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Citations sur Henri IV et la France réconciliée (4)

Stupéfaits, les Espagnols assistent alors à la plus incroyable des scènes. Le roi, à quatre pattes, le dauphin son fils juché sur son dos, fait le cheval sous les éclats de rire de l'enfant. Nullement démonté, Henri IV demeure dans cette position pour demander à son visiteur :
- Monsieur l'ambassadeur, avez-vous des enfants ?
- Oui, Sire.
- Alors je peux continuer.

Et le roi de poursuivre son jeu, pour la plus grande joie de son fils, qui, du reste, l'appelle "papa", comme les enfants du peuple, et non "Monsieur mon père" comme le voudrait l'usage, ce qui, là encore, constitue une nouveauté. Dans ce domaine, Henri IV est le premier père, sinon roi, à trouver ses enfants intéressants, à une époque où on les considère comme des êtres totalement insignifiants, jusqu'à leur majorité traditionnellement fixée à douze ans. Les courtisans sont donc médusés d'apercevoir leur souverain porter certains de ses enfants sur son dos, jouer avec d'autres, s'inquiéter de leur santé ou de leurs progrès et même veiller à ce qu'ils soient punis lorsqu'il le faut.

Pages 281-282
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Un tableau allégorique du temps résume parfaitement la portée de l'Edit : on y voit Henri IV, vêtu à la romaine, "s'appuyant sur la Religion pour donner la Paix à la France". Si la Paix tient, comme il se doit, un rameau, la Religion, elle, porte un crucifix, cher aux catholiques, et une Bible, chère aux protestants. Si l'idée de tolérance, quatre siècles plus tard, nous paraît aller de soi et, avec elle, cette spécificité toute française qu'est la laïcité, inventée au début du XXème siècle, force est de constater que ce n'était pas du tout le cas en cette extrême fin du XVIème siècle. On estimait alors qu'il ne pouvait y avoir qu'une seule façon de servir Dieu, que tout le reste était hérésie et que les hérétiques devaient être physiquement éliminés, soit par les voies de la justice ordinaire ou extraordinaire, soit par la guerre. C'est dire le génie novateur du Béarnais qui, brisant net une tradition totalement figée, invente une nouvelle approche de la conscience humaine, qui prépare la Déclaration des droits de l'Homme et du Citoyen. La coexistence pacifique doit se substituer progressivement à l'agressive hégémonie de la religion officielle. Au siècle des Lumières, Voltaire ne s'y trompera pas, qui, écrivant "La Henriade", fera d'Henri IV la pierre angulaire de son combat contre le fanatisme.

En proclamant l'édit de Nantes, Henri IV renvoie en quelque sorte Genève et Rome dos à dos, et annonce, avec trois siècles d'avance, la séparation du politique et du religieux, en un mot la laïcisation de l'Etat : c'est au nom des mêmes principes que la IIIème République dotera la France d'une autre longue et pérenne période de paix. Grâce au roi cessent, ce jour-là, les guerres de religion proprement dites ; grâce à lui, femmes, hommes et enfants peuvent à nouveau vivre en paix, sinon dans la fraternité retrouvée, du moins dans le respect de l'autre. Aucun souverain n'était allé aussi loin jusque-là : aucun autre, de son propre consentement tout au moins, n'ira jamais assez loin ! Le pape a beau s'écrier : "On me crucifie !", l'Edit entre en application parce que le roi le veut. L'absolutisme de la monarchie française en sort renforcé : seul le souverain décide de ce qui est bien ou mal, utile ou inutile, juste ou faux. Au reste, même s'il communique impeccablement, Henri ne s'en cache pas, aimant à répéter cet axiome dont ses successeurs feront leur miel : "Un roi n'est responsable qu'à Dieu seul et à sa conscience."


Pages 227-229
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Héros romantique, Henri IV ? Incontestablement, comme l'avaient sans doute perçu les volontaires de l'an II qui, spontanément, s'étaient réunis sous sa statue au Pont-Neuf. Ils avaient fait de ce roi qui fut le dernier à combattre au milieu de ses troupes un symbole du patriotisme. Mais aussi, en termes psychanalytiques, la juste référence au père de la Nation, doux et ferme, dur mais juste, tendre avec ses enfants et impitoyable envers ses ennemis. Drôle mais aussi capable de profondeur, ennemi du gaspillage inutile mais pas du faste nécessaire à l'éclat d'une couronne, provincial invétéré mais imprimant sa griffe à Paris, intelligent mais pragmatique, simple mais avec panache, prudent mais courageux et enfin (qualité suprême chez les Français, contrairement à leurs voisins, surtout anglo-saxons) bon vivant et grand coureur de filles devant l'Eternel. Chez Henri IV, il y a du Louis XI pour la ruse, du François Ier pour le charme, du Louis XIV pour la gloire, du Danton pour la gueule, du Napoléon pour le génie stratégique, mais aussi du De Gaulle pour la réunification de la Nation, toujours menacée par l'ennemi étranger. Au fond, chaque français, qu'il soit monarchiste ou républicain, catholique ou protestant, de droite ou de gauche, se reconnait en lui, parce qu'il a su manier au plus haut degré cet art de la synthèse.

Il incarne, dans l'inconscient collectif de la Nation, l'idée, ou mieux le sentiment que les Français se font du dirigeant idéal, c'est-à-dire d'eux-mêmes, à la manière d'un paradigme. A croire que si, à l'orée du XVIIème siècle, des élections avaient existé, à coup sûr Henri IV eût été élu président de la République. Chez lui on retrouve tout à la fois la virilité de Félix Faure, la bonhomie d'Armand Fallières, la probité de Raymond Poincaré, l'autorité de Charles de Gaulle, l'intelligence de Valéry Giscard d'Estaing, la subtilité de François Mitterrand, la simplicité de Jacques Chirac ou l'énergie de Nicolas Sarkozy, comme si la personnalité de ceux qui ont exercé la magistrature suprême depuis plus d'un siècle devait obligatoirement puiser dans les vertus du plus populaire de nos rois.

Pages 18-19
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Le 1er juillet se déroulent les funérailles officielles, juste après qu'une autre formalité a été effectuée : l'enterrement d'Henri III. On l'avait en effet oublié et on s'empresse de l'inhumer à Saint-Denis, avant que son successeur ne l'y rejoigne !

Page 318
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