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Critique de PhilippeSAINTMARTIN


Je dis que ce livre est sauvagement torturé, culotté et brutal, courageux, sordide, amoral et détraqué. Je dis qu'il a l'odeur fauve de cuir crasseux d'un ring des quartiers portuaires de Valpo, le goût aigre et dépravé du vomi dont la gueule béante des exilés de tout recouvre les détenus. Je dis qu'il frappe d'humanité, de vide, de soumission, d'absence, de folie, de survie à tout prix comme les bastons scélérats à creux de dix mètres au large d'Unimak Island, je dis que ce livre arbore cette tignasse pouilleuse de petit saligaud qui casse les vitres de nos évidences en disant : c'est pas moi, qu'il purge les entrailles de nos vies et prend salement nos apparences à la gorge, tel un agressif souteneur à chaussures bicolores guetterait son prostitué cheptel en arpentant les artères nicaraguayennes de Belo Horizonte, je dis que ce livre n'arrondit jamais les angles de ses méfaits littéraires, qu'il éructe une envie d'échappée belle aussi vaine que la menace d'un poing rongé d'arthrose, qu'il pue l'urgence angoissée d'un mauvais matelas maculé du foutre de tous les autres avant moi. Je dis que ce livre crache l'existence par tous les orifices de ses infamies et de ses espoirs mutilés de guerre perdue d'avance. Je dis que ce livre est épouvantable, au sens carnassier du terme, qu'il se trémousse de perversion, d'enfermement et de vitalité à la façon d'une douteuse entrecuisse trop chère payée, qu'il saoule d'humanité raturée aussi frelatée qu'un rhum des bas-fonds de Las Reglas, je dis que ce livre n'a pas la grâce aristocratique d'une grand voile mais l'épaisse vaillance de la plus rageuse des voiles d'avant : ses mots claquent aussi fort qu'un brave Tourmentin dans la bave écumante du gros temps. Je dis que ce livre bande comme el hijo de la Gran Puta, qu'il est aussi suicidé que le fantôme noyé de la petite nonne dominicaine au ventre gonflé de promesse de l'île de Chacachacare, qu'il arnaque comme on quitte furtivement dans la moiteur profanée du matin un lit qu'on ne voulait pas défaire, qu'il est de l'infecte et noble race des mafieux qui refusent tout repentir, que sa lucidité fait battre nos tempes migraineuses d'une cuite trop longtemps solitaire, qu'il brûle sans sommation comme l'or impur d'un soleil achève les imprudentes coques éventrées des traîtres chenaux de Hog Island.
Je dis enfin que ce petit diamant brut violemment acéré est de la trempe de ceux qui ne se laissent jamais polir, carajo.
Lien : https://tandisquemoiquatrenu..
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