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EAN : 9782370551023
797 pages
Le Tripode (27/10/2016)
  Existe en édition audio
4.05/5   1349 notes
Résumé :
"L'Arte della gioia", ouvrage posthume, 1996. Traduction française "L'art de la joie", 2005.

Il était une fois une enfant, Modesta, née le 1er janvier 1900, dans un monde frustre et rapidement englouti... Non, L'Art de la joie résiste à toute présentation. Roman d'apprentissage, il foisonne d'une multitude de vies. Roman des sens et de la sensualité, il ressuscite les élans politiques qui ont crevé le XXe siècle. Ancré dans une Sicile à la fois sombre... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (195) Voir plus Ajouter une critique
4,05

sur 1349 notes
Il y a tant de choses qui ont déjà été écrites sur ce livre que je ne peux que vous donner mon avis : c'est un chef-d'oeuvre. J'ai été complètement sous le charme de ce texte de la première page à la dernière, transporté par l'écriture claire, intelligente et poétique de Goliarda Sapienza.
Modesta, née le 1er janvier 1900 en Italie, raconte sa vie, de petite fille pauvre jusqu'à la femme, libre, ni soumise, ni dominante, indépendante, Princesse, qu'elle deviendra. Elle réussit le tour de force de fédérer tout son entourage, hommes comme femmes, en provoquant leur adhésion spontanée, naturelle, à ses idées et à sa vision de la vie. Elle est la narratrice de ce roman. Son livre est une ode au féminisme, sans l'hystérie imbécile que l'on connait aujourd'hui. Gloire est rendue aux femmes de convictions.
L'auteure a mis 10 ans pour l'écrire, de 1967 à 1976. Elle s'est complètement sacrifiée à son oeuvre, allant jusqu'à vendre ses meubles pour subsister, voler des bijoux et aller en prison. Tout ça pour qu'au final il n'y ait pas une seule maison d'édition qui accepte de la publier. Même l'intervention du président de la république, ami de la mère de Goliarda, n'y changera rien. Goliarda Sapienza décède en 1996 sans avoir vu son livre exposé dans la vitrine d'une librairie. Ce n'est qu'en 2005 que le roman connaitra le succès, d'abord édité en Allemagne, puis en France où il deviendra le best-seller que l'on connait.
Une oeuvre à découvrir, lire ou relire absolument.
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J'ai rencontré Modesta et l'art de la joie grâce à Arte et son émission consacrée aux romans « sulfureux « comme les bienveillantes de Littell, Lolita de Nabokov ou Madame Bovary.
« L'art de la joie « de Goliarda Sapienza est un roman qui ne trouva pas de maison d'édition en Italie et qui parut en France. Son auteure ne verra pas de son vivant son livre dans les librairies.
Modesta est née avec le vingtième siècle dans la région de Catane en Sicile. Elle vit dans la pauvreté la plus complète Entre une mère taiseuse une petite soeur handicapée et un père absent.
Modesta est une petite fille curieuse, bavarde et pas timide ce qui va la mettre dans des situations difficiles. Elle a un rêve, un rêve d'enfant voir la mer.
L'art de la joie c'est avant tout une émancipation dans une Italie patriarcale où les hommes font la loi et la religion acquiesce. Face à son destin Modesta va suivre un chemin dans une Italie bousculée par l'histoire, première guerre mondiale, montée du fascisme, seconde guerre mondiale.
L'art de la joie c'est aussi une histoire d'amour. Modesta n'a que faire de la bienséance, elle aime aussi bien les femmes que les hommes. Béatrice, Joyce, Nina, Carmine, carlo…. Elle vit ses histoires d'amour avec son coeur, avec son corps. Et pour finir l'art de la joie c'est l'histoire d'une famille, un microcosme avec une Modesta entourée d'enfants, les siens, des neveux des nièces. Une maison pleine de rires, de musiques et d'amour .
« comment pouvais -savoir que le bonheur le plus grand était caché dans les années apparemment les plus sombres de mon existence ? S'abandonner à la vie sans peur, toujours… »
Comment ce livre magnifique a t'il pu être considéré comme sulfureux ? Finit d'écrire en 1976 dans une Italie en proie au terrorisme des brigades rouges, où la religion n'a pas desserré son influence dans la société et un roman écrit par une femme.
J'ai aimé Modesta, son courage dans ses choix et ses combats, son amour de la vie. Un beau personnage de roman.
Je vous recommande l'art de la joie même si par moment il y a quelques longueurs.
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« Les couleurs viennent du coeur, les pensées du souvenir, les mots de la passion. »

Un livre assez impressionnant. Il ébouriffe dès les premières pages. La narratrice, Modesta, raconte une grande partie de sa vie, ses drames, ses rencontres, ses ''enfants'', ses coups de coeur, qu'ils soient sentimentaux, littéraires, idéologiques. On sent la présence, au travers de cette histoire qui s'étale sur plusieurs décennies, de la pensée de l'auteur, Goliarda Sapienza, son histoire personnelle, ses combats, ses rêves et espoirs durant toutes ces années difficiles qu'a connues l'Italie.

Elle y parle un peu de sa mère, Maria Giudice :
« - Vous ne connaissez pas Angelica Balabanoff ? Je croyais que vous la connaissiez, c'est une grande amie de Maria Giudice.
Non, je en l'ai pas connue. Elle est belle comme Maria ? »

Elle y parle de l'amour :
« ...parce que les sens suivent l'intelligence et inversement, il me semble qu'on tombe amoureux parce qu'avec le temps on se lasse de soi-même et on veut entrer en un autre. (...) entrer en un « autre » inconnu pour le connaître, le faire sien, comme un livre, un paysage. Et puis, quand on l'a absorbé, qu'on s'est nourri de lui jusqu'à ce qu'il soit devenu une part de nous-même, on recommence à s'ennuyer. Tu lirais toujours le même livre, toi ? »

Elle y parle de la mort :
« Il est temps de se remuer, de lutter de tous ses muscles et de toutes ses pensées dans cette partie d'échecs avec la Certa qui attend. Et chaque année volée, gagnée, chaque heure arrachée à l'échiquier du temps, devient éternelle dans cette partie finale. Réfléchis, Modesta, peut-être que vieillir de façon différente n'est qu'un acte révolutionnaire de plus... »

Elle y parle de la Sicile, du langage, de son évolution :
« - Et comment devrais-je les appeler ? de ces noms méprisants que leur donnent les étrangers ?
- Velluta... Cela faisait si longtemps que je ne l'avais pas entendu ! Notre langage se perd, Mattia, et il laissera beaucoup de regrets dans cette île. Tuzzu disait : ''Les couleurs viennent du coeur, les pensées du souvenir, les mots de la passion.'' »

Elle y parle du temps :
« Mais l'avenir n'existe pas, ou du moins l'inquiétude pour l'avenir n'existe pas pour moi. Je sais que seulement jour après jour, heure après heure il deviendra présent. Et dans ce présent que nous avons eu – et avons – tu m'as donné bonheur, conceptions nouvelles, tu m'as fait grandir mentalement et puis... »

Elle n'hésite pas à nous interpeller, nous lecteurs :
« Nina est curieuse comme vous l'êtes, vous qui lisez. Excusez-moi, le fait est que vous lisez chez vous, et peut-être êtes-vous dans un temps de paix, tandis que je vis dans un temps de guerre. »

Alors, je lui laisse la parole : « Raconte, Modesta, raconte. »

J'ai apprécié cette lecture. L'art de la joie est un roman qui parle de liberté avant tout : « Une grande liberté d'esprit et de mouvement ! Comment as-tu fais pour conquérir tant de liberté ? » Et il m'est apparu que c'est un travail long et difficile pour le faire dans le respect des autres. Modesta, bien évidemment en voyant cette photo de couverture, Modesta ne pouvait qu'avoir les traits de Goliarda Sapienza, magnifique ! Toutefois, Modesta n'est pas un personnage qui m'a enflammé (un peu trop parfaite pour moi -même quand elle reconnaît ses petitesses-) mais le livre tient sur la longueur -notamment la petite voix de Tuzzu, qui revient chanter des vérités toutes simples et si belles à l'oreille de Modesta toute sa vie alors qu'elle ne l'aura croisé que quelques temps dans sa toute jeunesse- et j'admire ce travail. Il y a de très belles phrases.

A un moment j'ai pensé au roman Les hauts de Hurle-Vent. D'une part parce que j'ai eu la même difficulté à retenir l'enchevêtrement familial avec des prénoms récurrents et des personnages vivants tous dans cette grande maison. Et puis, quelque chose m'a conduit à ce petit parallèle, vers la fin du roman, sans doute le personnage de Catherine me revenait en mémoire alors que je lisais chez Sapienza «Il faut mettre de la distance avec ceux qu'on aime, la distance clarifie presque plus que la mort.» Mais je ne saurais l'expliqué plus. Une association d'idées. Deux romans, deux femmes écrivains...

C'est également un roman d'apprentissage. Si je dois en retenir un seul, je choisis celui du jardinier, Mimmo : « tu m'as appris à rire et personne ne me retirera ton enseignement.»
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Je voudrais vous parler d'une femme dont j'ai rêvé qu'elle devienne à la fois ma mère, ma soeur, ma maîtresse, ma confidente... Je vous rassure, je ne suis pas allongé sur le divan d'un psy au moment où je vous écris ces mots. Cette femme existe, puisque j'ai frôlé son âme le temps de quelques pages de lecture, 640 pages précisément... Je veux simplement vous parler de Modesta.
Modesta est la narratrice du roman. Alors, forcément nous pensons que l'auteure, Goliarda Sapienza, a aussi parlé de son histoire personnelle, de ses combats, de ses espoirs, de ses joies et de ses blessures.
L'Art de la Joie est le roman qui la met dans la lumière et nous en sommes éblouis, tout comme celles et ceux qui croisent son chemin. Ce sont aussi de beaux personnages. Parfois, la lumière attire les papillons. Il faut beaucoup d'équilibre au papillon lorsqu'il s'approche de la flamme d'une bougie, ressentir l'éblouissement jusqu'à cette limite ultime qu'il sait ne pas franchir pour ne pas se brûler les ailes. Et donc mourir... Tenir la bonne distance en quelque sorte. Les personnages de l'Art de la Joie ont parfois brulé leurs ailes au plus près de Modesta.
Il m'est difficile de décrire et résumer ce livre. Il m'est presque aussi difficile de décrire le personnage de Modesta.
Simone Beauvoir nous dit : « on ne naît pas femme, on le devient ». Il me semble que Modesta a brûlé toutes les étapes et pourtant l'Art de la Joie est un roman d'apprentissage.
Modesta est née le 1er janvier 1900, c'est une belle manière d'entrer dans le siècle. Modesta traverse le XXème siècle de l'Italie comme une comète, comme un feu follet. Quand je dis l'Italie, c'est plutôt la Sicile, ce détail est très important. Modesta est à la fois ancrée dans le déroulement d'une histoire, la petite et la Grande Histoire et cela n'a de sens de le vivre et l'écrire que dans cette terre sicilienne et natale. C'est un roman d'émancipation.
Car c'est bien de la lumière qu'il s'agit, la lumière des livres, des textes, ceux dont nous parlons à longueur de jours et de nuits, ce qui fait tenir debout Modesta, elle qui se révolte, s'offre aux autres, hommes ou femmes, se refuse aussi... Modesta, femme libre, vit plusieurs vies. Au fond, elle devient femme plusieurs fois au cours de son existence multiple.
Le livre débute comme un coup de poing au ventre. C'est comme un acte fondateur, mais brutal, qui fait mal. Modesta porte les stigmates à la fois de son enfance et des histoires qu'elle côtoie et traverse sur son passage. Et puis aussitôt elle se relève, chancelante sans doute, regardant déjà vers le ciel, pour nous prendre la main et nous emporter dans le tourbillon de sa vie. Et c'est là que s'exprime la force de la joie, l'art pour être plus précis, la joie qui permet de se relever, qui console, qui guérit... Car c'est un art, lorsque, contre vents et marées, il est permis d'inventer sa vie pour en faire une île, un archipel, une barque, une herbe folle dans un jardin anglais, une constellation...
C'est une joie simple, presque primitive, qui tisse l'itinéraire de Modesta vers son destin. C'est une joie d'amour. C'est une joie qui s'éveille dans une blessure presque irréparable. Que dis-je ? Totalement inguérissable. le XXème siècle est un siècle de lumières et de tragédies. Modesta va traverser ce siècle, le poing levé vers le ciel, comme un drapeau qu'elle porte pour toutes les autres femmes qu'elle incarne. L'Art de la Joie est une fresque historique.
L'Art de la Joie nous décrit avec passion la pauvreté, la guerre, la résistance, les luttes politiques, l'émancipation féminine... Modesta est de tous les combats.
Il y a dans ce roman la vie, l'amour et la mort. le temps qui passe, la liberté, être femme, la sexualité féminine, la sensualité, l'intelligence, la lumière quoi ! Mais aussi les sentiments et leur tourmente plus que jamais...
Modesta est aimante, généreuse, anticléricale, cruelle aussi. Bourrée de paradoxes. Joyeuse enfin et libre plus que jamais.
C'est un livre qui perçoit aussi la lumière des autres. Elle est aussi fragile et brûlante que celle de Modesta. Et lorsque des personnages deviennent solaires, forcément il y a une part d'ombre qui se déroule à leurs pieds.
Le thème qui porte le livre est donc sans doute la liberté. Car Modesta se bat sans arrêt, prend des coups aussi, tâtonne, parfois trébuche, se trompe aussi, ne perd jamais sa joie. C'est un magnifique portrait de femme.
Ce n'est pas ce qu'on appelle un roman facile, c'est un roman dense, il n'est pas facile d'y entrer, il n'est pas non plus toujours facile de tenir la distance. C'est un roman de la patience. Le lecteur est aussi en apprentissage. Mais au fil des pages, nous entrons peu à peu dans le livre, dans la Sicile solaire et sombre, dans les pas sublimes de Modesta. Et une fois le livre refermé, l'histoire de celle-ci cogne encore en nous longtemps après.
Ce livre est profondément féminin. C'est pourquoi il doit être lu absolument par des hommes aussi...
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Il est des livres que l'on quitte à regret et d'autres plus sereinement. le roman de Goliarda Sapienza fait pour moi partie de cette seconde catégorie. Il porte merveilleusement bien son titre puisque la joie, comme d'autres activités artistiques telles la peinture ou la musique, nécessité du temps pour s'accomplir pleinement.

A travers le récit de la vie de la Sicilienne Modesta, née le 1er janvier 1900, l'auteure sème des phrases dignes d'aphorismes pleins de la sagesse présente dans son nom de famille, et qui valent tous les manuels de développement personnel et autre "littérature qui fait du bien".

Modesta est une femme libre et qui entend le rester à tout prix. Esprit curieux et avide de connaissances depuis l'enfance, elle développe sa grande intelligence et sa réflexion, absorbe savoirs et pensées tour à tour politiques, psychanalytiques, etc. Sans jamais tomber dans le piège de l'idéologie fanatique. J'ai admiré sa puissance d'analyse et le recul qu'elle sait prendre vis-à-vis des événements comme des livres et discours.

Le récit se révèle assez déconcertant au départ, tant dans son cheminement que dans sa forme narrative. En effet, si le roman est globalement écrit à la première personne du singulier, Modesta passe inopinément, parfois dans le même paragraphe, voire la même phrase, à une troisième personne qui produit une certaine distanciation vis-à-vis d'elle-même. Ce qui tend à rejoindre sa volonté de ne pas se laisser enfermer dans quelque schéma que ce soit, y compris sa propre personne. On s'y fait somme toute assez vite et il n'est plus qu'à suivre le parcours hors du commun de cette Princesse née dans une cabane sombre d'une seule pièce dans l'arriere-pays sicilien.

Présenté à la publication à partir de 1976, date d'achèvement de sa rédaction, L'art de la joie connut rebuffades auprès des éditeurs italiens par trop frileux face à la liberté de pensée et d'action de cette incroyable Modesta qui porte si mal son prénom.
Merci à Mme Sapienza d'avoir créé ce formidable portrait et merci à son dernier compagnon de vie qui persévéra jusqu'à sa parution. C'est 800 pages qui méritent d'être lues et goûtées comme un précieux nectar.
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critiques presse (1)
Telerama
26 avril 2021
Une jeune mère célibataire à la vie en équilibre, un foyer qui cache bien son jeu sous le vernis de la “normalité”, un clan de femmes qui se reconstruisent…
Lire la critique sur le site : Telerama
Citations et extraits (220) Voir plus Ajouter une citation
Attention, Bambolina, Crispina, Olimpia, attention ! D'ici 20 ou 30 ans, vous n'accuserez pas les hommes quand vous vous trouverez à pleurer dans quelques mètres carrés d'une petite pièce, les mains mangées par l'eau de javel. Ce ne sont pas les hommes qui vous ont trahies, mais ces femmes, anciennes esclaves, qui ont volontairement oublié leur esclavage et qui, se reniant, se placent aux côtés des hommes dans les diverses sphères du pouvoir.
(...)Attention vous, privilégiées de la culture et de la liberté, de ne pas suivre l'exemple de ces négresses parfaitement alignées. A la place des mains cisaillées par l'eau de javel, pour vous se préparent des années du sinistre exercice masculin qui consiste à attacher les plus pauvres à la chaîne de montage et nuit sans sommeil de l'efficacité à tout prix. Et après 20 années de cet exercice vous vous trouverez enfermées dans des gestes et des pensées distordus comme ce spectre qui sourit par devoir bureaucratique.
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"Le mal réside dans les mots que la tradition a voulus absolus, dans les significations dénaturées que les mots continuent à revêtir. Le mot amour mentait, exactement comme le mot mort. Beaucoup de mots mentaient, ils mentaient presque tous. Voilà ce que je devais faire : étudier les mots exactement comme on étudie les plantes, les animaux. Et puis, les nettoyer de la moisissure, les délivrer des incrustations de siècles de tradition, en inventer de nouveaux, et surtout écarter pour ne plus m'en servir ceux que l'usage quotidien emploie avec le plus de fréquence, les plus pourris, comme : sublime, devoir, tradition, abnégation, humilité, âme, pudeur, cœur, héroïsme, sentiment, piété, sacrifice, résignation
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- l’amour n’est pas un miracle, Carlo, c’est un art, un métier, un exercice de l’esprit et des sens comme un autre.
Comme jouer d’un instrument, danser, fabriquer une table.
- Tu veux dire le sexe.
- Mais le sexe n’est pas de l’amour ? L’amour et le sexe sont enfants l’un de l’autre. Qu’est-ce que l’amour sans le sexe? Une vénération de statues, de madones. Qu’est-ce que le sexe sans l’amour ? Une bataille d’organes génitaux et c’est tout.
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Il faut s'éloigner périodiquement de tout lieu où l'habitude a tué l'objectivité. C'est ce qui se passe aussi pour les langues. Lorsqu'on est obligé d'en parler une autre pendant des mois, comme cela m'est arrivé, quand on revient à la sienne on se rend compte que l'éloignement a servi à la redécouvrir dans son essence la plus profonde.
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- La position est bonne. Il se présente bien. Crie et pousse ! Tu vas y arriver !

Qui va y arriver ? Cette vague de douleur lancinante ? Son corps luttait avec l'autre corps qui, comme un bloc de pierre, cognait contre le mur du ventre pour sortir. Il était là, l'ennemi, dans ce bloc qui cognait pour sortir de sa prison, et vivre au prix de déchirer, de détruire son corps à elle qui, même s'il s'y était préparé, n'arrivait pas a expulser cet ennemi pour ne pas succomber.
- Voilà, comme ça c'est bien. Pas en te démenant de tous les côtés, mais en poussant vers le bas; comme ça tu l'aides et tu t'aides.
Oui, elle devait le pousser à sortir,cet étranger déjà fort de sa volonté de vie autonome. Elle sentait qu'il était décidé à vivre, fut-ce au prix de tuer. Et d'une dernière poussée qui la parcourut des épaules jusqu'à couper d'un coup sec le bas ventre, les cuisses, elle le sentit tomber d'elle avec un bruit sourd, dans le vide.
Non, on l'avait saisi. Des mains le soulevaient, le secouaient contre la clarté laiteuse de la fenêtre. Ce devait être l'aube, les oiseaux criaient. Les oiseaux crient toujours à l'aube.Et là aussi, secoué dans ces mains, des cris sortaient de ce morceau mutilé de son corps épuisé de fatigue.
Pourquoi criait-il ainsi ?Pleurait-il pour sa vie conquise, ou parce que, au secret de cet acte charnel, cet être savait qu'il avait presque tué pour vivre ? Seuls mon corps et le sien connaissaient la signification secrète de ce combat mortel et sans hostilité : chacun pour sa propre vie.

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