Citations sur Agatha Christie, tome 1 : Le secret de Chimneys (BD) (11)
- J'ai connu le comte Stylptitch à Paris... Je lui ai sauvé la vie à Montmartre ou des apaches l'avaient attaqué... En souvenir de ce jour mémorable, il m'a envoyé ici le manuscrit...
- ...de ses mémoires ! Mais pourquoi les confier à toi ?
- Le comte est mort il a deux mois. Il comptait publier son livre à Londres, mais n'avait plus confiance en personne. Je dois le remettre en mains propres à son éditeur... En échange de 1000 livres sterling !!
Ce que tout le monde en sait. Pas plus. C’est un des petits États balkaniques, n’est-ce pas ? Capitale : Ekarest. Population composée de brigands pour la plupart. Ces derniers ont l’aimable habitude d’assassiner leurs rois et de faire des révolutions. Le dernier était Nicolas IV, n’est-ce pas ? Assassiné il y a sept ans environ. Depuis, la Herzoslovaquie est une république. Tu aurais dû me dire tout de suite que ton affaire la concerne.
Cette fois, Jimmy accepta le reproche et hâta son récit. — C’était à Paris, il y a quatre ans. Je retournais chez moi, au milieu de la nuit, et je passais par un quartier désert, quand j’aperçus une demi-douzaine de brutes assaillant un vieux monsieur honorable. J’ai horreur des combats où les forces sont trop inégales ; c’est pourquoi je me suis rué sur les bandits.
Oui, il était venu habiter Paris après l’assassinat du roi Nicolas. Plus tard, on lui a proposé la présidence de la République, mais il a refusé. Il est resté fidèle jusqu’au bout à ses principes monarchistes – ce qui ne l’a pas empêché de tremper dans toutes les révolutions qui ont éclaté aux Balkans ! — Le roi Nicolas, c’est bien celui qui avait épousé une drôle de femme ? demanda Jimmy.
Parfaitement, mon vieux. J’espère que ce n’est pas une blague. « Méfiez-vous des politiciens », dit la sagesse des nations. Et pourtant, j’ai foi en celui-là. Il assure, dans sa lettre posthume, que les éditeurs me remettront la somme en échange du manuscrit. Ce dernier a voyagé si longtemps que, si je veux m’en charger, je n’ai pas de temps à perdre. Et pourtant, je préférerais me rendre immédiatement dans la région où se trouve ma mine d’or.
Tout à coup, tu rencontres ce vieux Cade et tu te dis : « S’il allait en Angleterre à ma place pendant que je retourne à ma mine d’or ? » Parlons sérieusement : si j’obtiens ces mille livres, combien toucherai-je là-dessus ? — Que dirais-tu du quart ? — Deux cent cinquante livres net ? — C’est bien cela. — Entendu. Et, pour t’embêter, je te confierai que j’aurais accepté même si tu ne m’en avais proposé que cent ! Toi, Jimmy McGrath avec ta mine d’or, tu mourras un jour à l’hôpital ! — Alors, accepté ? — Je suis ton homme. À bas les autocars Castle ! Ils levèrent leurs verres et burent solennellement à la réussite de leur affaire commune.
Bien sûr. Nous ne nous ressemblons pas le moins du monde, mais notre description rédigée par MM. les fonctionnaires doit être la même : taille, 1,85 m ; cheveux châtains ; yeux bleus, nez moyen, front moyen ; menton moyen… — Je ne suis pas si moyen que ça, s’il te plaît ! Crois-tu que c’est pour rien que la direction des autocars Castle m’a choisi parmi plusieurs concurrents, grâce à mon physique agréable et à mes bonnes manières ? — Oui, oui, on te connaît ! Tu as toujours fait le gentleman.
Pourquoi ce détour ? Je sais que les diplomates ont toujours toutes sortes de raisons pour faire les choses simples de la façon la plus difficile et la plus compliquée qui soit mais, pour qu’on envoie un manuscrit de Paris à Londres via l’Afrique, il doit quand même y avoir une raison plausible ! Si le comte tenait uniquement à t’assurer une somme de mille livres, il aurait pu aussi bien te la léguer par testament ! Ni toi ni moi ne sommes trop fiers pour dédaigner un legs. Stylpitch devait être gâteux.
Les gens de la haute finance, Jimmy. Américaine, juive, catholique, internationale… — Mais tu n’es pas un financier, toi ! Et même si le manuscrit, comme tu parais vouloir l’insinuer, contient des indiscrétions sur la Herzoslovaquie et autre chose, ça ne te regarde pas ! Tu n’as qu’à remettre le paquet à l’éditeur, à empocher les mille livres et à filer.
Si je ne me trompe, rectifia Jimmy, les rois, d’ordinaire, y restent encore moins… — Plus j’y pense, Jimmy, plus cette idée me plaît ! Voilà un peuple vivant et vigoureux, avec lequel on ne risque pas de se rouiller ! Entendu : je passe une journée à Londres pour remettre le bouquin et recevoir la galette, je t’envoie tes sept cent cinquante livres (à moins que jusque-là tu n’aies découvert ta mine d’or ; dans ce cas, j’investirai ton capital dans les pétroles herzoslovaques) et je file par le rapide balkanique ! — Un instant, mon vieux ! Pas si vite ! J’ai encore une petite commission pour toi à Londres