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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Sergio Salma évoque la catastrophe du Bois du Cazier, à Marcinelle, en août 56, à travers le récit de la vie quotidienne de Pietro, un immigré italien, mineur de fond. Ce roman graphique est très réussi parce qu'il ne tombe pas dans le didactique et est exempt de discours historique à vocation édifiante. Ici pas de jugement, pas de diatribe contre les patrons de charbonnages ou l'Etat belge prêt à sacrifier la main d'oeuvre qu'il avait obtenue pour pas cher. Salma parle du temps qui passe, des doutes de ces Italiens déchirés entre l'envie de retourner au village et la certitude que maintenant la vie est ici . Il évoque les regrets, les instants où un sourire, une chevelure volant au vent, un frôlement de main laissent entrevoir une porte de sortie, une vie moins absurde. Et, paradoxalement, cette chronique assez neutre, se révèle d'une terrible efficacité pour dénoncer la condition des mineurs en plein milieu du vingtième siècle, alors même que la Belgique s'apprêtait à inviter le monde entier pour célébrer le triomphe de la science et du progrès technique. Et quand le chef des sauveteurs prononce la phrase restée célèbre, "Tutti cadaveri", le lecteur a un goût de cendre dans la bouche.
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Intelligent et sensible.

Une tragédie comme celle du bois du Cazier à Marcinelle, en 1956, c'est loin historiquement, et géographiquement. Des tragédies dans les mines, il y en a beaucoup. Celle de Marcinelle, voici plus de 50 ans, n'a jamais quitté les consciences belges (et encore moins celle de la région "du centre", comme on l'appelle).

262 morts, à la suite d'une manoeuvre maladroite. Mais qui sonne quand même comme la chronique d'une catastrophe annoncée. Même si l'auteur ne prend pas cette voie, facile, vers les patrons pourris et avides au gain.

Sergio Salma nous livre une oeuvre intelligente, ai-je dit. Car il choisit de recadrer le tout dans un contexte plus large (tout en restant au niveau des individus): le Plan charbon de van Acker au lendemain de la seconde guerre mondiale. L'immigration massive d'Italiens qui sont appelés "macaroni", moqués, insultés, et qui trouvent en Belgique une seconde patrie. C'est l'histoire de deux frères, fictive et pourtant si "réelle". Un se trouve bien en Belgique, Pietro, l'autre rêve de l'Italie, d'où les tantes envoient du fromage et du saucisson.

C'est la Belgique, pluvieuse et froide, et les charbonnages, noirs et impitoyables.

Récit intelligent car on retrace l'année 1956 à travers Pietro et son rapport au monde, aux autres, à la mine, et à la famille, aux femmes aussi.

Sensible car pudique. Car humain. Pietro, on l'aime pour ses faiblesses et ses doutes. On ne s'appesantit pas sur la mort et le désastre. Il se lit dans ces visages simplement croqués, dans les postures de gens simples, directs, déracinés. Même l'histoire d'amour, cette séduction maladroite pleine de non-dits et d'incompréhension entre Pietro et une jeune blonde, est très puissante et tendre à la fois.

C'est par ailleurs très bien documenté. La salle des pendus, les wagons, la vie quotidienne dans la mine, les chevaux, etc. tout est d'un réalisme de bon aloi. Les gueules noires, la vie au fond du trou... Les quelques discussions entre frères sur l'Italie, la place en Belgique, etc. c'est aussi très bien rendu.

A une époque où l'immigration est honnie, haïe, où l'on crache à la tête de l'immigré, il est bon de se plonger dans un bout de son passé.

Une belle réussite, idéalement suivie d'un court dossier pédagogique bien vu. Mention particulière pour les affiches de l'époque, encourageant la production de charbon, exhortant les travailleurs qui oeuvrent pour le bien commun...
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Je ne vais pas répéter la quatrième de couverture. Juste ajouter que la construction du roman graphique commence et se termine le 8 août 1956, par l'accident et par les tentatives de sauvetage, début et fin qui enserrent les sept premiers mois de 1956, pour montrer le quotidien de Pietro Bellofiore et de sa famille. Ce personnage de Pietro est vraiment intéressant : Italien d'origine, et bien entouré par toute sa « smala » (femme et fiston, frère, copains du même village en Italie), il se démarque des autres parce qu'il n'a aucune envie de retourner dans son pays natal. « Mon pays c'est celui qui me donne à manger » proclame-t-il. Aussi, plutôt que d'économiser pour rentrer et s'acheter quelque chose au pays, il s'offre une Vespa, pour ne plus pédaler douloureusement avant et après des journées à la mine épuisantes. C'est la Vespa qui lui donne l'occasion de rencontrer Françoise, fille d'un colon belge au Congo. Une rencontre qui répond sans doute au désir inconscient d'intégration de Pietro. Comme l'explique Sergio Salma à la fin du livre, les difficultés de compréhension entre la Belge et l'immigré italien sont une sorte de métaphore du malentendu entre l'ouvrier italien du fond et le belge en surface, qui a provoqué la catastrophe le 8 août au matin.

Au delà de ce personnage de fiction et de l'aspect romancé (pas lourd du tout), c'est le travail des mineurs de fond qui est montré, leurs conditions de travail, le racisme envers les « Macaronis » dont l'Italie a été contente de se débarrasser contre des tonnes de charbon et que la Belgique a attirés avec des promesses dignes de l'Eldorado pour mener la « bataille du charbon », déclarée priorité nationale après la seconde guerre mondiale. Mais les premiers temps en Belgique n'ont pas été aussi roses que les affiches de propagande qui les recrutaient en Italie, loin s'en faut. Par exemple, les ouvriers italiens ont d'abord été logés dans des baraquements qui avaient servi pour les prisonniers de guerre allemands… (Ceci dit, j'ai vu un reportage à Manoppello, un petit village italien qui a perdu vingt-huit ressortissants dans la catastrophe, et dont les descendants des victimes disent que l'Italie n'a rien fait pour eux à ce moment-là, ce sont les Belges qui se sont bougés pour eux – vous me direz, on leur devait bien ça…). A travers le personnage de Françoise, c'est aussi la Belgique des années 1950 qui est évoquée, le contraste avec les ouvriers, le colonialisme.

J'ai beaucoup aimé le traitement graphique de cette histoire par Sergio Salma : un dessin en noir et blanc très clair, réaliste évidemment mais aussi très sensible, un découpage judicieux, et surtout de nombreuses pages sans paroles qui montrent la routine, la pénibilité du travail, les heures passées au fond, à 975 ou 1035 mètres sous terre, sans remonter en surface, des jours et des jours où la solidarité entre mineurs n'est pas un vain mot. Un dossier en fin d'ouvrage rappelle les enjeux de la bataille du charbon, l'immigration italienne, les jours et les jours d'attente qui ont suivi la catastrophe avant que les sauveteurs puissent enfin remonter les corps des 262 victimes, dont 139 Italiens. On peut essayer de s'imaginer les galeries où le feu a pu se propager rapidement grâce à la ventilation permanente et se nourrir du bois qui étançonnait les tailles, la fumée toxique, le noir complet dans lequel ont été plongés les mineurs, les tentatives de sauvetage avec des moyens dérisoires face à l'ampleur du drame. Seules 13 personnes ont pu sortir vivantes du brasier, le jour même ou le lendemain. le dernier corps a été remonté au jour en décembre… 1957.

Un sujet social et un ouvrage de mémoire poignant, indispensable.
Lien : http://desmotsetdesnotes.wor..
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Marcinelle 1956 est une histoire fictive inspirée de faits réels. L'auteur Sergio Salma montre la difficulté du travail dans les mines après la seconde guerre mondiale. de nombreux italiens et d'autres étrangers vont venir travailler en Belgique pour mieux gagner leur vies. Les conditions salariales étaient plus intéressantes en comparaison à un autre travail mais celui-ci était tellement éreintant que peu de Belge y travaillait. En 1956, un accident causa la mort de plus de 200 personnes. Un histoire poignante, triste et bien réele...
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Une merveille ! Partie pour acheter (encore) un Taniguchi, j'ai voulu "changer un peu" et essayer un nouvel auteur..je voulais voir la collection casterman écritures pour acheter "Castro" de Kleist. Par chance, il n'y était pas, j'ai donc choisi "Marcinelle 1956" parce que j'ai visité un musée de la mine la semaine dernière ..dans cette histoire, j'ai retrouvé tout ce qui m'avait alors été expliqué!
Et bien plus.. C'est aussi l'histoire d'un homme qui veut se sentir chez lui dans le pays où il est venu vivre, qui ne veut précisément pas vivre uniquement dans le passé et le souvenir de ce qu'il a du quitter. C'est l'histoire de la force des liens du sang, de la famille. Et c'est l'histoire d'une rencontre ..
Enfin, il y a le graphisme ! Pour moi ce fut une claque ! le dessin est moins élaboré que chez Taniguchi parce qu'il est tout en relief ! Ces personnages ne sont pas juste des coups de crayon ! Ils vivent devant nous !
Bref, j'ai adoré et j'ai hâte de retrouver une oeuvre de cet auteur..
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Marcinelle en Belgique n'est pas que la ville d'où ont émergé les grands dessinateurs de BD des années 50. C'était aussi, à la même époque, une des capitales du charbon avec ses terrils et ses corons. Et c'est aussi l'endroit d'une épouvantable catastrophe qui a coûté la mort à 262 mineurs qui reste gravée dans la mémoire des belges. Sergio Salma se propose avec cet album, très loin de ses productions habituelles, de rendre hommage à ces hommes qui ont péri en août 1956.
Si le drame de Marcinelle est le prétexte à cet album, il ne se résume pas à une simple illustration de ce fait divers. C'est surtout et avant tout un très émouvant hommage à tous ses mineurs d'origine italienne qui, après guerre, sont venus travailler en Belgique suite à un accord commercial entre les deux pays. A travers le personnage de Pietro, Sergio Salma fait revivre par touches subtiles, le quotidien de ces charbonniers venant d'un pays ensoleillé et s'enfonçant dans la mine au lever du soleil pour en sortir la nuit tombée. Tout y est suggéré avec finesse, la communauté italienne soudée avec ses habitudes de vie plutôt joyeuses et colorées, son catholicisme fervent, ses lois familiales et ses vespas. Mais aussi le racisme ordinaire envers ses "macaronis" toujours soupçonnés de tirer au flanc, les rêves de retour au pays ou le désir de rester dans cette sombre terre d'accueil. Et puis, il y a la rencontre fortuite entre Pietro et Françoise, jeune et belle bourgeoise belge, un peu esseulée, qui va faire rêver le mineur italien pourtant marié et père de famille. de fil en aiguille, le début d'un amour va se glisser dans une vie de labeur et de résignation.
Semblant de bonheur et malheur se mêlent admirablement dans cet album peu bavard mais à l'intensité dramatique parfaite. le destin de tous ces personnages est lié à une incommunicabilité terrible. L'accident qui a causé le drame de Marcinelle est le résultat d'un malentendu entre un ouvrier belge et son homologue italien dont le français était trop rudimentaire. de la rencontre de Pietro avec son vocabulaire très utilitaire et de la belle belge, naîtra également une méprise, faisant gamberger involontairement le mineur italien.
C'est beau, fort, poignant et surtout, quel dessin !
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