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EAN : 9782806101686
390 pages
Academia (26/09/2014)

Note moyenne : /5 (sur 0 notes)
Résumé :
Le mouvement noir contemporain du Brésil est présenté sous de multiples angles. Trouvant racine dans les vieilles révoltes d’esclaves de l’époque coloniale et dans la presse noire de la Première République, il se forme et se reforme sous de multiples figures lors des deux dictatures qui ont marqué le Brésil au XXe siècle. Le mouvement noir prend une forme singulière dans les années 1970-1980, en écho au mouvement des droits civils aux États-Unis. Il se déploie de ma... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Droits humains, reconnaissance et réparations

Noir-e-s au Brésil, Afro-brésilien-ne-s. « Etrange « minorité » que ce groupe en passe de représenter 50% de la population ».

Mais n'est-ce pas une habitude signifiante des dominants que de renvoyer les groupes dominé-e-s à une situation « particulière », une situation de minoritaires, une communauté spécifique ?… Les dominants, comme chacun-e le sait, ne forment jamais de communauté, leur situation est la mesure neutre de toute mesure… Il y aurait des personnes de « couleur » mais les « Blancs » seraient sans couleur, il y aurait des personnes de sexe féminin, mais les « Hommes » seraient neutres sexuellement, etc. Chacun-e pourra multiplier les exemples…

Francine Saillant parle des blessures de l'histoire, de la traite atlantique, « la plus grande migration forcée de l'histoire », de l'usage généralisé de la main-d'oeuvre esclave, dans les milieux ruraux et « peu à peu dans les milieux urbains »… L'esclavage fut aboli au Brésil en mai 1888. « L'Etat ne donna aucune compensation financière aux esclaves libérés, laissés pour compte, et ne mit en place aucun programme de distribution de terres ou visant leur insertion dans la « nouvelle » économie ». Et le Brésil favorisa l'immigration européenne, un projet de « blanchiment » de la population et un « renforcement du mythe des trois races, selon lequel Le Blanc, l'Indigène et le Noir seraient à la base de la formation brésilienne »

L'auteure analyse, entre autres, l'abolition, le blanchiment, le métissage, l'exclusion, la peur du mélange, le « mythe de la démocratie raciale », les racines du mouvement noir, les « identités », l'instauration des « politiques d'actions affirmatives » (ações affirmativas)…

Elle explicite sa recherche à partir de la problématique des réparations : « existe-t-il aujourd'hui quelque chose comme les réparations eu égard aux torts de l'esclavage au Brésil ? Ce mot réparation, a-t-il même un sens ? Si oui, qui en parle et comment ? Si les réparations existent, concrètement, comment sont-elles mises en oeuvres ? A travers quels processus ? Et, enfin, que signifie réparer les torts du passé dans un tel contexte ? Comment sont finalement mobilisés droits, mémoires, politiques et cultures ? » et précise « Ce thème des réparations, enchâssé dans celui des droits et des droits humains, me servit de fil conducteur ». Au centre de ce travail, le mouvement noir de Rio de Janeiro.

Francine Saillant n'en reste pas à une « conception strictement juridique » de l'idée de réparations, revient sur « l'expérience d'être privé de droits », les droits collectifs, « Il est prioritaire de reconceptualiser les droits humains comme processus sociaux, culturels, politiques et subjectifs et de poser la recherche sur de telles bases, cela tout en faisant la différence entre les droits humains produits d'une culture hégémonique (imposés de l'extérieur) et les droits humains générateurs de pratiques de résistance et de luttes sociales (appropriés localement) ».

L'auteure parle de classe, de race et d'héritages de l'histoire, de violences et de droits humains, des révoltes coloniales, du mouvement noir contemporain, de la création du Frente Negra Brasileira, du Movimento Negro Unificado, de la nouvelle constitution, de l'intensification des luttes, des activistes noires, de résistance, de la place de la conférence de Durban, d'afrolatinité, d'afrodescendance, de réparations…

Francine Saillant détaille les actions affirmatives et leurs rôles, parle de mémoire et de culture afro-brésiliennes…

J'ai particulièrement été intéressé par les chapitres sur l'art, « Réparer par l'art », les associations d'artistes afro-brésiliens, les portraits et pratiques d'artistes engagé-e-s (je souligne le chaptre sur Carmen Luz).

L'auteure détaille la « sphère religieuse », les religions afro-brésiliennes, les stratégies historiques de résistance, le mouvement contre l'intolérance religieuse, les attaques des néopentecôtistes, le candomblé, les lieux de mémoire, les liens entre politiques publiques et spiritualité noire, les réparations au sein du terreiro… Je souligne le chapitre « Navire négrier : le candomblé raconté depuis la traversée des esclaves ».

Dans le dernier chapitre, « Réparation, justice et devenir des afro-brésiliens », Francine Saillant rappelle qu'il n'y a pas de doux esclavage, « L'esclavage existe ou n'existe pas », analyse les réalités et les conséquences de l'esclavage, parle de trauma, du rôle des églises chrétiennes (dont l'enculturation chrétienne), de reconnaissance et de réparations (« le paradoxe des réparations est d'abord leur impossibilité » et « le paradoxe des réparations est aussi leur possibilité d'existence »). Réparations et actions affirmatives…

Le choix de mettre l'accent sur les domaines culturels et religieux, permettant une certaine compréhension des mouvements, des revendications, des organisations et des expressions, n'épuise pas le sujet. Il serait plus qu'utile d'avoir des données et des analyses de l'ensemble des rapports sociaux et des situations sociales… Les (ré)affirmations à dimensions identitaires ne pouvant être considérées comme seules hypothèses ou moyens de changement des conditions matérielles (y compris dans leurs dimensions idéelles) des populations.

Quoiqu'il en soit, un livre dont la lecture apportera, outre de multiples informations, des analyses et des réflexions sur le mouvement noir au Brésil et sur la (re)construction/(re)invention des passés et des imaginaires en liaison avec les possibles émancipateurs.
Lien : https://entreleslignesentrel..
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Citations et extraits (2) Ajouter une citation
Il est prioritaire de reconceptualiser les droits humains comme processus sociaux, culturels, politiques et subjectifs et de poser la recherche sur de telles bases, cela tout en faisant la différence entre les droits humains produits d’une culture hégémonique (imposés de l’extérieur) et les droits humains générateurs de pratiques de résistance et de luttes sociales (appropriés localement)
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L’Etat ne donna aucune compensation financière aux esclaves libérés, laissés pour compte, et ne mit en place aucun programme de distribution de terres ou visant leur insertion dans la « nouvelle » économie
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