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EAN : 9781025104010
383 pages
French Pulp Éditions (11/10/2018)
4.07/5   281 notes
Résumé :
Les premiers papillons ont éclos derrière ses paupières. Elle en avait déjà vu de semblables, enfant, un été au bord de l'océan, jaunes et violets contre le ciel d'azur.
Elle était allongée au soleil, l'herbe souple courbée sous sa peau dorée. Le vent tiède soufflait le sel iodé de la mer dans ses cheveux. Aujourd'hui, l'astre était noir. Le sol dur sous ses épaules. Et l'odeur était celle d'une marée putride qui se retire. Les papillons s'éloignaient de plu... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (110) Voir plus Ajouter une critique
4,07

sur 281 notes
Un grand merci à Babelio et aux éditions French Pulp...

Elle contemple, à travers les barreaux de la fenêtre, l'aurore éclore. Après la pluie qui n'a cessé de toute la nuit, la cour est encore noire. le silence règne encore dans le Centre. D'ici peu de temps, les premiers résidents ne tarderont pas à se lever, les chariots à couiner dans les couloirs...
Juillet 2006. Cela aurait dû bien se passer. Beau Gosse avait tout prévu. Malheureusement, le cambriolage a mal tourné. Un petit vieux et son chien dans la rue, ce dernier ameutant tout le quartier avec ses aboiements. Des fenêtres, ici et là, qui s'éclairent. Beau Gosse qui tente de faire taire le cabot à coups de pied, La Fouine, apeurée, qui s'en prend au vieillard. Deux coups de feu tirés depuis l'un des immeubles en face. Beau Gosse et La Fouine tués par une balle de 22 long rifle. L'autre s'est pris 15 ans ferme. Une double peine pour celle qui se sent enfermée dans son corps...

Enfermé.e, titre très à propos, narre l'histoire de Virginie, née garçon et devenue fille. de sa naissance dans une famille mal aimante à l'enfer dans les prisons en passant par une enfance compliquée et une adolescence révélatrice. À partir de nombreuses références, d'articles et de témoignages, Jacques Saussey tisse un scénario ô combien passionnant mais encore tabou de nos jours. La preuve : la transidentité n'est plus considérée, en France, comme une affection psychiatrique seulement à partir de 2010. de même, l'OMS affirmera seulement le 18 juin 2018 que le transsexualisme n'est plus considéré comme une maladie mentale. le texte sera présenté en mai 2019 à l'Assemblée mondiale de la Santé et entrera en vigueur le 1er janvier 2022 ! Traitant de ce sujet mais aussi des conditions des transgenres en prison, des mentalités, des regards, l'auteur dépeint avec force le parcours très personnel de Virginie. Alternant passé et présent, il dévoile peu à peu les pièces du puzzle. Tout en nous plongeant dans une ambiance noire et violente, il nous offre un roman tout à la fois brut, bouleversant et captivant, habité par une Virginie inoubliable, le seul personnage prénommé.
Dense, original et remarquable...
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Je savais que ce livre allait me plaire. Je le lorgne depuis longtemps.

Je lis enfin Jacques Saussey et quelle lecture !

Virginie est née dans le mauvais corps. C'est une femme enfermée à l'intérieur d'un corps masculin.

Après une peine de prison, elle se retrouve embauchée au Centre où elle semble avoir un but bien précis mais mystérieux.

Le roman s'articule entre la vie de Virginie dans ce Centre où des personnes très âgées viennent passer les derniers instants de leur vie et le récit de l'existence de Virginie depuis l'enfance.

Virginie est un des rares personnages du livre qui porte un prénom. Tous les êtres, souvent abjects, qui gravitent autour d'elles n'ont pas d'identité. le Pére. La Mère. le Curé. le Moche. le Musicien. L'auteur explique ce choix à la fin du livre. La société refusant à Virginie une identité, il décide d'enlever cette identité aux protagonistes du livre. Retour de boomerang.

On a entre les mains un roman très dur, parfois trop. Beaucoup de noirceur. de désespoir.

J'ai pensé à Karine Giebel ou à Claire Favan avec ce destin de femme qui prend aux tripes et sans concession.

Décidément le roman noir français est plein de pépites à découvrir.
Un sujet rare. Qui, au-delà d'un récit mené tambour battant qu'on ne peut lâcher, fait réfléchir à la place donnée dans notre société à la différence. A une époque où le droit à l'indifférence semble de plus en plus menacer, j'ai trouvé salutaire d'évoquer dans un roman de genre le transsexualisme.

J'ai donc encore une fois pu découvrir un auteur et ce roman étant le onzième de Jacques Saussey, je vais pouvoir prendre quelques cours de rattrapage.
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« Si je ne peux pas être qui je suis, je préfère être morte plutôt qu'être emprisonnée dans un corps qui n'est pas le mien. »

Emprisonnée, enfermée, Virginie l'est depuis l'enfance : dans son corps de garçon, alors qu'elle se sent fille. Et quand vos parents prennent pour une lubie un tel décalage, qu'ils s'attendent à ce que 'ça passe', quitte à sévir violemment pour vous remettre dans le droit chemin (éventuellement avec l'aide d'un psy), c'est douloureux pour le corps et surtout pour l'âme. En-dehors de la maison, c'est encore pire avec le harcèlement scolaire, entre 'simples' moqueries et passages à tabac : « Ce besoin de torturer ceux qui ne vous ressemblent pas, ceux dont les moyens de défense sont réduits à l'espoir que les choses changent un jour. »

Virginie connaît ensuite un double enfermement : la prison. Une prison pour hommes, puisqu'officiellement, elle est de sexe masculin.
Et si le milieu carcéral est particulièrement impitoyable et violent, il l'est plus encore pour les 'minorités visibles', notamment les homosexuels et transgenres, victimes des pires sévices de la part de co-détenus et de matons. Un enfer dont on s'échappe un peu (avec la drogue), ou beaucoup - en se suicidant.

Ce roman est magistral ! ♥
La lecture est douloureuse, on passe de la colère à la nausée, on est souvent triste à hurler, poings serrés, sourcils froncés, certains passages sont insoutenables. J'ai pensé à 'Meurtres pour rédemption' (Karine Giebel) pour la violence carcérale, à 'En finir avec Eddy Bellegueule' (Edouard Louis) pour le calvaire vécu par ceux dont l'identité sexuelle 'dérange'.
Mais surtout, le talent de l'auteur me rappelle celui de Thierry Jonquet, pour la construction de l'intrigue, la richesse des personnages (jamais nommés, habilement désignés par des pseudos ou des fonctions) et la pertinence des propos.
A travers l'histoire cruelle de Virginie, Jacques Saussey nous bouscule et fait réfléchir à la transidentité, à la sexualité en général, au regard de l'autre, aux relations parents-enfants, à la prison et aux Ehpad...

L'ouvrage commence comme un roman noir, il le reste, mais se double d'une intrigue policière troublante en huis clos qui évoque une ambiance Cluedo et Agatha Christie…

Passionnant et bouleversant ! Les explications de l'auteur en fin d'ouvrage rendent l'histoire de Virginie encore plus poignante, alors qu'on pense avoir atteint des sommets et être passé par toutes sortes d'émotions.

Bravo et merci à l'auteur pour son intelligence et sa sensibilité. ♥
________

(…)
Mais mon vrai métier c'est la nuit
Je l'exerce en travesti, je suis artiste
J'ai un numéro très spécial
Qui finit en nu intégral
Après strip-tease
Et dans la salle je vois que
Les mâles n'en croient pas leurs yeux.
(…)
On rencontre des attardés
Qui pour épater leurs tablées
Marchent et ondulent
Singeant ce qu'ils croient être nous
Et se couvrent, les pauvres fous
De ridicule
Ça gesticule et parle fort
Ça joue les divas, les ténors
De la bêtise.
Moi les lazzi, les quolibets
Me laissent froid puisque c'est vrai...
(…)
♪♫ https://www.youtube.com/watch?v=-4-zC8WtwBw
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Quand ça veut pas, ça veut pas.
Certains sont assujettis à la double peine.
Virginie, elle, connaîtra un double enfermement, celui du mitard couplé à celui du corps.
Pas née avec les bons chromosomes, elle n'aura qu'une seule et unique obsession, vouloir s'affirmer malgré l'effroi ouvertement affiché du Père et de la Mère.
Mais la roue tourne, dit-on. Lentement. Roue de l'infortune évoluant péniblement au rythme des pires brimades et de biens lourds tourments.
Puis vient la délivrance. Celle que l'on espérait plus. Celle qui allait lui permettre une certaine forme de résilience acquittée au prix fort.

♪Saussey, sey, sey, sey, sey le même♫.
Ben non, justement.
Il fait ici preuve d'un regard aiguisé et touchant sur un thème rarement usité, la transidentité.
Une problématique délicate traitée avec énormément d'acuité mais également de douleur psychique et physique.
Un agrégat de supplice et de désespoir suscité par un environnement aussi bestial que bas de plafond.

Le récit est habile, accrocheur, sans toutefois préserver le lecteur à la digestion un brin délicate d'user à l'envi de son sac à vomi.
En effet, Saussey ne nous épargne rien du quotidien dantesque de Virginie. Un karma placé sous le signe de la matriochka et c'est un cercle (sans mauvais jeu de mot) d'affliction infini auquel l'auteur nous convie.

J'ai adoré la trame, un peu moins le brouillard épais qu'il a fallu percé à grands coups de patience et de persévérance .
Nonobstant cette légère amertume finale, Enfermé.e se dévore littéralement tout en questionnant sur le sujet ce qui est plutôt notable dans ce genre littéraire qu'est le polar.

Enfermé.e, libérateur des pulsions les plus malsaines, légitime le talent pressenti de conteur de Jacques Saussey qui s'affirme comme une valeur incontournable du roman noir.
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Peu après mon affectation au service des impôts des entreprises d'Arras, je regardais brièvement trois collègues d'un autre service que je ne connaissais pas fumer leur cigarette à l'extérieur.
- Elle n'est pas un peu bizarre, elle ? demandais-je aux personnes de mon service en désignant l'une de ces femmes, aux jolies jambes mais à la mâchoire carrée, maquillée comme un pot de peinture, au visage ... perturbant.
- Ah ben oui toi tu ne connais personne ici alors forcément tu n'es pas au courant. Avant elle s'appelait Pierre.
Je regrettais un peu mon ironie, de m'être arrêté à ce physique un peu spécial. Je n'ai jamais jugé du choix de vie, de cette volonté qu'avait eu Pierre de changer de sexe.
Je lui dis bonjour, mais lorsque je la croise je ressens toujours un imperceptible malaise. Il ne s'agit pas d'intolérance mais davantage d'incompréhension.

D'autres cachent ce malaise par le bais de l'humour.
Je pense à Rosa qui se retrouve dans la peau de William Shakespeare dans le roman humoristique de David Safier : Sors de ce corps, William.
A toutes ces séries ( Code Quantum ) où le temps d'un épisode deux héros se réveillent après un étrange échange de corps, souvent masculin et féminin.
Je pense à Miriam Rivera, héroïne transgenre de l'émission de téléréalité britannique "There's something about Miriam". Mannequin de 21 ans d'origine mexicaine, elle jouait le rôle d'une sorte de Bachelor pour six hommes qui devaient la séduire en ignorant bien sûr que cette femme attirante était née homme et disposait alors encore probablement de certains attributs masculins.
L'émission a-t-elle permis d'ouvrir les yeux des téléspectateurs et d'accepter davantage la communauté souffrant de transidentité ?
Ou n'était-ce au fond qu'une farce réalisée aux dépends de tous les candidats suivie par un public prêt à s'esclaffer lors du dernier épisode quand la vérité a éclaté au grand jour ?
"Est-ce qu'on devient homosexuel quand on baise avec un travelo ?"

Et pourtant, des personnes transgenres, on en connaît tous sans même le savoir.
"Mais les trans d'aujourd'hui sont médecins, instituteurs, ouvriers, banquiers, comptables... Il y en a partout et ils sont invisibles la plupart du temps."
Jacques Saussey nous donne quelques chiffres : C'est une personne sur cinq cent qui souffre d'un problème d'identité en France, soit 134 000 personnes qui sont concernées. France qui a été le premier pays au monde à ne plus considérer ce trouble identitaire comme relevant de la psychiatrie.
Et c'était en 2010.

Dans ce roman paru il y a deux ans désormais, Jacques Saussey nous fait vivre l'enfer en prenant pour héroïne Virginie, de sa naissance en tant que garçon à ses trente-et-un ans en tant que femme.
"Je ne suis pas un travesti. Je suis une femme coincée dans le corps d'un homme."
"La nature s'est trompée."
"Elle n'est pas née du bon côté de la barrière."
Le roman alterne entre deux parties. le passé de Virginie année après année, comme de courts flashs de moments bouleversant son existence ou illustrant simplement sa souffrance quotidienne.
Et le présent de Virginie, quand elle devient aide-soignante à sa sortie de prison dans une maison de retraite appelée le Centre. Tous les employés y sont d'anciens criminels à qui le Directeur accepte de donner une chance de se réinsérer dans la société.
"Parricides, infanticides, violeurs, braqueurs, dealeurs, hommes de main, assassins divers et variés, la liste est longue."
Par courts chapitres de trois à six pages, l'auteur écrit donc presque deux romans distincts avec la même héroïne transgenre. L'un très psychologique et absolument bouleversant, l'autre davantage policier, un peu moins intéressant malgré sa galerie de personnages inquiétants et son ambiance lugubre. du moins jusqu'à ce qu'on réalise où Jacques Saussey nous emmène.

L'écrivain n'explique pas comment ce petit garçon est progressivement devenu Virginie. La seule piste éventuelle c'est le rejet qu'a manifesté son père à sa naissance. Mais y a-t-il vraiment une explication à chercher, un traumatisme à mettre à jour ?
"Votre fils sera incapable d'avoir une existence normale tant que nous n'aurons pas réussi à le remettre sur les rails de son identité masculine."
Pourquoi raisonner comme s'il s'agissait d'une maladie ? Est-il si inconcevable que l'esprit et le corps ne soient pas toujours coordonnés ? Chaque homme a une part de féminité, et inversement. Personnellement je vis très bien avec et je n'en n'ai pas honte. Mais si cette part était décuplée ? Ou davantage ? Qui aurait pu me comprendre et m'accepter ?
L'empathie qu'on ressent pour Virginie est si intense qu'elle nous noue le ventre. On essaie de comprendre ce garçon ... cette fille.
"Mais alors ... t'es quoi exactement ? Gay ? Travesti ? Transsexuel ?"
Et sans forcément y parvenir on veut la protéger, on souhaite qu'elle soit acceptée telle qu'elle est. Il s'agit bien d'un être humain à part entière et non d'une bête de cirque, d'une Chose.
Mais ça n'est pas au lecteur de décider. Et c'est les mains liées que nous assisterons à la descente aux enfers de l'héroïne, incomprise notamment par ses camarades de classe et par son père.
"Son fils ne serait ni un pédé ni un travelo, ça non ! Il allait le dresser et ça n'allait pas traîner !"
Et on leur en veut à tous ces idiots pour le déferlement de violences physiques et morales qu'ils vont faire subir à une personne déjà mal dans sa peau, pour qui le suicide pourrait être la seule échappatoire.
En même temps on vit dans un monde où, si la tolérance progresse, apprendre ne serait-ce que l'homosexualité d'un de ses enfants n'est pas toujours une pilule facile à avaler sans que l'amour parental ne soit forcément à remettre en cause.

J'ai un petit reproche quand même à formuler, ce sont les trop nombreuses scènes de sexe. Elles ne sont pas détaillées, mais elles pullulent au point de faire - vous me pardonnerez l'expression - de l'anus de Virginie un véritable garage à bites.
"Je suppose que vous n'avez jamais essayé la sodomie ?"
Liaisons consenties, liaisons tarifées et bien sûr viols à répétition en particulier en prison.
Des moments de dégradation et d'humiliation parfois nécessaires pour comprendre que les traumatismes physiques et psychologiques n'avaient désormais plus aucune limite pour Virginie qui sombrait dans un tunnel sans fin et n'était plus considérée que comme source de plaisir.
Mais d'autres aussi qui m'ont laissé plus sceptiques. Ou c'est peut-être mon esprit étriqué qui veut ça. Mais j'ai trouvé surprenant qu'une femme pas encore totalement sortie de sa chrysalide, pas encore tout à fait devenue papillon, puisse séduire autant d'hommes à sa sortie de prison.
"Ses seins allaient pousser. Ses poils allaient devenir plus discrets, plus souples. Son visage allait s'affiner."
Après il est possible que malgré cette lecture qui nous oblige à ouvrir les yeux, à partager l'existence, les souffrances et l'injustice quotidiennes d'une victime qui n'avait jamais rien demandé à personne, je me sente malgré tout encore obligé de ranger les personnes dans des cases. Mais avec bien plus de recul qu'auparavant parce qu'il s'agit forcément d'un livre qui participe à changer les regards.

Et l'un des tours de force de ce roman, c'est d'avoir enlevé à chaque protagoniste son patronyme.
Jamais vous ne connaitrez le prénom de Virginie à la naissance. Ni ceux de ses parents qui seront tout simplement "Le père" et "La mère".
Les regards sur elle en font un objet de curiosité, un travesti, une pute, un androgyne. Rien d'autre. Sûrement pas un être humain à part entière avec sa vie, ses rares joies, ses nombreux appels au secours, ses propres pensées, ses besoins en tant qu'individu.
Alors Jacques Saussey met tout le monde sur un pied d'égalité.
Vu que les regards d'autrui s'arrêtent à ce qu'ils voient en surface, tous les autres protagonistes du livre seront eux aussi réduits à leur plus simple expression : leurs fonctions, leurs surnoms.
La lingère, le curé, la fouine, le bouledogue, l'infirmière, le cinglé, l'Africain, le gâteux, le chétif ... Et bien d'autres encore.
Pour mieux nous dire qu'il ne faut pas d'arrêter à la surface.
Que limiter une personne à un trait de caractère, une fonction ou un aspect physique relève de l'irrespect.
Si vous connaissez un transsexuel et qu'il n'est que ça à vos yeux, imaginez que pour les autres vous ne soyez que "Le gros", "La vieille", "Le black", "Le gros con", "La nympho", "L'illuminé", "La dépressive".
Comment un seul mot pourrait-il décrire une personne sans la réduire à néant ?

On ne peut pas dire qu'Enfermé.e soit un petit bijou d'optimisme.
Toutes les formes d'incarcération y sont explorées : La prison bien sûr, les maisons de retraite qui sont la dernière demeure de personnes âgées bien souvent prisonnières de leur corps ou de leur esprit, attendant simplement la mort. Et la prison de personnes souffrant de transidentité, qui sont nées dans la mauvaise enveloppe charnelle.
La majorité des personnages sont donc tous d'une façon ou d'une autre en marge de la société : Criminels, vieillards solitaires, personnes en recherche d'identité, victimes de railleries.
C'est très noir, c'est violent sur le plan émotionnel, c'est sans concession.
Et pourtant ..
En choisissant Virginie pour héroïne, en nous montrant tous les obstacles qui se dressent sur son chemin pour l'empêcher de se construire comme elle le voudrait ...
"Je ne veux pas devenir une fille. Je suis une fille !"
... En nous montrant les rires, les brimades, les abus sexuels, la méchanceté et l'aveuglement de la quasi totalité de l'entourage de Virginie, à quelques douces exceptions près ...
Jacques Saussey réussit son pari on ne peut plus humain.
Il nous demande, à nous lecteurs, si nous souhaitons participer à cette ignorance, à cette incompréhension qui était aussi la mienne et dont je vous parlais en début de chronique.
Quelle que soit déjà votre ouverture d'esprit, Enfermé.e nous demande la plus grande indulgence face à ces personnes déjà suffisamment perdues, qu'il faut savoir écouter, et dont il faut respecter les choix.
Vous ne pourrez que constater que la problématique et les souffrances sont encore bien plus importantes que vous ne le soupçonniez. Que vous ne faisiez qu'effleurer la surface.

Si votre fille veut devenir un garçon, elle ne changera que physiquement.
Elle sera plus heureuse ainsi.
Et ne se jettera pas sous un train.

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Citations et extraits (46) Voir plus Ajouter une citation
- Quoi ?? Tu parles ? Mais pourquoi tu ne nous a jamais rien dit ?
La Vieille pose un regard d'un gris blanc sur lui.
- Ce n'est pas parce qu'une armoire est fermée qu'elle est vide... (...)
- En tout cas, c'est pas souvent qu'une bonne femme ouvre la bouche pour dire quelque chose d'intelligent ! (...)
- C'est parce qu'on n'a pas souvent en face de nous quelqu'un qui l'est assez pour comprendre.
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Le type était sauvé. Il serait suivi médicalement, cette fois, et c'était tout ce qui comptait. Maintenant, il allait falloir qu'il parvienne à convaincre le directeur de la prison de le faire transférer ailleurs, dans un établissement adapté pour les homos et les transgenres comme lui. Un endroit où il serait plus en sécurité. Un endroit où 'ces gens-là' avaient simplement le droit de survivre. Ce qui était mieux que ce qu'ils pouvaient trouver dans la majorité des centres de détention, où leur destin était rapidement scellé par la férocité de la libido de leurs compagnons d'incarcération, voire par les matons eux-mêmes.
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- Mais alors… t'es quoi, exactement ? Gay ? Travesti ? Transsexuel ?
[Elle] a rabaissé sa robe et s'est allongée sur le ventre. Elle a noué le préservatif et l'a laissé tomber sur le sol de béton brut.
- Je suis moi. C'est tout.
[Il] a insisté.
- C'est que je voudrais bien savoir, moi.
- Savoir quoi ?
- Eh bien…
- Si t'es pédé parce que t'as baisé avec moi ?
- Heu… oui. Ça te paraît con, comme question ?
Elle s'est redressée. Soudain, elle en avait assez de ce jeune type au cheveu flamboyant, mais au cerveau aussi pâle que commun.
- Cette question, c'est à toi d'y répondre. Et je pense que tu sais déjà ce que tu as à apprendre sur toi-même.
(p. 67)
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Le Directeur opine du bout des lèvres tandis que la famille fait des efforts louables afin de ne pas déguerpir trop vite. Il déballe sans élan l'attirail complet des répliques habituelles usées jusqu'à la corde. Oui, le Centre est un endroit parfaitement adéquat pour accueillir les personnes âgées, et même très âgées. Non, pas en fin de vie, madame. Nous préférons utiliser le terme 'en transition'. Car la vieillesse n'est qu'un état passager entre la jeunesse et la vie éternelle, n'est ce pas ? C'est en tout cas ce que nous explique monsieur le curé, le dimanche matin. Non, monsieur, nous n'allons pas à l'Eglise. Nos pensionnaires en sont hélas incapables, pour la plupart. En réalité, c'est l'Eglise qui vient à nous.
(p. 144)
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Tandis que le Directeur, tourne les talons, le Policier prend le Curé sous le bras et l'entraîne vers le fond de la chapelle. Les deux hommes marchent lentement et en silence jusqu'au confessionnal. Le Policier considère la construction de bois adossée au mur de pierres, puis il dirige un regard intéressé vers son vis-à-vis.
- C'est là qu'ils vous disent tout, hein ?
L’ecclésiastique opine.
- Oui, c'est là. Ils puisent dans les abysses de leur cœur et en exhument leurs péchés face au Créateur et à moi-même
- Mm...
Le Policier tourne autour du bâti et observe les lieux comme s'ils pouvaient parler.
- Dans le secret de la confession, c'est bien ça ?
Le Curé se rembrunit.
- C'est exact. Vous n'avez pas l'intention de me demander de vous en révéler la teneur, j'espère ?
Le flic lui sourit.
- Secret de la confession... C'est pratique.
- Secret de l'enquête... c'est tout comme, non ?
Le Policier éclate de rire.
- Vous êtes bon aux échecs, vous, hein ?
- Je n'y joue pas. Ce n'est pas aussi passionnant que l'étude du Livre saint.
- C'est bien celui qui dit : "Œil pour œil, dent pour dent ?"
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Vidéo de Jacques Saussey
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