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Bande de Gaza, entre novembre 2002 et mai 2003.
Joe Sacco, journaliste américain enquête sur de évènements meurtriers survenus en novembre 1956 à Khan Younis et à Rafah.
Il écrit : « Tandis que nous tentons fébrilement de déterrer 1956, des pelletées d'événements du quotidien ensevelissent le passé et empêchent nos sujets de se concentrer sur les strates qui nous intéressent. »

Tout l'intérêt de ce roman graphique réside dans cet écart de cinquante ans entre les faits que l'auteur cherche à mettre à jour et le foisonnement de situations d'une violence rare dans cette partie du Moyen-Orient où les plaies ne peuvent se refermer tant les coups sont éternellement répétés qu'ils soient de l'armée israélienne ou de militants palestiniens.

J'ai pu, par cette mise en scène bénéficier d'une vue générale sur l'historique de la bande de Gaza, où la Palestine a entassé ses réfugiés dans des conditions plus que précaires tant ils étaient nombreux.

Ses interviews se heurtent donc à l'incompréhension des palestiniens endurant quasi quotidiennement de féroces offensives israéliennes tuant des civils autant que des soldats incluant la destruction massive de leur habitat.
Les personnes susceptibles de lui donner des informations ont environ de 60 à 80 ans et n'avaient donc qu'entre 10 à 30 ans en 1956, leur mémoire fragilisée a mélangé les lieux et les années et l'enquêteur à beaucoup de mal à distinguer le réel de la légende.

Les dessins en noir et blanc sont très réalistes, les grandes planches traduisent le marasme et la désolation des villes dévastées de la bande de Gaza et les fines hachures espacées ou serrées mais toujours nerveuses expriment parfaitement, la frayeur, la colère et la détresse sur les visages des enfants comme des vieillards, des mères comme des veuves.

Joe Sacco est parvenu à inclure dans les quatre cents pages de son ouvrage la grande histoire de cette « frange » maudite engoncée dans des rivalités perpétuelles tout en focalisant le lecteur sur un massacre jamais vraiment clarifié, reconnu.
J'ai beaucoup apprécié cette approche qui donne abondamment la parole aux gazaouis et ou plane sans arrêt les décisions impitoyables des nations.

Israël/Palestine, un conflit inextricable !?
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Roman graphique instructif et surtout profondément émouvant.

Un journaliste à la recherche d'un moment de l'histoire, celui de note en bas de pages qui racontent la mort de Palestiniens de Gaza en 1956. Il recueille les témoignages des survivants, des versions parfois contradictoires, mais qui parlent de malheur et de victimes.

L'auteur utilise très bien la puissance de l'image. On voit les coups de bâtons, les hommes qui pleurent et qui disent la peur. Des femmes qui se demandent pourquoi on leur fait cela, pourquoi l'Histoire a-t-elle sacrifié leur peuple ? ...

Mais le présent continue, dans sa quête des événements de 1956, le journaliste est aussi confronté aux destructions actuelles : des maisons détruites, des balles perdues et des tirs de roquettes…

Une lecture éprouvante, qui montre toute l'absurdité de l'escalade de la haine, une triste situation sur laquelle on se sent bien peu de pouvoir.
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Joe Sacco repart pour la Palestine, plus précisément pour Gaza. Son idée de départ est de retracer les événements qui ont bouleversé ses habitants en 1956. En rester là est bien sûr mission impossible. Tout d'abord par ce que l'actualité en Palestine s'impose à tous, ensuite par ce qu'une telle entreprise signifie une enquête, des multiples rencontres, du temps, bref de l'imprégnation
Tel est alors le contenu de ce consistant et très dense roman graphique. On y rencontre milles témoins. Comme Joe Sacco, nous sommes confrontés à la fragilité de leurs récits, aux douloureuses concordances des temps entre hier et aujourd'hui. Parfois, le tournis nous guette tant les événements sont complexes, les acteurs nombreux. de ce drame sans fin surgissent de temps à autre quelques rares éclats d'humanité avant de replonger dans un océan de destruction de maisons, de meurtres et de violence.
On ressort forcément secoué, un peu plus informé mais malheureusement pas plus avancé.
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C'est à l'occasion d'une mission dans la Bande de Gaza pour les besoins d'un reportage avec Chris Hedge (en 2001) que Joe Sacco s'intéresse aux tragédies de novembre 1956. de fil en aiguille, le dessinateur découvre que le 12 novembre, des palestiniens des villes de Khan Younis et Rafah auraient été exécutés par des soldats israéliens débusquant des résistants ou des soldats égyptiens. Dans la panique générale, les israéliens auraient ouvert le feu et tué des dizaines de civils palestiniens dans ces deux villes. Gaza 1956 décrit les investigations menées par Joe Sacco entre novembre 2002 et mai 2003 sur ce pan méconnu et peu documenté de l'histoire. Mais voilà, cinquante ans ont passé depuis les événements. Joe Sacco veut rappeler l'existence de ces massacres car "les tragédies contiennent souvent les graines du chagrin et de la colère qui façonnent les événements du présent." Pourtant, reconstituer l'histoire à partir des souvenirs des témoins de l'époque est une entreprise compliquée : Qui interroger ? Comment trouver les "bons témoins" ? Quels crédits apporter aux récits des enquêtés ? Quels poids donner aux déclarations contradictoires des différents témoins ? Quels témoignages croire ou ne pas croire ? Quelle méthode retenir pour les croisement des infos ? Comment faire comprendre aux palestiniens interrogés qu'on s'intéresse à des événements révolus alors qu'ils sont quotidiennement victimes d'attaques israéliennes, que les attentats suicides sont légion, que leurs maisons font l'objet de destructions massives et qu'une Guerre en Irak est sur le point d'éclater ?

Joe Sacco est parfaitement conscient du caractère peut-être incongru de sa démarche mais ainsi qu'il nous le confie : "Les palestiniens semblent n'avoir jamais le luxe de digérer une tragédie avant que la suivante ne leur tombe dessus. Quand j'étais à Gaza, des jeunes gens regardaient souvent mes recherches sur 1956 avec perplexité. A quoi bon s'occuper de l'Histoire, alors qu'ils étaient attaqués et que leur maisons étaient démolies au présent ? Mais il n'est pas si facile de démêler le passé du présent ; tous deux font partie d'un continuum implacable, de la masse confuse de l'Histoire. Cela vaut peut-être la peine de figer un instant ce mouvement de brassage qui va toujours vers l'avant pour examiner un ou deux événements. Ces derniers, outre le fait qu'ils ont constitué une catastrophe pour les gens qui les ont vécus, peuvent être instructifs pour ceux qui veulent comprendre pourquoi et comment - ainsi que l'a dit El-Ransiti - la haine a été plantée dans les coeurs." Et, j'espère que cette noble intention aura une résonance sur les lecteurs...

Parce qu'il était impossible à Joe Sacco de revenir sur ces événements sans se pencher sur l'histoire générale de la bande de Gaza, Gaza 1956 telle une leçon d'histoire magistrale, revient sur les principaux conflits et événements survenus dans la Bande de Gaza entre 1948 et 2003 : Indépendance d'Israël (1948), apparition des premiers Fedayins (1955), Crise du canal de Suez (1956), Guerre des six jours (1967), 1ere Intifada (1987), Accords d'Oslo signés entre Israël et l'OLP (1993), 2e Intifada (sept. 2000)... La bande-dessinée permet ainsi de revenir sur les événements passés en gardant une certaine distance. Et ce, même si Joe Sacco reconnait volontiers que son travail de graphisme "s'accompagne inévitablement d'une dose de réfraction". On notera d'ailleurs que la lecture de Gaza 1956 s'impose en quelque sorte comme un voyage initiatique dans l'univers de la BD-reportage.

Mais encore : au delà de tout aspect purement factuel, Gaza 1956 interroge sur notre façon personnelle de se représenter l'histoire. Comment se construisent les récits des témoins. Comment traduire leur intention. Comment interpréter les silences, les demandes d'anonymat. Comment ne pas prendre parti.. Bref, toutes questions que le lecteur doit s'approprier par la réflexion et l'objectivité... Bien sûr, le propos de Joe Sacco est forcément engagé mais j'ai justement trouvé qu'il avait réussi à garder une certaine impartialité qui est nous l'avouerons, très appréciable...

Pour toutes ces raisons mais aussi pour le coup de crayon incisif (noir et blanc) de Joe Sacco, je ne saurais que recommander cette passionnante lecture. le gigantesque travail de documentation, de retranscription et d'interprétation mérite amplement que l'on s'y intéresse. Bref, voici du contenu de qualité enrobé dans un superbe objet. N'hésitez donc pas et découvrez sans tarder Gaza 1956 !
Lien : http://embuscades-alcapone.b..
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"Gaza, 1956, en marge de l'histoire" n'est pas seulement une bande-dessinée de reportage sur le conflit israélo-palestinien, elle est une oeuvre de réflexion sur le travail même de l'historien, du chroniqueur et du journaliste. Alors qu'en règle générale, chacun se targue de rechercher la sacrosainte objectivité, Sacco sait qu'il ne peut l'atteindre, malgré sa ferme volonté, sa rigoureuse démarche et sa déontologie. Il opte donc pour une autre méthode. Il se met en scène pour que le lecteur ait conscience du contexte dans lequel s'est élaboré son travail de recherche. Il ne cherche pas à masquer ses manques et ses imperfections, au contraire, il fait souvent preuve d'autocritique. C'est pourquoi je suis un peu surpris quand on lui reproche son parti pris, alors qu'il ne cherche, à aucun moment, à annoncer La Vérité ! Il sait que ce conflit est inextricable, que les issues à la crise sont quasiment inexistantes et qu'il serait téméraire de proposer d'improbables solutions. Plus simplement, Sacco, par ses successifs passages entre passé et présent, montre les désespérantes continuités d'une situation historiquement bloquée. Il cherche à aller au-delà de ce que nous diffuse régulièrement les vitrines de la BBC ou de CNN, à oublier un peu le bourdonnement des discours officiels pour faire entendre la voix de la souffrance, grâce à la précision quasi photographique de ses planches et son sens du cadrage qui donne à certaines de ses vignettes une puissance d'évocation saisissante.
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Gaza 1956 de Joe Sacco est un essai journalistique sous forme de BD. C'est son deuxième sur la cause palestinienne et le style y est définitivement plus travaillé.

Ici, Sacco se donne pour objectif d'enquêter sur les évènements de novembre 1956, dans la bande de Gaza. C'est un moment où les forces israéliennes ont violemment occupé le territoire, ont interdit l'accès aux ONG, et ont entrepris des exécutions massives d'hommes palestiniens en âge de combattre. Presque rien n'a été écrit sur le sujet et même les rapports de l'ONU sont, au mieux, incomplets. Sacco parcourt donc la Palestine pour trouver des témoins et survivants des attaques israéliennes. Il est confronté à deux difficultés.

1- 1956, c'était il y a longtemps. Les témoins sont soit très vieux, et leur mémoire peut leur jouer des tours, soit ils étaient très jeunes et leur souvenirs sont plutôt flous. Certains palestiniens ont honte d'avoir été absent et d'inventer un rôle dans mes événements. D'autres, dont la vie a été une suite d'événements funèbres, confondent novembre 56 avec d'autres datent marquantes, d'autres attaques israéliennes des 65 dernières années.

Le format BD permet à Sacco de mettre en parallèle ces différentes versions d'un même événement. Celle met en lumière les faits qui reviennent dans chaque témoignage, ainsi que ceux qui ne sont corroborés que par un seul témoin.

2- La vie à Gaza aujourd'hui n'est pas nécessairement meilleure qu'en 1956. (Et Sacco a travaillé sur ce livre en plein pendant le lancement de la guerre en Irak. Disons que ce n'est pas le moment où le monde occidental est le plus empathique envers le monde arabe, et plusieurs des programmes d'aide aux palestiniens étaient financés par Saddam Hussein.) Résultat : Beaucoup des témoins, guides, traducteurs de Sacco sont réticents à l'aider dans son reportage. À quoi cela sert-il de ressasser les vieux combats du passé alors que le combat n'est ni terminé, ni gagné? Les palestiniens préfèrent parler du présent ou du futur.

Et ils préféreraient que le journaliste partage cet avis. Comme ça, il serait au moins utile.
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Une phrase qui résume tant de choses … hier … aujourd'hui … et j'en ai bien peur demain :
Les « tragédies contiennent souvent les graines du chagrin et de la colère qui façonnent les événements du présent ».
Un roman graphique pour sortir de l'oubli deux événements ayant eu lieu à Gaza en 1956, les violences perpétuées à Khan Younis (1) et les tueries de Rafah (2).
Une vraie leçon pour essayer d'écrire l'histoire à partir du peu de chose qui reste, essentiellement les mémoires souvent défaillantes, brouillonnes et contradictoires des rares témoins présents à l'époque tout en soulignant leurs caractères fragiles.
Un constat douloureux sur la difficulté de réécriture du passé quand l'actualité est brûlante et demande toute l'attention pour dénoncer les horreurs de chaque jour.
Le livre a été écrit en 2010, le plus effrayant est qu'il aurait pu être écrit hier, les mêmes attentats, les mêmes tueries, les mêmes massacres …
Une phrase qui résume tant de choses … hier … aujourd'hui … et j'en ai bien peur demain :
Les « tragédies contiennent souvent les graines du chagrin et de la colère qui façonnent les événements du présent » …
Quand va t on pouvoir enfin sortir de cette spirale infernale …
Que feront les enfants de Gaza survivants demain ?

(1)
En octobre 1956, lorsque l'Égypte est attaquée par la France, le Royaume-Uni et Israël, Tsahal mène une offensive terrestre dans la bande de Gaza. Un rapport de l'ONU mentionne que le 3 novembre, 75 civils palestiniens ont été amenés sur des lieux publics et abattus par l'armée israélienne.

(2)
Me Wikipedia en français ne répond pas à la question … la version de Me Wikipedia en anglais :
Le massacre de Rafah a eu lieu le 12 novembre 1956, pendant l'occupation par Israël de la péninsule du Sinaï et du protectorat de Gaza à la suite de la crise de Suez. La ville de Rafah, située à la frontière entre l'Égypte et Gaza, avait été l'un des deux points d'invasion lors de la première incursion des Forces de défense israéliennes dans la bande de Gaza le 1er novembre. Comme lors du massacre de Khan Yunis, les circonstances entourant les événements qui ont conduit à La mort d'environ 111 habitants de Rafah et du camp de réfugiés voisin est très controversée, Israël ne niant ni ne reconnaissant aucun acte répréhensible, tout en admettant qu'un certain nombre de réfugiés ont été tués lors d'une opération de sélection. Les réfugiés, affirme-t-on également, ont continué à résister à l'armée d'occupation.
La version palestinienne soutient que toute résistance avait cessé lorsque les tueries ont eu lieu. Selon les témoignages de survivants, les soldats de Tsahal ont rassemblé des hommes de plus de quinze ans dans toute la bande de Gaza dans le but d'extirper les membres des fedayin palestiniens et de la brigade palestinienne de l'armée égyptienne. Israël a proclamé que la population civile serait tenue collectivement responsable de toute attaque contre les soldats israéliens pendant l'occupation, qui a duré du 1er novembre 1956 au 7 mars 1957. Des dizaines d'exécutions sommaires ont eu lieu contre des Palestiniens faits prisonniers et des centaines de civils ont été tués alors que les forces israéliennes ratissaient des zones comme Khan Yunis, et d'autres sont morts dans plusieurs incidents distincts. Les calculs du nombre total de Palestiniens tués par Tsahal au cours de cette période de quatre mois de domination israélienne varient entre 930 et 1 200 personnes, sur une population de 330 000 habitants.
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Joe Sacco ne prend pas ses lecteurs pour n'importe qui… Pas pour des idiots, parce qu'il vaut mieux avoir un minimum de connaissances sur le conflit Israélo-Palestinien avant de se lancer, ou être prêt à faire quelques recherches pour s'y retrouver au cours de la lecture. Et pas pour des petites natures non plus, parce qu'il ne leur épargne rien des horreurs de la guerre. Si on est prêt à faire chauffer ses méninges et si on est prêt à être secoué dans tous les sens, alors on peut éventuellement s'engager dans cette lecture.
Et ce sera pour découvrir une oeuvre graphique comme je n'en ai jamais vue. J'ai mis une semaine à lire cette histoire (et je ne lisais rien d'autre à côté), mais c'est bien ce qu'il faut pour avaler ces 400 pages sans concession. le début est difficile à suivre parce que Joe Sacco nous balader dans l'histoire du conflit entre Israël et Palestine, sans aucun respect pour la chronologie. Si les choses deviennent un peu plus clair par la suite, on continue à faire des va-et-vient entre le présent de l'enquête de Joe Sacco (en 2002-2003) et le passé des événements auxquels il s'intéresse, 1956 comme le dit le titre.
Et dans ce va-et-vient historique constant, il faut jongler avec les différents niveaux de lecture que ce livre propose : il y a les faits bien sûr, ceux du conflit, mais il y a aussi l'enquête que mènent Joe Sacco et son fixer (le mot n'est jamais utilisé, mais il fait référence à une autre bd de Joe Sacco, qui se passe à Sarajevo, un autre théâtre de guerre s'il en est), Abed. L'enquête qui est une réflexion sur le métier de journaliste, ses liens et ses différences avec celui d'historien, une réflexion sur la mémoire et la notion de vérité, une réflexion aussi sur ce que retient l'histoire et ce qu'elle oublie (ou relègue dans les notes de bas de page comme l'indique le titre original, « Footnotes in Gaza »).
Tout cela fait beaucoup et peut faire peur, mais Joe Sacco nous emmène avec lui et ne nous lâche pas, faisant de cette lecture un moment éprouvant mais intense. Je ne suis pas une adepte de l'emphase mais j'ai du mal à ne pas user de superlatifs ici, car je ne crois pas avoir déjà lu une oeuvre graphique qui m'ait autant remuée. J'ai pris mon temps pour la lire, parce qu'il m'était difficile de lire plus de 50 pages à la fois, parce que c'est dense et parce que c'est difficile. Mais je crois que je n'ai jamais vu le conflit Israélo-Palestinien de cette façon. C'est bien sûr uniquement le ressenti palestinien que l'on a ici, mais c'est très instructif, et un peu dépriment car, après avoir lu cela, on se demande comment ce conflit pourrait bien être résolu dans un avenir proche.
Lorsqu'il s'agit d'exposer les faits sur ce qu'il s'est passé à Khan Younis puis surtout à Rafah, Joe Sacco ne fait que donner la parole aux témoins qu'il a interrogés. Il fait un travail de puzzle minutieux, créant des paragraphes et un récit entier en mettant bout à bout les phrases des uns puis des autres. On a souvent une petite vignette de la personne sur la gauche de la page, avec la bulle qui retranscrit sa phrase puis un dessin sur la droite, qui reprend de façon visuelle ce qui est dit, avec parfois la même personne quelques 45 ans plus tôt. C'est une méthode rigoureuse, qui se veut sans jugement. Mais en s'effaçant devant son sujet, Joe Sacco nous le livre aussi sans fard, et rend les exactions décrites encore plus révoltantes. Il est facile de faire des parallèles avec des guerres plus connues, des exactions plus documentées : le tri des personnes, l'intimidation, l'humiliation… Je ne sais s'il s'agit d'un crime de guerre ou d'un crime contre l'humanité, mais c'est bien de cela qu'il s'agit, et j'ai du mal à imaginer ce que pourrait être une guerre propre, une guerre sans ces crimes (et la guerre qui accapare actuellement les médias en est encore un exemple).
Je m'arrête là pour cette note de lecture, je pourrais en dire tant et tant encore, et je ai l'impression de n'en avoir gratté que la surface. C'est un reportage graphique à lire et à relire pour en mesurer la portée et en explorer les dimensions. Une oeuvre magistrale, d'un auteur que je découvre ici et dont j'ai bien l'intention d'explorer l'oeuvre. A lire, à relire, encore et encore.
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Tout conflit armé quelqu'il soit est à proscrire. Il faudrait toujours trouver des solutions pacifistes pour le bien commun des peuples. Au-delà de ce constat bienveillant et presque utopiste, je dois bien admettre que les médias nous ont toujours donné que le seul point de vue des israéliens dont le peuple avait subi les pires exactions pendant la Seconde Guerre Mondiale. Il y a toujours eu une espèce de sympathie liée à la compassion ce qui nous faisait fermer les yeux. Pour autant, ce conflit est l'un des plus compliqué et des plus insolubles qui puissent exister puisque la même terre est revendiquée par deux peuples que tout oppose. L'Occident avait clairement choisi son camp et ce, depuis le début.

C'est vrai que depuis la seconde Intifada, je m'étais posé de légitimes questions en voyant les destructions de maisons mené par un gouvernement belliqueux et irresponsable. Et s'ils avaient tort ? Bref, le doute s'est installé. On appelait toujours dans les médias les palestiniens de vulgaires terroristes qui se faisaient sauter par désespoir de cause dans les rues de Tel-Aviv. En lisant cette oeuvre, nous avons un autre point de vue qui m'a d'ailleurs convaincu personnellement. On n'a pas assez parler des exactions israéliennes comme celle de novembre 1956. Il est vrai que l'auteur fait un parallèle intéressant entre le passé et le présent sur la situation qui n'a finalement guère évolué dans la bande de Gaza.

Comme beaucoup d'entre nous, j'ignorais ce qui s'était passé. Ces exécutions sommaires de centaines de civils est consternante. Il n'y a aucune justification pour ces meurtres commis de sang froid devant des familles apeurées. C'est vrai qu'Israel, sous prétexte de défendre sa souveraineté nationale, applique la loi du talion. C'est franchement indigne d'une démocratie responsable. En tout cas, je ne partage pas ces valeurs. J'espère qu'un beau jour, il y aura un gouvernant assez visionnaire pour démanteler les colonies et laisser vivre tranquillement un peuple totalement opprimé. J'espère que viendra également le temps de la vérité et du pardon et qu'on pourra tourner la page de ce conflit qui n'a que trop duré.

On a reproché à l'auteur son manque de partialité. Cela me fait bien rire quand je vois que les médias ont clairement été d'un côté pendant des années et qu'ils se contentent désormais d'une simple neutralité. C'était extrêmement courageux de la part de Joe Sacco. Par ailleurs, il a mené un travail d'enquête journalistique basé sur une multitude de témoignages qu'il a trié sans compter les archives historiques sur lesquels il s'appuie. C'est l'une des oeuvres les plus marquantes et les plus instructives dans la démarche que j'ai pu lire. Ce n'est pas une réécriture de l'Histoire mais il rétablit de simples vérités au-delà de tout manichéisme.
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Joe Sacco, auteur de bandes dessinées et journaliste, enquête sur un massacre de plus d'une centaine de civils palestiniens perpétré par des soldats israéliens à Rafah dans la bande de Gaza, en novembre 1956. Joe Sacco nous raconte la manière dont il procède à son enquête, ainsi que ses résultats. le travail d'investigation de l'auteur est très difficile, d'abord parce que l'Etat d'Israël poursuit sa politique de conquête des terres palestiniennes, ce qui rend la vie à Rafah périlleuse. Ensuite parce que les Palestiniens interviewés comprennent difficilement qu'il veuille témoigner d'un passé si ancien, alors que ce sont surtout les agissements actuels de l'Etat d'Israël qu'ils voudraient voir dénoncés. Enfin, parce que certains témoins ont disparu, tandis que beaucoup d'autres se contredisent ou relatent les faits de manière altérée.

Comme dans les autres ouvrages de cet auteur que j'ai lus, le contexte historico-politique est parfaitement présenté ici. J'ai cependant trouvé que les allers et retours entre le passé et le présent rendaient la lecture de l'album plutôt fastidieuse, ce qui est dommage. Ceci illustre cependant de manière convaincante que l'état des relations de l'Etat d'Israël avec les Palestiniens n'a guère progressé en plus de 50 ans...

Une bande dessinée "engagée", intéressante, mais dont le propos reste globalement pessimiste (ce qui est compréhensible s'agissant d'un reportage de guerre). J'aurais préféré un récit plus synthétique, la répétition de récits de barbaries devenant lassante, même si elle reflète la réalité.

De cet auteur, j'ai préféré Goražde.
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