"La carozza de Bolivar",de son nom original, est l'histoire du docteur Proceso, gynécologue de Pasto, petite ville du sud de la Colombie ,"ville dont l'histoire était truffée de farces, qu'elles fussent militaires, politiques ou sociales, d'alcôve ou de trottoir, légères comme une plume ou lourdes comme un éléphant" , et de son char de Bolivar.
Par un concours de circonstances, grâce à son voisin Arcangel de los Rios,alias don Furibard du Klaxon , Proceso, qui comme passe-temps écrit depuis des années,"Le Grand Mensonge de Bolívar ou le mal nommé Libérateur –Biographie", l'histoire d'un homme qui a convaincu ses contemporains puis les générations suivantes ,qu'il était ce qu'il n'était pas, qu'il avait fait ce qu'il n'avait pas fait, et qu'il était entré dans l'histoire comme le héros qu'il n'était pas, va avoir l'idée d'une farce sordide. Un char de carnaval burlesque ,initialement construit pour moquer son voisin, au défilé du 6 janvier 1966, sera transformé à sa demande, en celui de
Simon Bolivar (1783-1840)pour révéler la face caché du "grand héros révolutionnaire"de l'Amérique du Sud.
Il tombe alors avec fracas dans la dure réalité : personne ne sait ou ne veut rien savoir des réalités sur Bolívar, sauf les mensonges officiels appris à l'école....faire ce qui lui chante de ce héros national sur un char de carnaval, cela porte un nom : irrespect à l'égard du père de la patrie, et pour ces oiseaux-là c'est pire que de bafouer le bouclier, le drapeau et l'hymne national,une tentative qu'il va payer au prix fort.....
Côté vie privée pour le docteur ,ça ne va pas aussi, trés fort .Sa relation avec femme et enfant est au point mort, bien qu'il semble idolâtrer sa belle femme sensuelle ,objet de convoitise de toute une ville.....mais dans ces contrées, l'amour a des règles plus souples , aussi bien pour l'homme que la femme....
Dans la Colombie des années 60, alors qu'émergent des guérillas marxistes qui se réclament de Bolivar, l'auteur interroge la notion de héros national et le besoin de s'y référer.
En parallèle avec une relecture critique de l'histoire de l'indépendance latino-américaine ( un tout petit peu long....),il nous propose aussi le portrait brillant, d'une société provinciale tiraillée entre conservatisme de bon aloi et libération des moeurs et de la pensée.
Le burlesque ,l'ironie des situations,le tempérament bouillonnant sud-américain arrosé d'aguardiente ( eau de vie) et la plume sans concession de l'auteur ,donne un livre époustouflant ,où la tragédie se noie dans la farce !
le carnaval ! des innocents? pas vraiment.....
Muchas gracias,Pecosa !