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3,4

sur 183 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
«  Il n'y a que deux puissances au monde, le sabre et l'esprit : à la longue, le sabre est toujours vaincu par l'esprit », cette constatation de Bonaparte hante Daniel Rondeau qui suit ses traces à Malte et en Egypte, et médite sur la destinée d'Alexandre le Grand et Frédéric Barberousse.

Primé par l'académie française en 2017, cet essai exigeant demande un réel effort au lecteur mais l'éclaire sur les rapports entre les deux rives de la Méditerranée, les conflits opposant les croyants, les traces laissées par les luttes coloniales et les menaces actuelles.

Ambitieux, ce roman brasse une multitude d'acteurs, sur deux continents dans un espace temps débutant le 8 mai 1945 à Sétif qui permet de suivre deux générations, celles des pères luttant pour rejeter les français à la mer et celles de leurs enfants revendiquant le droit à devenir français. Une génération de laïcs turcs engendrant une génération d'islamistes avec pour seul lien … la corruption.

Daniel Rondeau fut ambassadeur de France à Malte de 2008 à 2011 (nommé par Bernard Kouchner, sous la présidence Nicolas Sarkozy) où il était aux premières loges pour observer le chaos en Syrie et en Libye puis les trafics déversant en Europe, depuis les cotes libyennes, des armes, des drogues et des être humains. Cette expérience donne à ses pages un bouleversant réalisme pimenté de violence.

Alternant réflexion historique, méditation philosophique, observation archéologique, intrigue policière, romances amoureuses, cet ouvrage est une mécanique dont les multiples rouages nécessitent de l'attention mais ne laisse pas le lecteur indemne.

Le sabre est toujours vaincu par l'esprit … mais notre Europe est elle inspirée par un esprit autre que mercantile ?

« Le pire n'est pas toujours sur ; le ciel t'entende » conclut l'académicien.
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Ce roman est assez particulier car d'une certaine manière je crois que son auteur avance masqué. C'est essentiellement un thriller à plusieurs voix.
Le contexte : notre société soi-disant en guerre contre le terrorisme.
Les lieux : côté négatif : les cités, la Libye, côté positif : Malte, le quartier général secret d'un service de la DGSE.
Les acteurs : innombrables et ratissant large : flic en mal-être, diplomate jouant double ou triple jeu, archéologue à la limite de la pédophilie, prostituée désabusée mais jeune et belle et aristocratique, djihadiste allumé, indic surdoué, caïd de la drogue, chargé d'affaire espion etc etc...
Voilà, c'est un peu le point faible de ce livre : il y a trop de personnages, tous brossés forcément hâtivement, même si c'est suffisant pour en percevoir la complexité.
C'est en fait un faux thriller. Délibérément construit ainsi. Car c'est justement la réflexion sur les motivations des uns et la non-motivation des autres qui est mise en exergue par l'auteur : il n'y a pas réellement de personnage détestable dans cette galerie protéiforme : que des solitudes baladées par la vie... Enfin pas seulement...
Dans ce bestiaire disparate, une figure sort du lot. Une seule.
En refermant le livre, je n'ai pas pu m'empêcher de rapprocher ce roman d'un essai de Michel Onfray sur notre société occidentale qui n'a plus de boussole idéologique.
Je crois que ce livre en brosse un portrait parmi d'autres possibles.
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Un roman dont la lecture requiert beaucoup de concentration ! Malte, la Tunisie, la Libye, la banlieue parisienne, l'auteur nous entraine dans des pays – hauts lieux stratégiques - où se côtoient islamistes, délinquants, hommes d'affaires et diplomates.
C'est autour du narrateur - Sébastien Grimaud, archéologue d'une soixantaine d'années - que l'intrigue se tisse. Il vit avec Rim, une jeune femme tout juste sortie de l'adolescence, en Tunisie et se laisse approcher par le fils d'une de ses anciennes connaissances pour évaluer des antiquités d'Irak et de Syrie, sorties illégalement du territoire pour être vendues à de riches collectionneurs dans le monde entier. Ecoeuré par ce commerce, amoureux qu'il est de l'Histoire et de ses héritages, il compte bien dénoncer ces agissements aux autorités concernées.
C'est le point de départ d'une course haletante pour identifier des terroristes et déjouer des attentats. Daniel Rondeau nous fait sauter d'un pays à l'autre, d'un personnage à l'autre (et ils sont nombreux !) avec de courts chapitres qui rythment efficacement le roman : on est entraîné dans ce tourbillon, attristé de la réalité dépeinte : islamisation des cités qui fleurit sur l'humiliation faite aux parents des jeunes radicalisés ; argent sale et complaisance (ou angélisme) des hommes politiques, vies détruites par une violence sociale et économique sans limite. On ne découvre rien mais l'habileté de l'auteur à mettre en lumière les faits, les liens, les stratégies rend le tableau éprouvant. Tout est dans le titre du roman (que j'aime beaucoup) ; un monde empli de bruits, de confusion et de désordre.
Certains des personnages sont terriblement attachants - Habiba, Harry, Bruno - et on espère au fil des pages une issue heureuse à la triste aventure dans laquelle ils sont embarqués. Tous les ingrédients sont réunis pour que ce thriller politique se lise de façon addictive.
Pour autant, ce n'est peut-être pas la lecture détente dont on aurait besoin en cette période inédite de confinement 😔!
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Une archéologie de notre époque finissante, puisqu'elle a égaré le secret de la vie.
Tout commence avec une citation d'Honoré de Balzac tirée de son roman « le père Goriot » « Ah! sachez-le: ce drame n'est ni une fiction, ni un roman. All is true, il est si véritable, que chacun peut en reconnaître les éléments chez soi, dans son coeur peut-être. » Si les personnages crées par Daniel Rondeau sont de pures fictions, la loi de la jungle devenue mondiale est bien réelle, et le tableau qu'il en tire, est apocalyptique. On ne veut pas croire que nous campons sur une bombe à retardement, entre « Soumission » de Houellebecq et « Katiba » de Rufin. Sur fond de chaos intégral : culturel, langagier et comportemental. 1984, d'Orwell, à côté de cela passe pour une lecture académique. Mécaniques du chaos a obtenu le Grand Prix du Roman de l'Académie Française 2017.
Grimaud, le narrateur principal est un archéologue spécialiste de Leptis Magna, une des villes importantes de la république de L'ancienne Carthage, déclarée Site du patrimoine mondial de l'UNESCO en 1982. Grimaud est porteur des multiples expériences de l'écrivain et de l'ancien diplomate. Son moteur personnel est fait de plusieurs facettes qui raniment le courage, la probité, l'émerveillement, la joie et l'énergie. Laissant la truelle et le pinceau, à lui de rebâtir une fresque de notre époque, sorte de tapisserie où l'on prend de plein fouet la vue d'ensemble mais aussi les mille et un détails. En particulier, un de ces « détails » de l'HISTOIRE qui a sombré dans l'oubli. le 8 mai 1945, à Sétif, une manifestation nationaliste est autorisée dans la liesse de la fin de la deuxième guerre mondiale. Dès 8h à plus de 10 000 personnes envahissent les rues et défile avec des drapeaux des pays alliés. Vers 8 h 45, tout dérape. Des pancartes « Vive l'Algérie libre et indépendante » surgissent. En tête de la manifestation, Aïssa Cheraga, chef d'une patrouille de scouts musulmans, arbore un drapeau vert et rouge. Un jeune s'empare du drapeau mais est abattu par un policier. L'émeute fait dans les deux camps de nombre de morts et de blessés. Dans le même temps, des émeutes éclatent aux cris du « djihad » dans la région montagneuse. Des fermes européennes isolées et des maisons forestières sont attaquées et leurs occupants assassinés, dans des conditions atroces… Voilà ! le mot et lancé ! La force de destruction du djihad est sortie de la boîte de Pandore. le fardeau de ces événements est porté humblement par un personnage émouvant du roman: Bouhadiba, ancien pied noir. » On revoit aussi les avions du 11 Septembre, ce Pearl Harbour du djihad?
Chaque époque n'est-elle qu'une succession de cercles dans l'eau? Passant par les guerres puniques, Daniel Rondeau retrouve la pierre fatale sur laquelle sont gravés les massacres de Sétif. Grimaud, l'archéologue examine le terreau qui a engendré cette mécanique du chaos, le terrorisme islamique, dont on ne parlait pas il y a 40 ans. Il braque l'éclairage sur d'autres mécaniques délétères : l'absence de repères, le nihilisme général engendré par la destruction du paysage spirituel de l'Europe après le passage destructeur du nazisme et du communisme dont nos générations ne sont toujours pas remises. Mais comment pourrions-nous encore rayonner en 2016, si on ne croit pas en soi? Sans l'eau de l'histoire, de la poésie et de la culture… peu d'espoir est permis ! « Je suis Habiba et je vis… »

En rassemblant les points de vue des nombreux personnages du roman, tous des naufragés, de la journaliste française et petite amie de Kadhafi à l'étudiante bretonne anarchiste passée par la prostitution de luxe, la mosaïque s'éclaire. le délitement des valeurs familiales a aussi créé l'absence de repères. Bruno, le policier anti-terroriste flotte dans sa vie, perdu par son divorce et l'éloignement de ses filles. La peinture de l'époque passe par la sphère toute puissante de l'argent qui a englouti notre planète et ses états de droit avec tous les trafics illicites du trafic humain, migrants et esclaves, à celui des oeuvres d'art millénaires, à celui de la drogue, et jusqu'aux détrousseurs de cadavres dans les hôpitaux. Assiste-ton à la « grosse domination du sabre sur l'esprit ? »
L'écriture se fait à coups de sabre, de déflagrations, de valse d'informations aussitôt interrompue, dans un immense zapping mondial de la violence. Comment, à travers les cascades d'événements sans transition, et les lieux brûlants d'actualité ne pas se retrouver piégé par la barbarie, cloué d'angoisse, stupéfait devant les personnages déboussolés, aux quatre coins de la Méditerranée, notre berceau millénaire devenu fosse commune. Autour de Malte, il n'y a qu'un pas pour la Lybie, la Tunisie, la Somalie, Istanbul… Et puis la frileuse Europe aux fondements dévastés se déploie, fragilisée par la corruption et le crime, de Londres, à Paris, au Quai Matignon et dans une banlieue infecte nommée Taurbeil-Paradis la Grande Tarte. Au début les images et les personnages sont bien difficile à suivre et on se perd dans les cercles de l'enfer… Puis la mosaïque contre la domination du sabre sur l'esprit, prend forme et on ne lâche plus le livre, de peur de perdre le fil infernal! Et au passage, -ouf!- on se permet de savourer les apartés de l'archéologue, Grimaud, qui n'est avare ni de recul, ni d'érudition, ni de sagesse. « Les peuples se font et se défont de leur énergie propre s'engendrant de leur âme et de leurs actes incessants pendant que le temps s'écoule à son rythme imperturbable. » comme disait Michelet.
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Un archéologue français résidant à Tunis est appelé, par le fils d'un ami, à évaluer des antiquités prélevées sur des vestiges d'anciennes cités romaines en Lybie. Laurent Gaudé avait également évoqué ce thème dans son roman Écoutez nos défaites, mais Mécaniques du chaos relève plus du thriller que celui de Gaudé et de ce fait, apporte une autre lumière sur ce trafic illicite pratiqué par l'État islamique en vue de financer ses activités guerrières et terroristes. Daniel Rondeau a tissé une histoire crédible autour de personnages évoluant de prime abord isolément, mais qui rapidement, entreront en contact de diverses façons. Les lieux et les temps varient d'une vignette à l'autre et donnent au récit une fluidité remarquable, d'autant que l'écriture ne se concentre pas seulement sur les événements, mais aussi sur l'état d'esprit des protagonistes.
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Roman intéressant et d'une lecture agréable.
Le chaos de l'histoire, le chaos de la fin des civilisations, le chaos du sentiment amoureux, le chaos des vies des hommes qui ne maîtrisent plus leur destin, le chaos de la vie quotidienne dans les banlieues abandonnées par la république, le chaos des parcours des femmes et des hommes fuyant la misère, espérant une meilleure vie au-delà de la Méditerranée, le chaos d'une société qui a perdu ses repères, ses valeurs...
Daniel Rondeau cherche à décrypter ou à donner un sens dans ces chaos, tenter une réflexion sur l'enchaînement des causes.
L'enchevêtrement des histoires, la grande histoire que l'on connaît mais que l'on ne comprend pas toujours qui emporte, ballote, élève ou fait chuter les petites histoires individuelles. Mais finalement cette grande histoire n'est-elle pas la somme de toutes ces petites histoires de femme et d'homme tiraillés entre leurs désirs, leurs valeurs, leurs aspirations et leurs limites.
Le roman brasse les évènements politiques, diplomatiques pour nous faire découvrir les réseaux du terrorisme intimement imbriqués avec l'économie parallèle des trafics en tout genre.
Je me suis laissé prendre par l'histoire que nous raconte Daniel Rondeau. Mais au fil du roman je me suis demandé s'il n'avait pas vu trop grand et que finalement, dans les dernières pages, il ne savait plus comment gérer ses personnages, l'intrigue de la traque des terroristes et la réflexion sur les civilisations et leur disparition.
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Quand la fiction épouse la réalité !
Voilà un bon livre sur la géopolitique du crime qui est fort bien documenté et présente une analyse sous forme de thriller/espionnage (?) très juste, semble-t-il qui dépasse la simple narration quasi-documentaire. Mais bon nous ne somme pas barbouze et n'en savons rien mais cela sonne vrai et c'est l ‘essentiel.

Rondeau a été ambassadeur à Malte. Il est rodé aux coups fourrés et combines des maffieux et groupuscules religieux du sud. Il sait ce qu'est la géopolitique et de part ses nombreux voyages au proche et moyen orient il a une excellente connaissance des pratiques de cette partie du monde qui a souvent été un terrain de violence .

Divers personnages se croisent avec leurs problèmes de coeur et leurs occupations pas toujours très propres ils nous plongent dans le monde extrêmement réaliste des services secrets , des affaires internationales des djihadistes, maffieux et magouilles en tous genres

On apprend que sur les anciennes routes de la drogue se développement des "poly-trafics". Non seulement ces substances y transitent mais aussi des armes, des antiquités oeuvres d'art issues de pillage , des êtres humains réduits en esclavage.

Des véritables zones de non-droits, des zones grises s'installent dans certains pays en proie à la guerre et au chaos mais aussi dans les grandes villes des pays occidentaux : les territoires perdus des états livrés à la criminalité organisée qui aujourd'hui s'appuie ou s'allie à des mouvements islamistes.
Deux mondes: une zone de "civilisation" contrôlée par les États et les lois et une zone de "ré-ensauvagement" dans lesquelles l'arbitraire a le monopole de la violence
Ce livre rejoint d'autres ouvrages pour l'aspect géopolitique comme celui de Rufin « L'Empire et les nouveaux barbares, 1991 » et le « Le Dérèglement du monde » d'Amin Maalouf donnant une vision du monde divisé en zones soit contrôlées par l'état soit laissées aux mains des maffieux Il y a un peu aussi du Thierry Joncquet, avec « Ils sont votre épouvante et vous êtes leur crainte » pour l'aspect banlieues en voie d'islamisation
 Une vision cauchemardesque d'un monde chaotique qui échappe à la raison Cela a toujours existé ni plus ni moins mais la menace est plus diffuse, à grande échelle, plus sournoise et ce sont des individus qui prennent les rênes des pouvoirs
« le XXIe siècle sera religieux ou spirituel ou mystique ou ne sera pas » disait Malraux on y est ! Mais est-ce de la religiosité, spiritualité, mysticisme ou du hard business  ?
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La sensation de chaos débute avec la structure du roman. Chaque chapitre est raconté par un personnage différent dans un lieux différent et il faut parfois un peu de temps pour savoir de quel personnage il s'agit. Et ils sont nombreux : Habiba, la migrante échouée sur un plage à Malte, Grimaud l'archéologue, Bruno le policier désabusé, Levent le diplomate espion, Emma la jeune femme libre, Moussa le commandant lybien, Samy le financier et bien d'autres. Cela ressemble à un puzzle où les relations, les connections, les enjeux apparaissent progressivement. La course contre les terroristes prend forme et s'accélère.

Daniel Rondeau nous décortique les mécanismes qui génèrent les bouleversements de notre société. Il embrasse la complexité de notre monde, propose une genèse de la radicalisation islamique avec les évènements de Sétif de 1945, montre des conséquences chaotiques des interventions occidentales en Lybie et au moyen orient. Il décrit l'argent sale des cités, la complaisance des politiques, le passage de la volonté d'intégration humiliée de la première génération d'immigré à la radicalisation de la seconde.

Mieux que tous les rapports ou documentaires, ce livre nous montre la réalité du chaos dans lequel nous sommes embarqués.
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Etonnant voyage dans le monde des services secrets, des affaires, du terrorisme en Afrique, au Moyen-Orient.
Monde que Daniel Rondeau a côtoyé comme journaliste et diplomate. Ce livre est paru en 2017.
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Echecs et Malte
Un tourbillon que ce livre qui nous entraîne de Malte en Libye, en passant par les cercles les plus proches du pouvoir français, les ambassades du Moyen Orient, les quartiers perdus de la banlieue parisienne, Carthage ou encore Istambul.
Un livre lu d'une traite, qui fait parler des hommes désenchantés et qui se demande si nous ne sommes pas en train de danser sur la musique d'un monde qui n'existe déjà plus ?
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