Achevé en 1966, ce roman inédit passe à merveille l'épreuve du temps. Mieux, il est totalement tendance. [...] Avec sa romance amoureuse, pour le côté légèreté, et sa quête d'un passé fantasmé, pour la réflexion spirituelle, Rencontre est un récit d'aujourd'hui.
Lire la critique sur le site : LeFigaro
eh oui ! quand on est jeune ( mais non, soyons précis : il faut dire "Quand on est jeune et gâtée, jeune et égoïste, jeune et assez sotte pour vouloir faire coïncider sa vie avec des clichés dont on ne sait d'où on les tient")
- quand on est tout cela, on n'a ni assez de confiance dans les évidences muettes pour s'en contenter, ni assez de défiance dans sa propre action pour savoir attendre. Alors on essaie de faire pression. On tend de petits pièges cousus de fil blanc pour obliger l'autre à se déclarer.
Mais si l'autre a une raison de ne pas le faire ?
"Ce n'est pas pour moi !" Voilà le genre de réflexions avec lesquelles on gâche sa vie, pense Anne. On écarte de sa vie le velours cramoisi, l'homme ardent et instable; et l'on se retrouve seule dans un studio banal. Car le pire est sans doute qu'en se disant "ce n'est pas pour moi", on se construit artificiellement des goûts et des habitudes fondés sur ceux que l'on prête à la masse et à la moyenne. On laisse à d'autres les audaces, parce que l'on se dit que le velours cramoisi sera critiqué et que l'on aura pas le courage de l'aimer encore malgré les critiques. Et on rejette un homme qui n'est pas comme les autres, parce que l'on devine que l'on ne saura plus l'admirer quand des amis auront l'air de vous plaindre, ni l'accepter comme il est, s'il s'écarte par trop de ce que vos parents auraient accepté.
Il est trop tôt, puis trop tard. On est trop jeune, et déjà trop vieux.
Comme les débris que charrie mollement le fleuve, on flotte, on se rencontre, on se sépare et on s'en va tout seul, au gré du courant.
Elle voudrait réfléchir. Mais il est trop tard. Et il semble soudain à Anne qu'elle a passé sa vie entière à réfléchir - à réfléchir en vain, à côté, inutilement, à réfléchir au lieu de vivre.
Elle voulait réfléchir. Mais il est trop tard. Et il semble soudain à Anne qu'elle a passé sa vie entière à réfléchir - à réfléchir en vain, à côté, inutilement, à réfléchir au lieu de vivre. Étonnée, elle s'entend murmurer docilement : On verra bien.
Affinités électives. Par Francesca Isidori - Avec Jacqueline de Romilly. Le 10 mai 2007, Francesca Isidori recevait la femme de lettres Jacqueline de Romilly pour l’émission “Affinités électives”, diffusée sur France Culture. Photographie : Jacqueline de Romilly © AFP Alexandre Fernandes. Née à Chartres, en 1913 (fille de Maxime David, professeur de philosophie, mort pour la France, et de Jeanne Malvoisin), elle a épousé en 1940 Michel Worms de Romilly. Elle a effectué sa scolarité à Paris : au lycée Molière (lauréate du Concours général, la première année où les filles pouvaient concourir), à Louis-le-Grand, à l'École normale supérieure de la rue d'Ulm (1933), à la Sorbonne.
Agrégée de lettres, docteur ès lettres, elle enseigne quelques années dans des lycées, puis devient professeur de langue et littérature grecques à l'université de Lille (1949-1957) et à la Sorbonne (1957-1973), avant d'être nommée professeur au Collège de France en 1973 (chaire : La Grèce et la formation de la pensée morale et politique).
Du début à la fin, elle s'est consacrée à la littérature grecque ancienne, écrivant et enseignant soit sur les auteurs de l'époque classique (comme Thucydide et les tragiques) soit sur l'histoire des idées et leur analyse progressive dans la pensée grecque (ainsi la loi, la démocratie, la douceur, etc.). Elle a également écrit sur l'enseignement. Deux livres sortent de ce cadre professionnel ou humaniste : un livre sur la Provence, paru en 1987, et un roman, paru en 1990.
Après avoir été la première femme professeur au Collège de France, Jacqueline de Romilly a été la première femme membre de l'Académie des inscriptions et belles-lettres (1975) et a présidé cette Académie pour l'année 1987.
Elle est membre correspondant, ou étranger, de diverses académies : Académie du Danemark, British Academy, Académies de Vienne, d'Athènes, de Bavière, des Pays-Bas, de Naples, de Turin, de Gênes, American Academy of Arts and Sciences, ainsi que de plusieurs académies de province ; et docteur honoris causa des universités d'Oxford, d'Athènes, de Dublin, de Heidelberg, de Montréal et de Yale University ; elle appartient à l'ordre autrichien “Ehrenzeichen für Wissenschaft und Kunst” et a reçu, en 1995, la nationalité grecque et est nommée, en 2001, ambassadeur de l'Hellénisme.
Elle a aussi reçu de nombreux prix : Prix Ambatiélos de l'Académie des inscriptions et belles-lettres(1948), prix Croiset de l'Institut de France (1969), prix Langlois de l'Académie française (1974), Grand prix d'Académie de l'Académie française (1984), prix Onassis (Athènes, 1995). Ella est élue à l'Académie française, le 24 novembre 1988, au fauteuil d'André Roussin (7e fauteuil). Son dernier ouvrage : “Tragédies Grecques au fil des ans” paraîtra en juin 2007 aux éditions des Belles Lettres. Il s'agit d'un recueil d'études sur la tragédie grecque du dernier tiers du Ve siècle av. J.-C. et ses rapports avec les mouvements intellectuels athéniens.
Jacqueline Worms de Romilly, née Jacqueline David le 26 mars 1913 à Chartres et morte le 18 décembre 2010.
Invitée : Jacqueline de Romilly
Source : France Culture
+ Lire la suite