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Critique de 5Arabella


C'est la première pièce écrite par Nathalie Sarraute, à la demande insistante de Werner Spies travaillant pour une radio de Stuttgart. La pièce sera créée en traduction allemande sur les ondes de cette radio en avril 1964 ; cette version sera reprise par diverses radios allemandes et européennes en général. En parallèle, le texte paraît en février 1964 au Mercure de France. La première création sur scène, dans la mise en scène de Jean-Louis Barrault, a lieu en 1967. La pièce est créée à l'occasion de l'inauguration de la petite salle de l'Odéon ; dans la même représentation figure le mensonge, une autre pièce courte de Sarraute. Une autre mise en scène mémorable est celle de Jacques Lassalle, pour l'inauguration du Vieux-Colombier, devenu la deuxième salle de la Comédie Française. Certains ont reproché à cette mise en scène de trop tirer la pièce vers le comique, mais Sarraute n'y voyait pas d'inconvénients, et semblait même, d'après ses déclaration, préférer cette mise en scène.

La pièce comporte 6 protagonistes : 3 hommes et 3 femmes. Ils sont désignés comme H1, F1 etc. Une notable exception, le troisième homme, Jean-Pierre, le seul qui s'affiche sous son prénom. H1 raconte ses vacances, et il en vient à une sorte de cliché sur des ravissantes maisons en bois avec des auvents. Il en vient à douter de l'intérêt de ce qu'il raconte, malgré les encouragements de autres personnages. Enfin, de certains, parce que Jean-Pierre se tait. Et ce silence semble provoquer un malaise, le doute. Tout le monde se met à interpréter le silence en question : timidité, mépris etc. Chacun projette ses doutes, ses angoisses. le silence de Jean-Pierre semble faire dérailler la machine social, obliger les personnages à s'interroger sur le sens des échanges banals, sans doute un peu creux, du discours qu'ils tiennent. Mais il suffit de quelques mots, aussi insignifiants soient-ils de Jean-Pierre, pour que la machine reparte, et que le doute disparaisse.

C'est à la fois très réaliste, dans ce récit de souvenirs touristiques un peu préfabriqués, et irréel, par le déraillement qui intervient tout d'un coup, sans raison, juste le silence d'un personnage qui vide d'une certaine manière de sens un échange social banal, ou plutôt qui fait apparaître son inanité. Une sorte de déchirure dans la trame du quotidien se produit, qui permet d'entrapercevoir un grand vide derrière le rideau. Qu'il faut cacher le plus vite, en faisant rentrer les choses dans l'ordre.

J'adorerais le voir sur scène, je pense vraiment qu'on peut le jouer de manières très différentes, entre un comique débridé, et quelque chose qui pourrait être tout simplement angoissant.
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