Entre temps, Decamps s’adonnait a la caricature ; il y avait été insensiblement amené par ses premiers travaux lithographiques, à ses débuts. Dans un ouvrage consacré à la Vie politique et militante de Napoléon, il avait exécute deux planches consacrées à la Bataille de Mondovi et à la Bataille d’Aboukir.
Vers la même époque, en 1822 et 1823, nous le trouvons collaborant à l'Album ; il y donne des lithographies dans le gout de l’époque, sentimentales et héroïques. Pauvre noir ! et le Massacre de Scio appartiennent à ce genre. Mais son esprit caustique et mordant l’incline plus volontiers vers la satire.
Le dégoût ne tarda pas à jeter Decamps hors de cet atelier où l'on n'apprenait rien: «J'essayai chez moi quelques petits tableaux. On me les acheta, et dès lors mon éducation de peintre fut manquée. Il décide de se passer de maître;avec les quelques rudiments qu'il possède, il cherche à se former lui-même sans direction, sans théorie, marchant à tâtons, semblable à un navigateur sans boussole et s'épuisant quelquefois à poursuivre l'impossible Mais il a la foi, une volonté opiniâtre, une formidable puissance de travail, et du génie par surcroît. Il se met résolument et bravement à la besogne. Il parcourt les faubourgs de Paris et les villages de la banlieue pour y chercher des modèles ou des scènes à peindre. Déjà se manifeste son goût du pittoresque.
Plus profitables lui furent les voyages d'étude qu'il entreprit à l'étranger. Il se rendit d'abord en Italie, en passant par la Suisse. La Suisse ne laissa dans son esprit que de vagues impressions dont son âme d'artiste ne retint rien ou presque rien. L'Italie elle-même, malgré tous ses chefs-d'oeuvre, ne l'émut que faiblement. Il était d'un tempérament trop primesautier, d'une nature trop ardente pour goûter pleinement les compositions équilibrées, harmonieuses des grands maîtres de la Renaissance.Toute sa spontanéité native se révoltait contre cet art fait de mesure, de réflexion, de pondération.
À l'époque où naquit Decamps, l'art français se trouvait arrêté à une sorte de carrefour où s'ouvraient, devant les pas du néophyte embarrassé, différentes voies, où venaient aboutir tous les systèmes d'école imaginés depuis le début du siècle.