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3,77

sur 986 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Le Mur, c'est un recueil de cinq nouvelles captivantes, mais en même temps repoussantes, voir répugnantes.
Le Mur est à mon avis la meilleure nouvelle du lot. L'angoissante vanité de la vie et de la mort d'une absurde existence dénuée de sens y est montrée dans tout ce qu'elle peut comporter de visqueux, de poisseux, de désagréablement odorant et de laid. L'ironie de la transposition du sort qui semble peser de manière imminente sur un personnage à un autre par un tour de force arbitraire du destin a quelque chose de vraiment tragique et sublime.
La chambre et Érostate nous entraînent ensuite dans les tourbillons monstrueux de la déraison de l'extérieur et de l'intérieur. On y sent bien le gouffre mystérieux et angoissant que constitue la possibilité de la mort de l'esprit.
L'intimité m'a moins interpellé quelque peu. Les tourments d'une femme dont les besoins sont comblés d'une manière condamnée par une personnalité marquante de son entourage sont toutefois très bien montrés par Sartre. Si on compare avec les nouvelles qui l'entourent, le malaise y est situé dans un horizon franchement superficiel.
Enfin, étant donné le contexte de sa sortie en 1939, la dernière nouvelle, L'enfance d'un chef, où l'adolescent sort de son mal être en grande partie en embrassant l'antisémitisme, me laisse un goût particulièrement acre.
Chacun sait que Sartre contribuera activement à l'hebdomadaire collaborationniste Comoedia et qu'il s'arrangera pour coopérer avec les nazis pour faire jouer Les Mouches en 1943 et Huis Clos en 1944. Si il a tout de même montré subtilement son opposition au régime nazi, ça ne sera pas de manière à risquer de nuire à sa carrière, mais probablement plutôt pour s'assurer de ne pas trop se mouiller afin, justement, de préserver l'impunité au cas où la situation changerait. « Jamais nous n'avons été aussi libres que sous l'occupation allemande » dira Jean-Paul Sartre dans La République du silence. Cet amoralisme narcissique, cette mollesse devant l'horreur, qui ont sans doute contribué à ce qu'il soit nobelisé en 1964, m'ont toujours empêché d'estimer la personne de Sartre malgré ses indéniables qualités de dramaturge.
Bien que les sujets varient, ces variations tournent autour d'une même tonalité de l'existence : le malaise. le malaise devant la mort, puis devant la folie sous deux formes différentes, dans la vie de couple et enfin au cours de l'adolescence.
Autre élément remarquable, la variation de la sexualité du personnage principal alterne d'une nouvelle à l'autre.
Sur le plan littéraire, j'ai vraiment beaucoup apprécié ce recueil que j'ai dévoré très rapidement. C'est vraiment du très bon Sartre.
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En découvrant à la lecture que le Mur n'était pas un roman mais un recueil de nouvelles, j'ai d'abord ressenti une pointe de déception. J'ai toujours l'impression de moins aimer ce genre de la nouvelle que celui du roman (alors que d'autres expériences positives devraient m'enlever cet a priori). Et le sujet comme le ton de la première nouvelle m'ayant vraiment intéressé, je regrettais que l'histoire ne continue pas.

Mais toutes les nouvelles de ce recueil sont intéressantes, dans le traitement du sujet de l'enfermement que suggère le titre. Enfermement réel des prisonniers dans la première; enfermement d'un couple dans la folie dans la deuxième; enfermement d'un homme face à une société qu'il rejette et qui le pousse à un acte inconsidéré dans la troisième; enfermement d'une femme dans le quotidien de son couple dont elle cherche faussement à s'échapper dans la quatrième; et enfin enfermement progressif dans le rôle assigné par la famille et par les attentes des autres dans la dernière.

Sartre nous présente ici une galerie de personnages pour la plupart peu recommandables, totalement englués dans leurs existences et ne nous donne que peu d'espoir sur une issue favorable. Mais ces récits noirs sont éclairés par un humour caustique, l'évocation de l'actualité mais aussi presque du futur (son analyse du tueur de masse (à petite échelle ici) résonne avec certains faits divers américains et le questionnement sur le genre et l'identité sexuelle du dernier protagoniste m'a semblé d'une actualité particulière). Son style est très agréable, plongeant souvent dans les méandres de la pensée de ses personnages par des accumulations de phrases à la ponctuation variable qui m'ont parfois rappelé un Faulkner (je sais je parle toujours de lui !).

Bref, pour un amateur de Camus comme je le suis, il est appréciable de découvrir que son meilleur ennemi Sartre est également très intéressant à découvrir, moi qui n'avait lu de lui que son autobiographie Les Mots.
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« le mur », unique recueil de nouvelles de Jean-Paul Sartre qui rencontra un vif succès – si l'on excepte la droite maurrassienne - à sa sortie en 1939, peu après « La nausée ».
Au delà du titre commun au recueil et à la première nouvelle, le mur est le symbole commun à ces cinq textes ; symbole d'enfermement, qu'il soit physique ou mental : un condamné à mort, « le mur », une femme qui assiste à l'enfermement de son mari dans la folie, « La chambre », un homme qui cherche à sortir de sa condition par un acte gratuit, « Erostrate », une femme prisonnière de sa relation avec son mari, « Intimité », un adolescent qui s'enferme lui même dans une idéologie monstrueuse, « L'enfance d'un chef ».

Des écrits qui divergent néanmoins par leurs préoccupations, d'ordre général pour « La chambre », « Erostate » et « Intimité », écrits en 1936 et liée à l'actualité pour« le mur » et « L'enfance d'un chef », écrits en 1938.

Plus facile que « La nausée », cinq textes qui constituent une excellente introduction à la pensée de Sartre
Néanmoins, je me permets ici, modestement, de recommander à tous ceux qui ont apprécié la nouvelle « le mur », de poursuivre le thème de la guerre d'Espagne et l'emprisonnement par la lecture de l'excellent « Un testament espagnol », d'Arthur Koestler
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Le mur, 5 petites nouvelles tantôt tragiques et tantôt comiques, qui sont des bouts d'histoires assez brèves, toutes différentes, qui se heurtent au final à un mur, comme le dénote le nom du roman.

Jean-Paul Sartre a joué avec nos sentiments dans ce livre, il nous a fait ressentir des moments forts en émotions, passages de vies exceptionnels, qui sortent vraiment de l'ordinaire. J'ai voyagé à travers ce livre, passant d'une vie à une autre, j'ai pénétré dans leur esprit, suivie leurs aventures et vécue avec eux une partie assez difficile de leur existence.

J'ai été un peu déçu : en lisant la quatrième de couverture, je m'attendais à des nouvelles sur la peine de mort, dans ce genre là, mais malheureusement pour moi, ce sujet n'est traité que dans la première partie.
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Poursuite de mon road trip dans l'oeuvre de Sartre et la surprise de découvrir le seul recueil de nouvelles de toute sa production littéraire.
5 nouvelles tragicomiques donnant le récit cynique de l'existence d'autant de personnages : un prisonnier de la guerre d'Espagne qui devrait être fusillé à l'aube, un fou que sa femme ne veut pas abandonner, un homme qui hait l'humanité et rêve d'assassiner un bon nombre d'inconnus, une jeune femme mariée à homme impuissant et qui vit d'occasionnelles aventures sans se résoudre à le quitter, un fils de bonne famille qui se questionne sur son orientation sexuelle et idéologique....
Tous ces récits traitent d'un enfermement, des "murs" physiques ou psychiques, des pathologies individuelles (relations aux autres; sexualité; suicide; démence...) et collectives (guerre, fascisme, racisme...).
Plus on lit Sartre et plus on se dit "tout change mais rien ne change". Il existera toujours des murs infranchissables et ce désespérant temps présent en construit plutôt qu'il n'en abat.
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Jusqu'à présent, pour moi, Jean-Paul Sartre c'était ça :
« La conscience est conscience de quelque chose : cela signifie que la transcendance est structure constitutive de la conscience ».
Ou encore :
« La conscience est un être dont l'existence pose l'essence et, inversement, elle est conscience d'un être dont l'essence implique l'existence, c'est-à-dire dont l'apparence réclame d'être. »
-- JP Sartre / L'Être et le Néant --

Fichtre...
Je vous laisse méditer là-dessus (vous avez 4h !)

Fort heureusement, le petit recueil de cinq nouvelles que voici, sobrement intitulé "Le mur", nous donne à voir l'autre Jean-Paul Sartre, le conteur d'histoires brèves et - ouf ! - plus accessibles.
Qu'on ne s'y trompe pas, les thématiques fétiches du grand philosophe existentialiste (libre-arbitre, négation du déterminisme, réflexions sur l'identité et la contingence) ne sont jamais bien loin, à peine camouflées au coeur de ces fictions aussi plaisantes que dérangeantes (devrais-je dire plaisantes "parce que" dérangeantes ?)

Sur scène et en costumes, nous croiserons successivement (applaudissez-les bien fort !) : trois condamnés à mort à la veille de leurs exécutions, deux couples en prise à la démence ou à la lassitude, un misanthrope hargneux et suicidaire, et un jeune antisémite complexé à la sexualité ambiguë. Sacrée compagnie, n'est-ce pas ? Chaque numéro est savamment orchestré, les descriptions très fines et la maîtrise impeccable de la tension dramatique nous rappellent que Sartre fut écrivain avant de devenir le penseur politiquement engagé que l'on sait.
Tous ces protagonistes nous font l'effet de cobayes soigneusement disséqués par l'auteur, qui cherche à dévoiler la vérité toute crue de leurs sentiments, fouille leur intimité et met leur âme à nue à grands renforts d'analyses psychanalytiques. Pas toujours ragoûtant mais très instructif !
Pablo, Eve et Pierre, Paul Hilbert, Lulu et Henri : tous sont en proie au doute, à la colère ou à la peur, chacun se heurte à la folie des autres sans jamais mesurer la sienne... Ces braves gens s'efforcent par leur actes et leurs choix de rester maîtres de leurs destins, mais bien sûr ils foncent droit dans le mur. Bing.

Finalement, bien que Sartre évoque ici "cinq petites déroutes tragiques ou comiques devant l'existence", pour moi l'emploi du second qualificatif est de trop, la dimension humoristique de l'ouvrage m'ayant un peu échappé ! Il n'empêche que j'ai beaucoup apprécié cette lecture.
Mention spéciale pour "La Chambre", l'histoire poignante d'une femme dévouée corps et âme à son époux dément et prête à tout pour le rejoindre dans sa folie, contre l'avis de ses parents qui souhaitent faire interner le malheureux.
Enfermement physique dans cette chambre close, enfermement mental dans les délires de Pierre, encore une histoire de murs...
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Les oeuvres de Sartre sont cataloguées littérature générale par opposition aux littératures de l'imaginaire que sont le polar, la Science-Fiction, le fantastique ou la fantasy. Pourtant, j'ai toujours trouvé quelque chose de fantastique, d'étrange dans les ambiances rendues par cet écrivain dans la plupart de ses textes de fiction. La première nouvelle de ce recueil en est un bon exemple.
Lien : http://livres.gloubik.info/s..
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Sartre se montre réel écrivain dans ce recueil de nouvelles, il n'est pas seulement un philosophe qui écrit des romans pour vulgariser ses idées. le suspens est présent, les description des personnages comme des lieux de qualité et l'histoire bien structurée. Cet ensemble de nouvelles se lit avec plaisir, notamment le mur.
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Le mur est un recueil de cinq nouvelles que l'auteur définit comme "cinq petites déroutes tragiques ou comiques".
Je n'ai pas ressenti grand-chose de comique à vrai dire : Sartre déshabille ses personnages de leur vernis pour nous montrer les rouages de l'humain; j'ai ressenti beaucoup d'ironie, la vérité "toute crue" des sentiments, l'inutilité des gesticulations de l'homme, de ses aspirations à un mieux, l'éternel recommencement, la futilité...
Les cinq nouvelles m'ont beaucoup plu. Elles sont très différentes, et je les ai toutes trouvées dérangeantes à des degrés différents. "Intimité" en particulier, parce que j'ai eu la sensation de m'embourber dans les tréfonds boueux et d'une superficialité crasse de l'âme humaine. "L'enfance d'un chef" est effrayant et cruel, il démonte la sincérité de l'engagement et fait de l'introspection une sinistre comédie.
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Voici quelques nouvelles sympathiques à lire dans lesquelles il y a de l'existentialisme à retirer. La philosophie se fait moins pressante que dans La nausée, elle est davantage suggérée que clairement énoncée, sauf dans les dernières pages où l'on reconnaîtrait leur auteur entre tous.


Un résumé des cinq nouvelles serait je pense inutile, ce n'est pas un format qui se résume, trop bref, c'est un format qui se découvre dans l'inconnu. Je n'en suis pas un habitué ni un très grand appréciateur, mais la lecture de cet ouvrage m'y a peut-être légèrement réconcilié.
Les plus intenses sont selon moi la première et la dernière, comme pour nous happer dans cet univers sans nous en laisser le choix, puis nous en dégager sans davantage de concession, que sa philosophie nous marque et nous imprègne au-delà de la simple lecture, jusque dans notre existence.
Le mur, il est présent dans chacune de ces histoires, mais la question est ce que nous en faisons, on s'y cogne, presque toujours, mais après ? Nous devons faire un choix, essayer de le contourner, de l'escalader, d'attendre que quelque chose se passe, qu'il s'effondre... Quoiqu'il en soit, nous devons en faire quelque chose, cinq illustrations de la réaction que l'on peut avoir à sa rencontre, voilà ce qu'est ce livre.


Sans doute à prétention moins philosophique que La nausée, en apparence en tout cas, cet ouvrage n'en reste pas moins agréable à lire, difficile de ne pas apprécier -si ce n'est la philosophie- le style et le talent d'écrivain de Sartre. Pas forcément la meilleure porte d'entrée dans l'existentialisme sartrien -contrairement à ce que semble annoncer la couverture-, celle-ci reste intéressante à franchir pour peu que l'on ait une idée plus ou moins vague de l'endroit sur lequel son auteur souhaite qu'elle débouche.
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