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Critique de aleatoire


Genèse d'une rencontre rothienne.

Mardi 9 juillet, je m'apprête à aller assister à la dernière de La force du destin à l'opéra Bastille lorsqu'un appel téléphonique vient tempérer mon exaltation :" Suite au résultat de vos analyses, ce serait bien qu'on vous hospitalise sans tarder afin de faire quelques investigations, nous avons un service de médecine interne très réactif. On vous attend avant 17.30 h..." Je tergiverse, "je préférerais demain." On insiste. Cette injonction inopportune, qu'en faire ? La force du destin verdiene n'allait-elle pas se heurter à la fragilité du mien ?
Même pas le temps pour ce premier séjour en résidence hospitalière d'interroger l'ami Krout (Pierre pour les initiés) un habitué (hélas) de ce genre de villégiature, pour m'informer du viatique à emporter. A l'arrache, je m'empare de brosse à dents, lunettes, portable (et son chargeur), dans la PAL, (pile à lire) le choix est vaste, le temps compté qui me fait me saisir de La tache de Philip Roth, auteur jamais lu.

D'examens abondants en analyses multiples, (on a les vacances estivales que l'on peut), je compris vite qu'en dépit d'un rythme hôtelier similaire, le room-service de la résidence ne saurait souffrir la comparaison avec celui de certains établissements cinq étoiles (nouvelle norme) expérimentés en d'autres temps et d'autres lieux. Personnel affable bien que fort sollicité (n'ai pas osé m'enquérir de l'emplacement de la piscine).

Finalement je fis fi du contexte, qu'importe le flacon, pourvu qu'on ait "livresse" qui convoque l'imaginaire et ses ailleurs lointains :
Le tragique des destinées de quatre personnages, deux universitaires, une femme de ménage, un vétéran du Vietnam, en quête de leur auteur, le narrateur qui, dans une sorte de mise en abyme, témoin et investigateur, est partie prenante de ce drame à l'antique, de ces parcours imbriqués, désespérément pathétiques ; pléonasme ? tant le sont souvent nos exercices de vie.

Profonde réflexion sur l'identité, le libre-arbitre, jusqu'au mensonge, au reniement d'une communauté d'appartenance, une trahison familiale pour le choix d'une liberté revendiquée et assumée (nulle tension entre "mêmeté" et "ipséité"), jusqu'au malentendu d'une sorte d'injonction paradoxale figée dans une double contrainte, la tache impure.

Nègres blancs, portons-nous, aussi, virtuelle, cette tache ? est-elle une impureté ontologique , une espèce de péché originel que nul Messie ne saurait racheter ou pire, participe-t-elle de nos travestissements, de nos reniements, de nos trahisons, de nos arrangements ?

A la question quelle est "la couleur du mensonge" ? répond peut-être le bleu d'un tatouage délibérément choisi par le personnage principal :
"Dans ce tatouage bleu, il pouvait voir une image vraie, intégrale de lui-même. Sa biographie ineffaçable s'y lisait, de même que le prototype de l'ineffaçable, puisqu'un tatouage est l'emblème de ce qui ne part pas. On y lisait de même la colossale entreprise, les forces du monde extérieur, toute la chaîne de l'imprévu, les dangers de la révélation, ceux de la dissimulation, l'absurdité même de la vie se lisait dans ce stupide petit tatouage bleu."

Par égard pour le personnel soignant, c'est sans cynisme aucun que je plagie Tolstoï :
"En dépit des soins prodigués, il guérit".

Don Alvaro
"Tu me condamnes à vivre,
et tu m'abandonnes, pourtant !"

Giuseppe Verdi - La forza del destino



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