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Critique de Eve-Yeshe


Nous sommes le 10 mai 1981, le destin de la France est en train de se jouer. Paul nous raconte ce qu'il a fait ce jour-là car il ne se sent pas vraiment concerné par l'évènement, n'ayant pas l'âge de voter alors que son ami Rodolphe, socialiste convaincu a pu le faire pour la première fois. Ils se retrouvent tous les deux ainsi que Tanguy, le troisième larron, et Myriam pour fêter cela en fumant un joint.
On retrouve le 6 juillet. Ils viennent de réussir leur bac, les uns brillamment tel Rodolphe, Paul rattrapé à l'oral au grand dam de son père, et se retrouve au café pour fêter cela. Tout le monde se réunit chez Tanguy et on fait la connaissance de Benoît le dernier de la bande, le seul qui a raté le bac. « Benoît était le quatrième et dernier élément de notre bande, que les mauvaises langues du lycée avaient surnommée « le Loup est ses Trois Petits Cochons », le rôle de l'affreux carnivore revenant évidemment à Rodolphe ».
Déjà, on perçoit leurs relations : Rodolphe, redoutable orateur qui réussi brillamment avec mention très bien, sans avoir vraiment travaillé, Tanguy, élève brillant peste contre sa mention bien, il s'estime aussi brillant que Rodolphe, donc pour lui c'est un échec : « Il voyait le nom de Rodolphe en tellement grand, et le sien, en dessous tellement plus petit »
Tous ont une idée de ce qu'ils vont faire en septembre, sauf Paul qui essuie la colère et le mépris de son père, gynécologue, qui a décidé de l'inscrire dans une école privée à Paris pour préparer le cours de médecine. Il a tout prévu, le logement, l'inscription, et à aucun moment, il ne se soucie de ce que désire son fils.
Ils se retrouvent en Grèce pour les vacances, où Paul rencontre un garçon pour une courte et brutale expérience qui va lui permettre d'accepter son homosexualité. « Ce fut le fin de les angoissants questionnements et peut-être le plus beau jour de ma vie »
Nous allons suivre notre quatuor du 10 mai 81 au 6 juin 2012, leurs études, leurs métiers, leurs vies amoureuses…

Ce que j'en pense :

C'est Paul qui joue le rôle du narrateur de ce roman et il nous raconte ses souffrances d'enfant, méprisé par son père, qui le rabaisse sans cesse, mais qui finit par trouver sa voie (sa voix pourrait-on même dire). le fait de s'éloigner de chez lui, et d'habiter Paris lui permet une certaine liberté. C'est le personnage le plus attachant, car il est humain, sensible, et n'essaie pas d'écraser les autres.

Rodolphe embrasse la carrière politique, on le sent venir très vite par sa rencontre avec Gabriel militant qui lui permet d'approcher Jean-Christophe Cambadélis qui le fascine (on est dans les années quatre-vingt) et dont il va copier les attitudes. Son père étant communiste, il a côtoyé la politique dès l'enfance, « Sur les genoux de son père, il avait appris à déchiffrer l'alphabet dans les manchettes de L'Humanité… »

Tanguy, obsédé par le travail jusqu'à l'addiction comme il a pu l'être dans les études, sans cesse en mouvement, boulimique de tout, la sexualité débridée, qui cherche à satisfaire un père décédé trop tôt et qui a une révélation en voyant Tapie à la télévision.

Benoît, qui a perdu ses parents tôt et a été élevé par son grand-père à qui il voue une vénération immense. C'est un artiste qui photographie les paysages, les gens et qui trouve sa voie.

Ce livre m'a énormément plu. Il nous parle de l'ambition ; on ne peut s'empêcher de penser à Rastignac « à nous deux Paris », mais lui se limitait à Paris bien-sûr, pour ces jeunes là, il faut New-York, le monde entier à leurs pieds.

Il retrace les espoirs, les illusions, désillusions de ces années qui ont vu émerger, les écoles de commerce avec leurs lois implacables qui poussent parfois les gens au suicide en leur demandant toujours plus de résultats au bénéfice des actionnaires, au détriment de l'humain.

On retrouve aussi au passage, les films, les chansons de l'époque, avec les vinyles, tout ce qui semblait léger tandis que dans l'ombre montait la bête immonde sous la forme vicieuse du SIDA, et ses conséquences funestes, les médicaments, la mort.

L'auteur a choisi de raconter l'histoire de quatre copains, et le rôle des femmes est limité : ce sont des épouses, des mères, avant tout et elles auraient pu occuper une plus grande place, même si elles ont du caractère, telle Alice fille d'un gros entrepreneur pas très honnête, Madame Ziegler la logeuse de Paul, ou Julia riche américaine, elles n'occupent pas le devant de la scène que l'auteur a désiré laisser à son quatuor.

Il y a des scènes hilarantes, comme le premier casting de Paul ou la façon dont il s'empêtre dans sa vie sentimentale, ou Tanguy interrogé sur "la sexualité des pots de yaourt"

l'analyse géniale de l'auteur, que j'ai adoré ce livre qui n'a pas eu le succès qu'il méritait à mon avis.

Tout est bien, l'histoire, l'étude de la société, le style, l'écriture. Un bon livre, un pavé de 679 pages que l'on ne lâche plus quand on l'a commencé, avec des phrases, des réflexions qui m'ont beaucoup plu.
Note : 9/10
challenge 1% rentrée littéraire 2014
Lien : http://eveyeshe.canalblog.co..
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