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Critique de Bazart


Bazart
14 septembre 2011
Même si je n'avais que 15 ans à l'époque, j'ai des souvenirs assez précis de l'annonce en 1992 de l'assassinat du juge Falcone par la mafia, contre qui il menait une lutte sans merci depuis de longues années à Palerme, la capitale de la Sicile. Quelques mois plus tard, c'était un autre magistrat investi dans cette lutte, Paolo Borsellino, qui trouvait la mort , assassiné également par la Cosa Nostra. Ces deux morts avaient beaucoup fait parler d'eux, car jusqu'à présent la justice était une des seules institutions épargnées par la toute puissance mafieuse.

Ce que je ne savais pas vraiment jusqu'à aujourd'hui, c'est qu'il y avait un 3ème juge qui travaillait en étroite collaboration avec Falcone et Borsellino, et ce dernier, Roberto Scarpinato (voir photo, non ce n'est pas le Corbier de Récré A2) a livré un entretien exceptionnel avec une jeune traductrice franco- italienne, Anna Rizello, publié aux éditions La Contre allée .
Scarpinato a instruit, et ce, même après les assassinats de ses confrères, les plus importants procès menés contre la mafia, et ses liens au sein du monde politique et institutionnel, et vit sous escorte depuis maintenant 20 ans. L'homme a déja une destinée exceptionnelle, et ce qui ressort de cet entretien, c'est qu'il est aussi une personne dotée d'une très grande profondeur intellectuelle et spirituelle.

Certaines de ses pensées touchent par leur pertinence et leur intelligence, par exemple lorsqu'il revient sur les raisons qui l'ont poussé à rejoindre la magistrature. Pour Scarpinato, "le droit n'est pas comme un moyen de rendre à chacun son du, mais plutôt comme un instrument essentiel de defense de la dignité humaine... Les institutions devraient garantir le droit à la fragilité humaine". Ce genre de discours est évidemment à contre courant de la pensée dominante, et à haute teneur philosophique, et on comprend tout à fait ce qui a conduit Anna Rizello à aller à la rencontre de ce personnage d'exception. Malgré les obstacles et le couperet de la mort qui est passé plusieurs fois au dessus de sa tête, Scarpitano a gardé intact sa rage de vivre et sa capacité à s'indigner, à l'instar des plus grands résistants à la barbarie humaine.

Mais ce qui est peut-être le plus intéressant encore dans les propos de ce juge, c'est qu'il ne condamne jamais totalement personne, trouvant des explications politiques et historiques à toutes les infamies perprétées par la Mafia. Malgré le sang qui coule à flot sur cette ville, Scarpitano reste profondément attaché à Palerme, ville qu'il n'a jamais quitté, et ce qu'il nous dit de le lien particulier de cette ville avec le crime organisé est tout à fait passionnant.

On n'en regrette d'autant plus que cet entretien soit aussi bref, et surtout qu'il ne s'accompagne pas d'une mise en perspective des faits. A part quelques notes de bas de pages, on n'apprend pas grand chose sur le contexte de certains évenements dont fait allusion Scarpitano, et les non experts en histoire de la mafia peuvent être parfois perdus, par manque de repère.

Cet oubli est sans doute volontaire, car prochainement aux mêmes éditions de la Contre allée, doit paraitre le retour du prince, mémoires autobiographiques de Scarpitano.
Lien : http://www.baz-art.org/archi..
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