AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
EAN : 9782940358861
348 pages
Héros-limite (23/10/2013)
3.6/5   5 notes
Résumé :
Dans le Moscou des années 1920, le régime communiste s'est installé en balayant brutalement le précédent. Hyppolite Kisliakov, conservateur des antiquités au Musée central, doit composer entre son attachement au monde ancien et la nouvelle politique du directeur. Publié en 1930, ce roman dévoile la vie sociale et politique moscovite durant la révolution soviétique.

Lire Camarade Kisliakov jusqu’au bout, il le faut absolument, car c’est à la dernière p... >Voir plus
Que lire après Camarade Kisliakov : Trois paires de bas de soieVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Pour pouvoir prendre la mesure d'un système de domination, quel qu'il soit, il faut pouvoir disposer d'un recul, pouvoir regarder ses effets de l'extérieur. Mais c'est précisément en retirant au plus grand nombre cette liberté de prendre du recul, grâce à la pression de l'immédiateté et du quotidien, que s'établit véritablement la domination. La domination n'a pas vraiment besoin que l'on adhère à ses « idées », il lui suffit d'amener progressivement la majorité à y participer ; par crainte ou par nécessité.
Sebastian Haffner, dans son « Histoire d'un allemand », qui date de 1939, résuma ainsi très bien « l'adhésion » au nazisme : « On se mit à participer - d'abord par crainte. Puis, s'étant mis à participer, on ne voulut pas que cela fut par crainte, motivation vile et méprisable. Si bien qu'on adopta après coup l'état d'esprit convenable. »
Ce roman de Panteleïmon Romanov a été écrit entre 1927 et 1930. La bureaucratisation étatique issue du bolchévisme a alors pris le contrôle d'une grande part de la vie sociale en Russie, avant même que la terreur stalinienne ne prenne toute son ampleur dans les années qui suivront. L'intelligentsia, au sens culturel du terme, voit alors constamment se réduire ses marges de manoeuvre. Ses revendications de liberté créative et de pensée sont moquées et assimilées à un comportement petit-bourgeois s'opposant aux lignes directives du parti qui se conçoit lui-même comme unique représentant légitime de l'intérêt général. Ce même parti qui décide de l'attribution d'un logement mais aussi de l'obtention d'un emploi, de la publication d'une oeuvre et des ressources qui lui sont liées.
Tout ce monde représentatif de la culture russe d'alors, dont la remarquable richesse créative avait été en grande part libérée par la révolution de 1917, se trouvait désormais dans la très désagréable situation de, soit renoncer à tout ce qui donnait sens à sa vie dans son expression même, soit de s'aligner aux exigences du parti et à sa vision absurde d'un art prolétarien complétement réifié par l'idéologie. Ce qui d'un point de vue créatif revenait au même mais qui, pour la seconde option garantissait une survie matérielle devenant très incertaine pour la première.
Dans la période des années 30 qui suivra, on verra donc les médiocres «s'adapter», les autres faire silence, les plus obstinés prendre la direction des camps ou être carrément assassinés par la police politique ; et toute la culture russe disparaître - (à l'exception de la musique dans des conditions particulières).
« Camarade Kisliakov » met en lumière le prix de cette adaptation, si l'on peut dire. Jusqu'à ce que la signification de son étrange sous-titre, « Trois paires de bas de soie », vous saute à la gorge.
S'intégrer, s'adapter, participer qu'ils disent toujours ; mais à quoi ?
Commenter  J’apprécie          50
Dans les années 20 à Moscou, après la chute du Tsar, des bouleversements se produisent petit à petit. Hippolyte Kisliakov, fait partie de l'intelligentsia et travaille dans un musée. Marié à Elena, ils vivent dans une chambre au sein d' un appartement communautaire avec une de leur tante mais ont bien du mal à supporter l'ambiance qui règne dans cet appartement. En effet, ils se sentent épiés par leurs voisins (pour la plupart des ouvriers) etsi l'un d'eux a quelques richesses, il s'évertue à les cacher aux autres pour ne pas être dénoncé.
Puis au travail, l'ambiance commence aussi à changer avec l'arrivée des komsomols qui ne voient pas d'un bon oeil la rétention des oeuvres dans un musée pour ne la laisser à la portée que de quelques privilégiés.D'ailleurs, ils ne comprennent même pas l'intérêt d'afficher des tableaux de peinture, etc
Kisliakov lui, sent que le vent va tourner et change son fusil d'épaule en se faisant proche des komsomols et en voulant être leur ami afin de ne pas finir renvoyé à l'instar de certains de ses collègues. Il finit d'ailleurs par ne plus s'émouvoir du renvoi de ses collègues avec lesquels il travaillait et collabore avec l'un des komsomols pour donner une nouvelle fonction au musée et y introduire d'autres "oeuvres".
Puis, son plus vieil ami, Arkadi, la quarantaine revient à Moscou avec une jeune femme qu'il aime, Tamara.
Kisliakov va donc découvrir la bien-aimée de son ami d'enfance, puis ce qu'est le rôle des komsomols, leur façon de penser.....
Mais peut-il y avoir de grands bouleversements sociétaux sans que des têtes ne tombent et sans que les uns ne trahissent les autres ou ne se trahissent eux-mêmes ?

Dans ce roman la description de la vie au musée, de l'appartement communautaire est très bien faite et l'on imagine aisément les scènes et les personnages. D'ailleurs l'appartement communautaire est en lui seul une scène de théâtre ! Les personnages sont assez pittoresques de par leur physique pour s'en faire une image. Tous les événements de la fin font vraiment réfléchir. Cependant, il m'a manqué quelque chose pour que je sois conquise par ce roman, pour qu'il m'émeuve. C'est bien dommage car j'aime beaucoup les auteurs russes.

Commenter  J’apprécie          10
Ce roman manque d'un peu de dynamique, c'est dommage, bien qu'il nous tienne en haleine. En effet, l'incipit nous dit : « L'enquête sur le drame de la rue des Jardins, survenu le 1er octobre dans l'appartement du scientifique Arkadi Neznamov, ne put établir s'il s'agissait de meurtre ou de suicide. » et il nous faudra attendre la fin du roman, soit plus de 300 pages, pour savoir ce qui c'est passé.
Et pendant tout ce temps, Panteleïmon Romanov nous raconte les évènements qui se sont déroulés à Moscou pendant les années 1920 : un nouveau régime qui s'installe, balayant brutalement le tsarisme ; le communisme qui transforme de fond en comble le tissu de la société russe ; la vie dans les logements communautaires avec sa promiscuité ; la peur et l'angoisse des personnages qui se débattent pour survivre aux épreuves quotidiennes ; la crainte de perdre leur travail, leurs amis s'ils ne s'adaptent pas aux nouvelles règles. Hyppolite Kisliakov, conservateur de musée, se trouvera confronté à la prolétarisation forcée du personnel et à la perte d'ambition du musée destiné désormais à servir d'illustration à la Révolution prolétarienne. Et ceci avec toutes les conséquences qui ne manqueront pas de se répercuter sur sa vie privée.
«J'ai écrit […] le dernier chapitre de l'histoire de l'intelligentsia», disait Panteleïmon Romanov, dont le roman est bien la chronique tragico-satirique de ce crépuscule.
Commenter  J’apprécie          40

Citations et extraits (6) Voir plus Ajouter une citation
Une conversation intellectuelle sur l'individu, sur ses aspirations était impossible. Depuis que le mensonge s'était glissé dans sa vie, ce genre d'échanges avec les femmes était devenu impossible, car ils lui rappelaient une fois de plus ce qu'il avait envie d'oublier. Mais la femme exige toujours que l'homme ait une consistance intérieure, qu'il s'enflamme, qu'il ait un objectif, une oeuvre. Elle veut toujours du spirituel dans la relation. Il faut donc en parler avec elle.
Commenter  J’apprécie          70
Il était attiré par la Sibérie. Construire là-bas voulait dire plus que construire : vaincre le désert et créer une nouvelle région.
Pendant la guerre, il avait réalisé une mission importante avec une énergie et une rapidité extraordinaire, et à partir de ce moment-là il avait compris sa vocation. La confiance que son entourage plaçait dans son talent avait une grande influence sur lui, décuplant ses forces.
Commenter  J’apprécie          50
- Cà va mal, mon vieux. Ici, c'est la même chose. On travaille uniquement pour manger, car comme tu l'as dit justement, il n'y a pas d'idée. Notre idée est morte, et une idée imposée par d'autres ne saurait faire naître la foi. Comment y penser en sachant parfaitement qu'on n'a pas d'avenir ?
Commenter  J’apprécie          70
Sur le trajet de la maison, Kisliakov brûlait d'impatience, pressé de jouir de sa solitude. Il était las de ne pouvoir jamais rester en tête à tête avec lui-même. Mais une fois dans sa chambre, en s'approchant de sa bibliothèque, il sentit soudain, à la vue des livres, un certain ennui. Il n'avait rien à faire avec lui-même. Il n'éprouvait pas le besoin de prendre un livre. La pièce vide ne le réjouissait pas, le silence lui pesait, il avait envie de sortir.
Sans doute, à force d'être longuement interrompu, tout mouvement intérieur s'était arrêté en lui.
Il en avait perçu depuis longtemps les symptômes menaçants : il ne pouvait plus rester seul une heure, il avait envie de sortir dans la rue, d'aller au théâtre comme si cet arrêt de la vie intérieure le rendait en permanence dépendant des stimulations extérieures.
Commenter  J’apprécie          10
- "Ami, ça veut dire quoi" ?
- Tu étais tout le temps avec lui.
- Tout le temps...La charrette reste tout le temps avec le cheval, peut-on en conclure qu'ils sont amis" ?
Commenter  J’apprécie          40

autres livres classés : littérature russeVoir plus
Les plus populaires : Littérature étrangère Voir plus


Lecteurs (14) Voir plus



Quiz Voir plus

La littérature russe

Lequel de ses écrivains est mort lors d'un duel ?

Tolstoï
Pouchkine
Dostoïevski

10 questions
437 lecteurs ont répondu
Thèmes : littérature russeCréer un quiz sur ce livre

{* *}