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Les chemins de la liberté tome 1 sur 3
EAN : 9782070368709
369 pages
Gallimard (18/01/1972)
3.98/5   328 notes
Résumé :
"Ivich regardait à ses pieds d'un air fermé.
- Il doit m'arriver quelque chose.
- Je sais, dit Mathieu, votre ligne de vie est brisée. Mais vous m'avez dit que vous n'y croyiez pas vraiment.
- Non, je n'y crois pas vraiment... Et puis il y a aussi que je ne peux pas imaginer mon avenir. Il est barré.
Elle se tut et Mathieu la regarda en silence. Sans avenir... Tout à coup il eut un mauvais goût dans la bouche et il sut qu'il tenait à ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (16) Voir plus Ajouter une critique
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Simplement un grand roman! Tout part de si petites choses, pour ne pas dire des histoires aux allures banales, pour nous conduire vers des analyses existentielles plus pertinentes. Un travail de main de maitre, une structure bien ficelée, des histoires qui nous retracent l'ambiguïté de la première moitié du XXe Siècle, des personnages secoués autant par les monstres qui leur sont intérieurs qu'extérieurs en ce sens qu'ils sont en quête avant tout d'un sens à leur existence pour pouvoir affronter les péripéties de l'existence elle-même. Un beau roman exploitant plusieurs thèmes comme l'avortement, l'homosexualité, mais le plus fondamental est la liberté, une question épineuse, de sorte qu'on part d'une liberté individuelle vers une liberté collective. Mais, plus la société évoluerait, plus la liberté serait une préoccupation plus intérieure à l'homme. Je me suis régalée de l'art narratif que j'ai trouvé bien structuré!
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Mathieu est professeur de philosophie. Son amie, Marcelle, est enceinte : un accident. Chacun s'active à trouver des solutions pour un avortement à un prix raisonnable et dans de relatives bonnes conditions. Sarah, qui a de l'expérience, se propose comme intermédiaire. En fait, en plus des raisons théoriques qui portent Mathieu à refuser l'engagement du mariage, il est lassé de Marcelle ; en outre, il est attiré par Ivich, la soeur de l'un de ses anciens élèves, Boris. Après maintes tergiversations, Mathieu finit par voler de l'argent à Lola, la maîtresse de Boris. Daniel, un ami homosexuel de Marcelle comprenant qu'elle a envie de garder l'enfant, se propose de l'épouser. Mathieu se prend à les envier. Eux, au moins, se sont engagés, ont décidé d'un acte devant lequel ils ne peuvent reculer. Lui, « il n'avait jamais pu se prendre complètement à un amour, à un plaisir, il n'avait jamais été vraiment malheureux : il lui semblait toujours qu'il était ailleurs, qu'il n'était pas encore né tout à fait. » Il a « l'âge de raison », et pourtant, il se sent incapable de « commettre » un acte : « Moi, tout ce que je fais, je le fais pour rien ; on dirait qu'on me vole les suites de mes actes ; tout se passe comme si je pouvais toujours reprendre mes coups. Je ne sais pas ce que je donnerais pour faire un acte irrémédiable. »

La liberté, c'est le choix. Mais choisir, c'est s'engager. le choix est ainsi un entre-deux entre liberté et engagement, auquel je ne puis échapper. Même si je ne choisis rien, je choisis de ne pas choisir, je m'engage, certes à rien, mais j'y suis tout de même, malgré tout. Engagé, me voici donc moins libre que je ne l'étais avant que de choisir. Il m'a fallu décider et cette décision fît d'une infinité de possibles un fait, un seul, effaçant tout ce qui aurait pu être. Il y a également l'importance du choix, laquelle est fonction de l'intensité de ce que sera l'engagement à venir. Je puis très bien avoir une idée de sa mesure avant le choix, et ainsi en amont peser le poids d'une décision en suspens. Mais cela n'est pas toujours vrai. Et puis il y a toujours de l'imprévisible, même en toute connaissance de causes. Intensité et imprévisibilité sont ainsi deux dimensions inhérentes à tout choix dont la variabilité n'appartient à personne. Mathieu, le héros de Sartre, lui qui veut être libre à tout prix, en refusant notamment ce dont il est le créateur, se trouve enserré dans ces dimensions. Mathieu pourtant décide et cherche activement les moyens de sa décision, les trouve d'ailleurs, mais le résultat n'est pas celui qu'il attendait, d'où dans un premier temps le sentiment d'être spolié des conséquences de ses actes. Imprévisibilité donc. Puis vient un temps où Mathieu prend conscience d'un vide, du peu d'intensité de ses décisions : « Mais tout ce que je fais, je le fais pour rien ; on dirait qu'on me vole les suites de mes actes ; tout se passe comme si je pouvais reprendre mes coups. Je ne sais pas ce que je donnerais pour faire un acte irrémédiable. » de tous les personnages du roman, Mathieu est celui qui revendique le plus d'être libre, mais il est aussi celui qui se perd le plus. Ou plutôt il devient très peu. La liberté, c'est choisir, c'est s'engager, mais c'est également devenir. Mathieu pourtant choisit, donc s'engage, mais il reste ce qu'il est. On peut ainsi très bien devenir ce que l'on est déjà, comme Mathieu.

L'Age de raison continue de transmettre, comme une maladie, une succession de petites morts physiques et contagieuses, l'état de crise morale de ses personnages. Tonalité : pessimisme énergique. Beaucoup de dialogues, de misères, d'analyses, de nervosité empêchée. Les héros se regardent agir tandis qu'ils agissent. Ils se méfient des autres, d'eux-mêmes. Ils se font des crasses, des provocations. Ils s'envient, se détestent, s'aiment de travers. Ils ont des lâchetés, des élans ricanants, réprimés. Leur amour-propre est contagieux, pénible, cassant. C'est le bal morne des gestes perdus et des occasions manquées : une panoplie dont il faut se débarrasser.

Les dernières phrases de l'Age de raison méritent davantage encore d'être citées. Nous sommes trois ans avant. Mathieu croit que sa vie d'homme libre est foutue et Sartre conclut pour lui : «Déjà des morales éprouvées lui proposaient discrètement leurs services : il y avait l'épicurisme désabusé, l'indulgence souriante, la résignation, l'esprit de sérieux, le stoïcisme, tout ce qui permet de déguster, minute par minute, en connaisseur, une vie ratée.» Ce petit inventaire n'a guère vieilli : on voit depuis trente ans se multiplier à la télé, à la radio, dans la presse et l'espace public, les figures de moralisant éprouvé. Elles vantent l'éthique, la vie bonne, l'humanisme sans peine, les droits de l'homme et l'indignation en toutes et lointaines situations, dans la plus confortable abstraction. Elles apparaissent, naturellement, sous les masques de vies réussies. Cette prépondérance en dit long sur l'état d'entretien des chemins de la liberté.
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J'ai choisi ce livre car j'ai chez moi depuis des lustres une très vieille édition poche du deuxième tome « le sursis ». Il fait partie du cycle « Les chemins de la liberté », en trois parties. Il semble qu' une quatrième partie est restée inachevée.

Dans ce roman écrit en 1945, Sartre se penche sur la question de la liberté et de ses paradoxes. Il nous dit que la recherche de liberté est incompatible avec le bonheur, puisqu'il faut en payer le prix. Il parle de l'engagement dans un couple, tout en relativisant la grandeur de cette si belle idée.

Mathieu est professeur de philosophie. Marcelle, sa partenaire est tombée enceinte par accident, et lorsqu'elle le lui dit, la réaction de Mathieu est de lui suggérer d'avorter, pensant qu'il était entendu que leur désir de liberté passerait au-dessus de celui d'un enfant.

Mathieu doit trouver l'argent nécessaire pour faire avorter Marcelle sans risque, et c'est une quête infernale dans Paris qui commence afin de pouvoir préserver son avenir.

Dans ce qui peut s'appeler une errance, il va croiser des amis, des étudiants, son frère. Chaque personnage vient d'un milieu différent, qu'il soit activiste, étudiant, bourgeois,… et ils défendent tous des principes qui les contraignent visiblement à des actes contraires à leurs propres valeurs.

L'écriture est tout simplement magique. Les dialogues excellents, c'est agréable à lire car l'intrigue est prenante, et tout ce qui est dit est profond et d'une grande justesse.
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Très belle histoire basée sur la liberté. J'ai suivi avec un grand intérêt ce groupe de jeunes gens se posant des questions sur l'avortement, l'homosexualité, l'estime ou la haine de soi. La liberté et le désir des femmes, à cette époque (1938), sont secondaires, du moins selon l'auteur. On le ressent fortement dans le livre où tout est concentré sur la liberté individuelle et existentielle des hommes, sur leur vie, ratée ou pas…L'égoïsme et l'égocentrisme règnent et dirigent l'histoire en maîtres, de quoi se poser des questions en tant que lecteur et de relativiser face à l'individualisme de notre société actuelle. A lire ou relire !


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Si je ne suis pas émerveillé par Sartre, je dois reconnaître qu'il avait un certain don pour la construction narrative. J'apprécie également son envie de philosopher qu'il ne dissimule nullement. Cela rend son propos encore plus marquant. le roman emboîte plusieurs récits de vie d'une manière tout à fait judicieuse. Mais quel intellectuel! Cet homme devait penser en permanence. Penser, penser et encore penser, à tout moment de la journée, dans n'importe quelle situation.
Les critiques de son époque le considéraient plus comme un romancier que comme un philosophe, mais il était, comme Albert Camus, les deux à la fois. Et avec quel génie.
Le personnage central de l'oeuvre doit être un double de l'auteur. Il analyse tout ce qu'il fait, tout ce qu'il voit et ébauche des théories philosophiques, dont la célèbre théorie existentialiste.
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Citations et extraits (58) Voir plus Ajouter une citation
"Une vie, pensa Mathieu, c'est fait avec de l'avenir comme les corps sont faits avec du vide." Il baissa la tête : il pensait à sa propre vie. L'avenir l'avait pénétrée jusqu'au coeur, tout y était en instance, en sursis. Les jours les plus anciens de son enfance, le jour où il avait dit : je serai libre, le jour où il avait dit : je serai grand, lui apparaissaient, encore aujourd'hui, avec leur avenir particulier, comme un petit ciel personnel tout rond au-dessus d'eux, et cet avenir, c'était lui, lui tel qu'il était à présent, las et mûrissant, ils avaient des droits sur lui, à travers tout ce temps écoulé, ils maintenaient leurs exigences et il avait souvent des remords écrasants, parce que son présent nonchalant et blasé, c'était le vieil avenir de ces jours passés. C'était lui qu'ils avaient attendu vingt ans, c'était de lui, de cet homme fatigué, qu'un enfant dur avait exigé qu'il réalisât ses espoirs ; il dépendait de lui que ces serments enfantins demeurassent enfantins pour toujours ou qu'ils devinssent les premières annonces d'un destin. Son passé ne cessait de subir les retouches du présent ; chaque jour décevait davantage ces vieux rêves de grandeur, et chaque jour avait un nouvel avenir, d'attente en attente, d'avenir en avenir, la vie de Mathieu glissait doucement... vers quoi ?
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Partout des faces souriantes et proprettes, avec des yeux décavés. Mathieu se sentit soudain solidaire de tous ces types qui auraient mieux fait de rentrer chez eux mais qui n'en avaient même plus la force, qui restaient là à fumer de minces cigarettes, à boire des mixtures au goût d'acier, à sourire, les oreilles dégoûtantes de musique, à contempler de leurs yeux vidés les débris de leur destin ; il sentit l'appel discret d'un humble et lâche bonheur : "Etre comme eux..."
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Du vide. Le corps se remet en marche en traînant des pieds, lourd et chaud avec des frissons, des brûlures de colère, à la gorge, à l'estomac. Mais plus personne ne l'habite. Les rues se sont vidées comme par un trou d'évier; quelque chose qui les remplissait encore tout à l'heure s'est englouti. Les choses sont demeurées là, intactes, mais leur gerbe est défaite, elles pendent du ciel comme d'énormes stalactites, elles montent de terre comme d'absurdes menhirs . Toutes leurs petites sollicitations coutumières, leurs menus chants de cigale, se sont dissipés dans les airs, elles se taisent. Il y avait naguère un avenir d'homme qui se jetait contre elles et qu'elles réfléchissaient en un éparpillements de tentations diverses. L'avenir est mort.
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Il était fasciné par Daniel. Il pensait :"Est-ce que c'est ça la liberté ? Il a agi ; à présent, il ne peut plus revenir en arrière : ça doit lui sembler étrange de sentir derrière lui un acte inconnu qu'il ne comprend déjà presque plus et qui va bouleverser sa vie. Moi, tout ce que je fais, je le fais pour rien ; on dirait qu'on me vole la suite de mes actes ; tout se passe comme si je pouvais reprendre mes coups. Je ne sais pas ce que je donnerais pour faire un acte irrémédiable.."
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Ce n'est pas un but, c'est un moyen. C'est pour te libérer de toi-même ; te regarder, te juger : c'est ton attitude préférée. Quand tu te regardes, tu te figures que tu n'es pas ce que tu regardes, que tu n'es rien. Au fond, c'est ça ton idéal : n'être rien.
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Le livre est disponibles sur editions-harmattan.fr : https://www.editions-harmattan.fr/livre-sartre_et_les_psychanalyses_essais_cliniques_claude_lorin-9782336414836-78338.html ___________________________________________________________________________
Jean-Paul Sartre fut l'instigateur d'une forme de psychanalyse existentielle originale peu discutée jusqu'alors. Il existe actuellement de nombreuses techniques de psychothérapie et il n'est pas toujours facile de s'y retrouver. Aussi, l'auteur résume-t-il ici dix principales formes de psychanalyse pratiquées dans le monde, y compris la psychanalyse existentielle de Sartre dont il s'est inspiré dans diverses situations cliniques à l'hôpital psychiatrique. Ces recherches innovantes, qui nous révèlent un « autre Sartre », relèvent ici de l'hommage et du devoir de mémoire et remettent en question certains concepts orthodoxes dominants. Elles portent aussi un regard critique sur cet ensemble très hétéroclite depuis ses tout débuts que l'on nomme à tort « La » psychanalyse.
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Bonnes lectures !
Crédit : Ariane, la prise de son, d'image et montage vidéo
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