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EAN : 9782757887202
336 pages
Points (15/10/2020)
4.5/5   3 notes
Résumé :
Résumé de l'éditeur : « Il y a des mots aussi meurtriers qu’une chambre à gaz », écrit Simone de Beauvoir pour expliquer son refus de soutenir le recours en grâce de Brasillach, condamné à mort et exécuté en 1945. Peut-on tout dire ? Et à quel prix ? Les écrits des intellectuels ayant collaboré avec l’occupant (Maurras, Rebatet, Céline, etc.) sont ici examinés à la loupe. Comment la justice de la Libération a-t-elle défini la responsabilité de ces intellectuels ? Qu... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Comment et sur quelles bases s'est passée l'épuration des intellectuels à la Libération. C'est le sujet de ce livre.

Il n'a pas été aussi simple que cela. Tout d'abord, il fallait séparer ce qui était de la littérature et ce qui était de la politique (les pamphlets haineux). Ce qui était de la liberté d'expression et ce qui était de la collaboration avec l'ennemi. Des frontières assez minces dont les défenses n'ont pas manqué d'essayer d'utiliser. L'antisémitisme ou le racisme n'étaient pas, à l'époque, considérés comme étant des crimes.

Le retour de la peine de mort, abolie en 1848, pour des crimes de trahison a été rétablie par décrets en 1939 et 1940.

Mais grosso modo, les condamnations ont été surtout décidées sur des écrits ayant donné des informations ou des avantages à l'occupant, de l'incitation à la haine provocant la désunion nationale ou alors des dénonciations nominatives dans les écrits.

Le livre décrit très longuement les nombreux procès, explicitant chaque point. C'est parfois assez long, mais la richesse de détails est assez importante même si, on se doute bien, les actes des procédures ont été bien plus fournis.

Le jugement des intellectuels a commencé dès la libération de la France, au deuxième semestre 1944. Des 55 procès, il y a eu 25 condamnations dont 10 condamnations à mort.

Il y a, dans la dernière partie, une étude assez très détaillée de la responsabilité de l'intellectuel, avec une bonne explication de la théorie sartrienne de la responsabilité de l'intellectuel.

Et on comprend alors pourquoi Sartre s'est refusé à signer des demandes de grâce à des intellectuels condamnés à mort alors que beaucoup d'autres intellectuels l'ont fait.
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Le travail et la renommée de Gisèle Sapiro ne sont plus à prouver. La chercheuse, sociologue, donne aux lecteurs des précisions pointues issues de ses vastes recherches en replaçant dans le contexte de l'époque le pouvoir des mots.
Dans la fièvre de la libération, un certain nombre d'exécutions sommaires de collabos avaient déjà eu lieu. Et la justice populaire avait trouvé ses victimes expiatoires dans la population jouant le rôle de bouc émissaire. On ne peut pas en dire autant du monde littéraire intellectuel, et autres sommités savantes et scientifiques, parfaitement à l'aise dans la collaboration avec l'occupation allemande en France. Tout ce monde jouissait de privilèges que la libération ne leur retirera pas, contrairement à d'autres qui, par leur idéologie philosophique démocratique pour la préservation des droit relatifs à tout être humain, sans condition de race et de religion; persécutés menacés d'emprisonnement, pire déjà déportés voire fusillés. Certains comme Breton , Maran, étaient partis en exil à l'étranger. le GPRF s'efforça de placer l'épuration dans un cadre juridique, et une haute cour de justice fut créée à Paris pour juger les crimes d'État: c'est elle qui condamna à mort Pétain, Laval, Darnand, et Brasillach. Dans la plupart des cas c'est la Résistance qui s'efforça de calmer ces excès. Les chambres ont jugé des représentants intellectuels pour des affaires mineures de marché noir, le plus souvent elles rendaient des arrêtés de non-lieu, même si beaucoup de résistants constataient avec amertume que rien n'avait changé, et que le sens de leur combat était ainsi dénaturé. La légalité républicaine était instaurée.
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Citations et extraits (3) Ajouter une citation
(p. 187)
S'ils n'avaient pas le pouvoir de faire exécuter ceux qu'ils dénonçaient, les propos des écrivains collaborationnistes tiraient leur autorité de plusieurs facteurs : leur pouvoir symbolique en tant qu'intellectuels, qui s'exerçait tant auprès du public qu'auprès des dirigeants ; leur ajustement à l'appareil répressif des forces d'occupation et d'un État autoritaire; la suppression de la liberté d'expression, qui interdisait à leurs victimes le droit de réponse et leur laissait une situation de quasi-monopole idéologique. Plutôt qu'un rapport de causalité entre les discours et les actes, il s'agit dans leur cas d'un travail de légitimation : tenant leur autorité de la conjoncture politique de l'Occupation , ils justifiaient, par leurs écrits, cette conjoncture et la violence quotidienne qui s'exerçait dans ce cadre. Ce travail de légitimation entre les intellectuels et les pouvoirs temporels avait ainsi un caractère circulaire. En s'appuyant sur ceux-ci pour réguler l'espace public, ils rompaient le pacte éthique fondateur de l'autonomie intellectuelle, qui veut que l'on s'en tienne à l'affrontement des idées, sans faire intervenir de critères ni de forces extérieurs. Ils furent bien mal placés pour revendiquer cette autonomie après l'avoir refusée à leurs confrères.
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(p. 9)
On a reproché à l'épuration d'avoir plus durement frappé ceux qui parlaient avec approbation du mur de l'Atlantique que ceux qui le construisaient. Je trouve parfaitement injuste qu'on ait excusé la collaboration économique mais non qu'on ait sévi contre les propagandistes d'Hitler. Par métier, par vocation, j'accorde une énorme importance aux paroles. [...] Il y a des mots aussi meurtriers qu'une chambre à gaz.
Simone de Beauvoir
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Chose plus incroyable encore, ce ne furent pas seulement des écrivains obscurs qui répondirent à l'appel de l'ennemi, mais des savants notoires, des historiens de renom, des écrivains illustres n'hesitèrent pas de se mettre au service du vainqueur, trahissant ainsi, en même temps que leur pays, l'honneur des lettres et de la science française.
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