Lamentation

....je la poussai doucement et, à ma grande surprise, tournant sur des gonds bien huilés, elle s'ouvrit aussitôt.
Elle donnait sur une vaste plate-forme carrée, éclairée par des torches placées dans des appliques accrochées aux murs. La plate-forme entourait un escalier qui menait ua rez-de-chaussée. Dans un coin, quatre hommes portant l'uniforme sombre des gentilshommes de la garde royale s'échinaient à actionner les manivelles d'un gros treuil pour hisser quelque chose dans la cage d'escalier depuis la rez-de-chaussée. J'entendis quelqu'un ahaner et crier d'en bas : "Attention, espèces d'idiots, gardez-moi en équilibre !" Puis, comme les hommes tiraient plus fort sur les cordes, une créature obèse apparut, assise dans un lourd fauteuil roulant et retenue par une ceinture de cuir attachée autour de sa taille. J'aperçus une tête quasiment chauve et un énorme visage rond, rougeaud, avec une barbe clairsemée ballottant sur le col d'un cafetan. Les grosses bajoues du roi tressaillaient de douleur.

Lorsqu’on consulte la chronologie des événements politiques en 1546, deux choses se détachent. La première, c’est qu’au printemps une grande chasse aux hérétiques fut lancée depuis la cour, visant des personnes qui avaient nié la vérité de la transsubstantiation, doctrine qui affirme que, durant la célébration de la messe, le pain et le vin deviennent physiquement le sang et le corps du Christ. Cependant un grand nombre de protestants niaient cette doctrine. C’est à ce sujet qu’en 1539 Henri VIII adopta une position ferme. Selon la « loi des six articles » promulguée cette année-là, la négation de la transsubstantation, appelée « doctrine sacramentaire », constituait une hérésie. On avait le droit d’abjurer une fois ; le refus d’abjurer ou la rechute dans l’hérésie conduisaient au bûcher.

Note historique

-Votre manque de foi me tracasse. Il vous dévorera intérieurement, jusqu’à ce qu’il ne reste qu’une coquille vide. (...)
-J’ai souhaité retrouver Dieu, répondis-je avec sincérité, mais je ne le vois dans aucune des deux factions existant aujourd’hui.

Chapitre 39

(...) si Mme Slanning venait, il fallait la prier d’avoir l’amabilité d’aller se faire bouillir la tête dans une casserole.

Chapitre 20

— Et les anabaptistes ?
— C’est l’une des sectes religieuses qui ont surgi en Allemagne, il y a vingt ans. Ils croient qu’il faut revenir aux pratiques des premiers chrétiens. Ce sont des sacramentaires, mais ils pensent aussi que le baptême des enfants n’est pas valable, que seuls les adultes qui ont appris à connaître le Christ peuvent être baptisés. D’où le terme “anabaptistes”. En outre, et plus dangereusement, ils partagent la croyance des tout premiers chrétiens selon laquelle les différences sociales entres les hommes devraient être abolies et que tous les biens devraient être possédés en commun.

Chapitre 8

(...) on allait brûler vives quatre personnes, dont une femme, parce qu’elles avaient nié que le corps et le sang du Christ étaient présents dans l’hostie au cours de la célébration de l’Eucharistie, durant la messe. Voilà à quelles extrémités nous en étions venus lors de la grande chasse aux hérétiques de 1546.

Chapitre 1

En Angleterre, durant l’été 1546, les événements politiques furent exceptionnellement dramatiques. Anne Askew fut accusée d’hérésie, torturée, brûlée vive, et elle a réellement laissé le récit de ses souffrances. Les festivités organisées à Londres pour recevoir l’amiral d’Annebault ont bien eu lieu et avec le faste décrit dans le roman. L’histoire de Bertano est authentique. Un complot fut ourdi par les traditionalistes pour détrôner Catherine Parr et elle a bien écrit Lamentation of a Sinner (« Lamentation d’une pécheresse »). Cependant, autant qu’on le sache, le livre n’a pas été volé.

Note de l'auteur

Mais je n’étais pas aussi certain de l’innocence de Jane la bouffonne. J’avais le sentiment qu’elle était moins bête qu’elle ne le laissait croire, bien que ce ne fût pas suffisant pour constituer une preuve.

Chapitre 15

Je n’avais plus aucune sympathie pour l’un ou l’autre des deux bords dans cette querelle religieuse et il m’arrivait même de douter de l’existence de Dieu. Toutefois, ayant été par le passé associé aux réformateurs, comme la plupart des gens cette année-là j’avais gardé profil bas et bouche close.

partir du mois d’avril, le bruit courut que des gens de toute classe étaient arrêtés pour être interrogés à propos de leur opinion sur la messe et sur des livres interdits en leur possession. Les interrogatoires avaient même concerné des membres de la maison du roi et de celle de la reine. Selon l’une des diverses rumeurs courant les rues, Anne Askew, la plus connue des personnes condamnées à mort pour hérésie, aurait eu des relations au sein de la cour de la reine, et aurait prêché et fait de la propagande parmi ses dames d’honneur. Je n’avais pas revu la reine Catherine depuis la fois où je l’avais impliquée dans une affaire potentiellement dangereuse, l’année précédente, et je savais, à mon grand regret, qu’il n’y avait guère de chances que je revoie cette douce et noble dame. Mais j’avais souvent pensé à elle et, au fur et à mesure que s’intensifiait la chasse aux radicaux, je craignais de plus en plus pour sa sécurité. Une semaine plus tôt, on avait rendu publique une longue liste de livres qu’il était interdit de posséder et, la même semaine, le courtisan George Blagge, un ami du roi, avait été condamné au bûcher pour hérésie.

Chapitre 1