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sur 102 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
L'auteure a l'occasion de passer la nuit dans le musée Picasso, à l'ombre de cette sculpture qui lui plaît beaucoup. Elle commence par refuser, puis finit par accepter, mais une immense angoisse l'étreint et elle ne songe qu'à fuir, s'échapper à tout prix, comme si un danger la guettait. Cette nuit au musée va lui permettre d'exprimer son ressenti et tout ce que lui inspire l'oeuvre.

La réflexion sur L'Homme qui marche de Giacometti est très intéressante, car Lydie Salvayre creuse dans tous les sens, cherche à approfondir, ce que l'artiste a voulu exprimer.

J'ai aimé aussi la manière dont elle critique les musées qui selon elle enferment les oeuvres, les tiennent en cage, et surtout sa diatribe contre le monde de l'art : l'entre soi d'une certaine élite culturelle, sous la houlette de celui qu'elle appelle « le ministre des distractions » au lieu de ministre de la culture, ce qui en dit long, le pouvoir de l'argent dans l'art.

Elle revient aussi sur son enfance avec son père violent, le « fragnol » que l'on parlait à la maison et la manière dont les enfants issus de l'immigration se sentent à part, vis-à-vis de l'art, de la culture, car ils pensent ne pas maîtriser suffisamment la langue.

Lydie Salvayre évoque aussi les doutes de Giacometti, dont l'estime de soi est vraiment très basse et qui se considère comme un raté, ce qui nous vaut une classification des ratés corrosive, que j'ai beaucoup appréciée.

J'apprécie énormément ce ton corrosif si caractéristique de l'auteure et ses réactions épidermiques, sa colère ne sont pas pour me déplaire, même si elles se retournent souvent contre Bernard son compagnon !

On rencontre au passage des artistes qui ont fait un peu de route avec Giacometti : Beckett, Picasso (qu'il n'aimait guère, trop solaire pour lui si modeste) ainsi que le rôle important de son frère Diego dans sa vie…

Bien-sûr la rencontre qui n'a pas pu se faire au cours de la nuit au musée, va se produire plus tard, les réflexions de Lydie Salvayre s'étant un peu décantées et elle comprendra tout le sens du message de Giacometti, en éclairant sa propre histoire. Mais je vous laisse découvrir tout cela…

J'ai choisi ce livre car la sculpture de Giacometti me fascine, alors que je ne l'ai vue qu'en photographie, par le message qu'elle m'envoie et que l'auteure ne tarde pas à percevoir. Je pourrais en parler pendant des heures… J'espère vous avoir convaincus d'y jeter un oeil (et plus si affinités).

J'ai pris beaucoup de plaisir à lire cet essai et les réflexions de l'auteure me touchent car elle considère que son statut d'enfant d'émigrés pauvres, a tendance à l'exclure du monde de l'art, ce qu'elle a réussi dans la littérature n'est pas encore « mûr » dans la peinture ou la sculpture, comme si elle ne s'en donnait pas le droit, cet art étant monopolisés par les intellos friqués…

Un grand merci à NetGalley et aux éditions Stock qui ont permis cette lecture.

#MarcherJusquauSoir #NetGalleyFrance
Lien : https://leslivresdeve.wordpr..
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L'impression que c'est le livre le plus personnel de Lydie Salvayre. Sa verve et ses colères y sont encore bien présentes. La narratrice va s'enfermer dans un musée face aux sculptures du suisse Giacometti. Mais surtout elle va se remémorer son enfance avec un père violent. Des réflexions très fortes sur l'art, la tv, les écrivains, la maladie et le monde actuel d'une grande liberté. Un bon cru 2019.
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Je vous invite à passer une nuit au musée en compagnie de Lydie Salvayre, ou plutôt c'est elle qui nous invite à ce surprenant voyage dans son dernier livre, Marcher jusqu'au soir, que j'ai beaucoup aimé.
Ce récit peut à la fois envoûter ou bien agacer, peut-être aussi les deux à la fois. Il est possible de rester au bord du texte, à sa surface, ne jamais parvenir à franchir le premier degré d'un labyrinthe qui plonge dans les dédales intérieurs d'une vie intime.
C'est une colère saine, inspirante, peut-être exutoire pour l'auteure... Consolatrice certainement...
Les mots sont violents, acides, ils décapent. C'est une plume trempée au vitriol et je comprends qu'elle puisse surprendre, agacer même, décourager certains lecteurs.
Lydie Salvayre nous raconte dans ce livre autobiographique l'expérience qu'elle a vécue, une sorte de jeu, de défi qui lui a été proposé par une amie, passer une nuit enfermée au Musée Picasso, avec comme seul compagnon la statue L'homme qui marche d'Alberto Giacometti.
Moi-même je me suis senti désarçonné par les premières pages de ce livre. Je ne savais pas trop bien où cette écrivaine m'amenait. La patience est salutaire. J'ai senti brusquement comme une main tendue qui me prenait la mienne, comme une respiration, comme des gestes à tâtons, comme une lampe tendue dans l'obscurité, non pas pour visiter un musée de nuit, mais descendre dans les profondeurs abyssales d'une vie intérieure.
Je connais encore très peu cette auteure, je la découvre dans cette deuxième rencontre et je ne saurai dire quelle part de sa vie intérieure elle jette dans les pages de ces livres. Ici visiblement, c'est un texte très personnel. Oui, elle règle des comptes avec l'Art, avec la Culture, le snobisme, l'argent, tous ces faux semblants, et c'est jubilatoire. Oui elle est de mauvaise foi sans nulle doute et c'est tout aussi jubilatoire...
C'est brusquement une petite fille qui nous parle, celle qu'elle fut, enfant d'une famille populaire d'immigrés espagnols, dominée par la figure écrasante d'un père redoutable. Elle se souvient qu'elle fut cette petite fille qui grandit, tiraillée entre l'amour et la honte.
Devant cette statue courbée vers elle, elle voudrait être touchée par la grâce de l'art, mais aucune émotion ne parvient à l'étreindre celle nuit-là... C'est une autre grâce qui la touche, celle de l'introspection, celle de pouvoir se pencher sur sa vie, ses vies intérieures, parler de ses origines sociales, d'un père qui la terrorisait, dire la peur du noir, savoir remonter le cours des choses, décrypter ses émotions, avouer qu'elle n'a peut-être jamais vraiment su trouver sa place dans les milieux culturels qu'elle est amenée à fréquenter depuis qu'elle est écrivaine, dire cette honte, dire cela avec humilité, et puis évoquer aussi sa maladie.
Il est des vies qui peuvent être façonnées par ce qu'elles ont éprouvé durant leur enfance, marquées à jamais, façonnées comme une statue de bronze filiforme condamnée à marcher, courbée sur son chemin, son ombre, ses pas.
Plus tard, ce voyage au musée est comme une eau qui se décante. En s'y penchant elle voit un visage, une silhouette qui remonte à la surface, c'est celle d'Alberto Giacometti. Elle se reconnaît alors brusquement comme dans un miroir. Elle est allée à la rencontre de cet artiste, a voulu savoir ce qu'avait été son existence et les circonstances qui avaient donné naissance à l'une de ses oeuvres les plus célèbres.
Peut-être Lydie Salvayre est-elle à son tour cette femme qui marche, nue, penchée vers les pages, celles des histoires qu'elle écrit depuis si longtemps... ? Les autres pages à écrire ? Avancer, toujours avancer, jouir, comme si les mots, l'art, un crayon, un morceau de bronze, un fusain, une partition musicale, pouvaient à eux seuls tenir à distance la barbarie et la mort.
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Elle est surprenante Lydie Salvayre.
Et toujours dans le bon sens.
On ne sait jamais à quoi s'attendre en ouvrant un de ses livres.
Ici, la narratrice se voit proposer de passer une nuit seule dans un musée.
Musée où se trouve « L'homme qui marche », oeuvre de Giacometti qu'elle affectionne particulièrement.
Après hésitation, elle accepte.
Mais cette nuit ne sera pas du tout ce qu'elle escomptait.
Rien, aucune émotion devant toutes ces oeuvres.
Mais des tas de remises en questions, sur l'art, sur sa vie, sur la vie, sur la mort.....
Cette nuit au musée ne lui inspire que du vide, vide dans lequel elle laisse exploser ses colères.
Contre son père, contre la modestie de son enfance, contre les bobos, contre les intellos, contre les marchands d'art.... 
Elle n'est envahie que de pensées sombres.
Elle se sent « coeur et cerveau sec ».
Les musées séparent l'art de la vie..
Les oeuvres exposées sont sorties de leur contexte.
« Les oeuvres d'art s'accommodent mal des cages ».
J'ai aimé ce ressenti qui est le mien dans les musées où je n'arrive que rarement à ressentir une émotion, tout m'y semble figé.
Ce livre est aussi un hommage à Giacometti dont elle fait une mini biographie.
Lydie Salvayre s'éclate avec le style qu'elle alambique, qu'elle enrichit de termes choisis, qu'elle pare de subjonctifs.
Revanche d'une « modeste » qui s'éclate dans l'écriture.
Belle revanche qui ravit le lecteur.
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Rester enfermé dans un musée le temps d'une nuit… Un musée qui expose, de plus, une des oeuvres d'art que vous appréciez depuis des années ; vous laisseriez vous tenter ?
Lydie Salvayre a reçu une telle proposition, avec, en contrepartie, un compte rendu à rédiger car destiné à être publié. le musée ? Celui de Picasso à Paris. L'oeuvre ? « L'homme qui marche » de Giacometti. Longtemps, elle a refusé, et puis, peu à peu, l'idée a germé dans son esprit, et la curiosité liée à cette expérience inédite l'a poussée à accepter cette mission.
Lydie Salvayre va donc passer la nuit sur un lit de camp, au pied de cette statue représentant un homme extrêmement mince, presque léger, aérien, en train de marcher, les pieds, eux, bien ancrés dans le sol.
Que faire durant cette nuit ? Qu'écrire ? L'oeuvre a déjà été scrutée, analysée, explicitée dans tous les sens. Alors la romancière va laisser s'exprimer sa plume : sa vision de l'Art, sa vision de la société actuelle ; surtout celui du microcosme artistique parisien, et puis par le biais d'une phrase qui a été prononcée lors d'un dîner chez un célèbre réalisateur à son encontre et qui la blesse encore aujourd'hui, « elle a l'air bien modeste », Lydie Salvayre va remonter aux racines de sa « modestie ». Fille d'immigrés espagnols, elle porte sur la vie culturelle et artistique un regard bien différent de celui de l'intelligentsia française. La valeur des objets, des personnes, mais aussi des sentiments vont alors être évoqués. Voilà qu'apparaît au détour d'une phrase un père bien traumatisant. Et puis, c'est la maladie qui est évoquée, avec son corollaire, la possible imminence de la mort.

Au final, c'est un récit très intime, bien loin d'une éventuelle fiction rédigée à partir d'une oeuvre d'art qu'aura rédigé notre romancière « Goncourisée » il y a peu, avec sa verve et son art du Verbe dans sa splendeur.
« L'art ne valait rien sans doute mais rien ne valait l'art », conclue l'auteure, pour s'épancher, pourrait-on ajouter.
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Une lecture très intéressant sur le sujet de l'art, où l'auteure aborde plusieurs réflexions.
On y apprend aussi sur Giocometti et l'homme qui marche, pour ma part j'affectionne l'art et je suis toujours enchantée de découvrir ou d'approfondir la connaissance sur tel ou tel artiste, ou une oeuvre, un tableau, une sculpture. Ce livre m'a permis donc de cheminer ici et là.
L'auteure ne se contente pas d'aborder et d'explorer le sujet sur l'art mais sur elle-même, ses origines, sa maladie, façon aussi d'aborder sur la fin du livre le sujet de la vie et de la mort.
Un livre donc fort intéressant mais qui ne se lit pas si facilement que cela, même si on aime l'art. Pour autant, L'homme qui marche, m'attend et c'est avec plaisir que je le rencontrerai.

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Se laisser enfermer dans un musée toute une nuit, avec un lit de camp, cela vous inspire-t-il ? Alina Gurdiel a proposé à des écrivains de tenter l'expérience et de la raconter. On ne peut pas dire que Lydie Salvayre, désireuse de mieux se confronter à "L'homme qui marche" et aux oeuvres de Giacometti, ait vécu une grande révélation artistique, loin s'en faut, et c'est même plutôt soulagée qu'elle quitta au matin le musée Picasso. À en juger par les deux cent dix pages de "Marcher jusqu'au soir", elle n'a pas perdu son temps, car durant le cours versatile de ses doutes et contrariétés, le lecteur a le loisir d'explorer son propre rapport au musée et à l'art.

"... la force de L'Homme qui marche excédait-elle les capacités de mon âme et ses très exiguës dimensions ?"

Qu'il partage ou pas les griefs et sentiments de l'écrivaine, le lecteur – les musées, ce n'est pas si mal, malgré leurs contraintes, les abus de la marchandisation de l'art, le côté entre-soi élitiste que peut percevoir négativement, à tort ou à raison, le socialement défavorisé – le lecteur disais-je, saluera la phrase à la fois familière (s'il faut dire merde, c'est merde) et distinguée (rhétorique habile et musicale, d'apparence si aisée). Elle nous livre quelques très belles pages sur Giacometti, les plus profondes du livre à mon sens, où l'artiste persiste dans la tentation de réussir l'impossible perfection, "le seul pari qui vaille". Dans cette métaphysique de l'impossible, Salvayre joint des écrivain(e)s, telle Virginia Woolf, sa "très affectionnée", toujours insatisfaite de l'oeuvre à cause de "l'impossible adéquation avec le rêve qui l'avait enfantée".

L'isolement au musée est propice aux introspections et la sincérité porte Lydie Salvayre à la révélation de ses fragilités.
Après un dîner mondain où elle se montra peu loquace, alors auteure déjà connue depuis le Goncourt, elle apprit qu'une actrice prétentieuse avait dit à son propos «elle a l'air bien modeste» : ces mots venaient "objectiver une différence de catégorie comme aurait dit ma mère, une différence de caste [...] dont je découvrais qu'elle était inscrite à tout jamais sur ma gueule et dans mes façons d'être en dépit des bonnes manières que j'avais laborieusement (et sans doute mal) acquises".
Dans la même veine, quelques lignes sur ses difficultés à s'exprimer en télévision :"Je fus prise d'une grande colère contre un système qui ne promouvait que ceux qui avaient appris dès le berceau à formuler de jolies phrases car ils avaient des papas-mamans rompus à l'art de papoter, [...]". Colère d'une "enfant de broques", honte d'un milieu populaire d'immigrés espagnols.

Après cette expérience nocturne, elle retourne au Musée Picasso et en revient réjouie des oeuvres de l'Espagnol et du public qui s'en délecte et s'en amuse. Viennent alors des mots positifs sur ce que peut l'art, une note gaie pour point final, qui sent un peu le travail sur commande.

On retrouve la vivacité familière de Lydie Salvayre dans ces pages subjectives. Personnellement, je regrette un peu l'originalité de la romancière qui m'avait emporté dans "La puissance des mouches".

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Quelle belle invitation!
Une réflexion sur l art, une rencontre avec cet artiste talentueux et modeste, Giocometti, mais également une approche sur les souvenirs d' enfance de l'auteure.
Entre essai et autobiographie, ce livre est inclassable, il m'a permis d'énormément m'interroger, de me positionner sur ce vaste sujet qu'est l'art.
J'ai souvent rêver de me retrouver seule dans un musée, de pouvoir profiter des oeuvres, sans bruit, sans commentaire, sans sonnerie de téléphone. Seule avec les oeuvres et l'invisible présence des artistes.
C'est pourquoi, cette initiative d'Alina Gurdiel m'a énormément séduite.
Merci à Lydie Salvayre de l'avoir finalement acceptée et ainsi d'avoir pu nous offrir ce livre.
Cette rencontre entre une oeuvre (l'Homme qui marche), l'artiste qui l'a réalisée et l'auteure, est d'une grande richesse.
Une rencontre qui découle sur une réelle introspection, sur maintes réflexions et c'est pourquoi je vous incite à lire ce livre.
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Après la lecture de Quand tu écouteras cette chanson de Lola Lafon, je poursuis ma découverte de la collection « Une nuit au musée ».
Lydie Salvayre a choisi le Musée Picasso à Paris où se déroule une exposition d'Alberto Giacometti, sculpteur suisse connu mondialement pour ses silhouettes longilignes. C'est la première fois que je lis la plume de cette auteure pourtant très connue et je découvre ici un récit de colère, de hargne, de fureur à l'encontre des musées, lieu emblématique à ses yeux de l'élite culturelle, symptomatique d'une exclusion d'un rejet de classe. Il est amusant de constater qu'une telle femme de lettres, ayant remporté un Goncourt, psychiatre de formation, soit en quelque sorte intimidée par un musée et qu'elle l'associe ainsi à l'exclusion. Cette colère est également un prétexte pour revenir sur sa propre histoire familiale, celle d'un exil familial fuyant le Franquisme, d'un engagement politique et d'une violence paternelle très présente. Face à L'homme qui marche de Giacometti saisissant le mouvement d'une silhouette quasi dissolue dans le bronze, Lydie Salvayre remue souvenirs et amertume face à ce sentiment d'imposture contre lequel elle semble longtemps avoir lutté éprouvant les longues heures de la nuit qu'elle affronte aux côtés d'un autre exilé espagnol, Pablo Picasso, monstre sacré du modernisme et monstre dévorant dans sa vie intime.
Un très beau témoignage amenant réflexion sur ce qui fait oeuvre, référence et culture commune dans une société métissée.
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Après avoir obtenu le Prix Goncourt en 2014 avec « Pas Pleurer », Lydie Salvayre dévoile un récit intime avec son livre « Marcher jusqu'au soir ». Il est question d'art, d'institutions artistiques et du rapport que l'on entretient avec le milieu culturel. Pour ce faire, l'auteur finit par accepter l'invitation de l'éditrice Alina Gurdiel de passer une nuit entière au Musée Picasso lorsque celui-ci inaugure son exposition « Picasso-Giacometti ».

C'est un livre personnel où des éléments constituants de la vie de l'auteure se dévoilent. Seule, au cours de cette nuit, elle est confrontée à sa propre impuissance, ses angoisses et son malaise. Lydie Salvayre exprime avec force ce qu'elle a sur le coeur avec un courage qui lui ressemble.

Sonnée par la vision de la mort, voir « L'homme qui marche » en vrai, se dresser devant elle, est autant une révélation qu'un cauchemar, l'auteure n'assume pas ce spectacle aussi attendu que redouté, celui d'un homme se dirigeant a priori vers une mort certaine.
L'angoisse et la frustration ressenties lors de cette nuit au musée ouvrent la boîte des souvenirs d'enfance enfouis. Pour la première fois, l'auteure évoque sa relation à un père redoutable et redouté, paranoïaque et violent, face à la grandeur du musée Picasso, l'auteure se retrouve comme face à son père terrible, dominateur et autoritaire. Il y est aussi question de son enfance issue d'un milieu populaire et des blessures qu'elle conserve à l'âge adulte alors qu'elle met tout en oeuvre pour s'extraire de cette condition modeste initiale.

En colère, libre et drôle, Lydie Salvayre porte le verbe haut avec des comparaisons jubilatoires où elle compare les musées à des hospices pour chefs-d'oeuvre et le ministre de la culture qu'elle nomme le « ministre des distractions ». L'auteure finit par temporiser son propos en reconnaissant l'utilité et l'importance des musées, la richesse de ce que l'on peut vivre grâce au partage et à l'expérience des autres à travers l'art.
Ce livre est également une belle déclaration au génie de Giacometti qui se définissait par son impuissance, sa modestie, ses échecs et qui a fait un choix d'une vie pauvre alors même qu'il a connu la gloire et l'opulence monétaire de son vivant.

Des réflexions passionnantes et touchantes, piquantes, parfois disproportionnées, mais qui appartiennent à l'auteure. Cet essai m'a donné envie de découvrir les autres ouvrages de la collection « Ma nuit au Musée » des éditions Stock : le prochain sera certainement l'expérience de Kamel Daoud dans « Le Peintre dévorant la Femme ».
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