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Catherine Saliou (Autre)
EAN : 9782701192864
608 pages
Editions Belin (07/10/2020)
4.39/5   9 notes
Résumé :
Que savons-nous du lointain passé du Proche-Orient, qui occupe aujourd'hui, de façon presque permanente, le devant de la scène médiatique ? Du Ier siècle av. J.-C. au VIIe siècle apr. J.-C., ce « croissant fertile » enserrant des régions arides entre la Méditerranée et les eaux de l'Euphrate fut à sa façon un centre du monde. Il mit en relation l'Empire romain, dont il faisait partie, avec l'Arabie Heureuse, la Perse, l'Inde et la Chine, et par lequel transitaient l... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Catherine Saliou s'est chargée de rédiger, pour la belle collection "Mondes anciens" de Belin, un remarquable volume sur le Proche-Orient romain, de Pompée (le conquérant du I°s av. J.C.) à Muhammad ou plutôt à ses successeurs, au VII°s apr. J.C. Ce découpage chronologique et géographique est extrêmement intéressant, et original pour le lecteur amateur d'histoire : temporellement, la période coïncide avec la domination romaine de la zone, jusqu'aux invasions arabes qui enlèvent cet espace à l'empire romain d'Orient, ou byzantin ; et géographiquement, l'étude se concentre sur la très riche et féconde province de Syrie, englobant l'état syrien actuel, le nord de l'Irak et le sud de la Turquie actuelle, ainsi que la Jordanie, Israël et le nord de l'Arabie. Autrement dit, l'Iran, l'actuelle Turquie et l'Egypte sont exclus par ce découpage raisonnable. Au plan de la documentation historique, il va de soi que certains travaux fournissent des sources plus fiables que d'autres, pensons aux agissements des "archéologues" et "historiens" de Daech ou du Waqf palestinien de Jérusalem. C'est pourquoi l'ouvrage limite sa riche iconographie à 2011.

C'est donc pour une part une étude d'histoire romaine, d'histoire provinciale du Haut-Empire, et pour une autre, un travail sur l'Antiquité tardive, ou l'empire romain de Constantinople. On apprend, au fil des chapitres, que les siècles qui furent matériellement si durs en Occident, du III° au VI°, correspondent à une grande prospérité et une vitalité culturelle de l'Orient, à tous niveaux. L'étude précise des territoires, de leur économie, des échanges, des cités et des campagnes, fondée sur une documentation plus riche qu'en Occident en pleine régression barbare, donne une image vivace d'un univers vivant, créatif et remuant, plein de surprises et de diversité. Les analyses de cas, les commentaires iconographiques, les encarts et citations, donnent au lecteur une idée à la fois claire et détaillée des questions abordées. N'était le style de l'historienne, la lecture de ce volume serait enthousiasmante.

Enfin, deux éléments distinguent ce livre des autres ouvrages d'histoire : le premier est la place faite aux langues multiples et à leur statut respectif au Proche-Orient ; parallèlement au copte en Egypte, en Syrie naquit une langue nationale locale, le syriaque, sous l'impulsion d'une église chrétienne dynamique qui fit face à la culture hellénique dominante des élites. Sans le syriaque, la fameuse "science arabe" n'existerait pas. Il est rare qu'un livre d'histoire réserve une place aux phénomènes linguistiques. En plus, une remarquable étude de sociologie des religions - dans une région et à une époque où ces questions sont centrales et d'une brûlante actualité - et un chapitre consacré à l'incarnation des autorités et des contestations, ouvrent des perspectives historiques vraiment intéressantes.
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Collection « Mondes anciens » des éditions Belin. Cet ouvrage traite du Proche Orient de -100 avant JC au VIIème après JC et s'organise autour de deux parties : la première est consacrée à l'histoire politique de la région et des peuples qui la composent, aborde leurs cultures et religions mais aussi l'économie de la zone, d'un point de vue global. La seconde se focalise sur l'économie des cités, la manière de vivre des habitants, leur religion au quotidien.

L'axe d'étude est orienté sur la période romaine ; il reprend à certains égards le tome consacré à Rome et cherche à montrer en quoi le Proche Orient était une zone singulière par rapport au reste de l'Empire.
Cette terre est une mosaïque de régions très disparates qui englobent désert, montagnes, côtes, steppes, zones volcaniques et se compose d'une multitude d'états à l'administration indirecte. Cela est assez singulier par rapport au reste de l'Empire romain au sens strict du terme mais somme toute assez logique puisque pour pouvoir assimiler au mieux les territoires annexés, l'Urbs a fait le choix de maintenir les instances et hommes en place en y apposant sa touche. Cette partie concernant le mode d'administration des états conquis n'est pas détaillée, pour ce faire, il faut se référer à un autre ouvrage de la collection : « Rome, cité universelle ».

Dans cette région, comme partout ailleurs, la croissance de la population implique celle des ressources mais ici, l'apport en eau se révèle être un véritable défi. Et celle-ci est d'autant plus nécessaire que Rome la rend indispensable par l'utilisation de thermes et de décoration (fontaines) qui font partie de sa culture. Des travaux d'aménagement d'aqueducs seront mis en oeuvre et vont ainsi permettre d'asseoir l'intégration de ces territoires dans l'Empire.

Un autre point qui confère au Proche Orient une véritable spécificité par rapport à l'Urbs est sa position d'intermédiaire dans les échanges internationaux. La zone est traversée par la route de la soie et les foires et le recours aux voies navigables, dont l'utilisation va être exponentielle avec l'intégration de l'Egypte à l'Empire, facilitent les échanges.

Un sujet très complexe concernant cette zone est la religion, qui fait l'objet d'un long chapitre passionnant. Elle est limitée à celle d'un village ou d'une région qu'elle soit monothéiste ou polythéiste. L'auteur aborde entre autres le judaïsme, et explique comment le christianisme s'est diffusé et finira par devenir majoritaire. Cela facilité par le fait que l'empereur Constantin le favorise en restreignant et encadrant les cultes polythéistes. Certains autres menacent même de perte de droits civiques et de confiscation de biens si la conversion n'est pas effective. On est loin du respect expliqué dans « Rome cité universelle » qui évoque l'intégration des us et coutumes d'autrui pour mieux assimiler les populations.

Ce qui m'a paru très singulier par rapport au reste de l'Empire est l'évergétisme, qui est sans cesse présent. L'auteur l'évoque mais n'insiste pas sur le fait que c'est une véritable singularité dans ce territoire. Ce qui peut s'expliquer dans la mesure où, étant loin de Rome, l'évergétisme impérial permet de conforter le pouvoir.

Et pour finir, l'atelier de l'historien qui évoque la période plus contemporaine, avec le démantèlement de l'Empire ottoman, les tensions entre français et anglais. L'archéologie devient un instrument politique et un prétexte aux querelles religieuses.
Ce manuel explique bien comment la religion juive a pris de l'importance dans la région et participe à la compréhension de l'origine des luttes entre communautés qui existent encore aujourd'hui.

Ouvrage instructif, j'ai moins appris qu'en lisant « Rome cité universelle » mais il reste très intéressant, Les parties sur les religions et l'atelier de l'historien qui met en parallèle la période romaine et la période contemporaine sont vraiment passionnantes. Ce manuel renvoie à d'autres lectures complémentaires telles que la route de la soie, l'Egypte et Byzance… de prochaines lectures en perspectives.

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Cette collection des mondes anciens chez Belin offre le plus souvent des ouvrages de grande qualité, bien documentés et illustrés. du point de vue de l'illustration, ce dernier ne fait pas exception à la règle. Ce tome contient des développements sur :
Le Proche Orient romain dans l'histoire du monde
Economies locales, économies mondiales
Polythéisme, et monothéisme
Carrefour de langues et de cultures
institutions civiques et réalités urbaines
Des campagnes aux déserts
Autorité et contestation
Mémoires et imaginaire

L'ouvrage est très centré sur la période romaine tout en explorant la période hellénistique. L'apparition de l'Islam est juste abordée sans être traitée notamment en termes de continuité ou ruptures par rapport aux âges antérieurs. le regard de l'historien est donc assez centré.
L'atelier de l'historien est très intéressant en détaillant l'histoire des fouilles dans cette région. L'histoire de ce Poche Orient étant assez connu, on découvre peu de choses nouvelles à la lecture de l'ouvrage, qui intègre sans doute un peu moins les recherches les plus actuelles que les autres tomes de la même collection.
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Citations et extraits (2) Ajouter une citation
Le monolinguisme de certains groupes ou de certains individus confère toute leur importance aux interprètes occasionnels ou professionnels. L'organisation du clergé fait d'ailleurs une place aux interprètes chargés de traduire, lors de l'office, lectures et homélies. De même, à la fin du IV°s, des représentants du pouvoir impérial, envoyés à Antioche à la suite d'une grave sédition, se font traduire les propos d'un moine, qui leur parle en araméen, par "l'interprète", c'est-à-dire sans doute par "leur" interprète, chargé de faciliter leurs contacts avec la population. Il faut tenter, à partir des quelques exemples dont on dispose et des comparaisons qu'on peut trouver au gré de sa propre expérience, de prendre la mesure du temps passé à ces traductions, des interférences et des malentendus possibles, des situations de dépendance linguistique où l'on pouvait parfois se trouver, mais aussi, à l'inverse, des joies de l'apprentissage et de la découverte, et des multiples possibilités offertes par la diversité même des langues en présence. Il faut aussi garder à l'esprit la variété des situations possibles, de l'intellectuel capable de s'exprimer à l'oral comme à l'écrit, avec le même niveau de compétence, en deux langues - c'est ce que l'on appelle le bilinguisme - voire plus, au paysan illettré, qui ne connaît que le dialecte en usage dans son village, en passant par l'ouvrier locuteur d'une langue araméenne qu'il n'écrit pas, et capable en revanche d'écrire son nom en grec alors qu'il ne peut déchiffrer un texte complexe dans cette langue. Ce plurilinguisme généralisé et cette diversité de situations linguistiques individuelles sont des traits structurels qui confèrent au Proche-Orient une partie de son identité culturelle propre. On est loin de pouvoir en étudier les conséquences cognitives, psychologiques et sociales.

p. 214
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Pourquoi tant de malheurs dans l'Antiquité tardive ? Le contraste apparent avec le Haut-Empire s'explique par la disparité des sources, moins nombreuses et surtout de nature différente pour les trois premiers siècles de notre ère : les historiens de cette période s'intéressent de préférence à l'activité des empereurs et à l'histoire politique et militaire. Par contraste, les chroniques locales élaborées durant l'Antiquité tardive attachent une grande importance aux crises alimentaires et sanitaires. Les conséquences démographiques de ces épisodes sont difficiles à quantifier et varient selon la nature et la gravité des crises mais aussi, au sein des populations, selon le statut social : les pauvres sont les plus exposés. A la surmortalité immédiate il faut certainement ajouter, dans le cas des famines, une baisse de la fertilité provoquée par la dénutrition. Quoi qu'il en soit, ces crises, mises en regard du double mouvement d'expansion et de densification de l'occupation de l'espace à la même époque, ne font que confirmer que la tendance générale est bien à la croissance puisqu'elles ne la font pas cesser. On en dira autant des ponctions démographiques opérées par les conflits, soit en raison du nombre de morts, soit en raison des déplacements de population.

pp. 82-83
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