Citations sur Vergers (76)
VOIS-TU, LÀ-HAUT, CES ALPAGES ...
Vois-tu, là-haut, ces alpages des anges
entre les sombres sapins ?
Presque célestes, à la lumière étrange,
ils semblent plus que loin.
Mais dans la claire vallée et jusques aux crêtes,
quel trésor aérien !
Tout ce qui flotte dans l'air et qui s'y reflète
entrera dans ton vin.
BEAU PAPILLON PRÈS DU SOL
Beau papillon près du sol,
à l'attentive nature
montrant les enluminures
de son livre de vol.
Un autre se ferme au bord
de la fleur qu'on respire - :
ce n'est pas le moment de lire.
Et tant d'autres encor,
de menus bleus, s'éparpillent,
flottants et voletants,
comme de bleues brindilles
d'une lettre d'amour au vent,
d'une lettre déchirée
qu'on était en train de faire
pendant que la destinataire
hésitait à l'entrée.
Ô mes amis, vous tous...
Ô mes amis, vous tous, je ne renie
aucun de vous ; ni même ce passant
qui n'était de l'inconcevable vie
qu'un doux regard ouvert et hésitant.
Combien de fois un être, malgré lui,
arrête de son oeil ou de son geste
l'imperceptible fuite d'autrui,
en lui rendant un instant manifeste.
Les inconnus. Ils ont leur large part
à notre sort que chaque jour complète.
Précise bien, ô inconnue discrète,
mon coeur distrait, en levant ton regard.
NOTRE AVANT-DERNIER MOT
Notre avant-dernier mot
serait un mot de misère,
mais devant la conscience-mère
le tout dernier sera beau.
Car il faudra qu'on résume
tous les efforts d'un désir
qu'aucun goût d'amertume
ne saurait contenir.
COMME UN VERRE DE VENISE
Comme un verre de Venise
sait en naissant ce gris
et la clarté indécise
dont il sera épris,
ainsi tes tendres mains
avaient rêvé d'avance
d'être la lente balance
de nos moments trop pleins.
Il suffit que, sur un balcon
ou que dans l'encadrement d'une fenêtre,
une femme hésite....pour être
celle que nous perdons
en l'ayant vue apparaitre
Et si elle lève les bras
pour nouer ses cheveux, tendre vase,
combien notre perte par là
gagne souvent d'emphase
et notre malheur d'éclat :!
La dormeuse
Figure de femme, sur son sommeil,
fermée, on dirait qu'elle goute
quelque bruit à nul autre pareil
qui la remplit toute
De son corps sonore qui dort
elle tire la jouissance
d'être un murmure encor
sous le regard du silence
Puisque tout passe, faisons
la mélodie passagère ;
celle qui nous désaltère,
aura de nous raison.
Chantons ce qui nous quitte
avec amour et art ;
soyons plus vite
que le rapide départ.
(p. 57)
UN ROSE MAUVE DANS LES HAUTES HERBES
Un rose mauve dans les hautes herbes,
un gris soumis, la vigne alignée ...
Mais au-dessus des pentes, la superbe
d'un ciel qui reçoit, d'un ciel princier.
Ardent pays qui noblement s'étage
vers ce grand ciel qui noblement comprend
qu'un dur passé à tout jamais s'engage
à être vigoureux et vigilant.
Après une journée de vent,
dans une paix infinie,
le soir se réconcilie
comme un docile amant.
Tout devient calme, clarté...
Mais à l'horizon s'étage,
éclairé et doré,
un beau bas-relief de nuages.
Quatrains Valaisans - 21