Un train pourri, des locos hors d'âge pour tracter en surcharge et hors la loi des citernes gavées d'un pétrole hautement inflammable. Et pour mener ça sur des rails pourris du siècle dernier qui traversent des agglomérations, une nouvelle réglementation permet l'emploi d'un seul homme aux manettes.
Ce gars là doit dormir, comme tout le monde. Il arrête son convoi, freins serrés, pour faire une pause dans un bled et roupiller.
Mais bien sûr les freins défaillent et le convoi s'en va tout seul semer la mort dans le village qui suit : il déraille, il explose et ça fait 45 victimes cette nuit là, sans compter ceux qui ne survivront pas à leurs blessures ou à leur désespoir. Sans compter les dégâts écologiques collatéraux bien sûr.
C'était au Canada il y a même pas dix ans de ça et aucun des vrais responsables, qu'ils soient financeurs ou politiques, n'a été inquiété.
Le cynisme des décideurs de la "reconstruction" est lui aussi exemplaire : des projets de mise en scène commémorative dans un genre de musée ont même été à l'ordre du jour ! Quant aux indemnisations des victimes, elles sont à ce jour assez dérisoires...
Je n'en avais jamais entendu parler...
C'est une histoire vieille comme le pétrole, vielle comme le capitalisme, vieille comme la finance et la loi du plus fort. C'est traité sobrement pour ce qui est du texte, sans surcharge. Et quant à l'esthétique, elle est à la hauteur, rend hommage aux victimes sans voyeurisme, elle sait faire froid dans le dos, manier la couleur et le symbole comme en témoigne la couverture, très réussie.
On ferme cette bonne et utile BD avec la honte d'être un humain qui consomme les yeux bandés, les oreilles bouchées et les mains sur la bouche, comme les singes chinois.
Et je pense au mot d'un
Yves Paccalet qui nous alerte avec son "L'humanité disparaîtra. Bon débarras"...
Pour finir, allez, je me fends d'un petit quatrain :
Les industriels les marchands
Nous font le monde de demain
Que les vents du réchauffement
Balaieront en un tournemain