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EAN : 9791022604260
304 pages
Editions Métailié (21/01/2016)
3.69/5   21 notes
Résumé :
Le docteur Justo Pastor Proceso a tout pour être heureux. Il est gynécologue dans une petite ville du sud de la Colombie, il a une résidence secondaire, une femme coquette, deux filles et un hobby : enquêter sur la véritable histoire de Simón Bolívar. Pour le carnaval de décembre 1966, il décide de frapper un grand coup en faisant construire un char burlesque qui révélera la face cachée de Simón Bolívar : le Libérateur s'est attribué des victoires sur des champs de... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (11) Voir plus Ajouter une critique
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"La carozza de Bolivar",de son nom original, est l'histoire du docteur Proceso, gynécologue de Pasto, petite ville du sud de la Colombie ,"ville dont l'histoire était truffée de farces, qu'elles fussent militaires, politiques ou sociales, d'alcôve ou de trottoir, légères comme une plume ou lourdes comme un éléphant" , et de son char de Bolivar.

Par un concours de circonstances, grâce à son voisin Arcangel de los Rios,alias don Furibard du Klaxon , Proceso, qui comme passe-temps écrit depuis des années,"Le Grand Mensonge de Bolívar ou le mal nommé Libérateur –Biographie", l'histoire d'un homme qui a convaincu ses contemporains puis les générations suivantes ,qu'il était ce qu'il n'était pas, qu'il avait fait ce qu'il n'avait pas fait, et qu'il était entré dans l'histoire comme le héros qu'il n'était pas, va avoir l'idée d'une farce sordide. Un char de carnaval burlesque ,initialement construit pour moquer son voisin, au défilé du 6 janvier 1966, sera transformé à sa demande, en celui de Simon Bolivar (1783-1840)pour révéler la face caché du "grand héros révolutionnaire"de l'Amérique du Sud.
Il tombe alors avec fracas dans la dure réalité : personne ne sait ou ne veut rien savoir des réalités sur Bolívar, sauf les mensonges officiels appris à l'école....faire ce qui lui chante de ce héros national sur un char de carnaval, cela porte un nom : irrespect à l'égard du père de la patrie, et pour ces oiseaux-là c'est pire que de bafouer le bouclier, le drapeau et l'hymne national,une tentative qu'il va payer au prix fort.....

Côté vie privée pour le docteur ,ça ne va pas aussi, trés fort .Sa relation avec femme et enfant est au point mort, bien qu'il semble idolâtrer sa belle femme sensuelle ,objet de convoitise de toute une ville.....mais dans ces contrées, l'amour a des règles plus souples , aussi bien pour l'homme que la femme....

Dans la Colombie des années 60, alors qu'émergent des guérillas marxistes qui se réclament de Bolivar, l'auteur interroge la notion de héros national et le besoin de s'y référer.
En parallèle avec une relecture critique de l'histoire de l'indépendance latino-américaine ( un tout petit peu long....),il nous propose aussi le portrait brillant, d'une société provinciale tiraillée entre conservatisme de bon aloi et libération des moeurs et de la pensée.
Le burlesque ,l'ironie des situations,le tempérament bouillonnant sud-américain arrosé d'aguardiente ( eau de vie) et la plume sans concession de l'auteur ,donne un livre époustouflant ,où la tragédie se noie dans la farce ! le carnaval ! des innocents? pas vraiment.....

Muchas gracias,Pecosa !





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Nous sommes à San Juan de Pasto, Colombie en 1966, et le carnaval bat son plein. Le gynécologue et père tranquille Justo Pastor Proceso décide de se déguiser en gorille pour effrayer quelques passants lorsque lui vient une idée saugrenue. Obsédé par la figure du héros Simón Bolívar El Libertador qu'il exècre, le bon docteur décide de faire construire un char (titre original du roman, La carroza de Bolívar), non pas pour célébrer le grand homme lors du défilé du Carnaval de Negros y Blancos mais pour jeter à la face des festivaliers les erreurs militaires du Général et toutes ses impostures. D'autant que San Juan de Pasto est le lieu symbolique de la cruauté des troupes de Bolívar car il fut le théâtre en 1822 de saccages, meurtres, et autres atrocités commises par les hommes de Sucre.

Hélas pour ce brave praticien, on ne touche pas impunément à une figure historique aussi emblématique, non seulement en Colombie mais sur tout le continent américain. Pour de nombreux citoyens il est un héros, une icône, une figure révolutionnaire, chanté dans les écoles: « On a fait efficacement digérer aux gens la belle histoire de la Colombie avec sa ribambelle d'anges et de héros. (…) Ce Bolívar était un sacré fils de pute. » Les habitants de la ville qui ont eu vent du projet n'entendent pas laisser impuni ce crime de lèse-majesté. Le destin de Justo Pastor Proceso est en marche.

J'ai lu ce roman avec un peu d'appréhension. Comment évoquer la figure de Simón Bolívar quand un autre Colombien, Gabriel García Márquez, nous a déjà offert Le Général dans son labyrinthe ( et Álvaro Mutis, Le dernier visage)? Le talent de conteur d'Evelio Rosero nous fait oublier un instant le grand Gabo. Il dresse les portraits acérés des notables d'une ville de Colombie dans les années 60, et met en scène le déboulonnage en règle du mythe du Libertador ( Rosero s'appuie sur les écrits de José Rafael Sañudo, Estudios sobre la vida de Bolívar.) Mais c'est lorsque la folie carnavalesque atteint son paroxysme, emportant avec elle des vérités difficiles à appréhender pour notre héros que Le carnaval des innocents prend toute son ampleur. Justo Pastor Proceso brûle d'envie de clamer une vérité qui va à l'encontre de celle de ses compatriotes, profitant des vertus cathartiques du carnaval, qui permet aux hommes de se déguiser de faire peur, de renverser l'ordre établi au moins pendant quelques heures. S'ils effrayaient les institutions, les rites subversifs dans la plus grande tradition carnavalesque étaient les instruments de l'équilibre social. Avec son char de carton pâte , il n'est pas certain que le gynécologue colombien soit le garant de la paix sociale, ni dans sa ville ni dans son pays.
Merci aux éditions Métailié pour ce voyage en Colombie.
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Un immense merci à Babelio et aux éditions Métaillé pour l'envoi de ce livre que j'ai dévoré en 2 jours.

Cette simple information devrait suffire à dire à quel point ce roman a été - pour moi - un coup de foudre, mais Masse Critique mérite bien mieux que cela alors je vais développer.

Tout commence par un "simple" carnaval, tradition très importante dans beaucoup de pays d'Amérique latine, qui commémore souvent des événements en rapport avec l'esclavage et qui permet - encore aujourd'hui - dans ces pays marqués par de très fortes inégalités sociales, de mettre tout le monde au même "niveau" : celui de la folie et de l'amusement !
Et pourtant, ... le protagoniste de cette histoire, Justo Pastor Proceso, va découvrir à ses dépends qu'il y a des sujets avec lesquels on ne rigole pas, même le jour du carnaval !

Pour oublier sa famille qui n'a pas (ou vraiment très peu!) d'affection pour lieu, son mariage qui n'est rien de plus qu'une immense farce usée jusqu'à la corde, notre gynécologue amateur d'Histoire se lance comme défi de dévoiler la véritable face de Simon Bolivar - un héro très proche du zéro, peut-être même en dessous.

Dans ce roman, Evelio Rosero nous parle d'Histoire et des impostures et "mensonges utiles" que permet l'historiographie. Chaque peuple a besoin de héros, et quand les légendes ne suffisent plus, L Histoire façonne des mythes vivants... mais à quel prix ! Ces impostures historiques sont mises en parallèle avec les faux-semblants et les apparences que l'on tente de maintenir en société pour cacher les divers délitements familiaux et échecs conjugaux. L'auteur se montre d'ailleurs très critique vis-à-vis de ces hypocrisies en tous genre de la société colombienne. La palme du pire va peut-être aux jeunes communistes d'ailleurs. le tout est toutefois dit avec beaucoup d'humour (souvent noir..) et d'ironie pour rendre moins lourds les sujets tragiques abordés ici.

Il faut bien dire aussi que la construction du récit est parfaitement maîtrisée : que ce soit les différents niveaux de narration avec différents narrateurs, les allers-venus entre le temps du récit et le temps historique, ou le rythme tantôt haletant comme le souffle d'un boxeur entre deux rounds, piquant comme dans un vaudeville ou plus lent comme dans un thriller.

Et ce que j'ai aimé par-dessus tout, c'est bien sûr cette ambiance purement latino-américaine : entre bigoterie, fanatisme (religieux ou politique) et blasphème extrême. Comme Evelio Rosero le fait dire à l'un de ses personnages : la vie est courte et souvent tragique, alors autant en rire et en savourer chaque goutte !
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Entre vaudeville et roman picaresque, Evelio Rosero dresse le portrait d'un médecin obsédé de Simon Bolivar et qui décide, pour le carnaval de sa ville, Pasto, au sud de la Colombie, de construire un char qui révélera la vraie nature du Libérateur. Entre optimisme burlesque et pessimisme bouffon, Evelio Rosero mélange joyeusement les genres, tourne en dérision, pousse ses personnages à se dévoiler, opte pour une construction théâtrale de son livre et nous enjoint à réfléchir sur les grands mythes qui peuplent nos cultures.
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Tout d'abord, je tiens a remercier Babelio pour leur opération masse critique ainsi que les éditions Métaillié pour l'envoi de ce roman.

Je ne vois que des critiques élogieuses pour ce roman et je suis bien embêtée au moment d'écrire cette critique car pour ma part, je suis partagée.

J'ai aime le voyage en Colombie, j'ai appris beaucoup sur les croyances, les coutumes, la politique et l'histoire du pays. le récit est richement documenté. Par contre je n'ai pas aimé le style de l'auteur. Les phrases sont longues et confuses, on s'y perd facilement et puis aucun des personnages n'est vraiment sorti du lot. Je ne me suis pas attachée à eux.

C'est une lecture fastidieuse ou je pense il faut prendre son temps, faire éventuellement quelques recherches, car pour ma part, je ne suis pas vraiment calée en Histoire sud-américaine. En tout cas, l'auteur réécrit l'histoire de manière beaucoup élogieuse notamment pour Bolívar.

Mon bilan n'est pas entièrement négatif et je vous invite a lire ce livre pour ma part, je pense que je m'attendais a quelque chose de diffèrent.
Lien : http://missmolko1.blogspot.i..
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Citations et extraits (13) Voir plus Ajouter une citation
Aide-moi à exhumer l'ombre du docteur Justo Pastor Proceso López, à retrouver la mémoire de ses filles, depuis le jour où la cadette eut sept ans et l'aînée fut déflorée dans l'étable de la ferme, jusqu'à celui de la mort du docteur, tué par la ruade d'un âne en pleine rue, mais parle-moi aussi de l'égarement de sa femme, Primavera Pinzón, chante son amour insoupçonné, donne-moi la force de revenir à ce jour néfaste où le docteur s'est déguisé en singe, en guise de farce inaugurale, résolu à surprendre sa femme par une première frayeur à l'approche du carnaval des Noirs et des Blancs. Quel jour ? Le 28 décembre 1966, jour des Saints Innocents, jour des farces, jour de l'eau et des bains purificateurs, à six heures du matin, un brouillard ténu flottait encore aux portes et aux fenêtres des maisons, s'emmêlait comme des doigts blancs aux saules des carrefours, les âmes dormaient, sauf celle du docteur - qui tournait en rond dans son vaste cabinet, accoutré d'un déguisement de singe qu'il avait fait venir en secret d'un célèbre magasin du Canada : il avait déjà enfilé les jambes et le tronc, ses bras se gonflèrent de muscles et de poils (un pelage hirsute d'authentique orang-outan), et il ne lui restait plus qu'à ceindre l'énorme tête velue qu'il tenait indécis contre son cœur.
La tête de singe entre les mains, il alla se regarder dans le miroir de la salle de bains pour invités du premier étage de sa maison qui en comptait deux, mais avant d'affronter de nouveau son visage bilieux de quinquagénaire, il préféra l'enfoncer d'un coup dans la noire tête de singe doublée de feutre, et il fut presque heureux de découvrir un simien parfait, aux yeux rougis - un voile rougeâtre couvrait les trous des yeux, de sorte que ceux du docteur paraissaient rougis de fureur et regardaient toutes choses à travers une brume pourpre -, et séduit plus encore par la denture simiesque excessive et dangereusement pointue, le pelage en authentique poil de gorille lui parut même dégager une repoussante odeur de singe, et cette certitude pestilentielle, de mâle simiesque, le fit transpirer avec l'accablement d'un mâle humain, il dit "Bonjour" et un dispositif dans la gorge du déguisement modifia son salut, le transformant en un son guttural, une sorte de plainte ou de menace simiesque, une espèce de hom-hom qui effraya le docteur croyant fugacement qu'un authentique singe se trouvait dans sa maison, voire en lui, "on ne sait jamais", pensa-t-il honteux.
Car il n'avait pas l'habitude de plaisanter de cette manière. En réalité il ne plaisantait avec rien ni personne dans cette ville, qui était à elle seule une plaisanterie perpétuelle, où avaient vécu et trépassé ses ancêtres, dans ce pays qui était aussi une autre plaisanterie atroce, mais plaisanterie quand même, sa ville composée de centaines de plaisanteries petites et grandes dont, volontairement ou non, pâtissaient tous les jours les habitants, les naïfs et les insolents, les lubriques et les coincés, les dormeurs qui à ce moment-là peut-être se réveillaient dans leur lit, consternés de devoir affronter non seulement la plaisanterie de la vie, mais celles aussi du jour des Saints Innocents, particulièrement les plaisanteries humides, car chacun ce jour-là à Pasto avait la liberté de purifier ses voisins, ses amis et ses ennemis, avec un seau d'eau froide, un tuyau d'arrosage, ou en les bombardant avec des ballons remplis d'eau lancés en face ou dans le dos, avec ou sans l'accord de sa victime, et devait en retour accepter de bon gré les autres farces, les pièges et les blagues de gros calibre auxquels il allait être exposé, du plus sage au plus candide, enfants et vieillards, en préambule au carnaval des Noirs et des Blancs.
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Son visage était radieux, comme le jour de sa première communion, comme au moment de recevoir son diplôme de médecin, comme à l’église lorsqu’il avait épousé la femme dont il était amoureux et comme lorsqu’il l’avait enfin vue nue.
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Tout est possible dans cette vie. Dans l'autre, je ne sais pas. Mais dans celle-là, si. Rappelons-nous ce que disaient les anciens : 'Hier le coiffeur, demain le fossoyeur.' Ce qui veut dire en clair : 'Ne nous compliquons pas la vie et dansons'.
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Lui et sa femme ne partageaient rien, ni au lit, ni sur terre, ni en l'air : l'ennui le plus pénible, celui qui porte des fardeaux de haine, pesait sur eux depuis très longtemps.
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[...] la farce fraie avec la médisance, leste le vent d'un mensonge accusateur, une farce [...] pouvait être plus impitoyable qu'une frayeur mortelle [ ...].
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