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Critique de latina


Pourquoi cet aristocrate hongrois, Benjowski, n'a-t-il jamais cessé d'être diffamé par les mémorialistes français ?
Peut-être parce qu'il professait un respect des Noirs de Madagascar, dont il est devenu le roi durant une courte période, mais durant laquelle il oeuvra si bien pour leur progrès, leur confort et leur liberté que les Malgaches le célèbrent encore maintenant.
Les Français aisés du temps de Louis XV se targuaient de vivre selon l'esprit des philosophes, mais les ministres, eux, ne pensaient qu'au profit et à ce commerce des esclaves dont Madagascar fournissait une bonne partie.


Rufin signe ici un roman ou plutôt une biographie romancée de cet homme sage qui, depuis son exil aux confins de la Sibérie, le Kamtchatka, où il a rencontré la femme de sa vie (fille du gouverneur), à la toute jeune Amérique indépendante de Benjamin Franklin, a connu une infinité d'expériences de toutes sortes.
Orphelin de mère très tôt, perdu dans ce froid château aux confins de la plaine hongroise, il vécut une enfance « d'une grande tristesse ». Puis vint Bachelet, un Français admirateur des philosophes, qui pendant trois ans lui enseigna la langue française, la bienveillance, l'égalité et la liberté. Cette leçon de vie le guidera jusqu'à sa mort.
Arrêté par les Russes et exilé en Sibérie, il s'échappa donc, et parcourut les mers, du détroit de Bering à Formose, en passant par Macao. La France, finalement, lui confia une mission : s'occuper de Madagascar et y faire fructifier le commerce, mais un lourd malentendu envenima ces relations, malentendu enraciné dans le mépris des indigènes de la part des hommes politiques français. Il alla même trouver Benjamin Franklin pour lui conter ses aventures et lui demander de l'aide.


Et nous voilà au propos de ce roman, un long monologue ou plutôt deux longs monologues alternés relatant la vie de Benjowski par lui-même, Auguste, et par sa compagne, Aphanasie. A vrai dire, ce procédé d'une « conversation » entre ce couple et Benjamin Franklin m'a paru très artificiel ; je trouve dommage que Rufin, qui écrit très bien, ait choisi ce type de narration ; mais très vite, je suis passée outre car l'esprit De Voltaire et de Diderot hante ces pages pleines d'aventures et de rencontres enrichissantes, stupéfiantes ou navrantes.


Je recommande la lecture de cette histoire vraie construite à partir des notes de Benjowski lui-même. Bien sûr, c'est romancé, bien sûr, Rufin y a mis beaucoup de lui-même, mais quel plaisir de faire le tour du monde en compagnie de cet homme empli des idées des Lumières et de cette femme audacieuse, préfiguratrice du féminisme !
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