Je découvre
Salman Rushdie avec ce roman qui n'est pas son plus célèbre. Sans avoir trouvé ça génial, j'ai été suffisamment intrigué pour avoir envie d'en lire d'autres. J'espère seulement que ses autres romans sont un peu moins touffus. A un moment, le narrateur, qui est photographe, reçoit le conseil d'un Français, un certain M. Hulot, une sorte de Cartier-Bresson :
« - Vous avez compris quelque chose au sujet de l'attention et de la surprise, me dit-il. Quelque chose du double moi du photographe, le tueur tant-pis et sans scrupule, ainsi que celui qui donne l'immortalité. Mais il y a le danger du maniérisme, vous ne trouvez pas ?
Bien sûr, merci, maestro. le maniérisme, oui, un grand danger, une chose terrible, j'y ferai attention à l'avenir, maestro, soyez en sûr. Merci. L'attention, la surprise. Précisément. Ce seront mes devises. N'ayez crainte. »
Bah,
Salman Rushdie n'a pas vraiment suivi le conseil, car « maniérisme », c'est exactement le mot que j'avais en tête pour qualifier son livre avant de lire ce passage. Vous savez ce qu'on dit sur la culture et la confiture, eh bien je n'avais encore jamais vu un tel étalage dans un roman. Sur une seule page on peut trouver une douzaine de références culturelles, de la mythologie grecque à la musique pop américaine. Et à la fin ça n'a plus de sens, un simple enchainement de scène ; ce n'est pas aussi imaginatif que l'on pourrait croire mais c'est bourré de références culturelles, quasiment une histoire de la musique pop, une histoire parallèle, légèrement différente.
Outre la culture et l'histoire de l'Inde (son indépendance, sa partition, le nationalisme hindou, les Sikhs, etc.), le grand sujet du livre est le déracinement, à la fois subi et libérateur. Les trois principaux personnages : le narrateur et le couple de rock stars, Vina Aspara et Ormus Cama, sont avant tout des déracinés. le pire des cas c'est celui de Vina car elle est violement rejetée, plusieurs fois ; elle est adulée et couche avec tout le monde mais elle n'a jamais été aimée que par Ormus et le narrateur.
La terre sous ses pieds, c'est tout ce qu'elle n'a pas, tout ce qui se dérobe. Et en même temps c'est tout ce qui lui permet d'être admirée et de devenir une star, l'incarnation d'une certaine liberté, un fantasme.
En gros c'est un roman bourré de culture et délirant, un peu de la poudre aux yeux à mon avis. Peut-être comme notre temps ?