Paule, (Paulette, poulette, ...le glissement pourrait aisément se faire avec le destin de cette jeune fille) , retourne à la ferme de sa maman qui s'est cassée le bec, et va reprendre l'activité d'élevage de poulets.
Cette jeune femme à la belle plume, va s'attacher à ses pensionnaires et commence à écrire une petite biographie pour chaque poulet dont elle va tordre le cou. Une sorte d'hommage aux belles emplumées dont elle va s'amuser à conserver une trace...
Loufoque dans le ton, plein de bonnes idées, j'aurais bien mis un dix sur dix mais je n'ai pu mettre qu'un oeuf! Je n'irai pas jusqu'à dire que le récit ne casse pas trois pattes à un...poulet, il y a plein de bonnes trouvailles, plein de bonnes idées, de vraies bonnes idées mais parfois, sans vouloir faire la poule mouillée, je pense que ces tentatives ne sont pas assez exploitées et auraient pu être plus drôles. Je m'attendais à être comme un coq en pâte, mais de temps en temps, je me suis retrouvé comme une poule qui a trouvé un couteau.
Il y a un certain plaisir à lire ce roman et je ne le déconseillerai pas mais j'ai tout de même un tout petit peu l'impression de me retrouver le bec dans l'eau.
Vous savez quoi? le mieux est que vous l'essayiez pour vous faire votre propre idée!
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À la mort de la mère, Paule revient dans la ferme où elle a grandi, après dix ans à la ville. La première chose qu'elle doit accomplir, c'est la dernière volonté de sa mère : tuer Théodore, le borgne, ce poulet qu'elle aimait tant. Elle va par la même hériter de son quotidien, perpétuer la tradition : l'élevage, l'abattage et la vente de ses poulets. Scénariste de métier, elle va apporter sa patte en décidant d'écrire la biographie de chaque poulet qu'elle aura tué – ou plutôt, leur nécrologie -, afin de leur rendre hommage et existence à travers la mort.
Ses poulets ne sont pas n'importe quels poulets : ils font partie de la haute-cour. Il y a ceux qui ont des noms d'ex-mannequins comme Carla "isolée, calme et pourtant vicieuse jusqu'au bout des griffes" , d'autres, ceux d'héroïnes de romans comme Lolita "qui [courait] plus vite que les hommes, plus vite que la tramontane" , ou Gervaise "grande fluette, hoquetant parfois comme une ivrogne, avec une jolie petite face ronde [dont l'] infirmité était presque une grâce". Il y a encore ceux qui portent des noms d'objets comme Lacet, ou des prénoms comme Charles qui "aimait la fraîcheur des bras humains" ou bien Harold, "l'incarnation du poulet médiocre".
Ses poulets sont comme des enfants qu'elle cajole, caresse, sollicite, avec qui elle dort, même. Elle les aime d'un amour égal. Et pourtant, quand les seize semaines sont passées, elle ne ressent aucun scrupule à leur rompre le cou à coup de serpette. C'est dans l'ordre des choses. Et même, elle ne peut supporter de ne pas être celle qui les tue.
Le quotidien de Paule s'écoule ainsi entre les moments privilégiés qu'elle passe avec eux, ses matinées au marché où elle intrigue et enchante tour à tour certains habitants du village avec ses biographies, en même temps qu'elle en irrite d'autres… Alors quand Fernand, directeur d'une grande surface, vient lui proposer de voir plus grand en participant à un projet d'exploitation révolutionnaire abritant dix mille poulets – cette idée de biographies est un concept qui relève du génie, il faut l'exporter à la ville et à plus grande échelle -, elle y voit pour ses petits l'occasion d'une nouvelle expérience, la découverte d'un terrain de jeu plus vaste. Elle veut ce qu'il y a de mieux pour eux.
Les Poulets de Paule vont devenir une marque, le soin qu'elle leur apporte et leurs biographies, des outils Marketing brillants. L'entreprise va rapidement prospérer, Paule et Fernand devront faire appel à des scénaristes pour rédiger de plus en plus de biographies. le nombre de poulets va rapidement enfler et les machines finiront par prendre sa place de Médée. Paule va alors perdre l'emprise qu'elle exerçait sur la vie et la mort de ses poulets et peu à peu, glisser vers une forme de folie, sous les yeux de Louis, son mari…
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Le Prix du roman d’écologie, dont « l’Obs » est partenaire, a récompensé un premier roman : « Le Chant du poulet sous vide ». Cette fable animalière explore la « dissonance cognitive » de tous ceux qui composent avec le système dont ils dépendent (oui, nous tous).
Lire la critique sur le site : Bibliobs
Ça pourrait être une bête, un prédateur naturel. On a vu dans la région, des belettes décimer des élevages entiers en bonne santé. Les morsures de belettes ressemblent à celles des vampires. Les bêtes qui ne succombent pas aux morsures meurent de crise cardiaque.
Mais il n'y a qu'un être humain pour égorger des poulets de cette façon.
Elle aimerait appeler Louis, lui demander : "Est-ce que c'est toi ? Est-ce que tu es venu ici pour tuer mes poulets ?"
Sa jalousie aurait pu faire ça de lui : un meurtrier.
Louis est le seul à ne pas fréquenter d'animaux.
Quand les animaux sont pour quelqu'un seulement une viande, le rapport au vivant est modifié.
Elle le trouve beau avec son air timide et ses longues jambes. Dans le bar de leur rencontre, Louis avait volé pour elle une bouteille de Get 27. Il lui avait dit : "ne dis rien", et il avait serré sa main.
Il n'avait que quatre doigts. Le majeur manquait. Elle avait pensé : il a des pattes de poulet.
Elle avait ressenti une décharge dans la totalité du corps, une envie infinie de faire l'amour avec ses doigts immédiatement, que ses mains se posent sur elle, la pénètrent.
En vérité, ses mains ressemblent davantage à celles d'un canard aux extrémités palmées qu'à des pattes de gallinacé.
La hache est pratique, mais elle doit être bien affûtée. Demain, c'est jour de marché et elle veut être prête. Elle se courbe sur son bureau, écrit des brouillons sur la vie de Sushi. Elle peine à trouver les mots. Sushi était le plus petit des poulets, celui qui faisait le plus de dégâts aussi. Son bec était acéré, son plumage rare en certains endroits. Mais "petit poulet au plumage rare" sonne mal. La réalité n'est pas très appétissante. Le dictionnaire n'est d'aucun secours, les synonymes sont à vomir : humble, chétif, infime, minuscule, réduit.
Théodore sous le bras, Paule revient à l’intérieur de la ferme. Si elle ne sait plus faire, la mort peut être lente et douloureuse. Elle doit préserver les yeux des autres. Sa main tremble. Théodore n’est pas effrayé. Quand elle le lâche sur le sol du salon, il reste près d’elle pour venir picorer ses chaussures avec tendresse. Il n’est pas coutumier de la violence. Elle aimerait l’implorer de se tenir tranquille, de ne pas être si doux. Elle se figure des scènes : la mère riant avec lui, l’embrassant, sur le bec peut-être, lui racontant une histoire sentimentale à voix basse, d’une voix tendre que Paule ne lui connaît pas, et lui qui s’endort, heureux, fermant son œil valide, s’abandonnant. Leurs repas partagés, peut-être. La mère courant à ses côtés dans le champ, ses vieilles jambes pleines d’arthrite tentant de suivre le rythme des pattes de l’animal.
Sac, si fragile et aventureux à la fois, la peau tendre. C’est ce qu’elle écrit sur l’étiquette avant de le porter au marché, emballé sous vide. Elle le vendra, même si c’est contre ses convictions de donner à manger un corps mort de mort naturelle. Ca porte la poisse.
"Bienvenue aux éditions P.O.L", un film de Valérie Mréjen. Pour les 40 ans des éditions P.O.L, quelques un(e)s des auteurs et des autrices publié(e)s aux éditions P.O.L écrivent une carte postale et laissent un message aux éditions P.O.L.
Avec par ordre d'apparition de la carte postale: Violaine Schwartz, Jean-Paul Hirsch, Lucie Rico, Emmanuel Lascoux, Jacques jouet, Philippe Michard, François Matton, Frédéric Boyer, Catherine Henri, Suzanne Doppelt, Lamia Zadié, Marianne Alphant, Suzanne Duval, Laure Gouraige, Emmanuel Carrère, Jean Rolin, Elisabeth Filhol, Célia Houdart, Nicolas Fargues, Nicolas Bouyssi, Louise Chennevière, Frédérique Berthet, Marie Darrieussecq, Jocelyne Desverchère, Jean Frémon, Kiko Herrero, Julie Wolkenstein, Emmanuelle Bayamack-Tam, Liliane Giraudon, Frédéric Forte, Pierric Bailly, Valère Novarina, Hélène Zimmer, Nicolas Combet, Christian Prigent, Patrice Robin,, Emmanuelle Salasc, Alice Roland, Shane Haddad, Mathieu Bermann, Arthur Dreyfus, legor Gran, Charles Pennequin, Atiq Rahimi, Anne Portugal, Patrick Lapeyre, Caroline Dubois, Ryad Girod, Valérie Mréjen / Dominique Fourcade, Marielle Hubert, Robert Bober, Pierre Patrolin, Olivier Bouillère, Martin Winckler, Jean-Luc Bayard, Anne Parian, Nathalie Azoulai, Julie Douard, Théo Casciani, Paul Fournel, Raymond Bellour, Christine Montalbetti, Francis Tabouret, Ryoko Sekiguchi,
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