Les médecins, comme tout le monde, apprennent à bien se couvrir. S’ils disent qu’un arrêt du cœur est la cause du décès, c’est exactement ce que trouvera le coroner. Une carrière médicale vaut plus d’un million de dollars. Ils ne vont pas risquer ça à la légère.
Il est notoire, dans le milieu hospitalier, que les médecins évitent instinctivement les malades incurables pour consacrer plus de temps à ceux qui vont guérir. Ce n’est que depuis peu qu’ils commencent à étudier leurs propres attitudes face à la mort. Pour la plupart des gens, les médecins sont des hommes pleins de compassion, de connaissances et de courage. Ce n’est que récemment que l’on a découvert que, s’ils évitent souvent d’annoncer à leur client qu’ils sont foutus, ce n’est pas par compassion pour ce dernier mais par autocompassion.
Bien finie l’époque où on vous assommait le malade d’une seule bonne dose d’un produit potentiellement meurtrier avec l’inévitable toxicité rémanente qui laisse, au réveil, le patient nauséeux, patraque et parfois en proie à la douleur. Aujourd’hui, l’anesthésie, c’est une symphonie.
Les docteurs ne témoignent jamais contre d’autres docteurs. Cela ne figure pas dans le serment d’Hippocrate, mais c’est là une règle que toute la profession observe scrupuleusement.
C’est bon signe lorsque les gens savent encore répondre à la chaleur.
Rémo, sans arme et dangereux - 1985, adapté de "Implacablement vôtre'