AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
EAN : 9782371190474
378 pages
Piranha (02/09/2016)
3.64/5   42 notes
Résumé :
Bagdad, été 2005. Hadi, chiffonier à moitié fou, raconte qu'une mystérieuse créature, faite de morceaux de corps des innocents tués dans les attentats qui secouent la ville, écume les rues pour les venger. Mais est-ce vraiment une invention ou est-il lui-même le créateur de ce monstre ?
Que lire après Frankenstein à BagdadVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (16) Voir plus Ajouter une critique
3,64

sur 42 notes
5
1 avis
4
11 avis
3
3 avis
2
0 avis
1
0 avis
Une lecture extrêmement prenante, étonnante, originale, une fiction abracadabrantesque avec en toile de fond les images d'une sombre réalité. Nous sommes en 2005 à Bagdad, sous occupation américaine, une ville dans le chaos, endeuillée, ravagée par les attentats, transformée en un théâtre sanglant, en un champ de batailles sur lequel s'affrontent trois adversaires, la Garde nationale irakienne et l'armée américaine d'un côté, les milices sunnites et chiites des deux autres, un champ de ruines, un amoncellement de cadavres, une situation désespérée ... pas pour tout le monde, certes; car il y en a toujours pour trouver profit d'une situation pourtant humainement sans espoir, une ville où les rumeurs se répandent comme la lèpre sur les murs et affectent tout le monde.
«...tout le monde est responsable de cette catastrophe, d'une manière ou d'une autre. J'ajouterais même que les incidents de sécurité et les tragédies que nous vivons ont une seule source, la peur. Les pauvres gens sur le pont, c'est la peur qui les a tués. On meurt tous les jours de la peur de mourir. Ceux qui ont accueilli et soutenu Al-Qaïda l'ont fait par peur de la secte adverse, laquelle a elle aussi pris les armes et constitué des milices pour se protéger d'Al-Qaïda. Et a fabriqué d'autres machines de mort à cause de sa peur de l'autre. Nous allons voir se multiplier les morts dus à la peur. le gouvernement et les forces d'occupations doivent en finir avec la peur, la tuer dans l'oeuf, s'ils veulent vraiment stopper cet engrenage de morts.»
Les multiples personnages de cette histoire sont très attachants, et notamment ce Frankenstein, baptisé "Trucmuche" qui symbolise très justement le déchirement, le chaos bagdadien. «Parce que je suis fait des rognures humaines renvoyant à des ethnies, des tribus, des races et des milieux sociaux différents, je représente ce mélange impossible qui n'a jamais été réalisé auparavant. Pour lui, je suis le premier citoyen irakien.» Un citoyen miraculeux, puissant, intouchable, invincible. Sa mission : instaurer la justice dans ce monde complètement ravagé par l'ambition, la soif de pouvoir et cette omniprésente soif de tuer, qui continue de faire couler le sang. Un justicier assassin, assoiffé de vengeance, embarqué dans une spirale infernale, la violence entraînant la violence, et qui causera sa perte... «Il n'est pas d'innocent complètement pur, ni d'assassin complètement abject.»
A travers cette fable contemporaine et effrayante, l'auteur révèle judicieusement une réalité qui est tout aussi effrayante.
Une lecture qui sort de l'ordinaire, marquante.
Lien : https://seriallectrice.blogs..
Commenter  J’apprécie          200
Bagdad, 2005. Les habitants tentent d'organiser une vie quotidienne normale, malgré les trop réguliers attentats-suicide qui viennent détruire les quartiers et faucher des vies. Parmi eux, un chiffonnier, saisi d'une curieuse manie : récupérer des morceaux de corps sur les lieux des attentats pour assembler un être complet. Lorsque sa tâche s'achève, le corps s'anime, et ce Frankenstein irakien n'a plus qu'une idée en tête : venger toutes les morts qui ont contribué à le créer.

Les premières exécutions semblent faciles, mais un petit détail vient compliquer l'affaire : quand une mort est vengée, le morceau de corps associé reprend son processus de putréfaction. Pour poursuivre le travail, il faut trouver de nouvelles victimes innocentes pour le remplacer ; et quand il n'y a plus assez de victimes assez innocentes, il faut être… créatif : accepter des corps à la moralité douteuse ; trouver des donneurs enthousiastes ; ou créer des cadavres soi-même, pour la bonne cause.

On saisit rapidement l'analogie : toute cause politique qui comprend une part de vengeance, même légitime à la base, finit, à force de plans sur le long terme et de « on ne fait pas d'omelettes sans casser des oeufs », par ressembler exactement aux oppresseurs qu'elle voulait combattre à la base, et ne devient qu'une force violente parmi tant d'autres.

Le roman baigne dans une ambiance assez sombre, entre arrestations arbitraires, loi du plus fort dans la rue, corruption généralisée et justice inexistante. Mais pas désespérée pour autant : les portraits des habitants sont assez touchants, et montrent une volonté inlassable de reconstruire un début d'avenir après chaque drame.
Commenter  J’apprécie          160
Un curieux livre à la frontière entre la réalité cruelle et le classique de Science-Fiction. Un chiffonnier du nom de Hadi récupère des morceaux de corps laissés là après un attentat, de ces morceaux il en fera une créature à qui un passant donnera son âme. le Sans-nom aura pour objectif de venger les innocents dont il est la chair. J'adore le concept, la revisite du conte de Frankenstein est très bien exécutée et adaptée à l'air moderne. Trucmuche est un excellent personnage qui erre dans un Bagdad dévasté par le terrorisme et les guerres entre les armées étasunienne, irakienne, sunnites et chiites, cette seconde lecture, après celle du conte, m'a totalement conquis.
Le mythe est dépassé par la réalité, et offre une la créature qui chasse les démons hors de la ville, au propre comme au figuré. J'ai beaucoup appris en lisant ce roman, sur Bagdad et ses traumatismes, sur la vie qui persiste malgré les horreurs qui y sont commises. le rythme est bon, les chapitres courts découpés en plus petites parties encore m'incite à lire quelques pages de plus pour au final le terminer d'une traite.
C'est un roman particulier, sombre mais à l'imagination développé et la balance des deux m'a conquis. On y comprend les injustices subit par les victimes du terrorisme, les habitants persécutés par les armées présentes, le conflit-géopolitique complexe expliqué simplement à travers une vision onirique.
Commenter  J’apprécie          172
Roman audacieux mais tellement complexe. Frankenstein à Bagdad n'est pas qu'un livre de science- fiction. À travers le mythe de Frankenstein revisité, Ahmed Saadawi présente une société décadente touchée par la violence. Il aborde l'actualité et la vie quotidienne de la population irakienne. Il aborde de nombreux thèmes. On regrette quelques longueurs au texte. La multitude de nombreux personnages arabes auraient mérités un glossaire afin de rentrer plus facilement l'histoire. le dernier point noir de ce livre, Ahmed Saadawi se disperse et nous ballade un peu trop à mon goût.
Commenter  J’apprécie          180
Bagdad en 2005 a tout d'un pandémonium. La capitale irakienne, occupée par les américains, minée par la corruption, est en plein chaos soumise à une violence quotidienne marquée par des attentats suicide incessants. Ce théâtre sanglant est le cadre de Frankenstein à Bagdad qui a valu à son auteur le prix international de la fiction en langue arabe. Singulier roman à l'aspect documentaire essentiel mais qui s'aventure sur bien d'autres rivages, policier et fantastique, notamment. Nombreux et marquants sont les personnages qui peuplent le livre d'Ahmed Saadawi : une vieille femme qui attend le retour de son fils, un journaliste ambitieux, un agent immobilier peu scrupuleux, un policier qui ne dédaigne pas le surnaturel, un hôtelier quasi ruiné, un chiffonnier dont l'esprit bat la campagne et qui raconte des histoires invraisemblables. En particulier celle d'une créature qu'il aurait lui-même créé à partir de morceaux de cadavres. Une simple fable ? Voire. Quand il est évident qu'un assassin en série court les rues de la ville, les délires du chiffonnier prennent une autre dimension. Frankenstein à Bagdad n'est pas un livre conventionnel, sa structure anarchique, surtout dans sa première moitié, donne parfois envie d'écourter la lecture. Mais ce serait une erreur, le livre trouve son rythme sur la longueur de même que sa tonalité qui est multiple, entre réalisme tempéré par un humour très oriental et fantastique. le roman est finalement à l'image de la ville qu'il décrit, complexe, turbulent et insaisissable. Sa lecture est une expérience sans GPS, elle mérite d'être tentée.
Commenter  J’apprécie          110


critiques presse (2)
BDGest
26 mars 2024
Frankenstein à Bagdad touche à tous les genres : fantastique, polar et chronique sociale. En toile de fond, se lit également un propos politique […]
Lire la critique sur le site : BDGest
Lexpress
04 octobre 2016
Ahmed Saadawi, figure phare des lettres irakiennes, a choisi de rester vivre au pays malgré la guerre (...) il convoque la figure créée par Mary Shelley pour mieux décrire la réalité sanglante de la capitale irakienne.
Lire la critique sur le site : Lexpress
Citations et extraits (41) Voir plus Ajouter une citation
Il passa le plus clair de la nuit à boire lentement, calmement, assis sur son lit, son verre et l'assiette de mezze posés près de lui sur un haut guéridon en métal. Il écouta le gargouillis léger de la radio, dans les ténèbres faiblement éclairées par une lanterne noire de suie. Fidèle à ses habitudes, il leva son dernier verre en l'air, comme s'il se trouvait dans un bistrot bruyant et qu'il saluait les fantômes assis à ses côtés, fantômes de gens qui s'en étaient allés, et d'autres qu'il n'avait jamais vus. Il salua l'obscurité, et les choses éparpillées dans sa chambre où grouillaient les rats. Il but ce dernier verre et entendit du bruit du côté de l'entrée. Il se retourna, vit la porte qui bougeait. Elle s'ouvrit en grand, laissant apparaître une haute silhouette sombre. Son sang se figea dans ses veines lorsqu'il la vit soudain avancer vers lui.
La lueur jaunâtre de la lanterne frappa le visage de l'intrus, qui lui apparut nettement : un visage couturé de points de suture, un gros nez et une bouche fendue comme une balafre béante.
Commenter  J’apprécie          40
L'explosion se produisit deux minutes après le départ de bus Kia qu'avait emprunté la vieille Elishua Oum Daniel. Tous les passagers se retournèrent d'un bloc et découvrirent au-delà de la foule l'impressionnant panache de fumée, d'un noir profond, qui s'élevait du parking situé à proximité de la place de l'Aviation, au centre de Bagdad.
Commenter  J’apprécie          60
...tout le monde est responsable de cette catastrophe, d'une manière ou d'une autre. J'ajouterais même que les incidents de sécurité et les tragédies que nous vivons ont une seule source, la peur. Les pauvres gens sur le pont, c'est la peur qui les a tués. On meurt tous les jours de la peur de mourir. Ceux qui ont accueilli et soutenu Al-Qaïda l'ont fait par peur de la secte adverse, laquelle a elle aussi pris les armes et constitué des milices pour se protéger d'Al-Qaïda. Et a fabriqué d'autres machines de mort à cause de sa peur de l'autre. Nous allons voir se multiplier les morts dus à la peur. Le gouvernement et les forces d'occupations doivent en finir avec la peur, la tuer dans l’œuf, s'ils veulent vraiment stopper cet engrenage de morts.
Commenter  J’apprécie          20
- J'voulais l'emmener à la morgue,parc'que c'cadavre-là,il était intact, et qu'ils l'avaient laissé pourrir dans la rue comme une ordure. Un être humain, chef, tu t'rends compte!
- Le cadavre n'était pas intact...c'est toi qui l'as rafistolé.
- Je l'ai rafistolé pour qu'on l'traite pas comme un vulgaire déchet...pour qu'on l'respecte comme les autres, et qu'on l'enterre, chef !
Commenter  J’apprécie          30
« Il est des lois que l’être humain ne connaît pas, des lois qui ne s’appuient pas sur le concept de temps comme les lois physiques qui gouvernent les vents et les précipitations, celles de l’attraction terrestre, ou d’autres qui sont clairement établies à force d’être récurrentes, vérifiées et révisées. Il est des lois qui ne s’appliquent que dans des circonstances particulières, et, lorsqu’un événement quelconque obéit à une telle loi, l’être humain s’en étonne et prétend que c’est impossible, qu’il s’agit d’un mythe, ou dans le meilleur des cas, d’un miracle. Il ne dit pas qu’il ne sait pas. L’homme est un être extrêmement arrogant ; il ne reconnaît jamais son ignorance. »
Commenter  J’apprécie          10

autres livres classés : irakVoir plus
Les plus populaires : Littérature française Voir plus

Lecteurs (146) Voir plus



Quiz Voir plus

Petit quiz sur la littérature arabe

Quel est l'unique auteur arabe à avoir obtenu le Prix Nobel de littérature ?

Gibran Khalil Gibran
Al-Mutannabbi
Naghib Mahfouz
Adonis

7 questions
64 lecteurs ont répondu
Thèmes : arabe , littérature arabeCréer un quiz sur ce livre

{* *}