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Critique de Presence


Ce tome a été initialement publié en 2014. Ces 2 tomes constituent l'adaptation en comics du roman du même nom de Neil Gaiman. La transposition en bande dessinée a été conçue et réalisée par Philip Craig Russell. Ce tome comporte 3 chapitres. La mise en couleurs a été réalisée par Lovern Kindzierski. Il faut avoir lu le premier tome avant.

Chapitre 6 (dessins et encrage de David Lafuente, 42 pages) – Nobody (Bod pour les intimes) Owens fait la connaissance d'un nouveau fantôme du cimetière : Thackerey Porringer (1720-1734) qui n'est pas très prêteur. Son comportement finit par faire prendre conscience à Bod de ce qu'il souhaite vraiment : aller à l'école pour apprendre. Silas lui arrange ça, mais Bod se heurte aux 2 terreurs de l'établissement Nick Farthing et Maureen Quilling.

Chapitre 7 (dessins et encrage de Scott Hampton, 100 pages) – C'est le retour de la seule humaine avec laquelle Bod avait fraternisé. Les retrouvailles sont émouvantes. Cette jeune demoiselle fait également connaissance de Jay Frost, un monsieur qui relève les inscriptions sur les pierres tombales, et qui fait forte impression à Noona, sa mère. Bod se tourne naturellement vers le fantôme de Nehemiah Trot, un poète décédé, enterré dans le cimetière, pour qu'il l'aide à gagner le coeur de cette jeune demoiselle.

Chapitre 8 (dessins de P. Craig Russel & Kevin Nowlan, 22 pages) – Toutes les bonnes choses ont une fin et cette histoire aussi, mais pas sans avoir rencontré le fantôme de Alonzo Tomás Garcia Jones.

Dans le premier tome, le lecteur s'était habitué à voir évoluer Nobody Owens de 2 ans entre chaque chapitre, à découvrir une nouvelle étape de sa vie généralement accompagnée par une nouvelle découverte ayant trait aux habitants du cimetière. P. Craig Russell poursuit son remarquable travail d'adaptation. Au début de ce deuxième tome, le lecteur se demande un instant s'il n'a pas perdu la main : les textes sont plus volumineux. Très vite la fluidité de la narration est de retour, avec une forme vraiment BD, la sensation de recopiage d'un ou deux paragraphes ayant disparu. En fait l'adaptateur recourt à un texte plus écrit de manière chronique et espacée quand l'image ne permet pas de transcrire ce qui est exprimé par les mots. La preuve de la qualité de son adaptation réside dans la rareté de ces moments.

Après Kevin Nowlan, P Craig Russell, Tony Harris, Scott Hampton, Jill Thompson et Galen Showman, c'est au tour de David Lafuente de participer à la mise en images de ce roman. À nouveau, le passage de 2 ans entre 2 chapitres permet au lecteur d'accepter la différence de représentation qui suit l'évolution de l'enfant. Cet artiste est plus porté sur les détails que ses prédécesseurs, qu'il s'agisse du nombre de pierres tombales et des fleurs sauvages, de l'aménagement intérieur de l'établissement scolaire, ou encore des façades des immeubles. S'il n'est pas sûr qu'il ait été choisi pour ces qualités, elles donnent plus de consistance au monde réel (en dehors du cimetière), ce qui tombe à pic puisque ce chapitre correspond à un essai d'intégration dans le monde normal des vivants.

David Lafuente intègre une légère exagération sous la forme d'une petite déformation dans les proportions, en particulier dans les visages qui présentent une légère touche manga (discrète et digérée). Cela donne plus de vie aux personnages (Bod, Maureen, Nick), sans que le récit ne verse dans la farce. Cette forme d'amusement est moins sophistiquée que celle de Russell, Nowlan ou Hampton, mais elle fonctionne quand même dans le cadre de ce chapitre.

Pour le chapitre suivant, c'est donc le retour de Scott Hampton qui dessine plus de la moitié de ce tome. le lecteur retrouve sa manière étrangement éthérée de représenter formes et visages. Dans un premier temps, le lecteur peut éprouver l'impression que les dessins manquent un peu de consistance, comme s'il s'agissait plus d'une délicate esquisse au crayon que d'une image peaufinée. D'un côté, cette sensation se marie bien avec la nature du récit qui parle de fantômes et de l'au-delà. La consistance des revenants apparaît un peu moindre que celle des vivants, ce qui correspond bien à leur nature.

Un regard un peu plus attentif permet d'observer qu'Hampton délimite les formes avec un trait fin sans variation d'épaisseur, leur conférant cette apparence un peu fragile. D'un autre coté quand le regard s'attarde sur un élément concret, comme la voiture de Jay Frost, il constate que le contour reprend celui d'un véritable modèle de voiture, et que seul le minimalisme des éléments dans le contour lui donne cette apparence un peu fragile. Toutefois cette sensation n'est pas présente à chaque page. En particulier dans la maison de Jay Frost, ou dans le cimetière le lecteur retrouve des décors consistants. Cet état de fait est attribuable à la mise en couleurs de Lovern Kindzierski qui a choisi des teintes un peu plus délavée pour ne pas masquer les quelques ombrages au crayon d'Hampton, et pour compléter ses dessins. le résultat est remarquable : il transporte le lecteur dans ce monde aux frontières de la réalité et de l'onirisme.

Cela n'empêche pas que ce soit un grand plaisir de retrouver P. Craig Russell et Kevin Nowlan pour le dernier chapitre, avec leur capacité bien à eux de transcrire le ton fantasque et amusé de la narration.

Le lecteur s'en doutait : Nobody Owens devait fatalement finir par retourner dans le monde des vivants. de manière fort inattendue (et assez second degré), voilà que dans ce conte pour enfants, c'est Nobody Owens qui réclame de pouvoir aller à l'école, et pour apprendre, en plus (en total opposition avec le stéréotype de l'école comme corvée). le ton reste enjoué, les tactiques employées contre les 2 petits tyrans de l'école font sourire de par leur inventivité et leur efficacité. le lecteur sourit franchement devant la tactique employée par Silas pour arrêter un véhicule de police. le lecteur lit avec plaisir un chapitre de plus dans la vie de jeune garçon élevé au cimetière.

Toutes les bonnes choses ont une fin, et Nobody Owens doit se confronter au mystère du meurtre de ses parents et de sa véritable identité. le lecteur sent bien que P. Craifg Russell a dû souffrir pour trouver comment transcrire le texte de l'intrigue, sans que les dessins n'éventent tout suspense. La narration proposée s'en sort bien et le suspense monte petit à petit, alors que le danger va grandissant. Craig Russell ne perd pas le ton fragile de la narration mêlant le fantastique du cimetière et la nature posée de Nobody Owens.

Le lecteur a le plaisir de retrouver de nombreux éléments des chapitres précédents qui trouvent naturellement leur place dans la mécanique de l'intrigue, peut-être de manière un peu trop propre. le pot-aux-roses relatif au meurtre reste dans le ton et l'esprit du récit. le lecteur pourra éprouver un petit regret quant au fait que l'intrigue reste centrée sur Bod, alors que les agissements de Silas et ses compagnons semblaient tout aussi intéressants et mystérieux. le dernier chapitre conclut de manière logique et satisfaisante cette éducation d'un garçon par tout un cimetière.

Cette deuxième partie vient achever la transposition du roman de Neil Gaiman en bandes dessinés. P Craig Russell a su conserver le ton de l'auteur tout du long de son adaptation, sans le trahir. À quelques rares reprises, le lecteur voit affleurer les difficultés auxquelles il a dû être confronté, comme dans le chapitre sept pour maintenir le suspense quant à la véritable identité de l'un des personnages, ou encore quant à la quête de Silas et de ses compagnons. Malgré ces difficultés, le résultat relève bien de la bande dessinée, et pas d'une mise en images servile, avec de gros pavés de texte extrait de l'oeuvre originale.

Cette deuxième partie est l'occasion d'apprécier le travail d'un artiste supplémentaire (David Lafuente), plus concret que les autres, mais sans que cela ne mette en péril la dimension onirique du surnaturel. Scott Hampton reste au diapason de cette adaptation, avec une mise en couleur en phase avec son approche graphique. le lecteur se laisse gentiment transporter dans ce conte sympathique et bien troussé, finalement peut-être un peu trop inoffensif.
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