roman n'entre pas vraiment dans mes habitudes de lecture, il a eu un effet hypnotique sur moi, un peu comme si Dolores Reyes m'avait envoûtée. La vulgarité de certains propos et la familiarité de la narratrice m'ont souvent gênée, bien que je reconnaisse que vu le contexte, elles soient fort à propos. Mais en parallèle, j'ai été captivée par l'atmosphère et ce réalisme magique qui nous permet de lire l'horreur tout en gardant notre esprit et notre coeur à l'abri des plus forts tourments. On ressent et on vit, mais on arrive à se protéger pour ne garder en soi que l'important, la force du message et l'implacabilité avec laquelle il est martelé.

Entre paroles crues, scènes presque animales et poésie évocatrice d'une plume vive et incisive, un roman qui interpelle et qui met brillamment en lumière une violence endémique dont les femmes sont les principales victimes. Par son essence empreinte de réalisme magique, et son contexte culturel qui s'oublie derrière la portée universelle, Mangeterre fait partie de ses livres inclassables, mais inoubliables.
Lien : https://lightandsmell.wordpr..
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Je me demande si Mangeterre ne m'a pas lancé un sort car je ressors de cette lecture à la fois intriguée, bouleversée, perplexe ne sachant finalement pas ce que j'en pense.....

Nous ne connaîtrons de cette jeune femme ni son âge ni son prénom car tous l'appelle Mangeterre car elle a un don : en mangeant la terre foulée par certains elle "voit" leur destin. Sa réputation grandit d'autant que ses allégations se vérifient, certains sont prêts à verser d'ailleurs énormément d'argent pour retrouver un proche disparu et plus particulièrement des femmes. Elle vit avec son frère Walter, sa mère étant décédée sous les coups de son "daron" de père qui a disparu depuis. Rejetée par le système scolaire, ils vivent entourés principalement des amis de son frère, à jouer sur la "play" et à boire des bières.

Nous suivons Mangeterre dans son parcours, celui d'une "sorcière" car c'est ainsi qu'on la désigne et qui souvent vit entourée des fantômes qu'elle retrouve lors de ses transes. Elle est souvent partagée entre acceptation ou besoin de se nourrir de la terre et dégoût mais ne résiste pas aux supplications parfois désespérées de ceux ou celles en quête d'une réponse.

Elle fera la découverte d'un territoire inconnu pour elle, celui de l'amour, dans les bras d'Ezequiel, un homme qui lui viendra en aide à plusieurs reprises.

J'ai aimé et j'ai été à la fois bousculée par ce personnage à la fois assez brutal dans sa façon d'exprimer ses sentiments, par sa narration en de courts chapitres assez débridés avec un langage populaire et comme on peut l'être d'une personne dont on constate la véracité de ses prédictions sans en comprendre l'origine.

Un premier roman troublant, mais dont j'ai du mal à savoir si j'ai aimé ou non et pour quelles raisons, il m'a manqué un "je ne sais quoi" pour totalement adhérer. Peut-être un manque de profondeur sur les différents personnages peut-être également une écriture vive et directe qui m'a lassée.

Il va me rester de ce premier roman un sentiment d'étrangeté dans l'écriture, le traitement mais aussi d'incrédulité par rapport au sujet pour mon esprit cartésien ,l'horreur parfois de ses visions, des questionnements qu'elles lui insufflent mais aussi son désir d'avoir une autre vie, sa propre vie et non celles de ceux qu'elles recherchent et qui la hantent.

Surprenant, inhabituel, ce roman explore une zone grise entre vie et mort.
Lien : https://mumudanslebocage.wor..
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critiques presse (1)
LeMonde
16 septembre 2020
Sur un mode onirique, le premier roman de Dolores Reyes évoque le fléau des féminicides, un phénomène omniprésent en Argentine.
Lire la critique sur le site : LeMonde
Citations et extraits (15) Voir plus Ajouter une citation
Assise sur le sol, j'ai passé la main sur la terre où j'ai planté le couteau et l'en ai retiré. ça m'a plu. J'ai refait ce geste, mais cette fois j'ai laissé le couteau, essayé de le bouge, d'écarter la terre pour l'ameublir peu à peu. La terre est forte mais n'a pas protesté.
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Je garde dans mes cauchemars le son de cet endroit, un ramassis de douleur et de pestilence.
Même le soleil me déroute, il saigne sur ma peau enflammée et mes yeux, brûlants comme si on y avait versé de l’acide, luttent pour ne pas pleurer.
La douleur, un jaune poubelle, jaune fièvre, ou un gris tôle, un gris malade. Seule la douleur semble ne jamais mourir.
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J'ai fermé les yeux et je l'ai vu.
C'était comme si je revenais dans une nuit ancienne. Une nuit qui s'était consumée et n'existait plus et qu'on voyait de là, à ce moment précis, dans ma tête.
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La voir en silence tomber dans un trou béant au fond du cimetière, là où se trouvent les tombes des pauvres. Ni plaque, ni bronze. Avant la roselière, une bouche sèche qui l’avale. La terre ouverte comme une coupure. Et moi qui essaie de la freiner, de la retenir avec mes bras, avec ce corps qui n’est pas plus grand que la largeur de la fosse. Mais quoi que je fasse, maman tombe.
Ma force, insuffisante, n’y change rien.
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J'ai caressé la terre qui me donnait des yeux neufs, me permettait d'avoir des visions auxquelles j'étais la seule à accéder. Je savais combien les messages des corps volés sont douloureux.
J'ai caressé la terre, serré le poing et soulevé dans ma main la clé qui ouvrait la porte par laquelle Maria et tant d'autres filles étaient parties, filles aimées, elles, de la chair d'autres femmes. J'ai soulevé la terre et avalé, toujours plus, beaucoup plus pour que naissent ces yeux neufs et que je voie.
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