J'aime la façon dont il a repris et bien fait passer la pluralité des voix, des expériences, des regards, des histoires, rendant ainsi une partie de la complexité de ce rapport entre l'Algérie et la France, avant et pendant la guerre, depuis, l'expérience de la guerre civile, l'expérience de la discrimination
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Alors cet étranger veut me tirer le portrait parce que j’étais sur sa route, j’étais de passage, sur son passage.
Le portrait, je lui ai proposé devant une montagne, un rocher noir, qui saignerait de partout.
Tous ceux d’entre nous qui ont voulu le passer s’y sont tranché les mains, les pieds, la gorge, la vie. Et même si tu penses l’avoir contourné, tu le revois devant toi, inchangé.
De face ou de dos, je suis tout petit, il est tout petit le bonhomme devant ce rocher, ce roc impénétrable, cette impasse matérialisée.
Alors, quand je vois aujourd’hui toutes ces filles voilées,
alors que nous, nous avons tout fait pour l’enlever,
quand je vois tous ces jeunes au chômage et dans les mosquées
je vois que nous avons perdu la lutte.
Il faut entendre ma colère.
Oui, ils sont tous acteurs, ils ont tous un rôle… Rachida joue le rôle de celle qui a déjà parlé, témoigné, expliqué sous toutes les coutures ; Benjamin fait le témoin français de bonne volonté, mais "malheureusement-devant-partir-dans-un-quart-d'heure", avec son pays, sa paix, sa plaie ; Rachid fait le témoin de l’autre bonne volonté, française-algérienne ; Assia joue le témoin pressé d’intervenir, pressé de parler, et qu’une autre parole ne vienne pas encore une fois la bâillonner ; Hélène interprète donc la Française malheureuse, et Philippe fait le témoin des cinq témoins présents.
L'immeuble, c'est un village vertical avec ses fêtes, ses mariages, ses baptêmes, ses circoncisions. Table verticale, s'accrocher ferme. Mixte le village, portugais, maghrébins, gens du voyage, ouvriers, prolétaires, petits employés, très mixte le village, très ethniquement mixte et très très uniforme pour ce qui est de la chute sociale qui s’y programme. Table verticale. S’accrocher de toutes ses forces.
Un enfant, ça se rend pas compte, dit-on.
Un enfant, ça voit et ça joue
comme si ça oubliait ce qu’on a pourtant sous les yeux,
les yeux océan d’une maman
et soi-même dans une toute petite barque naufragée au milieu.