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Critique de Moovanse


« Combien de temps peut-on passer à fixer l'océan, quand bien même on aime cet océan depuis qu'on est tout petit? Combien de temps pouvait-il contempler le flux et le reflux sans se rappeler, comme n'importe qui dans une rêverie littorale, que la vie lui avait été donnée, à lui comme aux autres, par hasard, fortuitement, et une seule fois, sans raison connue ni connaissable? »

Flux et reflux – Naissance et mort ? Venir au monde et le quitter.
Flux et reflux – Naissance et renaissance ?
Vague échouée qui aussitôt repart, Vague suivie d'une autre vague,
Va et vient inlassable, inusable …

Elle ne meure pas la mer ?
Seule la vague lassée de son voyage vient lécher la mort du bout des lèvres.

Flux : sang pulsé, sève impatiente, éclosion de vies, tout ces printemps d'enfance, ces rires de jeunesse, tout ces visages, ces mains, ces bouches, ces yeux, ces corps, ces peaux qui vont en l'éclair d'un ciel se croiser, se happer, se mêler, se coller, s'épouser, s'enfiévrer et peut-être s'aimer, toutes ces vagues chaudes de passions passagères, de désirs illusoires , tout ce remue-ménage de chairs et de pensées, ce bric à brac de voix et de lumières, de parfums, d'odeurs, de sexes et de sueurs, tout ce tourbillon de questions, ces tâtonnements, ces turbulences, tout cela - incroyablement tout cela - finira par se défaire et par se taire … par s'assécher et se dissoudre.
Tout s'achèvera par cette poignée de terre sombre et froide qu'on jettera sur le bois de ton cercueil : poussières sur ta poussière.

« Un homme » commence là, dans le huis clos de ses poussières.
Flash-back de sa vie, qui peut-être la tienne, l'ordinaire fait d'unions et désunions, méandres compliqués de la maladie qui s'installe, insidieuse douleur de la vieillesse qui « massacre » les corps et le reste, de cette jeunesse fuyante dont on n'accepte ni les rides ni le sépia.
L'Homme s'interroge, s'observe, se souvient, se raccroche à ses pelletées d'enfance, à la force de ses désirs, à ses lumières d'autrefois, se cogne à ses échecs, ses mensonges et ses manques, regrette ses dérives, s'enferme dans son requiem de mémoires, finit recroquevillé sur son effroi de solitude.
Sauf à se faufiler entre les mailles d'un filet que l'on ne maitrise pas, l'ordinaire en somme de notre fragilité …

A roder autour de l'inéluctable, Philippe Roth, dans l'intime de son sujet, nous invite ainsi de manière intense à nous pencher sur la couleur de notre propre existence.
J'y vois pour ma part, loin de la désespérance, une furieuse envie de Vivre cette vie de chien qui nous meurtrit, à la Vivre, ivre, avide, à la respirer, entière, puisque si courte, elle en est d'autant plus précieuse et fascinante …

Flux et reflux des jours qui soleillent et des nuits qui s'endeuillent, toutes ces questions qui vont, qui viennent et qui resteront sans réponse : notre seule destination est-elle le silence, une poignée de terre froide et sombre jetée sur un néant ?
Ou comme la vague en bout de course, finit-on du bout des lèvres par regagner le large ?

Je me demande …

Flux et reflux, serait-elle la miniature de notre destinée ?


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