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EAN : 9782226015556
Albin Michel (01/01/1970)
4.12/5   38 notes
Résumé :
De même que les oiseaux pressentent l'orage, les juifs de Rakwomir, petit village russe au tournant du siècle, devinent à certains signes que les persécutions antisémites, un instant suspendues, vont recommencer. Alors ils quittent clandestinement la Russie seuls ou par familles entières. Laissant les siens au village, Yankel Mykhanowitzki part pour la France où « tous les hommes sont libres et égaux en droit ». Trouver du travail, faire venir sa famille, voilà son ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (11) Voir plus Ajouter une critique
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De la Russie à la France, en plein coeur de la tourmente de la première moitié du XXème siècle, cette formidable saga familiale retrace le parcours de Yankel Mykhanowitzki (surnommé à son corps défendant Mr Mica) et de sa famille sur trois générations.

Quand je pense que ce livre a reçu le prix Goncourt en 1955 et que l'auteur m'était complètement inconnu! Initialement constitué de 2 volumes : La greffe de printemps (1898 - 1914) et les eaux mêlées (1914-1950 et des poussières), ils sont souvent réunis en un seul volume dans les rééditions actuelles. Même si les 2 parties peuvent être lues de manière indépendante, je vous conseille: 1/ de lire les deux, et 2/de les lire dans le bon ordre. Pas comme moi ! Les lire dans le désordre donne peut être un coté flashback intéressant, mais cela créé aussi quelques redondances superflues.

Les pogroms et les persécutions à l'encontre des juifs décident le jeune homme de 22 ans, marié et papa d'une petite fille, à fuir sa Russie natale pour venir s'installer en France, le pays des droits de l'homme... pense t il(!). "Ton pays natal te traitait en étranger, Yankel, en paria, Yankel ! Tu haïssais ce pays arriéré et sauvage. Tu l'as quitté en pleine conscience, en pleine conscience tu t'es choisi la France comme patrie, la France, le pays de la liberté, de la dignité humaine, qui t'offrait de te tenir debout, droit ! " Y trouvera-t-il ce qu'il recherche pour lui et sa famille ?

Yankel est le fil conducteur de cette histoire. C'est un personnage attachant, l'esprit toujours en ébullition. Il s'interroge sans cesse sur le comportement des hommes et le statut d'étranger. Son souhait obsessionnel est de devenir français mais ce n'est pas si simple. Et cela le sera encore moins quand sa femme, sa fille, et une partie de la famille le rejoindront par la suite. Les attentes de chacun doivent cohabiter et ne facilitent pas toujours l'intégration que souhaiterait Yankel. le fossé va aussi se creuser entre ceux nés en Russie et ceux nés en France. Mais un fossé, ça peut se combler en quelques pelletées, avec un peu de bonne volonté...

L'écriture est plutôt contemporaine, tantôt grave, tantôt légère. L'auteur parvient à instaurer un climat feutré et intimiste empreint de sincérité, avec des touches d'humour qui dédramatisent les situations difficiles. Étant lui-même fils d'une famille juive, lituanien par son père, polonais par sa mère, il y a certainement une part autobiographique dans ce récit. Nous évoluons donc aux côtés de cette famille, immergés dans les pensées et les réflexions de chacun. Dans cette période et ce contexte plus que troublés- on s'en souvient, en 1898, l'année ou Yankel arrive en France, l'affaire Dreyfus bat son plein, et Zola vient de publier son pamphlet 'j'accuse!' Et je n'évoque même pas les guerres qui vont suivre! - on pourrait attendre une histoire centrée sur l'antisémitisme, mais c'est surtout un livre sur l'immigration et les répercutions au sein du noyau familiale; un livre sur l'exil, l'intégration, l'assimilation, le poids des différences culturelles et générationnelles, des traditions, de la religion; un livre qui retrace la vie d'une famille comme toutes les autres, dont le désir le plus cher est de pouvoir vivre - et non survivre - sereinement et dignement, et d'assurer à ses enfants la possibilité d'accéder à une vie meilleure, la vie de leur choix. En ce qui me concerne, une belle découverte! Me reste à voir ce fameux téléfilm de 1969 que j'ai vu mentionner dans d'autres billets, étonnamment peu nombreux....
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C'est en contemplant les eaux opaques de la Seine au mois de Décembre qu'un souvenir a fait surface : la découverte d'un auteur lors de l'adaptation télévisuelle de l'oeuvre qui lui a valu le prix Goncourt en 1955, Les eaux mêlées de Roger Ikor. Séduite à l'époque par le propos et son interprétation, j'ai tenté à nouveau l'aventure, modifiée par les décennies écoulées, qui mettent à distance le contexte mais aussi remanient la sensibilité du lecteur. il ne me restait que deux souvenirs précis de ce roman : la découverte des frites par Yankel(!) et la correction que reçoit son fils pour avoir accusé d'antisémitisme son prof, un dénommé Lévy…

Voilà donc le propos : à la fin du dix neuvième siècle, Yankel fuit les pogroms qui mettent à mal la communauté juive de Rakwomir, en Russie. Via l'Allemagne, la fin du voyage se fait à Paris : la fin d'un rêve, avec ses désillusions mais aussi ses bonnes surprises. Ce jeune homme de vint-deux ans se pose mille questions à la minute, pour essayer de comprendre la vie qu'il découvre, pour s'interroger sur sa façon d'être, pour essayer de sortir du ghetto dans lequel se complaisent nombre de compatriotes arrivés depuis plus longtemps que lui. C'est difficile, la langue, les coutumes, la solitude, la judéité, sont autant d'obstacles pour une intégration. Lorsque sa femme le rejoindra après plusieurs années : le but est atteint mais le questionnement est toujours là. Et ce n'est pas l'arrivée d'une deuxième génération qui apaise les choses.

Cette saga familiale s'étend sur toute la première moitié de vingtième siècle, avec ses deux guerres, et la montée progressive de l'antisémitisme avec l'issue que l'on connaît. Si le sujet est abordé, c'est en filigrane, car l'auteur centre ses réflexions sur l'assimilation progressive d'immigrants, qui auraient être originaire de toute autre contrée exotique, et cheminer de la même façon. Au coeur du flux de ces eaux qui se mêlent, existerait t-il une mémoire de l'eau, pour qu'après plusieurs générations, le sentiment d'un ailleurs originel soit encore présent?

Même si le récit est à la troisième personne, on a le sentiment de suivre la logique interne des différents personnages, et de s'immiscer au coeur de leur réflexion.

Le téléfilm diffusé en 1969 est dispo sur l'INA : ma chronique sera révisée après l'avoir revu.
Lien : http://kittylamouette.blogsp..
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C'est par son adaptation pour la télévision par Jean Kerchbron que j'ai découvert en 1969 cette saga sur plusieurs générations d'émigrés juifs russes à Paris.
C'est d'abord Yankel fuyant les pogroms russes vers 1900 qui arrive, bientôt rejoint par sa femme, sa fille et ses parents… ses frères et soeurs : c'est "La greffe de printemps » qui constitue la première partie du diptyque qui, avec « Les eaux mêlées » constitue « Les fils d'Avrom ».
Yankel est un forcené de l'intégration, il deviendra français à part entière, clame-t-il… Français de la France, la république où les hommes naissent égaux.
C'est sans compter sans l'inertie de sa famille qui freine des quatre fers, arc-boutée sur les traditions avec l'approbation d'Avrom, le patriarche, père de Yankel… Une famille installée à proximité immédiate d'un quartier juif plus prompt à reproduire la culture ashkénaze que de s'intégrer vraiment.
C'est par Simon, son fils que son rêve se réalisera ; et le mariage de Simon Mykhanowitzki avec Jacqueline Saulnier, issue d'une vieille famille française. Nous sommes ici dans le deuxième volet des « Fils d'Avrom », « Les eaux mêlées… sur une période des années trente à cinquante. Des années traversées par la deuxième guerre mondiale.

Un livre alerte et émouvant, traversé de traits d'humour, mettant en lumière la grande difficulté de l'intégration dans le pays d'accueil d'étrangers à la culture foncièrement différente et rassemblés entre eux… Un thème d'actualité.

Condisciple de Georges Pompidou en khâgne avec qui il restera très lié, élève et professeur de lettres au lycée Condorcet , en juin 1940, Roger Ikor est fait prisonnier de guerre et déporté en Poméranie. le suicide de son fils, adepte du « Zen macrobiotique » lui fera mener une guerre sans merci contre les sectes notamment en fondant le « Centre Contre les Manipulations Mentales »…
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Deux jours ,plongée dans ce pavé (702 pages) au détriment des préparatifs de noël mais tant pis!!
Remarquable saga, j'ai rit ,et pleuré au côté de Yankel Mykhanowitzki, personnage central du roman.
Fuyant les pogroms ravageant la Russie à la fin du 19ème siècle, le jeune casquettier Yankel quitte sa femme Hanné et sa petite fille via Paris où là, il va devoir faire preuve de beaucoup de pugnacité pour devenir vraiment français, son souhait le plus cher et se fondre dans la masse.
Une histoire superbement écrite soulevant beaucoup de questions autour de l'émigration,le brassage des peuples d'ou le titre: les eaux mêlées.
Une foule de personnages " haut en couleurs" gravitent autour de Yankel que nous suivrons sur plus de 50ans.
Un gros coup de coeur que ce roman ,à placer pour moi au côté d'Ernst Wiechert .⭐⭐⭐⭐⭐
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Magnifique roman et un Goncourt 1955 d'un auteur trop méconnu. J'ai beaucoup apprécié cette saga d'émigrés juifs russes venus, au début du XX° siècle s'installer en France, pays des lumières pour fuir les pogroms. On va suivre la vie de Yankel, de ses frères et de son fils Simon au cours des décennies, et comprendre avec eux les questions de différences culturelles, d'intégration ou d'assimilation. Celles et ceux qui ont apprécié l'art de perdre d'Alice Zeniter devraient aimer également ce roman, même s'il s'agit évidemment d'une autre époque et d'une autre migration.
Je découvre à la fin de ma lecture qu'il s'agit en fait du tome 2 d'une saga mais cela ne m'a pas posé problème et il peut se lire sans que l'on ait commencé par la greffe de printemps.
Humanité, tolérance, bienveillance, humour sont au rendez-vous, servis par une belle écriture.
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Citations et extraits (21) Voir plus Ajouter une citation
Devant lui, vaste et souple comme la mer, une forêt moutonnait jusqu’aux collines de l’horizon. Au bas de la falaise, presque à portée de bond, semblait-il, tant la pente était à pic, la Seine s’étirait, se prélassait, bien à l’aise dans son lit bien large ; elle prenait tout son temps pour arrondir son cours, on la sentait heureuse de flâner dans ce pays, et pas du tout pressée d’en sortir. Avec une indulgence paresseuse et maternelle, une espèce de volupté de femme grasse, elle accueillait ces péniches épaisses comme des troncs d’arbres, et ces petits bateaux à voile qui faisaient si gentiment joujou.
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Les eaux mortes, les eaux vives ; les eaux croupissantes, les eaux renouvelées, brassées, mêlées ; mêlées, brassées, renouvelées comme cette foule que voici et qu’on appelle le peuple de France… Qui refuse le mouvement et ses périls s’étiole, dégénère et meurt. Les abeilles essaiment, les oiseaux, les poissons émigrent ; le rosier transplanté se renforce. Où ne souffle aucun vent, où ne coule aucune eau neuve, la vie s’éteint. Étranger ? Quel être vivant ne fut pas un jour l’étranger de quelqu’un quelque part ?
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Il avait l’impression qu’en ce lieu privilégié, l’homme et la nature opèrent leur mariage le plus heureux. L’homme maîtrise la nature, mais ne la viole pas, elle reste souveraine en ce fleuve majestueux, en ce vaste paysage d’eau, de pierre, de fer, et d’arbres. Usines, maisons, machines, bateaux, toutes les œuvres humaines baignent ici dans lumière et nourrissent la joie la plus exaltante qui soit, celle de la création saine et libre. Dans la ville, au contraire, tout est mornement frénétique, tout grouille, tout pue, car la nature y a été tuée.
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Pourquoi, mais pourquoi les hommes sont-ils si méchants ? Pourquoi s’acharnent-ils à massacrer la vie qui pourrait être merveilleusement bonne ? Satan conduit le bal, comme dit la chanson, et les génies de l’humanité, les Tolstoï, les Gandhi, les Victor Hugo, parlent dans le désert, parmi les ricanements des hyènes…
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Que représentent les frontières, sinon des lignes imaginaires tracées par la folie humaine ? Tolstoï l’a bien dit, les hommes sont partout les mêmes, et seule la société établit entre eux dès barrières artificielles.
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Video de Roger Ikor (3) Voir plusAjouter une vidéo

Le prix Goncourt 1955
Armand LANOUX évoque le testament des Goncourt. Insert=la remise du prix Goncourt en 1955 a Roger IKOR- déjeuner chez drouant-Bernard BUFFET dessinant les membres du jury.
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