D'un côté, Yarvil, ville mère avec son journal, son centre commercial, ses cinémas, ses immeubles, ses cités sociales… de l'autre, le petit bourg de Pagford, niché au pied de l'abbaye, avec ses maisons bourgeoises, ses villas aux jardins bien entretenus, son unique épicerie, son salon de thé, son Conseil paroissial (presque aussi important qu'un gouvernement fédéral)… Entre les deux, la cité sociale des Champs appartenant à Yarvil mais construite sur des terres de Pagford, usurpées par traitrise selon certains, et Bellchapel, la clinique de désintoxication, sise dans l'église désaffectée.
Administrativement, Pagfrod dépend de Yarvil – il n'y a pas de maire à Pagford – mais le bourg jouit d'une certaine indépendance dans divers domaines. Howard Mollison, le président du Conseil paroissial, voudrait se débarrasser une bonne fois pour toutes de la tutelle de la cité des Champs et de la clinique, qu'il voit comme deux abcès purulents sur la face lisse de « sa » ville. Il n'a que faire des parias, des parasites et des drogués qui y pullulent et menacent la tranquillité de Pagford !
Le charismatique Barry Fairbrother est son plus grand opposant au Conseil. Mais voilà qu'il décède d'une rupture d'anévrisme et laisse une place vacante. La petite bourgade paradisiaque va alors révéler son vrai visage.
Dans ce roman,
JK Rowling nous dépeint un monde qu'elle connait bien. Même si Pagford n'existe pas, il s'est nourri de ses souvenirs d'enfance et d'un passé encore proche qu'elle ne renie pas. La pauvreté, la misère, elle a fait plus que les côtoyer. Elle les a vraiment vécues. Cela se sent dans le portrait très fin qu'elle dresse des habitants des Champs. Malgré un regard impitoyable sur leurs travers, leurs bassesses et leurs fêlures, on sent aussi beaucoup de tendresse dans ses propos. Pour Krystal notamment.
L'histoire -et le milieu dans lequel elle s'inscrit- n'est pas sans rappeler les films de
Ken Loach (Sweet sixteen, Looking for Eric) ou encore « Billy Elliot » ou « Full Monty ». Même ambiance, même fond de crise économique et sociale, même décor. Mais là où « Billy Elliott » ou « Full Monty » laissait espérer une vie meilleure, une possibilité d'échapper à son destin et de se prendre en mains,
JK Rowling a choisi de nous montrer le rude côté des choses, d'une vie qui ne se passe pas toujours comme on l'a rêvée.
Manigances, hypocrisies, lâchetés et faux-semblants sont le décor sordide de ce récit. Que ce soit au sein de la ville et de son Conseil ou dans l'intimité des familles. Et chacun d'y reconnaitre un peu de son propre entourage…
Je n'attendais rien de particulier de cette lecture, si ce n'est me rendre compte de la manière dont
JK Rowling allait rebondir après le départ d'Harry. J'ai été charmée par cette histoire. On retrouve les descriptions fines et précises qui m'ont tant plu dans la saga Harry Potter et le souci du détail. Sans oublier cette inimitable écriture qui rend chaque fin de chapitre si attrayante qu'on a beau se dire « cette fois, je ferme », on se surprend quand même à tourner la page pour lire « les premiers mots, juste les premiers mots » avant de se laisser entraîner, faibles lecteurs que nous sommes.
Dans ce roman, ce sont surtout les jeunes qui m'ont émue : des adolescents en crise, certes, mais lucides, jetant un regard sans complaisance sur leurs parents et le monde des adultes en général. Des jeunes trop mûrs car malmenés par la vie ; des jeunes qui ne veulent en rien ressembler à leurs parents mais qui sont déjà tellement meurtris qu'on se demande comment ils pourraient en être autrement.
Ce n'est pas un conte de fées que nous propose
JK Rowling ici. Rien de magique dans ce récit. Mais la vie ; juste la vie, comme elle est, parfois…
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