Son individualité, à peine précisée jusqu'aux environs de sa trentième année, se développa régulièrement, s'affirma pendant les dernières années de sa vie. Isolé par le fait qu'il appartenait à l'ordre de Saint Dominique, vivant en marge de l'existence mouvementée des Florentins d'alors, il s'enthousiasma, dans ses loisirs contemplatifs, pour les beautés de la nature, trouvant son inspiration dans la campagne environnante. D'avoir vu une paysanne allaitant son enfant, il eut la conception de la maternité de la Madone qui, avant lui, était toujours représentée irréelle et informe comme une grossière statue de bois; sous son pinceau, le Christ n'est plus cette poupée maladroite et vulgaire, mais un mais un véritable bambino éclatant de beauté.
Ce que nous admirons en lui, quand nous pouvons nous libérer suffisamment des contingences modernes, plutôt incrédules,
c'est sa sérénité dans la Foi, sa candeur ineffable; il semble vraiment qu'il a connu les Anges, qu'il les a fréquentés, qu'ils ont posé devant lui, qu'il a vécu dans leur intimité ; ce ne sont pas des visions imaginatives, mais une réalité céleste, ce ne sont pas non plus des modèles habillés de robes bleues ou roses, avec des ailes dans le dos, mais des êtres exquisement vivants bien que leurs pieds ne reposent que sur des nuées.
Sur les murs et dans ses tableaux il a apporté la vie, il a exprimé les réels sentiments des personnages qu'il représentait, il nous montre les fleurs qui fleurissaient autour de lui, le paysage où il promenait ses heures de loisir.
Autour de la vie paisible et de l'oeuvre délicieusement mystique de Guido da Vicchio, l'artiste florentin connu dans le monde entier sous le nom de Fra Angelico, les critiques et les gens d'église ne cessent de discuter: "C'était, dit l'un, un homme à la pensée puissante,une lumière de la foi, un savant qui fut peintre"; un autre reprend: "Vous êtes tout à fait dans Terreur, il a été envoyé du Ciel pour accomplir des vœux de religion."