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Citations sur La porte du fond (29)

Christiane Rochefort (1917-1998) : L'écrevisse combattante
sur FRANCE CULTURE le 27/02/2021 59 minutes Émission Toute une vie

https://www.franceculture.fr/emissions/toute-une-vie/christiane-rochefort-1917-1998-lecrevisse-combattante

Rebelle dans l'âme, Christiane Rochefort, sa vie durant, a lutté contre toute forme de domination, pour un monde meilleur. Dans "La Porte du fond" (Grasset, 1988), roman majeur sur l'inceste, prix Médicis l'année de sa parution, on y retrouve sa personnalité dans chaque mot, chaque ligne.
La Porte du fond (Grasset, septembre 1988) est un roman majeur sur l'inceste, couronné par le prix Médicis en 1988, qui décortique la mécanique de l'emprise d'un père sur sa fille, ou comment dire l'indicible par la puissance de la fiction. Derrière chaque mot, chaque ligne, on retrouve la personnalité de Christiane Rochefort qui, sa vie durant, a lutté contre toute forme de domination, pour un monde meilleur.

Écrivaine atypique, elle lui préférait le mot "écrevisse" (parce que "vaine"… vous comprenez, ironisait-elle), elle entra sur la scène littéraire trente ans auparavant en 1958 avec son Repos du guerrier, roman bestseller qui fit l'effet d'une bombe dans la France engoncée de la fin des années 50, récit au scalpel d'une relation dévastatrice adapté au cinéma en 1962 par Roger Vadim avec Brigitte Bardot et Robert Hossein.

Pour celle qui avait rédigé ses mémoires d’une façon inédite (Ma vie revue et corrigée par l’auteur, 1978), tout en entretenant le mystère sur sa vie, raconter son parcours relève du jeu de pistes, entre révoltes et passion pour l'écriture, intimement liées.

Convaincue de toutes les potentialités qu'offre le monde, elle prend position publiquement, contre la guerre d'Algérie et celle du Vietnam, pour le droit à l'avortement (elle signe le Manisfeste des 343), la libre éducation des enfants, etc. Écologiste de la première heure, elle fait partie des pionnières du MLF au sein du groupe de 9 féministes qui déposèrent le 26 août 1970 une gerbe sous l'Arc de triomphe à la femme du soldat inconnu. Une action spontanée, joyeuse, qui marqua les esprits. La voici radieuse face aux policiers qui avaient du mal à comprendre la banderole "Un homme sur deux est une femme".



Dans la vie comme en littérature, Christiane Rochefort est une femme engagée, qui n'a pas peur de déranger, pour questionner son époque. Chacun de ses romans, essais, scénarii est l'occasion de faire avancer ses idées et de combattre les abus de pouvoir : patriarcat, aliénation sociale et société de consommation (Les petits enfants du siècle, 1961), institution du mariage (Les stances à Sophie 1963), poids de l'éducation des enfants (Encore heureux qu'on va vers l'été, Les enfants d'abord, 1976), perversion des utopies (Archaos, 1972), colonisation des esprits et des cœurs.

Son sourire de voyou quand elle vous balançait une vacherie. En plus d’un très grand écrivain, c’était un sacré combattant. Pour ses idées. Parce qu’elle s’était donné la peine d’avoir des idées et de les organiser. Et elle s’est battue pour ses idées avec les armes qu’elle a fourbi toute sa vie, le Roman. Auteur d’une œuvre véritable, d’un univers romanesque complet. Au point que même amies comme nous fûmes, il était difficile de parler d’autre chose que de ses livres ou de littérature." Sophie Chauveau, écrivaine.

On la traite de Gavroche en jupon ? Elle devient la Shéhérazade du stylo, comme elle se qualifie elle-même, retournant l'arme du langage contre l'oppresseur. Elle invente une écriture libre, mordante. C'est l'une des rares auteures à s'interroger sur son propre processus de création (C'est bizarre l'écriture, 1970 et Journal Pré-posthume possible).

Écrivain ce n'est pas une profession, c'est toute une vie, écrit celle qui a traduit avec son amie Rachel Mizrahi le premier livre de John Lennon, régal de "non-sens", sous le titre En flagrant délire (bien avant l'émission de Claude Villers).

En 1988, elle signe donc La Porte du fond, livre pionnier à l'heure du mouvement #MeTooInceste et de la libération de la parole sur le viol et les abus sexuels.

L'oppresseur n'entend pas ce que dit son opprimé comme un langage mais comme un bruit. C'est dans la définition de l'oppression. /…/ Il y a un moment où il faut sortir les couteaux. écrit-elle dans son préambule à l'édition française du "SCUM Manifesto" de Valerie Solanas (1971).

Mon courage est aussi violent que ma peur, avoue-t-elle plus tard en 1986 évoquant son engagement à lutter contre les dominants de tous poils.

Rebelle dans l'âme, Christiane Rochefort a vécu sans se prendre au sérieux tout en s'attaquant à des sujets profonds. Femme indépendante, d'une intelligence vive, elle a toujours privilégié la force de contestation au conformisme moral. Elle nous laisse une œuvre originale, pleine de verve. Sa voix forte et singulière mérite d'être redécouverte aujourd'hui.

Intervenantes
Sophie Chauveau, écrivaine
Martine Sagaert, professeur de littérature à l'université
Aurore Turbiau, doctorante en littérature comparée
Claire Blandin, historienne des médias
Geneviève Brisac, écrivaine
Oristelle Bonis, éditrice
Delphine Naudier, directrice de recherche au CNRS
Orit Mizrahi et Awena Burgess, comédiennes

Un documentaire de Pierre Lorimy, réalisé par Franck Lilin. Prise de son, Ollivia Branger. Archives INA, Véronique Jolivet. Avec la collaboration d'Annelise Signoret de la Bibliothèque de Radio France.
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Car enfin – pour la première fois cette pensée se formait chez moi – ne savait-elle pas ? Et – oh mon dieu ! – n'avait-elle pas toujours su ? Autrement, comment pourrait-elle avancer qu'il y a, dans ma vie, « des choses qu'on ne dit pas » ? Comment pourrait-elle affirmer qu'il se passait dans cette famille des choses dont « on ne parle pas » ?
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Je ne serais pas épouse-et-mère, je m'en fis le serment : j'aurais eu trop peur de donner un père à une fille. À l'en croire (mais peut-on croire un menteur?) le risque était élevé : « pratique courante dans les familles ». Je n'en rencontrais pas les signes autour de moi pourtant. Mais au fait, je n'en montrais pas non plus. Qui en eût cherché n'en eût pas trouvé plus que moi. Je pouvais aussi bien présumer que nous étions une foule. Une foule dont chacun est seul.
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Elle avait écopé un ordinaire papa tringleur, tardif et occasionnel. Repentant en plus. Une fois découvert bien sûr: Marthe, ayant compris qu'il lorgnait vers la sœur puînée, avait héroïquement sauté dans l'arène, semant la pagaille dans la famille. Le truc on peut, vaille que vaille, assumer pour soi. Pour les autres, on ne peut pas.
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Faudrait aussi une échelle dit Ruth, qu'est-ce qui est le plus inceste, l'oncle, ou le frère? Ou le grand'père ? – Je m'en fous de ce qui est le plus inceste. Je m'en fous de l'inceste ! je proclame. – Positif, appuie Jason, décidément présent. Ce n'est pas ça le point. – Ben alors de quoi on cause ? – Dites vous n'avez que des filles dans votre club ? Pour savoir si j'ai droit aussi à la parole, en cas. Et nous laisse le bec ouvert avec notre nanacentrisme : on n'avait pas envisagé des garçons. Il ajoute, au milieu du silence : – Nous aussi on a des pères. Bec ouvert, bis : si des garçons alors, on aurait attendu des mères. Ah le consensus ! honte à nous. J'apporte d'autres bouteilles, pour la relance. Welcome, frère.
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Toujours toute ma vie il faudra que ce soit moi. Que moi je décide, que moi je donne le feu vert, que moi je fasse le premier pas. Si on m'arrive dessus je me barre c'est comme ça, un réflexe, c'est musculaire. Personne n'a le droit de m'approcher sans permission.
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On est tombés tous (me voilà obligée de mettre à l'unisex, eh bien tant mieux, je ne tiens pas au privilège du ghetto) tous d'accord que le malheur n'est pas le sexe. Et pas non plus l'inceste. Le malheur c'est le Patron.
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Ma parole, j'étais vraiment en train de faire une pièce. Titre : La porte du fond. On ne montrera pas, ni ne dira jamais, ce qui se passe derrière. Le public devra trouver. C'est une sorte de pièce policière. Je ne tenais pas encore la fin.
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Finalement je me mettrai plutôt Auteur dramatique, que comédienne. Je voyais déjà, tout au fond du décor, cette porte toujours refermée, derrière laquelle on ne sait pas ce qui se passe. Et devant, tout du trompe-l'œil. A part l'entrée : – Ça va mieux ? – Non.
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Puisque je me trouvais sur les lieux de culte, je songeai à tâter de la confession. Peut-être que ça soulage. Ces gens sont là exprès, ils sont dans le noir, et supposés ne pas cafter. Dans le fond c'est bien conçu. Donc j'entre dans la boîte et si vous n'êtes pas au courant le premier mot à dire c'est : « Mon Père » – merde. Le deuxième : « Pardonnez-moi » – et de quoi s'il vous plaît ! Le suivant : « J'ai péché » – ça va pas non ? Et enfin : « C'est ma faute » – c'est le bouquet ! Alors j'ai glissé discrètement de là et le mec a pas entendu un son.
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