Il s'agit d'une minisérie en 5 épisodes (parus en 2011) écrite par
Robert Rodi et illustrée par
Mike Choi, avec une mise en couleurs de Frank d'Armata. Cette histoire peut être lue indépendamment de la continuité.
À notre époque, sur notre Terre, de violentes tempêtes font rage dans le ciel de Mahanattan. Thor intervient pour essayer de les calmer et de protéger la ville contre les éléments déchaînés. Alors qu'il use de ses attributions de dieu du tonnerre pour infléchir la violence du vent et de la pluie, Zephyr, une déesse du vent (comme son nom l'indique), apparaît, pour disparaître aussitôt. Toujours sous une pluie battante, Heimdall apparaît à son tour à Thor pour requérir sa présence a Asgard (toujours en ruine dans l'Oklahoma après les événements de Siege, en anglais). Une fois sur place, Heimdall explique à Thor que son don de clairvoyance lui a permis de discerner les raisons de ces dérèglements climatiques. Elles se trouvent dans l'espace et la cause en est l'approche d'un immense corps céleste se mouvant par sa propre volonté.
En 2011 sort le film Thor ; dans une optique de synergie potentielle entre le support filmé et le support papier, Marvel multiplie les sorties de comics et les rééditions mettant en scène le personnage. C'est ainsi que
Robert Rodi peut écrire une nouvelle histoire consacrée aux dieux d'Asgard, après
Loki (illustré par Esac Ribid, en 2004) et Au nom d'Asgard (illustré par Simone Bianchi, en 2010). Mais cette fois-ci le cahier des charges de l'éditeur est un peu plus strict : l'histoire doit se dérouler au temps présent, et Thor doit arborer le costume du film, c'est à dire celui imaginé par JM
Straczynski et
Olivier Coipel lors de la relance du personnage en 2007. Rodi s'en tient à ces obligations, tout en envoyant Thor dans l'espace pour lutter contre une planète dotée de conscience : Ego (apparu pour la première fois en septembre 1966, dans "Thor" 132).
Robert Rodi s'amuse avec le personnage de Thor et il écrit une histoire improbable mettant en scène une planète qui parle et un des Aînés de l'Univers (Elders of the Universe), personnages secondaires de la mythologique cosmique Marvel, surtout connus pour avoir détenu les Gemmes de l'Infini (récupérées avec perte et fracas par Thanos pour constituer le gant de l'infini). Dans la première moitié du récit,
Robert Rodi s'en donne à coeur joie avec Thor franchissant le vide spatial marteau en avant, la taille démesurée d'Ego, et même une poche dimensionnelle en forme de tesseract. le lecteur retrouve les aventures à grand spectacle dans l'esprit de
Jack Kirby, avec un petite pincée de science spéculative, et une grosse louche de n'importe quoi scientifique, pour aboutir à des enjeux plus grand que nature et un niveau de divertissement proportionnel au niveau de suspension consentie d'incrédulité.
Fort heureusement, ce tome ne se limite pas à un gros délire cosmique, Rodi y insère quelques touches dont il a la spécialité telles une intrigue secondaire sur les relations amoureuses entre Zephyr et Thor, un créateur ayant perdu contrôle de sa créature, Thor s'échappant littéralement de sa prison grâce à sa nature divine (magnifique moment visuel, grand moment de mise en abyme), et la notion de cycle et de changement (thème récurrent de Rodi appliqué aux mythes et légendes) apparaît en filigrane.
Ce tome est illustré par
Mike Choi qui utilise un style décompressé, au trait très fin, presque des crayonnés, sans encrage. Décompressé, c'est à dire qu'il y a peu d'informations dans chaque case, qu'il y a plusieurs pleines pages et même double pages dans chaque épisode, et que le nombre maximum de cases par page est de 6, avec une moyenne à 3 ou 4. Enfin les passages dans le vide spatiale l'exonèrent de dessiner des décors. Malgré ça, le résultat n'est pas une catastrophe visuelle, il s'avère même parfois convaincant, et souvent séduisant. D'une part
Mike Choi a le sens de la composition pour des pages faciles à lire, mettant en avant le spectacle et incluant assez de détails pour ne pas tomber dans le générique. Vous ne croirez pas à la réalité physique d'une planète présentant un visage et parlant avec une bouche, mais vous pourrez accepter cette représentation littérale d'un concept enfantin matérialisant un sens simple du merveilleux et une imagination divertissante. À la relecture, l'approche graphique utilisée par
Mike Choi évoque fortement celle de
Georges Méliès pour le voyage dans la lune.
Fort heureusement les illustrations de
Mike Choi bénéficient de la mise en couleurs de Frank d'Armata, un professionnel ayant une vision artistique de son travail. Il intègre au vide spatial des camaïeux de bleu nuit le faisant miroiter d'une douce et chaude lueur nocturne. Il assure la continuité chromatique entre Ego vu de l'espace et sa surface planétaire lorsque Thor s'y pose. Il compose plus de la moitié visuelle de la scène d'évasion de Thor de sa prison en forme de tesseract, rendant palpables les énergies mises en jeu par la divinité de Thor. Il confère une douce luminescence au vaisseau de l'Aîné. Il nimbe d'une superbe lumière le moment d'intimité entre Zephyr et Thor dans le dernier épisode.
Du fait d'impératifs éditoriaux,
Robert Rodi délaisse Asgard et met en scène Thor comme protecteur de la Terre. Il construit un récit beaucoup plus léger que les 2 premiers ("
Loki" & "Au nom d'Asgard"), pour un sympathique divertissement recelant plusieurs bribes des thématiques développées dans les 2 premiers. Les illustrations sont également un cran en dessous en ce qui concerne la minutie et la force. Mais elles portent la majesté du récit cosmique et elles sont admirablement complétées et enrichies par une mise en couleurs sophistiquée. le récit suivant écrit par
Robert Rodi pour Thor est La saga des Déviants (illustré par
Stephen Segovia, 2012).