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Critique de Lutin82


Je me suis enfin décidée à franchir le pas pour me plonger dans un bouquin du britannique Alastair Reynolds. Sa réputation d'écrivain de hard-SF avait eu tendance à me détourner de ses écrits. Cette hésitation n'est pas liée aux termes, explications ou théories techniques et scientifiques, mais à l'aridité émotionnelle que je ressens à la lecture de tels récits. de fait, mes aprioris se sont révélés plutôt infondés, mais pour autant, la lecture de ce premier tome ne m'a pas emballée outre mesure.

Il faut aussi souligner que le 4° de couverture du présent roman, La Terre bleue de nos souvenirs est assez alléchant accolé à un auteur de belle renommée :

« XXIIe siècle. le Mécanisme sait tout. Où vous êtes, à quoi vous pensez. Geoffrey et Sunday Akinya savent que garder un secret peut s'avérer dangereux. Leur famille a profité de l'essor économique de l'Afrique. Eux l'ont rejeté en bloc. Geoffrey travaille sur l'intelligence animale au Kilimandjaro et Sunday mène une carrière artistique sur la Lune, hors de portée du Mécanisme. Mais en mourant, leur grand-mère laisse un secret qui va les lancer dans une course désespérée… sous l'oeil impassible du Mécanisme.«

Mais voilà, le Mécanisme n'est présent qu'en toile de fond et il ne paraît pas si menaçant à la lecture du roman. Certes, son influence est sensible, malgré de très rares interventions (dont notre héros en fera les frais ultérieurement), mais nous sommes loin du Rapport préliminaire de Dick, cela se rapproche plus de « Samaritain » de Person of Interest. J'avoue que je m'attendais à un interventionnisme de ce Régulateur plus important et plus envahissant. Toutefois cette subtilité ne nuit pas à l'univers, au contraire. Au fil des pages, et grâce aux comportements des protagonistes, le lecteur comprend toute l'importance du Mécanisme et de la police de la pensée dans « l'éducation » des peuples vers la non-violence (et sans doute sa surveillance de tous les instants). le modelage de la société est si poussée qu'il est devenu impossible de commettre un crime. Il anticipe et prévient toute velléité d'infraction, aseptisant les rapports humains et l'humanité. A tel point qu'il existe deux sociétés parallèles.

Certains réfractaires se sont réfugiés dans la Zone, une partie de l'espace lunaire hermétique au Mécanisme. Il y vit toute une population un peu bohème et marginale dont Sunday Akinya, soeur de Geoffrey et artiste de son état. D'autres ont investi les océans, transformant leurs capacités corporelles pour devenir des êtres amphibiens voire carrément aquatiques, constituant une société à part et totalement autonome. L'homme a conquis le système solaire et les mers terrestres, avec difficulté ayant nécessité beaucoup de détermination. L'un des précurseurs, qui s'avère être une gloire de cette conquête, est la grand-mère des deux « héros » qui leur lègue un jeu de piste vers un trésor mystérieux, semant au passage la zizanie la plus complète dans sa richissime famille africaine.

C'est en accompagnant Sunday et Geoffrey dans cette quête, de la Lune à Mars en passant par la Terre, qu'Alastair Reynolds nous dévoile sa vision de notre futur. Une conquête spatiale à dimension humaine, la mise sous tutelle de l'humanité facilitée par des implants neurologiques obligatoires, des transformations génétiques radicales, des IA mises à l'écart par suspicion et finalement peu de latitude pour la création et la spontanéité.

Un monde certes plus sûr, mais pas du tout séduisant. Un avenir si aseptisé que l'appel des étoiles apparaît comme un salut.
Quand aux « héros », je ne suis guère plus enchantée que Xapur qui évoque à juste titre dans sa critique : « des rebelles mous ». Sunday et Geoffrey défient leur richissime famille, l'une artiste vivant dans la Zone, l'autre, scientifique pleurant des subsides auprès de ses cousins. Ils n'inspirent pas un grand attachement et si j'ai poursuivi la lecture jusqu'au bout, c'est pour suivre les péripéties de la grand-mère ou plutôt de son fantôme virtuel…

En effet, la technologie a énormément évoluée. Il est possible de se rendre sur la Terre depuis la Lune dans un golem, une sorte de robot qui accueille la conscience de l'humain en voyage, ou même dans l'esprit d'un autre être humain. Ce concept est intéressant, mais pas autant développé que dans Les enfermés de Scalzi. Sunday a utilisé ces évolutions techniques pour reconstituer un double virtuel de mamie Akinya, plus vraie que nature, ou presque.

Les lecteurs auront le loisir de découvrir de nombreux thèmes abordés par l'auteur, ma critique serait trop longue si je devais en faire le tour : la manipulation génétique, le dispersion dans l'espace, l'eugénisme, le danger potentiel de l'IA, …. En soi, ce n'est pas extravagant, et l'auteur a les moyens de son ambition. Seulement, cet étalage se fait au détriment d'une histoire captivante et de protagonistes convaincants.

Le premier tiers du livre est franchement longuet, voire ennuyeux. L'histoire a commencé à capter mon attention à la page 265. Et il a fallu attendre la page 273 pour que je me dise, finalement, il y a un peu de suspens… Il est vrai que par la suite, le rythme devient plus enlevé et le récit plus vivant.

J'en ressort avec un avis plutôt mitigé. D'un côté, les nombreuses thématiques m'ont emballée de par leur ambition et surtout par la cohérence de leur agencement. D'un autre côté, le rythme, les personnages « mous du genou », et la trame insipide du premier tiers du livre ne plaident pas en faveur de la Terre bleue de nos souvenirs. Heureusement que la « pseudo grand-mère » apporte le peps et la saveur dont sont dépourvus les vivants!
Lien : https://albdoblog.wordpress...
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