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Critique de babounette


Jojo, le gilet jaune - Danièle Sallenave de l'Académie française.
Lu en mai 2019. Paru chez Tracts-Gallimard - 22 mars 2019 - 3,90 €.

Ne reniant pas ses origines relativement modestes, ses parents étaient instituteurs, encore respectés en ces temps là, Danièle Sallenave allant sur ses 79 ans, à l'époque l'instituteur était un personnage important, surtout dans les villages, mon grand-père maternel l'était aussi dans un village en Belgique, l'auteure nous emmène tout au long de ces 42 pages dans le fil de ses réflexions sur le phénomène des Gilets jaunes.
C'est avec une plume fluide qu'elle nous parle de ces "petites gens", ceux "d'en-bas", de leurs demandes de la dérive et de la violence que bon nombre de ces Gilets jaunes condamnent. "Leur mouvement attire, sans forcément les soutenir, des radicaux anti-système et des délinquants ordinaires. Mais il va courir à l'échec s'il se fait régulièrement déborder par des casseurs organisés" page 4.
Casseurs qui s'en prennent aux commerçants, qui détruisent du matériel public, des voitures etc...
Les Gilets jaunes inquiètent, ce mouvement parti de rien et qui a pris une telle ampleur peut évidemment en effrayer certains, surtout dans la population bien plus aisée et bien sûr les élites de la nation.
Mais malgré cela, Danièle Sallenave leur garde le même intérêt qu'à leurs débuts : "A cause de ce qu'il a révélé : la profondeur de la faille ouverte, en France, entre les "élites" et le "peuple". Dont je ne m'accommode pas, ni ne m'accommoderai jamais" page 5.
Elle compare l'ambiance politique et le mouvement de Mai 68 : "Mais il partait des jeunes "d'en-haut", les étudiants" à celle d'aujourd'hui : " les Gilets jaunes viennent "d'en-bas", ils réclament une fiscalité plus juste. La fiscalité a toujours été au départ et au coeur des révoltes populaires. Une amélioration du pouvoir d'achat".
En un mot, ils veulent être entendus.
"Cette manière de parler d'eux, dans la presse, les médias, les milieux politiques, sur les réseaux sociaux ! Une condescendance, un mépris."
Un membre du Cercle Montesquieu (décembre 2018) écrit-elle, a déclaré : "Le pouvoir d'achat n'est pas un droit de l'homme, il ne figure pas dans la Déclaration française des droits de l'homme et du citoyen de 1789, texte sur lesquels sont fondés tous les droits dont jouissent les Français aujourd'hui". ( "Manger est-il un droit de l'homme ?" page 7.
"Les familles du CAC 40 ne se battent-elles pas aussi pour protéger leurs droits acquis ? "
Le président lui-même, fin juin 2018 n'a-t-il pas dit lors d'une rencontre avec des entrepreneurs de la Halle de Freyssinet à Paris: "Une gare, c'est un lieu où l'on croise les gens qui réussissent et les gens qui ne sont rien" et cela après avoir dit publiquement qu'il ne prononcerait plus de phrases méprisantes.
Danièle Sallenave se pose aussi la question suivante : "Le mouvement des Gilets jaunes est-il le point de départ d'une révolution ?"
Certains Gilets jaunes le disent.
Elle met aussi en perspective de manière claire, les événements de ces dernières semaines avec des événements de l'histoire.
L'auteure est allée à la rencontre de ces Gilets jaunes, elle s'est rendue aux ronds-points pour comprendre ce qu'il se passait. Elle dénonce ces petites phrases comme encore celle du président disant "que les médias ne devraient pas accorder autant de place sur leurs antennes à Jojo le gilet jaune qu'à un ministre".
Il est vrai que la violence de quelques-uns a jeté le discrédit sur les Gilets jaunes.
"Nul ne peut prédire l'avenir d'un mouvement de cet ordre, son espérance de vie est sans doute limitée. D'autres cependant suivront et rien n'interdit de penser qu'ils puissent retrouver l'ancienne solidarité active des intellectuels organiques et des artistes, le soutien de leur expérience et de leurs savoirs" page 41.
"La protestation des Gilets jaunes, c'est une demande de plus de justice, de dignité, d'égalité, portée par une catégorie de Français qu'on n'avait pas l'habitude d'écouter ni d'entendre" page 42.
Et pour finir, Danièle Sallenave termine son essai par ces phrases non dénuées de poésie : "Dans les semaines à venir, il m'arrivera sans doute un jour ou l'autre de faire le tour d'un rond-point que je connais bien, et où je me suis arrêtée souvent. Hérissé de bannières et de slogans, il est entouré d'une palissade de palettes. Un feu y flambe en permanence. Je donnerai comme à chaque fois un coup de klaxon en passant. Je ne sais pas combien de temps encore il y aura quelqu'un pour me répondre."
C'est sûr que les Gilets jaunes ont trouvé en Danièle Sallenave, si pas une amie, une personne à leur écoute et qui les comprend.





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