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Jean-Marie Saint-Lu (Traducteur)
EAN : 9782020526517
124 pages
Seuil (20/06/2002)
3.55/5   22 notes
Résumé :

En ce jour de mai 1945 où l'Allemagne nazie capitule dans une Espagne murée dans sa misère, un inspecteur de police doit conduire jusqu'à la morgue une toute jeune fille afin qu'elle identifie un cadavre : celui d'un vagabond qui, croit-on, l'a violée. Un long itinéraire les mène à travers des quartiers sordides. Dans un étrange chassé-croisé, ils se séparent et se retrouvent, et une trouble connivence finit par naître entre le flic rogue et usé et l'orp... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
Juan Marsé nous livre un court moment qui se situe le 8 mai 45 à Barcelone. Un inspecteur de police va chercher dans l'orphelinat où elle réside Rosita, jeune fille ayant été victime d'un viol il y a quelques années, afin qu'elle reconnaisse l'homme qui est aujourd'hui à la morgue de l'hôpital.
On accompagne la longue errance de ces deux personnages dans les rues du quartier du Guinardo.
Les déambulations de ces deux êtres, "un chat de gouttière" comme Rosita se définit et un inspecteur de police vieillissant et peu en forme, sont surprenantes.
Rosita se joue de l'inspecteur qui est agacé mais aussi parfois amusé, attendri par cette gamine insaisissable.
On se laisse guider par cette petite Rosita qui nous mène par le bout du nez et que l'on a parfois du mal à suivre et à comprendre, tant son comportement peut paraitre en décalage avec ce qu'elle a vécu.
Roman sombre dans une Barcelone qui l'est ici tout autant.
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«Boulevard du Guinardo» se déroule sur une après-midi, le 8 mai 1945. 
Il conte l'errance dans le Guinardo, quartier populaire de Barcelone, d'un inspecteur de police que le poids des ans et la chaleur a rendu somnolent et désabusé. Préoccupé par l'un de ses testicules baladeur, il va s'essoufler derrière une «Lolita» orpheline, «une morveuse en socquettes» qu'il doit convaincre de le suivre à la morgue pour identifier un vagabond, sans doute son violeur, ce qui lui permettra de classer l'affaire.

«Trois ans avaient passé depuis sa mutation, et d'autres fonctions l'avaient éloigné du quartier, mais il n'était jamais parvenu à déconnecter son imagination sensorielle et son flair belliqueux de ces rues enchevêtrées et de leurs habitants maniérés et experts en l'art de la dissimulation et de la fourberie. Dans les routinières inspections de son souvenir persistait une chaude odeur de linge repassé et amidonné, de festivité clandestine et vernaculaire.»

Rosita va le mener en bateau, au fil de rues poussiéreuses et de venelles insalubres, reculant la visite à la morgue qui lui fait peur.
Elle s'adresse à l'inspecteur à la fois comme une enfant et comme une femme et lui, policier amoureux de l'ordre en est exaspéré, ému et séduit. Au fil de ses déambulations derrière Rosita, il retrouve et redécouvre ce quartier qu'il a quitté durant trois ans, les combines, les prostituées, les gamins qui jouent dans des no man's land où traînent des carcasses datant de la guerre

«Incliné sur le remblai, le squelette oxydé d'un camion militaire enfouissait son museau dans une mare à sec. Sur le flanc de sa caisse défoncée trouvaient refuge une demi-douzaine de garnements, nu-pieds et le crâne rasé, qui se battaient avec de grosses épées de bois.»

Mélange d'humour et de désespoir, de beauté et de sordide ce roman laisse des souvenirs inoubliables. le lecteur comme le policier se laisse mener. 


«Les réverbères de la petite place centrale s'allumaient, et il y avait encore des petits vieux qui bavardaient sur les marches de l'escalier et sur les bancs de pierre. Les moineaux menaient leur tapage dans les branches des platanes, cherchant à s'installer confortablement. Rosita but à la fontaine et lança des serpents d'eau avec la paume de la main, dont les gouttes aspergèrent les chaussures de l'inspecteur. du côté est du Carmel parvenait l'écho des cris de la marmaille, un vacarme de pétards, de coups de clairon, de claquements de ceinturons. Au-dessus de la montagne Pelée se balançaient dans le ciel quatre cerfs-volants de fabrication artisanale, noirs et lourds, alignés comme des étendards guerriers contre la splendeur du couchant. Rosita indiqua à l'inspecteur le banc de bois... p 96
«Rosita appuya le front contre la vitre et regarda au- dehors. Au centre de tout ce vertige noir pendaient des grappes de lilas sous une pergola ensoleillée et elle, en gentille petite fille qu'elle avait été jadis, était assise sur une balançoire avec son gilet d'angora bleu tout hérissé de lumière. Elle se tira la langue en se disant à travers la vitre : «Bourrique» p 118

Je reste étonnée d'être à chaque fois prise par l'écriture de Juan Marsé et son art de séduire et perdre le lecteur qui désire arriver au bout de cette histoire, savoir ce que va être le final que la femme-enfant repousse. 
C'est le troisième roman de lui que je lis et la magie est toujours intacte. A chaque lecture je me laisse embarquée avec la même curiosité et je vais poursuivre ma découverte.
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Le texte est court mais a la longueur idoine pour cette confrontation entre deux personnes, deux âges, deux classes sociales. Une jeune fille espiègle voire plus et un homme au bord de la mort. Avec un jeu de style étonnant - phrases courtes ou longues, dialogues, non-dit, accélérations et ralentissements, l'auteur, à l'aide d'un vocabulaire particulièrement riche, nous emmène dans l'Espagne des années 40, où les pauvres et miséreux de l'époque ne sont plus ceux que l'on y rencontre aujourd'hui.
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Une idée originale. Un flic comme on en voit de plus en plus souvent dans la littérature. ( Pas un héros, mais un homme simple, avec ses problèmes compliqués).
Une écriture rythmée, incisive : Tout pour faire un petit ouvrage que l'on refrerme en se disant :"Zut, j'en aurais bien repris un peu".
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En ce jour de victoire des Alliés, nulle victoire pour l inspecteur ni la gamine. Elle vomit, il s est trompé. La parabole est âpre dans son style comme sur le fond mais claire : le monde est sauvé mais l Espagne franquiste s est fourvoyée et sa jeunesse reste miséreuse et sans avenir.
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Citations et extraits (7) Voir plus Ajouter une citation
Epigraphe
Il était une fois une coïncidence qui était allée se promener avec un petit accident ; au cours de leur promenade, ils rencontrèrent une explication si vieille, si vieille, qu'elle était toute courbée et toute ridée, et qu'elle avait plutôt l'air d'une devinette.
Lewis Carroll
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L'inspecteur attendit sans rien dire, en s'éventant, l'autre main dans la poche déformée de sa veste, son testicule toujours mélancoliquement juché sur quelque coude très élevé de son intestin. Et s'il ne redescendait plus ? pensa-t-il. On le trouverait là, quand on ferait son autopsie... Un trouble organique avec un nom bizarre, à ce que lui avait dit un jour un docteur du Service, en le plaisantant : "Il affecte surtout des nourrissons." p 19
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Le garçon portait la veste d'un mort, trop grande pour lui, et dont les manches étaient maladroitement enfoncées dans les poches. Il frottait tendrement sa joue contre son épaule, et de la pointe de sa langue il faisait habilement passer son mégot éteint d'un côté à l'autre de sa bouche, comme un vieux. Quoi qu'il fît, constata Rosita une fois de plus, le fantôme de ses bras perdus errait sans cesse autour de ses manches vides et raides, collées contre ses flancs. Il lui même arrivé, parfois, de sentir sous ses jupes les mains froides et sans sépulture de l'enfant, ces mains qu'il ne pouvait bouger que dans ses rêves, ou dans les belles histoires qu'il se racontait.
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Elle continuait à épousseter les chaises et à les ranger le long de la table. L'inspecteur ne disait rien, et elle le regarda du coin de l’œil. Elle remarqua son laisser-aller, l'usure de son col de chemise, sa veste râpée, aux poches déformées; surtout ses joues mal rasées et pleines de coupures. Elle pensa à son estomac délabré....
(Le ton est donné)
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L'inspecteur, aux portes du sommeil, buta contre lui-même et se dit salut, va-t-en au diable. Du bord du trottoir, avant de traverser la rue, il regarda une dernière fois la palme jaune tout effrangée et la petite branche de laurier accrochées aux volutes oxydées du balcon. Il avait toujours eu dans l'idée que l'enfer commençait là, derrière ces humbles emblèmes de Pâques attachés à cette rouille familière. (premier paragraphe)
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Video de Juan Marsé (6) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Juan Marsé
El embrujo de Shanghai (trailer) film de 2004 de Fernando Trueba. Adaptation du roman Les nuits de Shanghai
>Littérature (Belles-lettres)>Littérature espagnole et portugaise>Romans, contes, nouvelles (822)
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