Je me souvenais des arbres fantômes. On disait qu’il existait une forêt invisible, constituée par la mémoire des arbres disparus. A leur mort, les spécimens les plus anciens, les plus majestueux, demeuraient vivant dans l’autre monde (…).Là où s
était dressé leur tronc s’ouvrait une faille dans l’espace et le temps, où l’on pouvait s’insinuer , comme par une trappe, et pénétrer le territoire des esprits. (…) On disait encore que c’était par les portes des arbres fantômes que les esprits des morts s’introduisaient dans notre monde sous une forme animale.
Elle détestait l’auto-stop, mais c’est ce que tout le monde faisait, ici, enfin tous ceux qui avaient envie de vivre.
Des points lumineux surgissaient entre les arbres, suspendus aux branches, aussi fugaces qu'une idée, aussitôt disparue. Peu à peu, ils parurent se synchroniser, dessinant des constellations éphémères, et ce fut comme un chant silencieux, des mots inscrits dans la nuit, une mystérieuse langue codée. (p 215)
La forêt me donnait la nausée. Elle était la forme palpable du mensonge, elle vous faisait croire à l’éternité. Vous pensiez avancer à l’intérieur d’un cœur plus grand, qui battait plus fort, un cœur immortel. Mais ce n’était qu’une illusion […] (p. 40.)
Rien ne s'évapore, rien ne disparaît, je le sais à présent. Je ferai le siège de ceux qui ignorent la nécessité du refuge, de la frontière, de l'ombre. Je serai la gardienne du monde obscur des forêts. Je veillerai sur lui, je me dresserai sur le chemin de ceux qui veulent le détruire. Je me tiendrai debout, minuscule sur la route, dressant des barrages dérisoires. Je serai là, à la lisière, entre le chaos et le silence, je chercherai le secret caché derrière le paysage, à l'origine.
Le ciel était d'un noir profond, constellé d'une infinité de points lumineux qui se reflétaient dans l'eau, comme un autre ciel.
Déterminer ce dont les autres sont capables est une chose complexe. Souvent, on ne peut même pas imaginer de quoi nous sommes capables nous-mêmes..
Au-dessus de nous, les étoiles brillaient, certaines plus que d'autres, traînant derrière elles un nuage laiteux qui donnaient l'impression qu'elles fécondaient le ciel.
Une grenouille se mettait à coasser, entraînant avec elle des dizaines de congénères, et la nuit était constituée de ce chant.
On entendait les feuilles bruisser, un clapotis, dans le lointain. La lune, brumeuse, était suspendue haut dans le ciel, une mère bienveillante.