Ce pape qui dérange

Je ne me sens pas l'envie de débattre sur l'Eglise, c'est un sujet complexe qui, s'il me tient vraiment à coeur, mérite de longs développements. De la même manière qu'on peut croire en la démocratie et contester un gouvernement, on peut croire en Dieu et se montrer critique vis-à-vis de l'Eglise. Dans une société exacerbée où il ne fait pas bon parler des religions et où la sacro-sainte laïcité génère plus de tabous qu'elle n'en démine, semant l'amalgame dans les esprits (je m'étonne régulièrement de constater en écoutant les médias que beaucoup de mes concitoyens considèrent la laïcité comme une interdiction irrévocable de pratiquer une religion et non comme une valeur de respect, d'équité et de tolérance), il faut bien du courage et de la détermination pour défendre ce en quoi l'on croit.

Or si déjà nos jeunes démocraties, censées être portées par des idéaux de justice et de citoyenneté, souffrent en leur sein de corruptions de toutes sortes, comment une institution vieille de plus de 2 000 ans pourrait-elle échapper elle aussi aux corruptions ? Impossible puisqu'elle est constituée d'hommes et que l'homme, ecclésiastique ou laïc, est faible. Au fil de son histoire, l'Eglise catholique a commis le meilleur comme le pire mais aujourd'hui elle est toujours là et depuis plusieurs pontificats elle tente de se réformer. Difficile défi que relèvent les papes : là où on voudrait de la rapidité, il y a la lenteur, là où on exige des évolutions, on trouve les traditions.

Recentrons-nous. Dans cet essai, il est question de François, souverain pontife depuis 2013. Le Saint-Père a toute ma sympathie et je place en lui beaucoup d'espoir. Il m'impressionne et je suis de ces Chrétiens qui pensent que l'Eglise ne doit pas mettre d'oeillères mais doit au contraire se montrer extralucide face aux maux de l'humanité, aller les débusquer et mettre le doigt là où ça fait mal, en son sein et à travers le monde. Je crois donc en François et en son message universel de miséricorde. La tâche est ardue, les épines dans le pied de l'Eglise sont nombreuses, souvent scandaleuses, mais quand c'est une réforme et non une révolution qui s'amorce, on ne peut pas s'attendre à ce que les choses se fassent en claquant des doigts. De plus, le peuple concerné par cette mutation est dispersé à travers le globe et offre une pluralité de cultures extraordinairement variée.

L'ouvrage de la journaliste Virginie Riva est remarquable de clarté et d'objectivité. Le chapitrage thématique est un plaisir à aborder. Sa documentation est solide ; ici, pas de place à l'extrapolation. Les sujets sont traités avec transparence, quelle que soit leur teneur : la famille, l'homosexualité, la pédophilie, la banque vaticane, la curie, l'engagement humaniste du pape. On apprend beaucoup ; on prend du recul avec les médias souvent trop racoleurs, on est plus à même de se faire sa propre opinion, qu'on soit croyant ou non.

Ce que je retiens de la lecture de cet essai, c'est que je suis dérangée par ceux que ce pape dérange, pour la plupart des ultra-conservateurs, des planqués et des ambitieux qui vivent dans la crainte du changement. Aujourd'hui, le pape François est une voix qui doit être écoutée et qui peut s'élever contre celles de politiciens ou de porte-paroles emblématiques peu crédibles ou menaçants. Il peut aussi être un soutien pour tous ceux qui oeuvrent pour un monde de paix et de justice sociale, et heureusement, ça fait encore un paquet de monde. A mon sens, ce que François propose, c'est ce que Jésus proposait il y a plus de 2 000 ans : changer les hommes en humains. Je signe.

Enfin, j'attribue un bon point supplémentaire pour le chapitre traitant de la pédophilie. L'auteur rend compte avec exactitude de l'état des travaux entrepris par François sur ce sujet délicat et douloureux. Elle montre que le pape hérite de décennies de loi du silence criminelle et surtout elle n'omet pas de rappeler que l'écrasante majorité des prêtres est au service des familles et des pauvres et n'a jamais abusé de mineurs, et que cette écrasante majorité souffre quotidiennement des amalgames crétins et des racolages médiatiques (imaginez que demain, tous les professeurs, moniteurs, éducateurs et parents soient montrés du doigt et soupçonnés du pire). La pédophilie est un des graves cancers qui gangrènent notre société mais pas plus abjecte que la famine, la misère ou le trafic d'organes. Inutile donc de chercher des boucs émissaires et de vouloir immoler le clergé tout entier.


Challenge MULTI-DÉFIS 2017

Je remercie les Éditions de l'Atelier et Babelio pour l'organisation de cette Masse critique.
Un livre instructif sans être ennuyeux, Virginie Riva expose les faits clairement. Cette lecture m'a renseigné notamment sur le fonctionnement et la composition d'un synode. Elle évoque pour chaque sujet, les propos du pape, et selon, ceux des différents interlocuteurs tels que les évêques, la curie, les salariés du Vatican, les journalistes ... On peut dire que la pape François agit tel un Monsieur Propre, les changements exigés par le pape se situent à tous les niveaux, celui de la curie d'abord, mais aussi celui des évêques, des prêtres et des laïcs ; «Même à la secrétairerie d'État ils ne savent pas toujours ce que la pape va faire. Ils sont dépassés. p. 159». le pape attache une grande importance à la famille, à l'implication des femmes dans les processus décisionnels de l'Église, il oeuvre avec efficacité pour les pauvres.
Je ne peux qu'encourager la lecture de cet ouvrage dont je reprends la Table des matières ci-après :

Introduction
Chapitre 1. La famille, ou comment François a provoqué un séisme dans l'Église
– La grande bataille du synode
– Une belle exhortation à ... l'amour et l'intégration
– le synode, tournant dans le pontificat
Chapitre 2. La réorganisation des finances, la lutte contre l'argent sale et la mafia
– Les chantiers de la réforme des finances du Vatican
– La lutte du pape contre la mafia en Italie
Chapitre 3. François et ses batailles économiques
– Un pape économiste
– Remettre le pauvre au centre de l'Église
Chapitre 4. La difficile lutte contre la pédophilie
– La progressive prise en considération du problème par les papes précédents
– Les différentes initiatives du pape François et les résistances
– Un changement en profondeur ?
Chapitre 5. le gouvernement de François
– La miséricorde comme feuille de route
– le pape : une figure centrale mais pas impériale
– La papauté : une mission à durée déterminée ?

Conclusion. Un pape qui dérange peut-il changer l'Église ?

Virginie Riva a réalisé, d'une écriture fluide, un ouvrage éclairant sur le rôle prépondérant d'un pape différent.

Challenge Petits plaisirs 2017 – 171 pages

Bien qu'athée j'ai apprécié ce livre bien détaillé.

Comme je le disais précédemment, j'ai apprécié ce livre, même si pour moi les religions sont des aberrations car la foi n'a pas besoin d'être dominée par des dogmes quels qu'ils soient. Par contre, je dois dire que je suis pour la première fois agréablement surprise par les actes et les paroles d'un chef religieux qui prône enfin la liberté, l'amour de tous et la Paix. Par contre, j'ai trouvé le début trop longuet car il détaille beaucoup trop le synode, ce qui ne nous apporte pas grand chose au final, sauf pour les catholiques peut-être... Mais heureusement, les choses évoluent en mieux quand on accède aux chapitres suivants qui abordent tous un thème différent.
Par contre, moi qui pensais apprendre de nouvelles choses, j'ai été un peu déçue. En effet, je n'ai rien trouvé de neuf que je ne savais pas encore. C'est bien ainsi que je m'imaginais Le Pape François, et j'étais aussi au courant des diverses transformations et des miasmes putrides qui couvaient au Vatican. de même, je savais combien les dangers et les détracteurs qu'il rencontrait étaient nombreux. En effet, l'Eglise au plus haut est totalement vérolée depuis toujours et il était bon que quelqu'un qui se targue de vouloir faire le bien balance le pied dans la fourmilière. Entre blanchiment d'argent de la part de la banque du Vatican, hauts représentants riches comme Crésus, manipulations, pensées limitées et limitantes, pédophilie et j'en passe, il ne doit pas être simple pour ce Pape de faire le ménage. J'ai d'ailleurs peur pour lui depuis longtemps car les gens honnêtes qui veulent rétablir le Bien disparaissent souvent tragiquement, c'est pour cela que j'espère qu'il aura les soutiens et protections nécessaires pour lui permettre d'accomplir jusqu'au bout cette transformation en profondeur.


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