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EAN : 9782350180410
330 pages
Editions Cécile Defaut (14/09/2007)
4/5   3 notes
Résumé :
Depuis 1985 et la publication de son premier roman, Antoine Volodine met en scène un monde littéraire, nommé le post-exotisme, dont les quinze livres parus sous son nom et la douzaine parus sous hétéronymes émergent. Ce qui se lit dans cette œuvre, c'est le vingtième siècle comme substance, comme matière temporelle et spatiale des constructions imaginaires ; le vingtième siècle comme affolement de l'histoire, et notamment de l'histoire politique ; le vingtième siècl... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Superbe travail critique sur les 6 500 pages du À la recherche de la Révolution perdue de Volodine.

Désormais sur mon blog : http://charybde2.wordpress.com/2014/08/10/note-de-lecture-volodine-post-exotique-lionel-ruffel/
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Citations et extraits (5) Ajouter une citation
Un enjeu, fabuler l’histoire. Un lieu, l’œuvre-monde. Une dynamique, les dispositifs fictionnels. Il manque quelque chose à cette description : les Breughel, Will Scheidmann, Golpiez, Dondog, ces figures, ces personnages qui forment le personnel post-exotique. Ou plutôt le peuple post-exotique car on suivra bien volontiers Gilles Deleuze lorsqu’il déclare que la fabulation a pour fonction d’inventer un peuple qui manque. L’œuvre de Volodine développe particulièrement cette notion que le mot post-exotisme, une fois encore, définit. Découvrir dans la représentation une organisation sociale complexe et parfaitement repérable renverrait cependant trop à un naturalisme rejeté de toutes parts. On y chercherait en vain un reflet de la réalité contemporaine ou une vision sociologique. Les enjeux chez Volodine sont certainement ailleurs et touchent à nouveau l’histoire du vingtième siècle, l’esthétique, la politique, le passé, le présent et le futur. Il serait tout aussi difficile de repérer, du moins clairement, ce qui est apparu lors de ce tournant de siècle comme ce qui reste des pensées du commun et plus particulièrement du communisme. On sent bien dans les publications récentes que les penseurs attachés au marxisme font d’une pensée de la communauté l’objectif majeur d’une réflexion qui se développe après la défaite des "socialismes réels". La communauté est à leurs yeux (pour emprunter une expression de Volodine) "ce qui reste quand il ne reste rien" ("Des anges mineurs"). (…)
(Le peuple post-exotique) ne s’inscrit ni dans une vision sociologique, ni dans une vision ontologique et substantialiste. Il est ailleurs, évidemment. Mais cet ailleurs n’est pas sans rapport avec notre humanité ; ni sans relation avec les données politiques du vingtième et du vingt-et-unième siècles. C’est l’originalité de cette vision de l’individu et du collectif, des singularités et de la communauté, bref du peuple, que je me propose d’étudier dans ce dernier chapitre.
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e la lecture de Volodine, il reste cela : cette multiplication horizontale, cet excès, cette impression de débordement. Mais pas seulement. L’inverse se rencontre aussi : des images très précises, saisies dans leur singularité avec une acuité parfois extrême. Loin de s’opposer à la première impression, celle-ci la complète. Et de même qu’on évoque parfois le "feuilleté" de "Lisbonne dernière marge", la forme interrogatoire suffit à emblématiser cette œuvre. L’affrontement de Golpiez et de Gonçalves ("Le nom des singes"), celui de Breughel et de Kotter ("Le port intérieur") mais aussi la posture de Will Scheidmann accroché à son poteau d’exécution ("Des anges mineurs"), celle de Breughel collé à sa planche (dans "Nuit blanche en Balkhyrie" cette fois-ci), le dépeçage de tortues durant les séances de tortures (l’effet paronomastique jouant à plein, "Le nom des singes") mais aussi et pourquoi pas cette phrase liminaire "Rue de l’Arsenal, à Lisbonne, les potences abondent" ("Lisbonne dernière marge"), tout cela constitue ce que la tradition littéraire a repéré depuis fort longtemps comme des "scènes". Et comme c’est toujours le cas, ces scènes produisent des images rémanentes, qui nous hantent bien plus longtemps que la conduite narrative, fût-elle virtuose ou chaotique (les deux termes n’étant pas opposés). Rien de bien étonnant, pourrait-on dire, pour une œuvre romanesque. Il faut cependant repérer et mentionner quelques éléments qui vont mettre au jour une singularité. La théâtralité et l’iconicité sont omniprésentes dans cette œuvre ; elles le sont à un point tel qu’elles peuvent en être considérées comme les régimes ou les logiques dominants. La dimension discursive y est généralement perturbée par la production d’images qu’assure la multiplication de ces scènes. C’est cette extrême récurrence, qui permet de comprendre le régime de fiction propre à l’œuvre de Volodine, sur lequel je vais m’arrêter.
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Écrire cette histoire qui ne passe pas, la collaboration, le nazisme, le stalinisme, les camps, l’horreur du vingtième siècle sont des préoccupations qui dépassent l’œuvre de Volodine. La dernière décennie du siècle fut en un sens obsédée par cette mémoire traumatique. La littérature l’exprima, comme les sciences humaines, renouvelant avec ce geste une pratique que la génération précédente avait un peu délaissée. Ce siècle s’achevant, la pensée et la littérature ne cessent de revenir sur ces traumas, sortes de scènes originelles, de taches aveugles sur lesquelles elles se construisent. Alors que la confrontation avec l’histoire, et particulièrement celle qui ne passe pas, est une des origines de l’œuvre de Volodine, elle n’intègre curieusement jamais les corpus d’étude sur ces thèmes. Pourquoi ? Car face aux mêmes événements, Volodine choisit une posture proche du délire et refuse toute vraisemblance référentielle, alors que le paradigme de l’enquête informe les textes contemporains affrontant l’histoire. Son imaginaire paranoïaque s’oppose à bien des égards à une recherche de vérité qui se sait vouée à l’échec. L’imaginaire, le délire, la folie, la fiction "fictionnante", l’étrangement font l’originalité de cette œuvre et peuvent être saisis par un terme qui a le mérite de désigner dans le même temps un effet littéraire et son origine presque clinique : la fabulation, qu’on doit différencier de la fable ou de la simple fiction et comprendre comme une fiction à effet de fiction.
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L’œuvre d’Antoine Volodine jouit d’un privilège rare : elle est inactuelle et pour une part infréquentable. Et comme d’autres œuvres inactuelles et infréquentables, on la trouve pourtant exemplaire et on aime sa fréquentation. L’histoire littéraire est peut-être ainsi faite que chaque période engendre ses monstres, marginaux et révélateurs. Ils portent souvent un nom, Maldoror ou Zarathoustra, qui dit tout à la fois leur irréductibilité au temps, et la coloration qu’ils lui ont donné. Le "post-exotisme" pourrait être un de ces noms, un nom de monstre, engendré par l’époque, et qui nous la fait voir, selon une étymologie bien connue.
La lecture des monstres dérange et provoque parfois des malentendus. Leur étrangeté peut les exclure du système de reconnaissance. Cette exclusion ne résiste pas au temps car s’il va de soi qu’une époque s’étudie grâce à des phénomènes de régularité, elle se comprend aussi par les phénomènes de rareté. Il faut être attentif aux monstres bien que l’époque ne les aime plus guère. Leur étude est un défi, car il faut toujours tenir ce rapport de la singularité et de l’exemplarité, et toujours tenir que l’exemplarité se mesure à force de singularité. Le post-exotisme pourrait beaucoup dire du temps présent, nous le dire sans vraiment nous en parler, de manière oblique.
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Faire exister en deçà de l’œuvre un contexte romanesque implique une stratégie littéraire qui pense et intègre le dehors de l’œuvre. Intégrer est un terme excessif qui relève de la réception et de la recherche d’effets. Car du côté de la production, il s’agit moins d’intégrer le hors-texte que de lui affecter les mêmes signes qu’au texte, des signes de "fictionnalité". Il s’agit donc de les situer sur un même régime d’existence. Mais que désigne-t-on par hors-texte ? Les romans de Volodine traitent de manière très singulière cette zone stratégique, en ce qu’elle délimite texte et hors-texte, qu’à la suite de Gérard Genette on peut appeler le paratexte ou les seuils du texte. Volodine les a fictionnalisés avec insistance pour réduire à l’extrême l’expression d’un dehors du post-exotisme cependant que le post-exotisme s’affirme grâce à ce geste comme dehors, c’est-à-dire comme monde, comme univers. Reprenant la seule métaphore qui s’impose, disons que l’univers post-exotique apparaît grâce à cela comme un iceberg, dont les romans publiés constituent la partie visible. Apparaît ou est, le simple doute consacrant la réussite de l’entreprise.
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Vidéo de Lionel Ruffel
Vendredi 9 août 2019, dans le cadre du banquet d'été "Transformer, transfigurer" qui s'est déroulé à Lagrasse du 2 au 9 août 2019, Lionel Ruffel tenait la conférence "L'épreuve du feu"
Rien ne transforme plus que le feu et les fictions. Et peut-être les fictions ne sont-elles qu'une manière de conjurer la puissance terrifiante du feu, la puissance qu'a acquise celui qui l'a domestiqué. Comme toute domestication, celle-ci est réversible et entraîne une dépendance. Domestiqués par le feu, les anciens formaient des cercles narratifs autour du foyer pour tromper la nuit, qui jusque-là, leur imposait ses rythmes. Puis l'on s'est mis à tracer des lignes, écritures, codes, frontières, voies de circulation et d'échange et ces lignes ont produit une immense accélération, une propulsion, une incandescence. Le feu est désormais partout, il nous appartient d'en faire l'épreuve
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