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EAN : 9782070360925
250 pages
Gallimard (09/05/1972)
3.39/5   168 notes
Résumé :
"Voici les Guimier. Un couple charmant. Gisèle est assise auprès d'Alain. Son petit nez rose est ravissant. Ses jolis yeux couleur de pervenche brillent. Alain a un bras passé autour de ses épaules. Ses traits fins expriment la droiture, la bonté. Tante Berthe est assise près d'eux. Son visage, qui a dû être beau autrefois, ses yeux jaunis par le temps sont tournés vers Alain. Elle lui sourit. Sa petite main ridée repose sur le bras d'Alain d'un air de confiance ten... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (16) Voir plus Ajouter une critique
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Nathalie Sarraute a été précurseure du nouveau roman qui prônait la fin des récits, des histoires, et pourtant, il y a dans le planétarium, une sorte de trame narrative avec quelques personnages dénommés et bien identifiés. L'histoire relatée sous forme de monologues par plusieurs protagonistes est celle d'Alain Guimier, jeune thésard marié à Gisèle, qui lorgne désespérément le grand appartement vaguement promis par sa tante. Autour de lui gravitent son père, ses beaux-parents, une écrivaine, diva du ghotta littéraire parisien entourée de ses admirateurs. Alain Guimier, jeune homme qui aime séduire et se plie aisément aux attentes de ses interlocuteurs, souhaiterait se lancer dans l'écriture.
Dans ce roman offrant de multiples niveaux de lecture, Nathalie Sarraute fait évoluer, de manière distanciée, des créatures figées, caricaturales, légèrement enduites de cire ou de fine poussière, apparaissant comme autant de petites planètes ou de satellites en orbite les unes autour des autres.
Elle construit un monde étrange, absurde, où sont observées, sous la lentille du microscope, des créatures qui s'approchent, s'entredévorent, guidées par la soif de possession, de pouvoir, de statut social, de réussite.
Comme dans ses précédents livres, l'autrice se met en quête de ce qui est sous-jacent aux émotions, aux comportements des êtres. Nous sommes dans le domaine du sensible, de l'inexprimé, de l'informe, aux frontières de la conscience, en amont du langage. On pourrait employer le terme d'impulsions, ou de pulsions, ce que Sarraute ne fait pas, rejetant la psychanalyse, son jargon et ses concepts qui enferment.
Des phénomènes, chimiques et physiques, d'attirance et de répulsion relient ou séparent les personnages. Des matières visqueuses, gluantes les enserrent, des forces les séparent ou les relient, symbolisant l'emprise, les rapports de pouvoir, l'osmose, la fusion.
Les relations entre les individus sont empreintes de bassesse, d'envie, de jalousie, d'acrimonie, de cruauté. Une violence sourde et latente plane. Celle-ci se traduit par l'irruption de scènes de la mythologie ou de western, de contes pour enfants, d'histoires de princesses, autant de références à des temps immémoriaux, à une mémoire collective ancestrale.
Dans ce concert de voix indissociées, les monologues s'entremêlent et on découvre à posteriori qui parle. Les mêmes scènes rejouées, relatées par des personnages différents mettent en relief de minuscules détails.
Nous sommes dans l'univers des représentations, des faux-semblants, des êtres se démultipliant en fonction de la perception qu'en ont les autres. de menus éléments de la conversation peuvent déclencher des réactions imprévues. Tout se joue de manière larvée, en deçà du langage convenu, des conventions et des rapports sociaux codifiés.

Le planétarium est également une critique acerbe de l'intelligentsia parisienne, du monde de la culture, où des courtisans entourent de grands noms de la littérature, parmi lesquels on croit reconnaître la silhouette de Sartre.

Une oeuvre passionnante, aux accents métaphysiques, qui ne livre pas d'emblée tous ses secrets.


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Sommes-nous des planètes qui tournons l'une autour de l'autre dans un ballet confidentiel et mal agencé, dérangé par les discours de nos semblables autant que par nos ressentiments ?
Sommes-nous ces cocons ivres de la vie des autres, de leurs paroles aussi gluantes que le liquide amniotique ambiant censé nous protéger mais qui nous étouffe.
Étouffant. Voilà le mot. L'écriture de Nathalie Sarraute est d'une telle densité, une telle proximité non seulement avec le discours mais avec le vécu, le ressenti, le peu conscient, le refoulé que l'air y circule peu. Dans sa prose à nulle autre comparable, mêlant dialogues, monologues intérieurs, reliquats de pensée, de non-pensée, d'orgueilleux soubresauts de l'âme et de verbeux hoquets de dégoût, l'auteure (ou l'autrice, je ne me suis pas encore décidé) tisse sa toile littéraire, nous enveloppe de tous les sucs sociaux et psychologiques que le langage a pu produire. Les personnages s'y débattent tandis que le lecteur tente de surnager dans le réseau romanesque dans lequel il s'est lui-même jeté en ouvrant ce planétarium. Non ce n'est pas un livre que nous lisons mais une pelote, une jungle, un enchevêtrement d'être soyeux et collant .
C'est un amas de langage à la dynamique étourdissante où les relations interpersonnelles forment un agglomérat informe peu tangible même s'il dégouline de honte, de vanité, veulerie, rancoeurs et faiblesses. Existent-ils autrement que par ces bouts de langage, les Guimier, ? Et Germaine Lemaire (Maine pour les intimes) est-elle autre chose que ce fantasme habillé d'on-dit ?
Telle l'araignée, notre esprit sinon notre corps vrombit à la moindre palpitation de l'une des cordes qui forme la toile de notre lecture, l'une des répliques dites ou pensées par n'importe lequel des personnages. Aussi entrons-nous d'emblée dans ce grand planétarium, dans cette immense toile filée par Nathalie Sarraute avec son roman à la forme bizarre, compacte et mouvante, grossissant sous nos yeux, même le livre refermé.
Des planètes peut-être le sommes-nous mais telles des boules de jongleurs, nous sommes entraînés par le moindre des mouvements de la constellation rayonnant autour de notre orbite - être vivants et personnages de romans compris . Et notre unicité nous ne la devons qu'au contact souvent douloureux et brûlant des corps célestes qui nous entourent.
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Paru en 1959, le Planétarium est un des textes fondateurs du Nouveau Roman. Quelque peu réfractaire à ce courant, je trouve quand même que le style de cet auteur reste facile d'accès. Certes, il est déroutant car Sarraute joue énormément avec la ponctuation. Elle utilise les points de suspension afin d'éluder les pensées de ses personnages ou leurs interruptions. Elle crée, par là-même, une sorte de langage parallèle.

Dans ce livre, ses personnages sont caricaturaux. On trouve ainsi un jeune couple, Gisèle et Alain, ainsi que leur vieille tante, Berthe, qu'ils aimeraient voir partir afin de récupérer son appartement. Sarraute va nous faire part de leurs conversations, les disséquant consciencieusement. le lecteur se retrouve également face à de longs monologues. Pourquoi faire de choses quotidiennes tout un roman ? L'auteur manie ici l'ironie dans toute sa splendeur et le lecteur ne peut qu'adhérer, se retrouvant parfois dans la peau d'un des protagonistes.
Lien : http://www.lydiabonnaventure..
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L'image que l'on donne à voir se rapproche-t-elle de la réalité ou non?
Observons un jeune et gentil couple par un trou de souris.
Alain n'en finit pas de préparer sa thèse. Faible, un brin éteignoir,sous la coupe d'un père autoritaire,anxieux, il a toujours manqué de confiance en lui.Il adore faire le pître pour amuser la galerie.
Gisèle sa femme,toujours impeccable,souple et trop gentille a toujours été facile à manipuler par sa mère qui mène son monde au doigt et à l'oeil.
Gentils,gentils c'est vite dit. "Tout le monde a ses petits recoins!" Et ce sucre qu'ils cassent sur le dos des gens!
Seraient-ils faux jetons? Capricieux?Hypocrites?Ambitieux? Snobs?Haineux? Prêts à tout pour atteindre leur but? Manichéens?
Il suffira de simples bergères à choisir à la place de fauteuils clubs en cuir proposés par sa mère à elle, intrusive,tyrannique, il suffira de l'appartement convoité de sa tante Berthe à lui,tatillon,perfectionniste,maniaque,revêche, pour que les balles changent de camps et que les masques tombent.
Une belle caricature d'un milieu intellectuel,futile et bourgeois dont le vernis s'écaille.
Un style à part,de très longues phrases où les paroles s'entremêlent de pensées, dont on perd parfois le fil et où l'on ne sait plus très bien qui fait quoi,qui dit quoi, qui pense quoi, ce qui rend parfaitement plausibles ces relations familiales engluées et les manipulations croisées des uns et des autres.
Une approche psychologique très fine.
Nathalie Sarraute,dont j'ai apprécié enfances,connue dans le monde comme l'un des plus grands écrivains du XX° siècle est l'auteur de romans,pièces et essais et a reçu le Prix international de la littérature pour Les Fruits d'Or.
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Pour les amateurs de "Nouveau Roman". Ce n'est pas un roman facile à lire, ni un roman qui prend aux tripes. C'est un pur exercice de style, selon moi. Il se lit principalement avec l'esprit. On ne s'attache pas du tout aux personnages. Mais l'exercice qu'entreprend là, Nathalie Sarraute, est vraiment étonnant et selon moi, s'il faut lire un roman de cette auteure, c'est celui-ci. C'est très difficile d'en parler mais en gros, l'attrait principal de son écriture, est la manière dont elle parvient à écrire le non-dit, comme elle parvient à faire sentir en quelques fines descriptions les rapports complexes entre les gens, comment une petite réflexion acerbe d'un personnage mine la personne qu'il a en face de lui. Elle met tout cela en scène, comme une naturaliste qui décrirait le comportement des animaux ou des plantes. Guère d'émotions, donc, mais du pain béni pour la curiosité intellectuelle.
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Citations et extraits (11) Voir plus Ajouter une citation
Comme c'est inerte. Pas un frémissement. Nulle part. Pas un soupçon de vie. Rien. Tout est figé. Figé. Figé. Figé. Figé. Complètement figé. Glacé. Un enduit cireux un peu luisant, recouvre tout cela. Une mince couche de vernis luisant sur du carton. Des vernis... il lui semble que quelqu'un du dehors, sur un ton monotone, insistant, répétant toujours la même chose, les mêmes mots simples, comme fait un hypnotiseur, dirige ses sensations... Elle ne veut pas... Ce n'est pas vrai... Ce n'est pas ce qu'elle sent vraiment... Elle sent que la vie est là... la réalité... et le voilà déjà, il se forme, il grandit, ce sentiment familier de ravissement, de bonheur... la vie est là, captée, elle fait vibrer doucement ces belles formes pures... Mais non... rien ne vibre... Rien... Ce sont des moulages de plâtre. Des copies. Aucune sensation de bonheur. Pas la moindre vie. C'était une illusion. C'était de l'autosuggestion. Tout est creux. Vide. Vide. Vide. entièrement vide. Du néant. Un vide à l'intérieur d'un moule de cire peinte.
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C'est cela, il le sent maintenant, qui le paralyse, l'empêche de se lancer, cette masse lourde près de lui, une énorme poche enflée, tendue à craquer, qui pèse sur lui, qui appuie... S'il bouge, elle va crever, s'ouvrir... des racontars idiots, des cancans, des mensonges... des papotages grossiers... des bonnes femmes... et lui, la pire, paradant, voulant briller, une vraie petite putain... on s'avilit à leur contact, ils vous donnent l'impression de manger du foin... ça va déferler sur lui, l'étouffer, lui emplir la bouche, le nez, d'un liquide âcre, brûlant, nauséabond...
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Un air de surprise heureuse. Un air d'abandon, de grâce tendre. Les mots se forment n'importe comment, ils jaillissent, transparents et légers, bulles scintillantes qui montent dans un ciel pur et s'évanouissent sans laisser de traces... « Ah tiens, mais comme je suis content, quelle chance de vous rencontrer, il y avait si longtemps... Vous nous voyez, mon père et moi, en train de chercher.. C'est un livre dont j'ai besoin, très difficile à trouver... Mais comme je suis heureux... Mais cest vrai, vous ne vous connaissez pas... Permettez-moi de vous présenter... Mon père... Madame
Germaine Lemaire... » Voix claire et bien posée. Regard où glisse, pudique, une lueur de piété filiale, de tranquille fierté... « Mon père... » Et son père aussitôt... la moindre preuve d'affection l'attendrit... ce sourire timide, gêné, quand il avait vu au milieu de la page blanche la dédicace imprimée : A mon père...
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Un jour il a eu le malheur, dans un moment de laisser-aller, un moment où il se tenait détendu, content, de lui lancer cela négligemment, cette confidence, cette révélation, et telle une graine tombée sur une terre fertile cela a germé et cela pousse maintenant : quelque chose d’énorme, une énorme plante grasse au feuillage luisant : Vous aimez les carottes râpées, Alain.
Alain m’a dit qu’il aimait les carottes râpées. Elle est à l’affût. Toujours prête à bondir. Elle a sauté là-dessus, elle tient cela entre ses dents serrées. Elle l’a accroché. Elle le tire… Le ravier en main, elle le fixe d’un œil luisant. Mais d’un geste il s’est dégagé — un bref geste souple de sa main levée, un mouvement de la tête… « Non, merci… » Il est parti, il n’y a plus personne, c’est une enveloppe vide, le vieux vêtement qu’il a abandonné dont elle serre un morceau entre ses dents.

Mais il ne fera pas cela, il ne comprend pas ce qu’il fait… Tout occupé à parler, il n’a pas compris ce qui s’est passé, il a de ces moments, quand il parle, quand il est préoccupé, où il ne remarque rien. Il jette sur son assiette un regard distrait, il trace dans l’air avec sa main un geste désinvolte, insouciant : « Non, merci… » Elle a envie de le rappeler à l’ordre, de le supplier, comment a-t-il osé… « Oh, écoute, Alain… » Il a bafoué sa mère, il l’a humiliée, cela lui fait honte à elle, cela lui fait mal de voir ce petit sourire préfabriqué que sa mère — comme elle sait se dominer — pose sur son visage et retire aussitôt, tandis que marquant que le désastre est consommé, qu’il faut savoir courber la tête devant son destin, elle remet à sa place le ravier.

« Mais qu’est-ce qui te prend, Alain, voyons… tu adores ça… Maman les a fait faire exprès pour toi… Tiens… » Elle est prête à tout braver pour voler au secours de sa mère, tous les interdits. Il a horreur de cela, mais tant pis : « Tiens, Alain, je te sers… » Voilà. Ce n’était qu’un caprice.
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Il n'y a de fusion complète avec personne,ce sont des histoires qu'on raconte dans les romans-chacun sait que l'intimité la plus grande est traversée à tout instant par ces éclairs silencieux de froide lucidité,d'isolement.. ce que sa mère a vu,elle l'avait vu,elle aussi pendant ce bref instant où elle était revenue à elle,où elle avait repris ses sens,les deux images coïncident,il n'y a pas d'erreur possible...
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Quand on s'interdit les facilités et les conventions en usage dans le roman, et qu'on poursuit dans une voie purement littéraire, à l'exemple du nouveau roman, quel est le thème qu'aucun écrivain d'avant-garde ne songerait jamais à aborder ?
« Enfance » de Nathalie Sarraute, c'est à lire en poche chez Folio.
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